Snakes Of Despair

Chapitre 8 : Chapter seven

5655 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour il y a plus de 8 ans

Chapitre 7,

 

Très tôt dans l'après-midi. Le soleil au plus haut dans le ciel ponctué de nuages. Une légère brise, caractéristique de la fin de l'automne. La chaleur printanière, annonciatrice de cette nouvelle saison. La jeune fille s'avança avec hésitation dans le cimetière à demi-ensoleillé. Elle évoluait avec timidité entre les tombes, avant de bientôt se retrouver aux devants d'une pierre tombale qui paraissait récente. Elle s'arrêta quelques instants à quelques mètres, ses yeux orageux grand ouverts, complètement immobile. Le vent souffla avec une certaine force, emportant avec lui quelques faibles pétales arrachés à leur branche.

Orihime finit par s'approcher de la tombe qui se dressait devant elle. Elle tendit la main pour toucher du bout du doigt les indications fatidiques qui s'inscrivaient sur la façade lisse, mais la froideur du marbre glacé l'effraya. Elle eut un mouvement de recul, son corps fut secoué d'un brusque frisson. C'était si froid... Si dur... Si différent de Tatsuki. Elle riva son regard sur le bouquet de fleurs d'un bleu vif qu'elle tenait dans ses mains et souffla, un rictus forcé sur les lèvres : « Je sais que tu n'aimes pas trop les fleurs, mais... Je... »

La jeune fille baissa les yeux. Elle ne pouvait s'empêcher de parler de sa meilleure amie au présent, comme pour se rassurer elle-même, mais la conscience de cette erreur lui fendait justement un peu plus le cœur. Tatsuki n'était pas là. Tatsuki n'était plus là. Et ce constat qu'elle ne pouvait se résoudre à accepter la frappait impitoyablement à chaque seconde qui s'écoulait. Si seulement...

Si seulement...

Orihime s'appliqua à déposer l'encens au pied du monument de pierre, puis déposa le joli bouquet aux côtés des deux autres déjà présents. Sa gorge se serra. Trois bouquets ? Elle devrait en avoir des centaines, des milliers, même. Tatsuki le méritait, plus que personne. Enfin. Elle se releva et fit de son mieux pour se contenir, essayer de sourire, bien consciente au fond d'elle que le résultat était désastreux.

« J'ai intégré un nouveau lycée » lâcha-t-elle soudain, d'une voix presque forcée.

Son cœur se souleva, elle sentit une boule naître au creux de son ventre. L'espace d'un instant, elle s'était imaginée que sa meilleure amie lui répondrait.

« Il est au moins trois fois plus grand que l'ancien ! Je suis sûre que tu t'y plairais... »

Elle s'arrêta, prenant sur elle. C'était dur. Mais elle continua, le corps aussi crispé que le sourire qui fendait son visage :

« Les profs sont agréables. Et, Oh ! Ils ont une incroyable salle réservée aux arts martiaux, et un gigantesque terrain de foot. Si tu voyais ça ! Tu t'y éclaterais... »

Orihime porta sa main libre à son avant-bras opposé et l'empoigna avec force.

« Ah, et aussi ! J'ai été embauchée dans un restaurant pour assurer le service du soir. Ne t'inquiète pas, je n'ai pas postulé pour le poste de cuisinière mais de serveuse, je ne risque pas d'empoisonner les clients... »

La voix de la jeune fille se brisa en prononçant ces derniers mots, et elle baissa la tête. Elle fixa le marbre de la pierre et serra les dents.

« Non..., souffla-t-elle d'une petite voix, en relevant la tête, je ne peux pas. Je... Je n'y arrive pas, Tatsuki. »

Ses ongles s'enfoncèrent violemment dans sa peau, mais elle ne broncha pas, torturée par une douleur bien plus intense que celle-ci.

