Snakes Of Despair

Chapitre 15 : Chapter fourteen

7397 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour il y a environ 9 ans

Chapitre 14,

 

Orihime salua une dernière fois, avant de tourner le dos. Elle suivit la blonde vénitienne qui venait de sortir de la pièce, avant de fermer la porte derrière elles. Elle fit quelques pas derrière la femme en question, et elles s’éloignèrent en silence. Puis, arrivées au bout du couloir, lorsqu’elles furent sûres de ne pas être entendues, elles s’exclamèrent avec enthousiasme :

« Super ! On a réussi ! »

Orihime se rapprocha de la rousse et lui lança, gratifiante :

  • Merci, Rangiku ! Grâce à toi, je n’ai eu qu’une simple journée d’exclusion et des heures de colle en fin de journée. J’ai vraiment cru qu’ils allaient définitivement me virer. J’ai échappé au plus gros !

  • Ce n’est rien, tu sais, répondit son amie. La CPE a toujours été extrêmement gentille et compréhensive. Et puis, il faut dire que s’il y a bien quelqu’un qu’elle n’aime pas, c’est Loly. Si tu savais tous les ennuis qu’elle lui a causée ! Par sa faute, le lycée a même été poursuivi par la Justice. Alors, pour une fois qu’on lui rend la monnaie de sa pièce...

  • C’est vrai qu’elle est très gentille. Je n’aurais jamais cru qu’elle serait si... Douce, même avec moi.

Rangiku passa son bras autour de l’épaule d’Orihime, et se mit à marcher, l’entraînant avec elle :

« Viens, on va à l’infirmerie. Il faut soigner tes bobos, et nettoyer ton visage ! »

Et sur ce, elles quittèrent le couloir, bras dessus bras dessous.

 

  • Sérieux ? S’écria Orihime, assise sur le rebord du lit de l’infirmerie. Des calendriers ? Avec moi dedans ? Mais, je ne-

  • Chut, lui intima son amie, qui nettoyait avec soin la plaie sur son arcade. Arrête de bouger, ou je vais te foutre du désinfectant dans l’œil ! Pour les calendriers, on verra ça plus tard. Tu seras superbe. Et nous serons avec toi.

La jeune Matsumoto s’appliqua donc à terminer sa tâche. L’infirmière étant absente, elle avait dû se servir directement dans la réserve, et Orihime avait été surprise de la précision et de l’habilité avec laquelle son amie la soignait. Elle savait s’y faire.

  • Ça va ? Tu n’as pas mal ? S’enquit la concernée en appuyant la compresse sur le haut de sa joue gauche.

  • Non, ne t’inquiète pas. J’ai déjà eu bien pire.

Le visage de la rouquine n’était pas très abîmé, si ce n’était la plaie près de son arcade droite, et l’hématome qui apparaissait sous son œil gauche. Ses poings, par contre, étaient bien plus endommagés. Le dessus de ses doigts était rougi, il y avait du sang sous ses ongles et ses phalanges avaient été violemment éraflées. 

  • Bien pire ? Répéta son amie. Qu’entends-tu par là ?

  • Euh... Je...

Orihime s’arrêta. Elle avait laissé les mots s’échapper de ses lèvres sans même en avoir conscience. Elle tenta de maîtriser les battements de son cœur accéléré et serra discrètement les poings. Elle avait décidemment le don de se mettre dans le pétrin !

  • Tu sais, Orihime, Tia comme moi avons remarqué que tu agissais bizarrement, parfois. Ça nous inquiète un peu. Tu as eu des problèmes, avant de venir ici ?

La concernée déglutit péniblement et fit de son mieux pour éviter le regard de Rangiku, à la recherche d’une réponse potable. Mais voyant son désarroi, celle-ci eut un léger soupir et reprit :

  • Ce n’est pas grave, laisse tomber. Tu te confieras quand tu seras prête, si tu l’es un jour, et pas avant. Chacun ses petits secrets.

Elle alla reposer le boitier médical sur l’armoire. Quand elle se retourna, Orihime fixait ses mains qui trituraient le drap du lit, l’air préoccupée et coupable. Rangiku se rapprocha et vint s’asseoir près d’elle :

  • Je ne t’en veux pas, je t’assure. Tu nous en parleras le moment venu. Alors, ne fais pas cette tête. Ne l’oublie pas : on forme un trio, toutes les trois.

