Sentiments et Ressentiments
Chapitre 6 : Inquiétude et incompréhension
10127 mots, Catégorie: G
Dernière mise à jour 10/11/2016 05:49
Chapitre 4 : Inquiétude et incompréhension.
En ouvrant les yeux le lendemain matin, Karin vit avec peine qu'il était seulement 7h30. Elle se leva doucement, encore dans les vapes et ouvrit son armoire. La jeune fille prit une robe noire toute simple, des sous-vêtements et se rendit dans la salle d'eau pour se laver. Elle fit une toilette rapide et s'habilla lentement, ses gestes encore hésitants.
Une fois habillée et coiffée, la brune descendit doucement les marches pour ne pas réveiller son frère et sa femme qui dormaient encore. Elle prit un rapide petit déjeuner constitué d'un verre de lait et d'une pomme puis enfila ses chaussures et un manteau pour sa sortie matinale.
Ce qu'elle n'avait pas prévu, c'était que le duc avait eu la même idée qu'elle car elle l'avait aperçu derrière un buisson. Espérant qu'il ne l'avait pas vue, Karin fit volte face et chercha à s'éloigner de lui rapidement.
Mais que faisait-il là ? Karin ne savait pas que le jeune seigneur était resté la nuit dernière ! Cependant, à peine avait-elle quelques pas qu'il l'appela doucement, comme pour ne pas l'effrayer.
- Bonjour, Mademoiselle Karin.
À l'entente de cette voix douce et suave, la jeune fille se raidit. Elle savait que c'était trop beau mais elle n'avait pu s'empêcher d'espérer. Elle se retourna doucement vers le duc et répondit d'une voix sans timbre :
- Bonjour, Votre Grâce.
Toshiro fronça les sourcils quand il entendit le ton de sa voix. On aurait dit qu'elle avait voulu l'éviter mais, qu'en jeune fille bien élevée, elle s'était sentie obligée de lui répondre. Cela ne plaisait pas du tout au jeune homme mais ne montra rien de sa contrariété.
Vraiment, quelle fille étrange, songea-t-il mi-amusé, mi-agacé. Un jour, elle lui parlait bien et le suivant, elle cherchait à l'éviter. Mais que se passait-il dans sa tête ?
Karin et le duc firent quelques pas en silence, l'un à côté de l'autre. La brune était mal à l'aise, elle ne savait pas comment se comporter avec lui. Puis le jeune seigneur prit la parole, espérant... il ne le savait pas lui-même :
- Avez-vous passé une bonne nuit ?
- Courte mais bonne, et vous ?
- La même.
La jeune fille se décida enfin à lui parler normalement mais Toshiro la devança :
- J'imagine que vous devez être assez tendue par rapport au bal qui a lieu la semaine prochaine dans mon château.
Karin poussa un soupir, ce qui rendit le jeune homme perplexe. Elle ne voulait donc pas parler avec lui, alors. Cela le blessa plus qu'il ne l'aurait imaginé. Mais quel pouvoir avait-elle sur lui pour qu'il s'inquiète à ce point ? La jeune fille s'arrêta et le regarda dans les yeux puis répondit à sa question avec une légère pointe d'humour :
- On ne peut rien vous cacher... Oui c'est vrai mais c'est parce que je ne sais pas à quoi m'attendre, continua-t-elle après une légère interruption.
- Il est vrai que la première fois, c'est toujours impressionnant, mais je ne doute pas un instant que vous allez y arriver, assura-t-il avec une lueur étrange dans ses prunelles turquoises.
Tous deux partirent s'asseoir sur un banc non loin de là, ce même banc où ils s'étaient rencontrés par hasard, le soir de son arrivée chez son frère.
- Qu'est-ce qui vous fait dire cela, Votre Grâce ? Possédez-vous des pouvoirs de médiums ? le taquina-t-elle.
- Qui le sait ?
La réponse du duc fit sourire Karin qui se tenait les mains. Comme c'était étrange ! Elle avait l'impression qu'ils se connaissaient depuis toujours quand ils parlaient de cette manière.
Toshiro se colla au dossier et regarda attentivement la jolie brune. Le sentiment étonnant qui l'envahissait quand il se trouvait avec elle, il ne savait pas de quoi il s'agissait mais une chose était sûre, il ne le regrettait absolument pas.
- Vous souvenez-vous ? s'enquit soudain le jeune homme.
- De quoi parlez-vous ?
- De ce banc, de cet endroit ?
La jeune fille esquissa un léger sourire. Comment aurait-elle pu oublier ? C'était ici qu'elle avait ressenti pour la première fois des choses étranges.