« Je n'arrive pas à te parler, reprit-elle en souriant avec désolation. Je n'y arrive vraiment pas. Je ne peux pas te raconter ma vie, comme si de rien n'était, comme si tu étais encore là. Excuse-moi, Tatsuki... Si je commençais... Si je commençais à parler, tout deviendrait... Je ne veux pas que ça devienne une routine, je ne veux pas y être habituée, je ne veux pas oublier... C'est si dur... Mais je ne veux pas oublier. Je ne veux pas passer à autre chose. Tu es morte, on t'a tuée... et je ne peux en parler à personne. Ni même à tes parents... Personne ne connaît la vérité. Tu me manques tant... Ma vie n'a plus de sens, sans toi. Et j'ai mal. Oui, j'ai mal, je n'ai jamais eu aussi mal, fit-elle en portant une main au côté gauche de sa poitrine. C'est comme si un insecte me dévorait le cœur à chaque instant qui passe, comme si on me brûlait vif de l'intérieur, comme si je sentais mon être se détruire, petit à petit. Je le ressens, Tatsuki... Je le vis. Chaque battement de mon cœur est devenu une torture... Chaque journée passée sans toi me brise un peu plus... Et je n'en peux plus.»

Elle marqua une pause et se mordit la lèvre inférieure.

« Je t'en prie, excuse-moi, Tatsuki.. Je... J'ai été égoïste. J'ai d'abord pensé que si je me débarrassais de cette douleur, j'irais mieux, et je ne souffrirais plus... Quand je suis avec mes camarades du lycée, ils me font rire, ils me font revivre, et j'étais contente de pouvoir... De pouvoir oublier ta disparition et ma solitude, rien qu'une seconde. Mais je me suis rendue compte que cette douleur qui me ronge est tout ce qu'il me reste. Je n'ai que ça, ma douleur et mes souvenirs. Nos souvenirs, Tatsuki... Tu es morte, et cette douleur est la seule preuve, bien qu’immatérielle, que tu ais été là, avec moi. C'est un peu comme si... Tu vivais à travers moi, à travers ma souffrance. Ce n'est pas cohérent, je sais, mais c'est ce que je ressens. Je dois t'honorer. Cette douleur me tue, je le sais, mais je ne veux pas guérir. Guérir, ce serait oublier... Oublier notre amitié, oublier ce que tu as fait pour moi, oublier ce qu'il s'est passé, t'oublier, toi... Et ça... Je ne peux pas. Je ne veux pas. Mieux vaut mourir. Alors je préfère de loin cette souffrance, ce mal-être continu ou ces cauchemars effroyables qui me hantent... Je préfère être brisée, quitte à ne jamais me relever, qu'oublier. Sans cette douleur, je ne suis plus rien. Sans toi, je ne suis rien. »

Mais à cet instant, la rouquine posa son regard au pied du tombeau, son cœur sembla se briser en mille morceaux, à l'instant même. Elle s'agenouilla, ses prunelles rivées et absorbées par le cadre moyen qui trônait sur un petit balcon surélevé de la pierre tombale. Automatiquement, sa main vint à la rencontre de la photo encadrée et elle écarquilla ses grands yeux ardoise. Elle reconnaissait cette photo. C'était elle qui l'avait prise, il y a un peu plus d'un an.

Le souvenir de cette journée s'imposa instantanément dans l'esprit d'Orihime, à l'instant même où ses doigts caressaient le visage de sa si chère amie. Les larmes se mirent aussitôt à affluer avec violence et silence. Elle s'en rappelait comme si c'était hier.

C'était le Nouvel An. Orihime et Tatsuki avaient passé leur semaine ensemble, jour comme nuit. Les parents de Tatsuki n'ayant pas pu prendre de congés durant la dernière semaine de Décembre, elles s'étaient elles-mêmes occupé de l'ôsôji de la maison des Arisawa, le grand nettoyage marquant la fin d'une année, et le commencement d'une nouvelle. Elles y avaient passé plusieurs jours, mais le résultat avait été plus qu'époustouflant, la décoration plus que parfaite, et les parents de Tatsuki, plus qu'émus.