A ces mots, Orihime releva ses grands yeux gris vers ceux de son amie. Elle avait prononcé exactement les mêmes paroles que Tia. Rangiku riva son regard à celui de la rouquine, avant de l’attirer à elle, un sourire aux lèvres. Elle avait sa réponse, maintenant : elle était bien trop attachée et liée à Orihime, elle ne pouvait pas la quitter. Et elle en assumerait les conséquences.

Orihime et Rangiku restèrent près d’une heure à l’infirmerie. La rouquine lui fit tout d’abord le récit des évènements passés, avant de dériver sur d’autres sujets bien plus légers. Elles s’allongèrent côte à côte sur le petit lit de l’infirmerie et discutèrent, plaisantèrent, rigolèrent. Rangiku s’amusa même à tresser les longs cheveux roux d’Orihime en une longue tresse, laissant toutefois quelques mèches de cheveux encadrer son visage. Elles mangèrent leur bento. Puis, elles quittèrent enfin l’infirmerie. Il fut décidé qu’Orihime rentrerait chez elle aujourd’hui, mais que Rangiku retournerait en cours. 

« Rentre bien, lui lança Rangiku en s’engageant dans les escaliers du hall. Si tu as besoin de quoi que ce soit, appelle-moi. On se voit demain ! »

Et sur ce, elle disparut. Demain ? Demain, Orihime n’irait pas en cours. Elle devait s’être trompée. La lycéenne remonta l’allée principale du hall, repassant devant le lieu même où elle avait perdu la tête, grimaçant à la vue des deux casiers qui s’étaient déformés lors de leur affrontement. Les images revinrent en mémoire de la rouquine, et elle secoua la tête, comme pour repousser le souvenir de cette sensation folle qui l’avait engloutie. Elle avait complètement pété un câble. Elle l’avait littéralement tabassée. Il n’y avait aucun autre mot pour décrire cela.

Orihime laissa la porte se refermer derrière elle, avant de s’engager dans la cour. Elle la traversa silencieusement, contemplant le ciel grisé qui s’offrait à elle. Mais, devant le portail blanc du lycée, elle s’arrêta un instant. Quelqu’un la regardait. Pour des raisons qui lui échappait, elle était devenue douée à ça : elle parvenait maintenant à ressentir le poids d’un regard sur elle, ce qui n’était pas le cas avant. Alors, elle se retourna et examina les alentours. Personne. 

Puis, son regard remonta le long du premier bâtiment et elle les croisa alors : les yeux émeraudes d’Ulquiorra. Il se tenait près d’une fenêtre de la passerelle vitrée, sa chemise blanche toujours parfaitement cintrée, un livre ouvert à la main. Il la regarda longuement, la faisant frémir malgré toute la distance qui les séparait, avant de mystérieusement disparaître derrière le reflet de la fenêtre.

Mais alors qu’Orihime s’apprêtait à enfin quitter l’enceinte du lycée, elle entendit une voix l’interpeler derrière elle et eut un hoquet de surprise. Ulquiorra ? Non. Elle se retourna de nouveau et vit alors le rouquin qui courait dans sa direction. Un sourire étira ses lèvres.

« Renji ! S’exclama-t-elle. Que fais-tu là ? »

Il s’avança, son sac nonchalamment balancé derrière son épaule, ses cheveux entièrement relevés en sa sempiternelle queue de cheval ébouriffée. 

« Je-, » commença-t-il avant de s’interrompre en croisant son regard

Renji s’arrêta dans sa progression, et plissa légèrement les yeux. 

  • Qu’y a t-il ? S’enquit-elle.

  • Tu es changée. 

Les mots s’étaient échappés de sa bouche. Il la vit ouvrir grand ses yeux et se mit à l’observer. Au-delà de la longue tresse qui coulait près de sa poitrine, de l’hématome qui décorait le dessous de son œil, des croutes qui se formaient déjà à son arcade et sur ses genoux, et de sa chemise en sale état ; elle avait changé. Ses épaules étaient légèrement moins tendues que d’habitude, ses lèvres étaient naturellement étirées en un fin sourire et surtout, l’éclat de ses yeux était différent. Elle était toujours envahie de ce même désespoir, torturée de cette même douleur, engloutie par les mêmes ténèbres, mais quelque chose avait changé en elle. C’était comme si elle semblait enfin prête à être elle-même. Et surtout prête à leur faire confiance. Renji écarquilla ses yeux. C’était ça. Elle avait enfin compris. Compris qu’elle n’était plus seule.

