When in Rome

Chapitre 2 : Pâle copie (copy and past)

3501 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 18/08/2020 12:56

Chapitre 2 Pâle copie (Copy and past)

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Évidemment, il avait eu tout le temps de la voir venir. Avantagé par la célérité qui faisait de lui un chasseur hors pair, il était arrivé le premier à leur point de rendez-vous. Adossé à l'un des hauts piliers de bois brut du cabanon de surveillance sur pilotis, il avait ôté ses bottes et retroussé le bas de son jean noir jusqu'au milieu des mollets. Plutôt pour se donner quelque chose à faire d'autre que de se mettre à fumer, il s'en foutait d'avoir les pieds mouillés. Elle aussi avait retiré ses sandales ouvertes de cuir fauve, pour courir plus vite sur le sable inégal et encore chaud. Il fallait louvoyer en tâchant d'éviter les petits coquillages coupants, les algues gluantes et les plastiques suspicieux.

Bien loin de son fantasme de l'autre nuit, elle portait une longue robe estivale descendant jusqu'aux chevilles, relativement élégante avec de grosses fleurs blanches sur un fond rouge, et ses cheveux avaient été noués en une longue tresse qui dansait derrière elle à chacune de ses foulées. Peu maquillée, elle avait l'air heureuse et plus jeune ainsi, moins sophistiquée que la belle romaine d'adoption qu'il avait vue quelques mois plus tôt. La lumière électrique d'un réverbère en surplomb, rendait à ses cheveux la teinte moins sombre qu'il aimait davantage. Toute rose, elle se précipita sans façon dans ses bras pour poser sa joue contre la sienne.

Oh, Spike ! Je suis si contente que tu sois venu ! s'exclama-t-elle comme la gamine qu'elle était autrefois.

Pendant une seconde, à la voir aussi extatique, il hésita en sachant pas vraiment comment la saluer. Il n'y avait jamais vraiment de démonstration de tendresse publique entre Buffy et lui. D'abord parce qu'elle avait caché leur relation, ensuite parce que cette dernière était devenue strictement « professionnelle », empreinte de sourde culpabilité pour elle et de regret muet pour lui. Quoi qu'il en soit, à distance suffisante.

Dawn ne raisonnait pas du tout comme sa sœur et semblait considérer, depuis leur dernière entrevue, que la donne tactile avait été largement changée entre eux... Peut-être s'était-elle aussi habituée aux mœurs locales où l'on trouvait cela plus naturel que partout ailleurs... Pour Spike, le contact physique existait dans la sphère sexuelle (ou alimentaire), mais en dehors de cela, à part pour connecter son poing avec des figures ou des estomacs... ?

Elle ne se posait pas tant de questions apparemment. Quasiment aussi grande que lui, elle avait passé familièrement un bras autour de ses épaules pour venir embrasser sa joue, s'appuyant sur lui le temps d'une brève accolade. Spontanément pourtant, il saisit sa taille à deux mains, gratifiant au passage le haut de sa hanche d'une caresse furtive qui lui permit de réaliser qu'Angel avait foutrement raison : il ne savait pas toucher une femme « poliment ». Dawn ne s'en formalisa pas le moins du monde tandis qu'il la relâchait le plus naturellement possible, en faisant mine ramasser leurs chaussures respectives.

Sans un mot, mais avec une sorte de joie perceptible, elle l'entraîna pour marcher bras-dessus bras-dessous le long de la grève. Elle avait fait disparaître le téléphone dans une poche, cachée au pli de son ample jupe que soulevait un peu la brise marine. Sous sa paume éberluée, il sentait le grain de son épaule nue, ronde et douce… Seigneur, mais que faisait-il là ? Comme il tournait la tête en cherchant comment formuler la chose diplomatiquement et compte tenu de ses faibles capacités naturelles, elle surprit son regard s'attendrissant sur les onctuosités bronzées, complaisamment exposées par le haut de son vêtement. Elle comprit sans qu'il ait besoin de dire un mot.

— Ah oui, je n'y avais pas pensé. Ça t'embête ? Je ne pensais pas que je te verrais si vite, en fait...

— « Embête » n'est pas vraiment le mot qui me vient à l'esprit, non... J'ai interrompu un genre de… rendez-vous galant ?