Elles avaient passé leur journée du Nouvel An à s'amuser ensemble, à rigoler, à se balader, et avaient même participé à un gigantesque concours public de cerf-volant, bien que tous les participants n'étaient que de sexe opposé. Orihime avait passé une semaine, une journée incroyable, elle s'en souviendrait sûrement toute sa vie. Elle n'avait pas dormi de la nuit, préférant aller faire la fête dehors et s'enivrer de la convivialité des rues japonaises le soir du Nouvel An.

A minuit, les deux meilleures amies, vêtues de leurs superbes yukata spécialement achetés par la mère de Tatsuki, qui y accordait une grande importance, s'étaient rendues dans l'un des plus célèbres temples du Japon : le célèbre Fushimi Inari Taisha de Kyoto, avant d'aller assister aux feux d'artifices et aux spectacles de rue. Madame Arisawa les avait d'ailleurs rejoint, accompagnée de son mari, sur une grande colline très prisée, pour y admirer le premier coucher de soleil de l'année. C'était une grande tradition japonaise.

Les vœux avaient été faits, et ce moment s'était avéré être des plus magiques. La photo avait été prise à cet instant, par Orihime. Dans son magnifique yukata bleu marine décoré de fleurs de couleur blanche et rose pâle, Tatsuki était debout, le visage rayonnant des premiers rayons de soleil de l'année. Elle était splendide. Ses courts cheveux noirs ébouriffés de l'époque, ses yeux bleus foncés brillant de cette flamme si particulière qui l'habitait, ses index et majeurs gauches tendus à l'américaine, son visage illuminé par ce sourire empli de sincérité qui étirait ses lèvres, elle était incroyable.

Tatsuki détestait les photos, ce pour quoi il n'y en avait que très peu d'elle, et la plupart, en compagnie d'Orihime. Et pourtant, elle s'était laissée prendre, seule, encouragée par l'humeur positive et l'ambiance festive qui régnaient dans le Japon entier, ce jour-ci. Orihime ne put que s'écrouler. Cette photo respirait la joie de vivre et le bonheur. Ces yeux brillant de milles feux, reflétant l'apparition du soleil à l'horizon, et ce sourire... Ce sourire étincelant... Ce sourire qu'Orihime rêvait de pouvoir revoir un jour...

Cette photo était magnifique. La rouquine l'avait déjà remarqué, à l'époque, mais aujourd'hui, dans ce contexte, elle ne la trouvait que plus belle. C'était comme si, en une seule photo, on pouvait apercevoir toute la Lumière qui émanait de Tatsuki, une Lumière pure et chaleureuse, une Lumière capable d'éloigner les plus ténébreuses des Ombres. C'était comme si l'appareil avait capturé l'essence même de sa meilleure amie. C'était comme si une partie d'elle était ancrée dans cette photo, une partie de son âme. C'était Tatsuki.

Et lorsqu'elle fut frappée par cette constatation, la douleur de la rouquine se décupla pour prendre une ampleur inimaginable. Ses yeux se plissèrent, sa bouche se tordit, et elle se mit à pleurer tout le désespoir qui rongeait son cœur et son être.

« J'essaie, tu sais... Comme tu me l'as appris. J'essaie de rester forte comme tu me l'as appris. J'essaie de ne pas pleurer, comme tu me l'as appris. J'essaie de rester positive et de garder ce sourire, ce sourire que tu disais tant aimer. Mais sans toi, tout est... Tout est si dur... Sans toi, je ne peux pas. Je n'ai jamais été forte. J'ai toujours eu besoin de toi pour vivre. Tu m'as toujours protégée, Tatsuki... »

Elle s'arrêta un instant, les perles d'eau venant s'écraser dans un éclat presque sourd contre le marbre sec.

« Excuse-moi, sanglota-t-elle doucement. Excuse-moi d'être faible. Je suis si désolée, Tatsuki... Je t'en prie, pardonne-moi... »

Ses mains se crispèrent autour de la pierre.