« Changée ? Répéta-t-elle. Que veux-tu dire ? »

Renji, tiré de ses pensées, se reprit :

  • Non, je... Ce sont tes cheveux, se rattrapa-t-il. Cette coupe métamorphose littéralement ton visage. J’ai cru l’espace d’un instant que je m’étais trompé de personne. 

  • Ah, j’aurais dû m’en douter. Rangiku m’a assuré que ça m’irait bien, mais je savais que cela ferait bizarre. J’aurais dû me regarder dans un miroir !

  • Non, ce n’est pas vraiment ça. C’est juste que... ça change. Mais c’est vrai que je te préfère avec les cheveux lâchés. Enfin, je ne suis pas venu ici pour te parler de tes cheveux. Tu quittes le lycée ?

  • Oui, j’ai été renvoyée pour aujourd’hui et demain. Tu ne vas pas en cours ?

  • Non, pas trop envie. Renvoyée, hein ? Je vois... Tu rentres chez toi ?

  • Oui..., répondit-elle d’une petite voix.

Orihime baissa les yeux. Non, elle n’avait plus de « chez elle ». Mais oui, elle retournait à son appartement. Elle allait retrouver les murs sombres, le vide de son studio et l’obscurité qui l’y attendait. Et elle allait y rester jusqu’au lendemain matin. Non, le lendemain aussi, elle passerait sa journée dans son appartement. Rien qu’à cette idée, elle frissonna. N’avait-elle aucun lieu où aller ? Où sortir ? 

Renji n’eut absolument aucun mal à deviner ce qui se tramait dans l’esprit de la jeune fille. Il se l’imaginait dans son sinistre studio, silencieuse, le regard vitreux, sans la moindre pensée, telle une coquille vide. Alors, d’une voix naturelle, il demanda :

  • Que dirais-tu de venir chez moi ?

  • De quoi ? S’exclama-t-elle avec surprise. Renji ! Ne me dis pas que tu sèches les cours pour-

  • Non, non, ne t’inquiète pas. 

  • Renji ! 

  • Je ne sèche pas pour toi, je t’ai dit ! Alors, c’est décidé. On va chez moi.

  • Menteur, soupira-t-elle.

  • Tu arrives à me cerner un peu trop facilement, toi, rigola-t-il, heureux de voir qu’elle n’avait pas refusé comme elle l’aurait fait il y a peu de temps. Allez, on y va !

Et sans plus tarder, ils se mirent en chemin. Orihime fut surprise de constater que Renji n’habitait même pas à deux minutes de chez elle, c’était bon à savoir. C’était la première fois qu’elle entrait chez lui : sa maison était assez grande. Elle frôla d’ailleurs la crise cardiaque quand un grand type baraqué et bronzé aux cheveux noirs tressés et à la bouche surmontée d’une épaisse moustache, vint poster ses lunettes à quelques centimètres seulement des yeux d’Orihime. 

« Voici Tessai, présenta Renji en soupirant. Tessai, je te présente Orihime Inoue, mon amie. »

Tessai se redressa alors et reprit ses distances. Après avoir retrouvé contenance, Orihime s’inclina :

« R-Ravie de vous rencontrer. »

Et, alors qu’elle s’attendait à une réponse froide et distante, Tessai répondit chaleureusement :

  • Je suis enchanté de votre présence, ici, Inoue-san. Vous êtes la bienvenue à la maison, sachez-le. J’espère que vous allez manger avec nous, ce soir ?

  • Huh ? S’étonna-t-elle en se relevant. Euh... C’est que... Je...

  • Oui, elle va manger avec nous, répondit Renji à sa place.

  • Parfait. Dites-moi, quel est votre aliment préféré, Inoue-san ?

  • Euh... Mon aliment préféré... Ce sont les pâtes de haricots rouges. Mais j’aime aussi celles à la framboise, ou encore les pommes de terres au nutella et...

Orihime vit le visage de Renji se décomposer et se calma rapidement. Mais à cette annonce, les yeux de Tessai s’illuminèrent, et il s’exclama :

  • Des pâtes aux haricots rouges ! Quel délice ! C’est décidé. Je vais concocter les meilleures pâtes aux haricots rouges que vous n’avez jamais mangé, Inoue-san !