La question était venue spontanément. Et c'était loin d'être idiot de le supposer : elle portait une jolie robe qui exaltait sa féminité, du rouge à lèvres, un air rêveur peut-être parce qu'elle avait bu deux ou trois verres d'asti... Il y a peu de choses qu'on peut cacher à l'odorat d'un vampire.

Elle pouffa derrière sa main comme lorsqu'elle était enfant et arrangea illico le large volant élastiqué du haut de sa robe pour qu'il remonte et cache ses épaules.

— Galant, tu parles, j'étais avec des copines… Comme ça, ça va mieux, non ? demanda-t-elle d'un ton complice en glissant derechef son bras sous le sien pour l'entraîner au bord de l'eau.

— Oh tu sais, moi je suis pas un mec compliqué. Avec robe, sans robe, tout me va…

La nuit cacha sa roseur, elle mordit un sourire flatté mais il embraya vite, conscient que cette réplique était plutôt déplacée. C'était étonnant le nombre de commentaires salaces qu'il avait sorti à Buffy pour l'énerver et dont le dixième devenait soudain « très inapproprié » pour sa sœur...

— Parle-moi plutôt de ce fameux géniteur que j'ai déjà envie de saigner à blanc, dit-il pour changer de sujet. Et qu'est-ce que tu penses que je peux faire ? Tu voudrais que je vienne avec toi pour que je lui flanque la trouille, c'est ça ?

— Venir avec moi… mais à quel titre ?

— Bah, c'est pas pour dire mais... je crois qu'Andrew ne serait pas très impressionnant. Tu vas te trouver face à un bonhomme qui aura vite fait de capter que ton riche mari est irrémédiablement gay et qu'il ne serait pas très difficile de profiter de ta frustration sexuelle ou de l'admiration toute cuite d'une jeune fille comme Maya... Alors que si je venais avec toi en me faisant passer pour ton mec, déjà, il arrêterait de se faire des idées de ce genre et de croire qu'il n'a qu'à tendre la main pour se resservir...

Il espéra qu'avec un froncement de sourcil, son argumentation porterait davantage… Elle se retint de rire en arborant un large sourire incrédule et charmé à la fois. Elle se retint aussi de plaisanter en demandant qui se faisait « des idées de ce genre » au juste... A priori, certainement pas cette éphémère conquête d'un soir de beuverie, qui l'avait certainement oubliée. On ne l'imaginerait pas ravi d'apprendre qu'il allait avoir des frais de scolarité et une pension alimentaire à assurer...

— Trop aimable de supposer que quelqu'un de mon âge puisse être encore désirable, mais je t'assure que ce n'est pas ce que pensent les gens, ou alors ils ont plus de soixante-cinq ans... Seuls les vieux collègues d'Andrew me dragouillent encore un peu, mais plus par politesse ou parce qu'ils espèrent de l'avancement. Tu sais comment sont les Anglais du Conseil. Ils ont d'exquises tournures qui peuvent presque passer pour charmeuses... En puis, pardon de le dire crument, mais nous ne pourrions jamais être pris pour un vrai couple ! Je fais plus vieille que toi et tu passerais pour... vénal, termina-t-elle avec un coup d'œil furtif qui disait clairement « call-boy ».

— Et pourquoi ça, je te prie ? Je t'assure que je pourrais vite me montrer très convaincant dans le rôle de ton homme, si c'était pour la bonne cause...

Elle considéra son petit air faussement détaché, celui qu'il avait toujours quand il mentait comme un arracheur de dents, en soutenant qu'il n'avait rien à faire des blaireaux qu'ils étaient autrefois... Elle se haussa sur la pointe des pieds pour lui déposer simplement un baiser de remerciement sur la joue.

— Spike, ce n'est déjà pas sûr qu'il se rappelle de moi. Mais le cas échéant, je doute que passer de « fille facile imbibée » à « bourgeoise sur le retour encanaillée avec un tendron gothique » soit une véritable amélioration de mon image...

— Hey, retire « tendron » tout de suite ! J'ai cent quatre-vingt-trois ans... *

— Et bien, disons que tu es mieux conservé que moi !... badina-t-elle.