« Je m'en veux... Si tu savais comme je m'en veux. Je ne sais pas comment m'exprimer, comment exprimer cette douleur et ce désespoir que je ressens... Je ne sais pas comment te dire que je suis désolée, comment te dire que je regrette ce qui s'est passé... Je ne sais pas, lâcha-t-elle avant de marquer une pause.Tu m'es apparue... En rêve. 'C'est toi qui m'as tuée', c'est ce que tu m'as dis. Je sais que tu ne le penses pas, car je te connais, et que je veux conserver cette image de toi. Mais tu avais raison. C'est ma faute, tout ça... C'est ma faute et uniquement la mienne. Si je n'avais pas été faible, si je n'avais pas été si naïve... Tu serais encore là ! Ma faiblesse t'a donnée la mort... Alors oui, on peut dire que c'est moi qui t'ai tuée. Et ça me tue... Tatsuki... ça me tue.»

Le flot de paroles s'échappait de ses lèvres au même rythme que ses larmes. Elle ne savait pas vraiment ce qu'elle disait, et pourtant, les mots étaient bien là.

« Sans toi, je ne suis rien... Je n'ai plus rien à faire ici ! Sans toi, à quoi bon vivre ? J'aimerais tant te rejoindre... Si tu savais... Je donnerais tout pour être à tes côtés ! Je donnerais tout pour prendre ta place Là-Haut! Pour te laisser profiter de ce monde que je hais, ce monde qui de ta famille t'a prise, ce monde qui m'a arrachée à toi. Pourquoi ne m'as-tu pas prise avec toi, Tatsuki ? Tu es partie, et tu nous a laissé, tes parents, ta famille et moi, ici... Le vide que tu as laissé... Le vide que ta disparition a creusé dans mon cœur... Tatsuki, il ne sera jamais comblé ! »

Elle se pencha vers le sol et cogna son front contre le marbre gelé, tout en frappant le sol de ses poings abîmés.

« Pourquoi es-tu partie ? Pourquoi ne reviens-tu pas ? Pourquoi t'être sacrifiée ? Pourquoi t'être sacrifiée pour moi, Tatsuki ? Pourquoi ? Cria-t-elle. Tu devrais encore être là ! Tu devrais encore faire partie de ce monde ! Pourquoi n'es-tu pas avec moi ? Tatsuki... Ô, Tatsuki... Tu devrais être là ! Tu devrais être là ! Tu devrais... être là... »

Dans un geste de désespoir fou, elle se mit à tirer violemment sur ses cheveux. La douleur de sa contusion se réveilla, mais son affliction était telle qu'elle la sentit à peine.

« Tu avais juré, Tatsuki ! Tu te rappelles de ce jour, hein ? Tu avais promis que tu resterais près de moi ! Tu avais promis de me protéger ! Tatsuki... Alors pourquoi ? S'écria-t-elle. Pourquoi m'as-tu laissée ? Pourquoi toi ? »

Elle s'arracha les cheveux.

« J'aurais dû être à ta place...»

Elle resta ainsi pendant un long moment, agenouillée, la tête contre le marbre, aux devants de la pierre tombale de celle qui venait de quitter cette terre.

« Je suis maudite, Tatsuki... Maudite... »

Puis, au bout d'une quinzaine de minutes, elle se redressa et se arqua, le visage tourné vers les Cieux. Elle plongea ses yeux gonflés et injectés de sang dans le ciel légèrement couvert et souffla d'une voix exténuée :

« Kami-sama, douchite ?* »

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Dimanche 7 Avril.

Orihime se laissa choir avec épuisement sur l'un des fauteuils provenant de son ancien appartement. Elle se laissa aller sans la moindre retenue et poussa un long soupir. Elle était épuisée, esquintée, complètement usée. Cette première semaine de cours l'avait achevée, sans qu'il n'y ait pourtant de raison apparente.

La jeune fille riva ses yeux sur le plafond de son habitation. Que pouvait-il lui arriver de pire maintenant ? Elle n'avait plus rien à perdre. Maintenant que Tatsuki n'était plus là... Dès lors qu'elle rentrait chez elle, Orihime se retrouvait confrontée à ses problèmes, à la disparition de sa meilleure amie, à une implacable solitude.