  • Sérieusement ? Questionna-t-elle, les yeux grands ouverts. 

Mais, alors qu’elle retirait ses chaussures dans l’entrée, Renji lui attrapa la main et la traîna dans les escaliers. Ainsi, avant même de comprendre ce qui se passait, et de continuer sa conversation culinaire avec Tessai, elle se trouvait sur le pas de la porte de la chambre de Renji.

« Bah t’attends quoi ? Lança-t-il, voyant qu’elle n’osait pas pénétrer sa chambre. Rentre ! »

Elle fit un premier pas, puis un second. La chambre de Renji était simple. A vrai dire, c’était une vraie chambre de garçon. Un bureau qui visiblement n’en faisait pas l’usage, recouvert d’habits et de choses en tout genre. Un grand lit, mal fait et imprégné d’une odeur virile mais chaleureuse. Une commode de cinq tiroirs desquels débordaient des bouts de tissus. Une armoire visiblement en pagaille dont la porte ne fermait pas. Des murs blancs, dont l’un d’entre eux comportait un calendrier ainsi que des posters de filles, de rappeurs, de boxeurs ou de footballers. Et pour finir, un coin dans lequel étaient déposés poids, altères, ainsi qu’un sac de frappe attaché au plafond.

« Je ne vais pas m’excuser, je suppose que tu ne t’attendais pas à trouver une chambre rangée... » Lui lança-t-il avec un clin d’œil. 

Le rouquin se jeta sur son lit, et lui fit signe de venir le rejoindre. Elle alla alors s’asseoir en tailleur sur son lit, près de lui, après avoir retiré sa veste. Elle avait beau être dans la chambre de Renji – un garçon – elle était à l’aise. Lorsqu’elle était avec lui, sa timidité semblait presque disparaître. Tout paraissait naturel, avec lui. C’était comme si elle le connaissait depuis des années.

« Alors, raconte-moi. Que t’est-il arrivé ? » S’enquit-il en s’allongeant sur le dos, les mains derrière la tête.

Orihime le regarda quelques secondes, avant de prendre place et de se jeter dans son récit. Elle n’eut absolument aucun mal à lui expliquer ce qu’elle avait fait, elle n’eut absolument aucune honte à lui décrire ce qu’elle avait ressenti. Elle savait qu’il ne la jugerait pas. Elle se sentait bien, avec lui. A la fin de son histoire, Renji ne dit rien. Elle avait vu son visage se crisper de colère à la mention des paroles de Loly et savait pertinemment ce qu’il allait lui dire. Alors, pour ne pas le laisser commencer à se blâmer lui même pour ne pas avoir été présent, elle s’empressa de dire :

« Tu n’as absolument rien à te reprocher, Renji. Ce n’est rien. Et puis, c’est fini. »

Renji la regarda, mais eut du mal à lui rendre son sourire. Elle le savait : il s’en voulait.

« Je vais rester avec toi, demain » lâcha-t-il après quelques secondes de silence.

Mais à ces mots, Orihime s’insurgea et se redressa au-dessus de lui :

« Ne- Renji, je t’interdis ! » S’écria-t-elle plus fort que prévu. 

Surpris, il la regarda. Elle se calma, et reprit :

« Tu as déjà séché les cours aujourd’hui, tu ne peux pas recommencer sous prétexte que tu veux être là pour moi ! Je ne te le pardonnerais pas ! Pense un peu à toi ! »

Elle riva ses yeux dans les siens, les sourcils froncés. Renji n’aimait pas l’école, il n’avait d’ailleurs pas de très bonnes notes et avait déjà redoublé une fois. Elle ne voulait pas être la cause de son abandon scolaire. Elle voulait l’aider à réussir, au contraire. Et puis, elle ne voulait pas être un fardeau pour lui. Renji sembla comprendre qu’elle était sérieuse dans ses propos, alors il se renfonça dans son oreiller, contrarié.