- Bien sûr, répondit-elle en s'efforçant de cacher son trouble naissant à ce souvenir. C'est ici que nous avons vraiment parlé pour la première fois.
- En effet, confirma le duc.
Un silence apaisant s'installa. Karin ferma les yeux comme pour profiter pleinement de ce calme. Mais au fond d'elle, c'était une vraie tempête de sensations. Le fait d'être aussi proche du duc et d'entendre sa voix la mettait dans tous ses états.
Son cœur battait la chamade et la jeune fille se sentait mal à l'aise. « Karin reprends-toi, espèce d'idiote ! » s'admonesta-t-elle durement. La brune était complètement perdue et se demandait si elle ne devait pas éviter le duc pour éviter tout cela.
Ignorant totalement ce qui se passait dans la tête de Karin, Hitsugaya la regardait du coin de l’œil. La voir ainsi au naturel lui faisait éprouver des émotions troublantes et inopportunes. Il n'avait vraiment pas besoin de tout cela. Il fallait vraiment qu'il reprenne ses esprits, il était fiancé quand même !
Orihime nettoyait la vaisselle du petit déjeuner quand elle remarqua le duc et sa belle-sœur en train de discuter dans le jardin. Elle ne put s'empêcher d'esquisser un sourire à cette vue. Karin semblait un peu – beaucoup – mal à l'aise et la rousse ne savait que trop pourquoi. Elle avait eu 18 ans aussi... Ah l'amour, soupira-t-elle intérieurement. Il apparaissait toujours au moment où on s'y attendait le moins.
Si seulement il n'était pas fiancé avec cette idiote, songea-t-elle avec tristesse. Mais elle ne pourrait rien y changer, le seul qui pouvait était le duc lui-même. Même si c'était quasiment impossible de revenir sur un engagement publiquement établi...
Perdue dans ses pensées, la jeune femme n'entendit pas son mari arriver.
- Bonjour, Orihime, susurra Ichigo d'une voix douce.
La rousse sursauta, surprise. Elle se reprit et le salua à son tour avec un beau sourire.
- Bonjour, Ichigo.
Le jeune homme la trouvait étrange. Elle n'avait pas l'air d'être dans son état normal, on aurait dit que quelque chose la tracassait.
- Tout va bien ? Tu sembles inquiète...
- Oui, ne t'en fais pas, c'est juste que Karin ne semble pas dans son assiette, en ce moment, dit la jeune femme dans un souffle. Je pense que sa sœur lui manque terriblement...
- Et cette absence de nouvelles ne me dit rien qui vaille... la coupa Ichigo. Yuzu donnait des nouvelles à Karin environ toutes les deux semaines et là d'un seul coup, plus rien depuis deux mois !
L'inquiétude pouvait se lire aisément sur le visage du frère aîné des jumelles. Sa jeune sœur semblait avoir disparue de la surface de la Terre et il ne pouvait rien faire. Orihime passa sa main doucement sur le front d'Ichigo, comme pour enlever les plis qui le marquaient.
- C'est vrai que c'est troublant, acquiesça sa femme. Mais pour le moment, on ne peut rien faire d'autre que d'attendre, comme Karin...
Le régisseur ne répondit pas. Il avait vu par la fenêtre une chose qui ne lui plaisait pas trop. Qu'est-ce que Karin faisait avec le duc dehors ? Certes il savait que son seigneur était un homme d'honneur mais les mauvaises langues ne pourraient s'empêcher de répéter la nouvelle.
- Dis-moi, Orihime ? Tu sais depuis quand Sa Grâce et Karin sont sortis ?
- Pas plus de deux heures, en tout cas, répondit-elle en rangeant la dernière assiette dans le placard. Je l'ai entendue descendre, ce matin et elle n'est pas sortie tout de suite. Ce sont les racontars qui te préoccupent ?
- En effet, confirma Ichigo. Qui sait ce que les gens pourront encore lancer comme rumeur...
Le couple partit dans le salon et la jeune femme prit place dans le canapé tandis qu'Ichigo se postait à la fenêtre. Son regard noisette ne lâchait pas sa sœur et le jeune duc. Ils paraissaient bien s'entendre tous les deux, songea-t-il avec mélancolie. Le roux soupçonnait fortement Karin de s'être entichée du duc malgré elle.
Seulement était-elle au courant ? Lui connaissait les symptômes car il avait eu les mêmes lors de sa rencontre avec celle qui allait devenir sa femme, mais elle ? Certes elle avait un caractère fort mais personne n'était à l'abri de tomber amoureux... Et surtout de la mauvaise personne !