La solitude, elle y était habituée. Depuis la mort de son frère, elle s'y était faite. Ce n'était pas vraiment ça. Mais le creux qu'avait laissé Tatsuki Arisawa dans sa personne toute entière ne cesserait jamais de la ronger et ça, c'était encore plus dur et douloureux. Elle n'avait aucun mot pour décrire ce qui lui arrivait, ce qu'elle ressentait. Et maintenant, elle se retrouvait seule face à tout. Seule face à elle-même.

Presque inconsciemment, Orihime passa sa main sur sa tête et se tâtonna le crâne, à la recherche de sa cicatrice qui avait manqué légèrement saigné hier. Ses pensées se mirent à dériver et bientôt, celles-ci la menèrent contre son gré au sujet qu'elle n'arrivait pas à traiter : les parents de Tatsuki. Son cœur se serra à cette mention silencieuse, et elle se mordit la lèvre inférieure. Elle n'était toujours pas parvenue à trouver le courage d'aller les voir. Comment leur faire face, alors qu'elle était à moitié responsable de sa mort ? Comment partager leur souffrance, alors qu'elle en était la cause ? Comment pouvait-elle être sincère avec eux, alors qu'elle ne pouvait même pas leur révéler la vérité sur la mort de leur fille ?

Mais alors qu'elle se mettait à triturer nerveusement l'extrémité de son haut de pyjama, une sonnerie musicale retentit, coordonnée à la vibration de l'instrument électronique sur la petite table de son salon. Elle s'empara de son téléphone portable et considéra le nom qui s'affichait sur l'écran rectangulaire : Rangiku.

Orihime hésita d'abord. Était-ce le bon choix ? Elle ne pouvait se permettre de tisser de nouveaux liens. Elle ne pouvait pas... Il ne fallait pas... Le malheur la rattraperait encore et toujours, ça, elle le savait.

Malédiction.

Mais dès lors qu'elle entendit la voix enjouée de son amie aux cheveux blonds vénitiens, sa résolution s'évapora aussitôt.

« Allô ? Rangiku ?...... Euh, oui, ça va. Et toi ? Ton week-end se passe bien ?........ Vraiment ? De la mayonnaise et de la crème de marron ?...... Du nutella ? Je n'en reviens pas ! Tu es vraiment une génie, Rangiku !....... Il faut absolument que je goûte ça. ….... Eto... Non...... Mon adresse ? Pourquoi ?...... Et bien, j'habite au numéro 18 de la rue *****...... Oui, ce n'est pas loin de la gare et du supermarché...... Renji ? Mon voisin ? Mais il ne prend jamais le même chemin....... Ah bon ? Vraiment ?....... C'est bon à savoir. »

Elle se tut durant un long moment. Elle baissa les yeux et agrippa le bas de son tee-shirt, froissant légèrement le tissu en coton.

« Une sortie? Euh... Je.... Je ne sais pas si c'est une bonne idée........ Tu sais, j'ai énormément de travail et-...... Ah oui, c'est vrai, nous n'avons pas encore de devoir...... Non, mais c'est....... Non, je ne te fuis pas ! Je........ C'est juste que.....»

Elle eut un sourire. Toutes ses mauvaises pensées venaient d'être balayées d'un revers de la main.

« Comment ça, tu savais ? …...... Oh ! Je suis si prévisible que ça ?........ Il va falloir que je travaille un peu sur moi-même......... Je sais...... Oui, tu as raison...... C'est l'Hanami, après tout...... Je..., Merci, Rangiku...... Pourquoi ? Et bien... Parce que. Je ne sais pas, il fallait que je te remercie......... Oui......... Bien évidemment !........ Quoi ? Dans dix minutes ? Mais je ne suis-........ »

De nouveau, elle eut un sourire.

« Oui. Je t'attends. » Et sur cette dernière réplique, elle raccrocha.

Orihime put également constater que Rangiku était très ponctuelle. Car exactement dix minutes après son coup de fil, elle sonnait à la porte de son amie. La rouquine s'était évidemment hâtée de se préparer et lorsqu'elle lui ouvrit la porte, la blonde vénitienne fut surprise de la trouvée tout à fait parée.