« ‘Pense un peu à toi’ ? Répéta-t-il en grommelant. Et c’est toi qui me dit ça... »

Orihime se retourna. Elle était plongée dans ses pensées, quand elle vit les deux cadres photos posés sur la table de nuit de Renji, le seul meuble entretenu et rangé de la chambre. Elle s’approcha et toucha du bout des doigts le verre qui protégeait la photo d’Ururu, toute mignonne dans son manteau bleu marine, qui souriait timidement, la neige venant orner ses cheveux sombres. Puis elle considéra le second cadre, et eut un sourire. C’était une photo de Renji, visiblement, quand il était plus jeune, sans ses tatouages. Mais alors, elle eut un hoquet de surprise. Non, ce n’était pas Renji. Il avait le même sourire malicieux, les cheveux d’un rouge aussi intense et un visage aussi fin, mais ce n’était pas Renji. Elle ne savait pas dire pourquoi, mais elle savait que ce n’était pas lui. Elle ouvrit un peu plus ses grands yeux gris. Il s’agissait de son petit frère.

Voyant qu’elle observait avec attention la photo, Renji commença, les yeux rivés au mur :

« Jinta. C’est son prénom. Lui et moi avons été tirés de l’orphelinat quand j’avais treize ans, et lui, huit, par un type appelé Kisuke. Puis on a été adoptés par Tessai, et quelques mois après, ce fut le tour d’Ururu. Les années sont passées, jusqu’à ce que Jinta ait un accident de voiture près de chez nous. Le conducteur a fui, et c’est Ururu qui est tombée sur son corps, presque devant notre porte. C’était en début d’année dernière. »

Il se tut. Sans un mot ni un regard, Orihime se rapprocha, et comme portée par un réflexe, elle laissa sa main aller rejoindre celle de Renji, crispée et moite. Ce dernier fut surpris de ce geste qu’il apprécia énormément, et eut un sourire qu’elle ne vit pas. Il aimait vraiment Orihime. Puis, alors qu’elle lui tournait le dos, il demanda :

  • Cet homme, dont tu as la photo dans ton salon, c’est ton père ? Et la fille ?

  • Non, répondit-elle avec un petit sourire. C’est mon frère, Sora. Mes parents n’étaient pas... Euh... C’est lui qui m’a élevée. Il a été victime d’un accident de voiture, lui aussi, et après ça, j’ai été seule. Quant à la fille...

Orihime s’arrêta. Renji la vit tressaillir et fronça les sourcils. 

« C’est Tatsuki... Ma meilleure amie. »

Sa voix était fébrile et vacillante, il l’entendait. Alors, il se leva et descendit de son lit. Puis, il contourna son lit et vint se poster devant elle. Son cœur se serra avec violence : il avait vu juste. Son visage était sombre, elle se cachait derrière ses cheveux. 

« Elle est morte il y a presque deux mois..., reprit-elle. D’une... D’une mauvaise chute. »

Elle s’était arrachée ces mots. Mais, en prononçant ses paroles d’une voix particulièrement mal assurée, les larmes se mirent à rouler sur les joues d’Orihime. C’était la première fois qu’elle en parlait à quelqu’un. Aussitôt, elle tenta de les effacer, mais lorsqu’elle eut compris qu’elle ne pouvait pas, elle se cacha derrière ses mains. Renji s’agenouilla près d’elle. Puis, avec douceur, il posa ses mains sur les siennes et tenta de les lui retirer. Elle résista une première fois, mais il insista, et elle finit par accepter de dévoiler son visage. 

Sans un mot, il la regarda de ses yeux sombres et les larmes roulèrent de plus belle sur les joues d’Orihime. Ce regard chaud... Elle avait le sentiment de pouvoir tout lui dire. Elle avait l’impression de pouvoir se reposer sur lui. Elle savait qu’elle pouvait avoir confiance en lui. Mais pourtant, elle se ravisa et réprima son envie de se jeter dans ses bras. Cependant, Renji sut lire à travers cette hésitation et ce changement d’avis. Comme s’il avait compris le sous-entendu de cet infime geste, il lui tira les bras. Aussitôt, Orihime fut attirée à lui et l’instant d’après, elle se retrouvait enlacée des bras de son ami. Elle écarquilla ses yeux, bouleversée, mais ne chercha pas à se défaire de son étreinte. 

« Je ne sais pas quoi dire... Commença-t-il d’une voix teintée d’émotion. Je comprends tes larmes, mais je ne peux rien dire pour autant. »

Orihime sentait le corps chaud de Renji contre le sien, son souffle apaisant qui caressait son visage, son odeur réconfortante, ses bras sécurisant qui la protégeaient. Elle se sentait enveloppée d’une aura bienveillante, comme dans une bulle de bien-être dont elle ne voulait pas sortir. Elle se sentait chez elle.