— Mouais, bien essayé mais... Est-ce que t'es pas en train de dire que – hypothétiquement parlant, bien sûr, et... indépendamment du fait que c'est impossible en raison de... bah... ma nature, et puis bien sûr ta sœur, tout ça... – mais sinon, t'aurais honte de sortir avec moi, à cause de mon look ?

Elle rit aux éclats en posant sa tête contre son épaule.

— Oh, tu me fais rire... J'aime ton stupide et adorable ego, tu sais ?... Pour répondre à ta question, j'ai toujours trouvé ton look génial. Il te va bien. En plus, t'avoir vu une fois en tweed m'a suffi pour une vie.

Spike jeta un œil de biais à son épaule qu'elle avait investie hardiment. C'était déloyal qu'elle lui rappelle le faux-pas vestimentaire de « Candide Giles ». Mais il n'était pas assez distrait pour qu'elle puisse le tromper. « Pour répondre à ta question »... et elle n'y répondait pas du tout, ou partiellement. Encore un tour qu'elle avait appris chez les Observateurs, sans doute.

— Et bah alors, où est le problème ? insista-t-il quand même. Tu t'en fous de ce mec et de ce qu'il pensera... Comment ça se fait que vous l'ayez retrouvé, d'ailleurs ?

— Andrew a eu l'idée de voir si on n'aurait pas gardé un de mes vieux journaux intimes. On déménage souvent. J'avoue que certains trucs restent dans les cartons et qu'on ne les redéballe plus...

— Ah ça, c'est bien une lubie d'Observateur que de croire que la solution à tout se trouve dans des vieux carnets de notes poussiéreux !... opina-t-il sans voiler le mépris.

— Oh, plaisante tant que tu veux mais il a trouvé ! Une carte de visite avec un numéro de téléphone gribouillé au dos, et une photo plutôt mauvaise.

— Oui, mais ça ne prouve rien. Ou seulement que tu l'as rencontré une fois et que t'as gardé sa carte. Comment tu sais que c'est bien lui précisément, le père de Maya ? Y... se ressemblent ?

Elle frissonna contre lui, saisie par la petite fraicheur saline qui s'intensifiait à mesure que la nuit s'épaississait.

— Euh… non. A l'époque de la mort de Buffy, j'ai fait n'importe quoi. Je buvais trop et je couchais avec un type différent tous les soirs, pour oublier que je n'avais plus personne...

Alors le père de Maya pouvait être littéralement n'importe qui.

Elle n'osa rien ajouter qui aurait pu sonner comme un reproche, mais elle s'était sentie d'autant plus seule que l'absence de Spike après le « vrai » décès de Buffy, l'avait laissée désemparée. Quand autrefois la vie avait fait d'elle une orpheline, il avait été une présence indéfectible, son seul soutien, même financier.

— C'est pas mon genre de te juger. En plus, moi aussi, je faisais des trucs pas très malins, laissa-t-il échapper.

— Toi aussi tu couchais avec un type différent tous les soirs ? Évite de raconter ça à Andrew...

Plus sérieux, il s'arrêta de marcher pour prendre ses mains dans les siennes et les presser doucement. La brise ne déplaçait pas une seule de ses mèches lissées au gel, il inclina la tête pour la regarder droit dans les yeux.

— Dawn, pourquoi ne m'as-tu jamais dit que tu avais besoin d'aide… ? J'aurais pu...

Ses mains s'échappèrent avec un petit signe de dénégation impatienté.

— Oh, je savais que c'était aussi dur pour toi de revivre ça. Et le serment que Buffy t'a extorqué, c'était injuste… La première fois, j'étais une ado... Je ne réfléchissais pas à ce que ça te coûtait de rester avec moi. Mais quand elle est partie pour de bon, je n'avais plus cette excuse. J'ai essayé de moins penser à moi...

Rongé par une sournoise culpabilité, il l'attira spontanément d'un geste contre lui, sans qu'elle ne semble mal à l'aise qu'il se permette de faire une telle chose. Quand diable avait-il été établi que c'était OK de la serrer de près ? Indifférente à ce qui le tourmentait, elle se laissa aller un peu plus, comme si elle déposait une partie de son fardeau. Il aurait dû réfléchir à ce détail, comprendre qu'elle se sentirait perdue. Mais il l'avait souvent dit, réfléchir dans ces situations, n'était pas expressément son fort.