- Tu t'es douchée, au moins ? S'exclama-t-elle, étonnée que la rouquine soit déjà prête.

- Évidemment, répondit la concernée avec un air satisfait exagéré.

- Tu as mangé ? Enchaîna l'arrivante.

Orihime fit un sourire gêné et se gratta la tête.

- Orihime, gronda Rangiku en se penchant sur elle d'un air sévère. Tu n-

Mais cette dernière la coupa en la contournant. Elle sortit de son studio et s'adressa à son amie restée à l'intérieur : « Allez, on y va ! »

Rangiku détailla de ses fins yeux la jeune fille qui se tenait sur sur la devanture de l'appartement. La blonde vénitienne n'avait pas connue Orihime dans un autre état que celui-ci, mais il était évident qu'elle n'avait pas toujours été comme cela. Ses longs cheveux roux reflétaient son manque de préoccupation pour elle-même, et même si elle avait décidé de masquer son corps sous un long gilet de maille bleu marine, il était clair que cette maigreur dont elle était victime n'était ni saine ni naturelle.

Rangiku plissa les yeux. Même si le sourire qu'elle lui adressait était sincère, la lueur qui brillait dans le fin fond des prunelles de son amie ne pouvait la tromper. Elle était torturée, et ce, bien plus profondément que ce à quoi elle s'attendait. La blonde vénitienne fronça légèrement les sourcils, peinée et blessée. Orihime...

Lorsqu'elle croisa les yeux de la concernée, Rangiku soupira, avant de suivre ses traces.

« Ok, allons-y. »

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- Ah, elles sont là !

- Bah enfin ! C'est pas trop tôt ! On a failli partir sans vous !

- Tu sais comme moi qu'on les aurait attendues, Hiyori.

- La ferme.

Rangiku et Orihime s'avancèrent vers le groupe qui patientait aux devants des guichets de la gare et saluèrent leurs amis. Ah oui, elle n'avait pas menti, toute la bande était réunie, et au grand complet. Nemu, Kira, Hiyori, Shinji, Toshiro, Yumichikka, Ikkaku, Tia, Renji et Hisagi. S'ajoutent à cela les deux jeunes demoiselles qui venaient de faire leur apparition. Oui. Au total, ils étaient douze.

- Tout le monde est prêt ? S'enquit Tia d'une voix portante.

- On dirait bien, lâcha Ikkaku.

- Alors on y va ! Direction le Shinjuku Gyoen !

- Le quoi ? Répéta Orihime.

- Le Shinjuku Gyoen...

- Sérieux ? S'écria Renji. Tu n'y es jamais allé ?

- Euh... Non..., reprit-elle, gênée de voir que visiblement, elle était la seule à ne pas connaître.

- C'est un superbe parc national en plein milieu de Tokyo, affirma Kira.

- Oh ! Vraiment ? S'exclama Orihime, les yeux brillants d'excitation. On va à Tokyo ? Je n'y vais jamais presque jamais.

- Rangiku ne te l'avait pas dit ? Demanda Toshiro.

- Non, elle avait préféré garder la surprise.

- C'est vraiment magnifique là-bas, enchaîna Hisagi, surtout pour l'Hanami, c'est juste incroyable. Tu verras, tu vas adorer.

Et sur ce, la petite troupe s'engagea tranquillement dans les sous-sol de Karakura, avant de ressurgir à la surface, environ une demi-heure plus tard. Lorsqu'elle ressortit à l'air libre, Orihime ouvrit grand ses yeux brillants comme ceux d'un enfant, admirant la si particulière ville mondiale de Tokyo. Mais lorsqu'elle pénétra avec ses amis dans ledit Shinjuku Gyoen, ses yeux manquèrent de sortir de leurs orbites tant elle fut surprise.