« Ne me demande pas pourquoi, mais... Je ne supporte pas de te voir pleurer, Orihime. Je ferais tout pour ne plus avoir à te voir verser des larmes. Mais tout ce que je suis capable de faire, c’est de te prendre contre moi et de te serrer dans mes bras. »

Le visage de Renji était crispé. Il serra un peu plus la rouquine contre lui, comme de peur qu’elle ne puisse disparaître. Comment avait-il pu s’attacher à elle si facilement, si rapidement, si intensément ?

« Je ferais tout pour alléger ta souffrance, ton fardeau, reprit-il. J’aimerais, mais je ne sais pas comment faire. Alors... Excuse-moi... »

L’odeur d’Orihime enivrait ses narines et il percevait ses larmes qui mouillaient son buste à travers sa chemise. Il la sentit secouer la tête contre son torse et l’entendit murmurer :

« Non..., répondit-elle. Tu en fais bien plus pour moi que ce que tu crois. Tu es là... Et c’est déjà bien assez. »

Renji ne répondit pas. Il se contenta de poser ses lèvres sur le haut de son crâne et ferma les yeux. 

L’après-midi d’Orihime fut complètement différente de la matinée qu’elle avait passée. Elle resta chez Renji, avec qui elle discuta des heures et des heures. Ils avaient entrepris de ranger la chambre de ce dernier, avaient regardé des films, avaient fini leurs devoirs, s’étaient amusés. Renji avait même initié Orihime à la boxe. Puis, quand Ururu était rentrée de l’école, celle-ci et la rouquine s’étaient données pour projet de faire des cookies. Renji avait alors découvert que lorsqu’elle ne laissait pas libre court à ses goûts exotiques, Orihime était une superbe cuisinière et il fut d’autant plus heureux de voir les yeux d’Ururu briller de bonheur. 

Puis, lorsque la jeune Inoue avait rallumé son téléphone, elle avait été confrontée aux appels de Hiyori et aux messages d’un Hisagi plutôt inquiet qu’elle avait de suite rappelé, le téléphone d’Hiyori semblant être éteint. Renji s’était aussitôt emparé du téléphone et avait demandé à son meilleur ami de venir chez lui. Le brun était donc venu sonner à la porte, et les avait rejoints avant de lui aussi réclamer des explications quant aux événements du matin. Puis, après avoir discuté tout en dégustant les bons gâteaux d’Ururu et Orihime, les deux garçons s’étaient donnés pour objectif d’initier leur amie à la PlayStation. 

Le résultat avait été catastrophique, et au bout d’une heure, elle avait fini par comprendre que les différentes touches de la console avaient différentes fonctions. Ils avaient alors compris qu’elle ne plaisantait pas lorsqu’elle affirmait être nulle avec toute forme de technologie. Ils avaient donc passé de longues heures ensemble, tous les trois, se taquinant, se chamaillant, s’écroulant de rire. Ils s’étaient terriblement rapprochés, et surtout, amusés, comme s’ils se fréquentaient depuis la plus jeune enfance. Puis l’heure du repas était arrivée, et Tessai avait offert à Orihime d’exquises pâtes aux haricots rouges accompagnées d’une sauce, comme il le lui avait annoncé, tandis que Renji, Ururu et Hisagi avaient préféré opter pour des plats plus « normaux ». Les deux garçons avaient tout d’abord été exaspérés quant au mélange affreux de cette recette, mais quelle avait été leur joie lorsqu’ils avaient vus leur amie reprendre goût à la nourriture et manger comme pour rattraper ces mois passés.

Puis, après avoir salué Ururu, Tessai et Renji, les deux invités quittèrent la maison de leur ami. Hisagi raccompagna Orihime jusqu’à chez elle, après avoir discuté longuement sur le chemin. Il resta d’ailleurs près d’une demi-heure chez elle, invité, avant de lui aussi retourner à sa maison. Et ce fut la tête un peu plus légère que la rouquine s’allongea dans son lit, sans toutefois s’endormir, consciente que si ses yeux se fermaient, ses bons moments passés seraient effacés par d’horribles cauchemars.