— Je suis désolé, murmura-t-il dans ses cheveux. Je pensais que tu étais entourée par les autres.

Elle soupira et remit d'elle-même une distance plus raisonnable entre eux.

— D'une certaine façon, c'était vrai.

— Et apparemment d'une certaine autre, c'était faux !

— Non, protesta-t-elle. Je ne peux pas te laisser dire ça... Andrew m'a trouvée évanouie dans mon vomi un matin. Il s'est occupé de moi, il m'a conduite chez un médecin quand il a eu des soupçons... Il s'est rendu compte avant moi que j'attendais un enfant.

Le vampire faillit dire que, lui, aurait entendu le double battement de cœurs bien plus tôt mais il se retint. Il voulait qu'elle continue à parler, espérant qu'elle se libérerait ainsi.

— ...Je ne réalisais pas ce qui arrivait, tellement j'étais à côté de la plaque. Et je n'avais pas de nausées...

— Hum... Et toujours des règles, peut-être ? Est-ce que quelqu'un a jugé bon, un jour de relâche entre deux apocalypses, de t'expliquer un peu le mode d'emploi ?

— T'énerve pas. Et la réponse est oui. Mais pour en revenir à Maya, à ce moment-là, je ne mangeais pas régulièrement. Mon corps était assez maltraité. Je ne veux pas qu'elle croie que je ne voulais pas d'elle, mais tout cet alcool pouvait avoir compromis le fœtus... Je n'étais pas sûre de pouvoir garder ce bébé. Sans Andrew qui m'a soutenue et promis qu'il m'aiderait à traverser ça, j'aurais avorté...

— Shhh... souffla-t-il, écœuré de découvrir combien elle avait été mal. Ce que je veux dire, c'est que je veux être là pour toi maintenant. Si tu veux que je t'accompagne voir ce mec répugnant, je t'accompagne. Et je promets que je ne l'éviscérerai pas pour avoir profité de toi... Enfin merde quoi, il devait bien voir que tu étais ivre, non ?

— Spike, c'est moi qui me suis jetée à sa tête... Il était assis tranquille dans son coin, il ne demandait rien à personne... Mais je l'ai vu ce soir-là dans ce bar. Je l'ai vu et j'ai su que je n'aurais pas d'autre occasion. Je voulais être dans ses bras, c'était le seul réconfort dont j'avais besoin...

— Tu essaies de me dire que c'était un genre de coup de foudre ?

— Hein ? Non ! Bien plus pathétique.

Il se recula un peu, le sourcil froncé d'incompréhension.

Elle respira profondément et fit quelques pas en arrière, secouant la tête comme si elle était en proie à un furieux débat intérieur.

— Oh, je me sens tellement stupide... C'est juste qu'il était... il était...

Dans un geste d'énervement fataliste, elle jeta les bras en l'air en signe de reddition. Elle fouilla sa poche pour en ressortir le téléphone qu'elle manipula fébrilement pour retrouver quelque chose, avant de le tourner pour qu'il puisse voir la photo qu'elle lui présentait.

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C'était une très mauvaise photo. Probablement une prise de vue faite sur un tirage imprimante fané. Dans le cadre, il reconnut le profil plus juvénile de Dawn qui ne regardait pas la caméra, mais le visage de l'homme qui tenait l'appareil à bout de bras, le laissa une petite seconde complètement désarçonné.

— Est-ce que c'est plus clair, maintenant ? questionna-t-elle de ce ton agressif propre à la Tueuse, quand elle se sentait prise en défaut.

Il plissa les paupières, silencieux tandis qu'il considérait l'image. Même si le type était loin d'avoir son sex-appeal – la couleur des yeux, la structure du visage et la blondeur étaient des indicateurs suffisants... Pas besoin d'être Einstein pour faire le rapprochement entre lui et… cette pâle copie.

— Attends, c'est ça que tu veux me dire ? Que t'as couché avec ça, en imaginant que tu le faisais avec... moi ?

Sans un mot, les yeux baissés mais le menton frondeur, elle se croisa les bras dans une posture de défi qui était si typiquement celle de Buffy. Jusqu'au petit pied nerveux qui battait sous sa jupe. Le cœur immobile du vampire se serra. Ses tripes se nouèrent. Sous le choc, il ouvrit la bouche mais rien n'en sortit.