Sa bouche s'ouvrit de stupéfaction, elle eut un hoquet de stupeur. Mais où avait-elle atterri ? Les mains d'Orihime tombèrent le long de son corps. Elle n'en croyait pas ses yeux. Était-elle arrivée au Paradis ? Un grand lac, calme, apaisant et lisse, s'étendait sous son regard ébloui, reflétant ainsi l'éclat du soleil qui trônait dans son ciel bleu dégagé. Le lac en question était bordé par des centaines d'arbres différents et des tas de plantations plus belles les unes que les autres. Une bâtisse traditionnelle semblait se dresser un peu plus loin, dominant le parc de par son vif toit rouge.

Orihime n'avait jamais rien vu de tel. La plupart des végétaux étaient en pleine floraison, révélant au grand jour l'éclat incroyable de leurs splendides fleurs. Du vert, du rouge, du violet, et même du blanc, en passant par toutes les nuances possibles de rose. Le vent soufflait légèrement, apportant avec lui des centaines d'arômes différents, enivrant au passage les narines de la rouquine des effluves sucrées du parfum des fleurs. Ladite rouquine n'avait jamais rien vu d'aussi beau, d'aussi magnifique, d'aussi... extraordinaire. Il n'y avait absolument aucun terme pour décrire ce lieu à sa juste valeur. C'était... C'était... C'était tout bonnement divin.

Une brise un peu plus forte vint caresser le visage de la lycéenne, faisant tanguer les plus faibles des branches. Les pétales de cerisier se mirent à voleter dans l'air en grande quantité, envahissant le champ de vision de la jeune Inoue. Son souffle se coupa par la beauté du spectacle et presque inconsciemment, elle tendit la main vers l'infinité de pétales qui se dirigeaient vers elle.

Lorsque ses doigts effleurèrent la surface à l'exquise douceur des pétales, elle se sentit transportée et ses pensées dérivèrent automatiquement sur Tatsuki. Sans même qu'elle ne puisse rien contrôler, les larmes lui montèrent aux yeux, autant par l'émotion que par le souvenir de sa si précieuse amie. Mais elle vit une jeune femme entrer calmement dans son champ de vision et venir se poster à ses côtés.

« C'est beau, n'est-ce pas ? » fit la nouvelle arrivante de sa voix mature.

Pour une raison qui lui échappait, la rouquine ne prit même pas le temps d'essuyer les larmes qui ruisselait sur son visage, ni même de considérer la splendide asiatique au regard émeraude qui l'avait rejointe. C'était comme si... Elle n'en avait pas besoin.

- Oui, c'est incroyable, répondit-elle dans un souffle. Ces bourgeons qui semblent s'ouvrir sous nos yeux, c'est...

- L'Esprit du Printemps, lâcha la jeune Kurosutchi d'un air tout aussi évasif.

- L'Esprit du Printemps ?

- Oui, l'Esprit, l'Essence de l'Hanami, reprit sa camarade en tendant la main vers les pétales roses, exécutant le même geste qu'Orihime quelques instants auparavant.

Elles se turent toutes deux quelques instants. Nemu et Orihime n'avaient encore jamais eu de réelle conversation ensembles. Elles ne se connaissaient pas, ne s'étaient jamais retrouvées seules l'une avec l'autre, n'avaient jamais vraiment eu le temps de se découvrir. Et pourtant, aujourd'hui, les cheveux aux vents, un air de bonheur triste sur le visage, les yeux rivés sur cet incroyable spectacle qui prenait scène sous leurs yeux, elles semblaient incroyablement proches et similaires. Toutes deux absorbées par cette même nostalgie prenante, elles semblaient comme unies l'une à l'autre par une sorte de force étrangère.

Orihime ferma ses yeux quelques instants et huma l'air fleuri qui planait dans l'atmosphère. Ah oui, c'était vrai. L'Essence du Printemps... Elle en avait même oublié la signification. Nemu avait raison. Elle se rappelait, maintenant. La floraison, les bourgeons, le soleil derrière les nuages. L'Espoir. La Vie. L'Esprit de l'Ô Hanami.

La Renaissance. 

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Kami-sama, douchite* = Dieu, Pourquoi ?

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