Mais après des heures de lutte contre sa nature humaine, elle dut s’endormir car de nouveaux cauchemars l’assaillirent. Et quand elle rouvrit ses yeux cernés, son réveil affichait neuf heures et demi passées. Orihime passa ses mains sur son visage et essuya les quelques larmes qui continuaient de rouler sur ses joues. Quand ce fut fait, elle rejeta les draps humides de son lit, le souffle court. Puis, elle s’allongea de nouveau, les yeux rivés au plafond fissuré de son appartement et resta immobile Aujourd’hui se déroulait sa journée d’exclusion du lycée. Allait-elle passer sa journée ainsi, dans son sinistre studio ? Hors de question, elle en mourrait. Son regard resta fixe et insensible durant presque une heure, une heure qu’elle passa complètement immobile. Jusqu’à ce que la sonnette de l’entrée se fasse entendre, la faisant émerger du monde intérieur qu’elle s’était construit. 

Orihime se redressa, le visage dépourvu d’émotions. Elle se leva de son futon et sortit de sa chambre pour s’approcher de la portée d’entrée. Sa main tendue vers la poignée, elle hésita d’abord, se remémorant le sang qui avait taché cette même poignée lors de son cauchemar. Elle souffla puis prit sur elle, avant de finalement déverrouiller la porte et ouvrir le battant. La lumière pénétra son appartement avec violence et elle porta une main à ses sourcils. Mais ses yeux pourtant plissés, agressés par la luminosité, s’écarquillèrent lorsqu’elle reconnut la bande de filles qui stationnaient sur le pas de son studio. Tia, Rangiku, Hiyori et Nemu se tenaient devant elles, toutes vêtues différemment, chacune arborant un large sourire sur leurs lèvres.

  • Les filles... Que faites vous là ?

  • Hey, s’exclama Hiyori.

  • Ne me dites pas q-

  • Tais-toi, lui intima la blonde en lui mettant sa paume sur sa bouche. Tu as dix minutes pour te préparer, jeune fille ! 

  • Et pas une minute de plus, renchérit Nemu. On a une journée chargée.

Ahurie, Orihime regarda ses quatre amies pénétrer son appartement avec la même expression sur le visage.

  • Une journée chargée ? Répéta-t-elle. Mais... Vous avez cours !

  • Cours ? Ne sois pas bête, fit Nemu.

  • Comme si on allait laisser passer l’occasion de se faire notre première journée entre filles, toutes les cinq ! 

  • Ce qu’Hiyori essaie de te dire, reprit Tia, c’est qu’il est hors de question qu’on te laisse ici, à moisir dans cet appartement sombre. Tu dois sortir, profiter de la vie. Et on est là pour ça.

  • Et ce que Tia essaie de te dire, enchaîna Rangiku, c’est qu’on forme une famille. T’es virée, on l’est aussi.

Et ce fut sur ces mots que démarra la journée d’Orihime.

Ainsi, le mercredi 17 Avril, une bande de filles débarqua en plein centre ville. Composée de cinq superbes jeunes femmes et riche en exotisme, elle ne fit qu’attirer l’attention. Et partout où elles allèrent, elles firent des ravages. Le restaurant dans lequel elles allèrent pour entamer leur journée après une balade les servit gratuitement, tout comme le taxi qu’elles utilisèrent pour changer de ville. Et ce, uniquement grâce à la belle Nemu, qui sous les yeux effarés de ses amies, s’occupa de soudoyer les hommes, et même les femmes. Orihime fut d’ailleurs agréablement surprise de constater les changements qui s’opéraient chez la superbe asiatique, plus ouverte, plus bavarde, plus joyeuse, plus elle-même, lorsqu’elles étaient ensembles. 

Puis, arrivées sur l’une des plus grandes rues commerçantes de la région, elles se mirent à arpenter les magasins, sans toutefois cesser de rigoler entre elles. Les essayages défilèrent, les changements de looks aussi, et les filles finirent par avoir les bras surmontés de sacs de shopping. Oui, même Orihime. Ainsi, après avoir rapidement déposé l’ensemble chez Tia, les cinq camarades se rendirent au cinéma, pour y visionner un film d’amour, étrangement réclamé par la plus teigneuse des cinq, la fameuse Hiyori. Elles allèrent également à l’aquarium, avant de retourner chez Tia, où elles se baignèrent dans la piscine de son jardin, malgré la température assez fraîche de celle-ci. Puis, après s’être douchées, elles se commandèrent des pizzas tout en entamant un karaoké de chansons anglaises.

Puis, arriva le soir. 