La voix douce de sa moitié interrompit le fil de ses sombres pensées :
- Ichigo ! Qu'est-ce qui t'arrive ?
Il se tourna vers elle, ne sachant que dire.
L'inquiétude dans sa voix, ses perles grises pleines de doutes... Bon sang ! Voilà ce qu'il voulait éviter !
En voyant que son mari gardait le silence, Orihime ne put empêcher son inquiétude d'augmenter d'un cran. Elle ignorait ce qui tracassait Ichigo de cette façon mais elle détestait le voir comme cela.
- Ne t'en fais pas trop, Orihime, la rassura-t-il avec un petit sourire crispé. Je me charge de tout... D'accord ?
Toujours à tout vouloir porter sur ses épaules ! La jeune femme poussa discrètement un soupir de frustration. Quelle tête de mule, cet Ichigo ! Sa grossesse ne la rendait pas incapable pour autant, elle se savait capable d'encaisser.
- Tu sais, il faut parfois savoir demander de l'aide, tenta-t-elle de le raisonner. On ne peut pas toujours tout régler tout seul, Ichigo.
- Je sais bien mais laisse-moi faire pour le moment.
- D'accord, soupira la jeune femme. Mais tâche de garder ton calme, Ichigo.
- Je suis toujours calme, Orihime, contra-t-il avec un sourire plus doux.
Le frère de Karin s'éloigna de la fenêtre et rejoignit sa tendre moitié sur le canapé. Il passa un bras autour de ses épaules et la tint serrée contre lui.
- On verra bien ce que l'avenir nous réserve, dit doucement Ichigo.
Sa femme acquiesça de la tête. Personne ne pouvoir prévoir ce qui allait arriver.
Pendant ce temps, à l'extérieur de la maison, Karin et le duc se baladaient en discutant de tout et de rien même si la brune ne se sentait pas encore vraiment à l'aise. La jeune fille réprima tout à coup un frisson et son compagnon s'en rendit compte aussitôt.
- Je crois qu'il est temps de rentrer à l'intérieur, à présent, fit remarquer le jeune homme aux cheveux d'argent. Vous êtes transie...
- Vous avez raison, Votre Grâce, accepta Karin en se frottant les bras. La température s'est rafraîchie depuis quelques minutes.
Ils prirent tous deux le chemin de la maison en silence. Karin se posait beaucoup de questions et le nombre augmentait d'heure en heure. Elle jeta un coup d’œil à celui qui l'accompagnait et vit qu'il ne craignait pas vraiment le froid. Vraiment résistant, comme garçon, songea-t-elle amusée.
En tout cas, elle ne regrettait vraiment pas ce moment passé avec le duc Hitsugaya. La jeune fille se morigéna intérieurement, elle n'avait pas le droit de penser de cette façon. Il était déjà promis à une autre mais en sa présence, elle se sentait toujours fébrile. Que lui avait-il fait ?
Inconscient des questions qui assaillaient Karin, Toshiro essayait de répondre aux siennes. Plus il fréquentait la sœur cadette de son régisseur, plus il l'appréciait. Ce qui était vraiment étonnant de sa part, lui qui n'aimait pas trop la compagnie des femmes en général. Peut-être que celle-ci n'était pas comme les autres jeunes filles qu'il pouvait rencontrer à la Cour... Sa présence lui faisait du bien, elle était rafraîchissante. « Mais à quoi je pense, là ? Ce n'est pas le moment de divaguer, franchement ! » se blâma-t-il sèchement.
- Tout va bien, Votre Grâce ? Vous semblez soucieux, s'inquiéta Karin.
La voix de la jeune fille l'avait coupé dans ses pensées. Le jeune duc reprit ses esprits et lui répondit d'une voix neutre :
- Oui, ne vous en faites pas. Juste des soucis dont je me passerais bien...
- Je comprends.
Et pas des moindres : il s'agissait ni plus ni moins de son mariage ! Comment faire pour y échapper ? Toshiro était dans une impasse.
Puis avant de pouvoir dire quoi que ce soit, les voilà arrivés devant la porte de la maison des Kurosaki. Le duc laissa la sœur d'Ichigo entrer la première – galanterie oblige ! – et referma la porte derrière lui. Avisant son visage, il put noter qu'elle avait repris des couleurs. Mais sans qu'il ne puisse le prévoir, il se retrouva emprisonné par les prunelles sombres de Karin qui le regardait au même moment. L'arrivée de son régisseur rompit le sortilège.
- Bonjour !