— Et quoi ? Tu vas dire que tu es choqué peut-être ?

Il se contenta d'une petite moue prudente assez peu révélatrice et n'osa pas répondre immédiatement. Ce n'était pas comme s'il ne comprenait pas. Quand il sortait avec Harmony, ne l'avait-il pas déguisée avec des vêtements piqués dans l'armoire de Buffy pour pimenter leurs préliminaires ? Et pour quelle autre raison avait-il commandé à Warren Mears le sex-toy grandeur nature qu'était le Buffybot ? Il se sentait mal placé pour les remarques vertueuses. Mais lui était un vampire amoral, formé par des pervers psychopathes, alors que Dawn pas tellement...

— Non, pas « choqué » au sens moraliste, mais est-ce que j'ai le droit de dire que je suis un peu... étonné ?

— Mais qu'est-ce qui est si étonnant à la fin ? Personne ne t'a jamais dit que tu étais attirant, peut-être ?

Le naturel revenant toujours au galop, il opina positivement avec une petite moue prétentieuse mais se reprit vite.

Buffy trouvait toujours ça dégoutant qu'il puisse sentir quand elle crevait de désir pour lui, et quand elle était prête à se damner pour qu'il la prenne debout contre un mur, même à côté des poubelles graisseuses du Double Mixte Palace... C'était sans doute injuste mais il pouvait flairer et décoder le moindre changement hormonal de tout ce qu'il considérait comme une proie… Et il n'avait jamais détecté la moindre phéromone chez Dawn qui aurait pu lui mettre la puce à l'oreille. Alors oui, il était étonné. Mais pour autant, n'y avait-il aucune une explication ?

— Ta mère et toi, vous avez toujours été... hors limites pour moi. Vous m'avez traité avec respect dès que vous avez compris que vous pouviez me faire confiance. Pour une quelconque raison, je m'y suis agrippé, résistant à toute force pour m'empêcher de gâcher ça. Mais plus tard, comme tu sais, ta sœur a rompu, ça m'a rendu dingue et j'ai tout ruiné quand même.

Il avait les yeux vagues fixés sur ce souvenir et la voix qui sortait mal. Il aurait dû s'arrêter là. Pourquoi lui dire ça, surtout à elle ? Jamais il n'avait osé demander le pardon. Mais il continuait à parler malgré tout, comme s'il était possédé.

— ...Réaliser que je ne comptais pas du tout, ni mes sentiments, ni mes caresses, réaliser qu'elle avait honte de s'être laissée toucher par quelqu'un comme moi... Mais j'étais comme un pauvre camé… J'ai cru que si on recouchait ensemble, elle comprendrait que je l'adorais. Et dans ses yeux, il n'y a eu que la peur, l'horreur et le désespoir...

— Spike… le supplia-t-elle.

Lancé comme une locomotive dont les freins ne répondaient plus, il poursuivit.

— Tu te souviens de ce que tu m'as dit quand tu as su... « Il faudra bien que tu dormes un jour et ce sera pour te réveiller dans un lit en feu » ?... J'ai su que j'avais détruit en même temps tes illusions sur moi et que c'était irrémédiable... Buffy pouvait toujours se raisonner, admettre que je restais, malgré mes insuffisances, « son soldat le plus fort » dans un combat foutu d'avance... Mais à toi j'avais prouvé que Giles avait raison et toi tort de croire dans ma rédemption, impossible même si je ne rêvais de rien d'autre… Tu as enfin compris ce jour-là, que je n'étais pas « spécial » ni meilleur … Buffy n'attendait rien de moi. Mais toi… je t'ai déçue amèrement, parce que tu croyais en moi.

— Non, l'interrompit-elle.

— Non ? Comment ça « non » ? Bien sûr que si !

— Non ce n'était pas « irrémédiable ». Tu as fait bien d'autres choses par la suite qui t'ont remonté dans mon estime.

— Oh ? fit-il avec cette petite touche de vanité mêlée de curiosité.

— Et d'autres encore, qui m'ont salement mise en colère aussi.

— Oh... répéta-t-il avec abattement.

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Note

* Spike serait né en 1853.

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