  • Allez, c’est parti ! S’exclama Tia. On a deux heures devant nous. Je vais rapidement me préparer. Nemu, Rangiku, je compte sur vous pour les habiller !

  • Ne t’en fais pas, répondit la première.

  • Elles mettront leur robe, quoi qu’il nous en coûte, renchérit la seconde. Je t’en donne ma parole !

Une fois la blonde disparue derrière la porte de la salle de bain, sourire aux lèvres, les deux concernées firent volte-face et considérèrent les deux filles devant elles. Celles-ci avaient les jambes qui tremblaient sous l’effet des deux regards de leurs amies, qui à cet instant précis, se rapprochaient plus de deux monstres aux yeux luisants que de jeunes femmes encore dans la fleur de l’âge. Mais elles n’y échappèrent pas. La blonde comme la rousse furent déshabillées de haut en bas, et malgré leur abandon du combat, leurs deux bourreaux ne s’arrêtèrent pas. Dans la salle de bain, Tia entendit les cris d’Orihime et Hiyori, et ne put s’empêcher de rigoler un peu. Si on se fie à leurs cris, de drôles d’idées nous viennent aussitôt en tête... Heureusement que je n’ai pas de voisins proches, songea-t-elle.

Mais quand elle quitta sa salle de bain, elle fut agréablement surprise de voir que ses quatre amies étaient parfaitement prêtes, et magnifiquement habillées. Elle s’approcha d’Orihime et examina la façon dont la robe bleue marine qu’elles lui avaient achetée dessinait délicatement les courbes de son buste avant de s’évaser. C’était parfait, et bien loin d’être vulgaire, comme elle l’avait deviné. Elle fit un clin d’œil à Rangiku. Puis, elle se pencha sur Hiyori et arrangea le col de la belle robe rouge sang qui faisait ressortir l’étrange vert marronné de ses yeux. Ses cheveux avaient été attachés en un magnifique chignon, qui métamorphosait complètement son visage tâcheté.

Evidemment, Rangiku et Nemu étaient sublimement vêtues de robes qui moulaient délicieusement les trésors de leur corps. Alors, Tia attrapa à la volée son sac de sport posé sur son lit et sortit de sa chambre, ses amies sur ses pas.

« Allez, c’est parti ! »

Car oui, ce soir, la bande sortait. Dans un club de danse, et plus exactement, dans celui où Tia travaillait en tant que pôle danseuse. Orihime fut agréablement surprise. Elle qui s’attendait à pénétrer un lieu empli d’hommes aux désirs douteux fut prise au dépourvu. Il s’agissait au contraire d’un club à la fois raffiné mais aussi très convivial, aussi bien peuplé d’hommes que de femmes, où seules les artistes pouvaient prétendre être danseuses. Dès l’arrivée, la bande de filles s’était faite remarquer. D’autant plus que Tia était connue, ici. Le patron vint aussitôt les accueillir, un sourire délicat sur les lèvres, et les invita à prendre place autour d’une table. 

« Les amies de mes danseuses sont mes invitées. Surtout s’il s’agit de Tia ! » Avait-il dit.

Alors, elles avaient accepté la proposition et avaient trinqué à leur soirée, juste avant que Tia ne parte se préparer pour commencer son service. Le show de la blonde fut magnifique. En la regardant se mouvoir tout autour de cette fine barre de fer et monter jusqu’à des hauteurs vertigineuses, Orihime avait cru halluciner. Halibel était sensuelle et gracieuse à la fois. Elle tournait autour de ce simple morceau de métal, faisant voltiger ses jambes dans tous les sens, glissait, se balançait, et dansait dans les airs. Chaque figure qu’elle exécutait était plus spectaculaire que la précédente, et elle ne s’arrêtait jamais. Ses muscles se contractaient sous sa peau métissée, son bassin roulait au rythme de la musique, son corps ondulait autour de la barre de danse. Ses yeux verts étincelants, son visage au teint hâlé, ses longs cheveux blonds relevés en une queue de cheval et son visage rayonnant sous les discrets projecteurs. Elle était juste envoûtante. Et lorsqu’elle eut fini, ses amies se levèrent pour l’acclamer en criant, et la salle toute entière suivit. Puis, le patron lui fit la chance de lui donner la fin de la soirée, pour que Tia aille s’amuser et profiter avec ses amies. 

Et ce fut là le commencement véritable de la soirée.

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