Karin sursauta en entendant la voix de son frère. Quelle idiote, elle ne l'avait pas entendu s'approcher ! « C'est ça de se perdre dans les beaux yeux turquoises de ce cher duc » se moqua son for intérieur. Elle ignora cette voix mesquine et se concentra sur Ichigo qui la regardait d'un drôle d'air.
- Pourquoi me regardes-tu comme ça, Ichi-nii ? s'impatienta la brune.
Elle ne voulait surtout pas qu'il lui fasse remarquer son absence – trop humiliant.
- Pour rien, Karin, soupira le roux, habitué à son caractère difficile.
Toshiro ne disait rien mais était amusé par la scène qui se jouait sous ses yeux. La sœur de son employé avait vraiment un caractère changeant, tout de même. Elle pouvait être douce et de compagnie agréable mais pouvait tout aussi bien s'énerver assez rapidement. Son frère n'était pas au bout de ses peines avec la jeune fille, il esquissa un petit sourire moqueur alors qu'il remettait son manteau à la maîtresse de maison.
- Décidément ces deux-là seront toujours comme chien et chat, fit soudain Orihime qui était revenue vers lui.
- En effet, acquiesça le duc. Mais on ne peut pas ignorer le lien puissant qu'il y a entre eux, vous ne trouvez pas ?
- Tout à fait d'accord, Votre Grâce.
La jeune femme frappa dans ses mains et la dispute du frère et de la sœur cessa instantanément, à la surprise de Toshiro.
- Je crois que ça suffit, trancha Orihime qui ne pouvait retenir un sourire. Vous continuerez vos gamineries plus tard, le déjeuner est prêt.
- Gamineries ? répéta Ichigo, les sourcils froncés – plus que d'habitude. Tu n'y vas pas un peu fort, Orihime ?
Celle-ci se retint de rire en mettant une main devant sa bouche alors que le duc partait dans la salle à manger accompagné de Karin. Elle les vit partir ensemble et son regard se fit pensif tout à coup. Ichigo remarqua ce changement d'attitude et s'en inquiéta :
- Qu'est-ce qui se passe ? Ça va ?
- Oui, ne t'en fais pas, Ichi, répondit-elle distraitement. Je me disais juste que le duc et Karin s'entendaient bien, c'est tout.
- Je l'avais remarqué aussi, confirma son mari. Bon, on les rejoint ?
La rousse hocha la tête en signe d'assentiment. Ils purent remarquer que la discussion allait bon train entre la brune et le jeune seigneur.
- Je vais chercher le déjeuner, je reviens, annonça Orihime qui filait dans la cuisine.
Karin avait vu le sourire plein de signification de sa belle-sœur et se retint de rougir. Elle ne savait pas vraiment ce qu'Orihime avait en tête mais elle se doutait que ce n'était pas innocent. La jeune fille posa ses prunelles noires sur le duc qui parlait maintenant avec son frère.
Le petit sourire qu'elle voyait flotter sur ses lèvres la troublait et elle sentit ses joues chauffer. Karin baissa la tête rapidement de peur que quelqu'un ne remarque son émotion. La présence du duc n'était vraiment pas bénéfique pour sa santé mentale, songea-t-elle désabusée.
- Tout va comme tu veux, Karin ? lâcha soudain la voix d'Ichigo qui la fit sursauter.
Karin se reprit immédiatement et répondit à son frère sans rien montrer de ce qu'elle éprouvait :
- J'étais perdue dans mes pensées, tout va bien.
Ichigo posa la tête sur ses mains et fixa sa sœur cadette d'un regard soupçonneux.
- Il me semble que ça t'arrive souvent, ces derniers temps, lui fit-il remarquer.
- Et alors ? Ça ne t'arrive jamais, toi ? Laisse-moi en douter, balança Karin, à bout de patience.
Le roux leva les yeux au ciel devant la réponse pour le moins énergique de la jeune fille. Il ne savait pas trop encore pourquoi mais sa sœur avait changé, depuis quelques temps. Elle était encore plus susceptible qu'avant, c'est peu dire.
Avant qu'Ichigo ne put répondre, Orihime arriva avec l'entrée et la déposa sur la grande table. Elle n'ignorait pas qu'elle avait interrompu une énième dispute mais cela lui était égal. Son regard gris se posa sur le jeune duc qui ne loupait pas une minute de la scène. D'après ce qu'elle pouvait remarquer, il s'en amusait. L'étincelle dans ses yeux de glace ne trompait pas.
- Ichigo, laisse Karin tranquille, soupira Orihime en s'asseyant. Elle parlera quand elle en aura envie.
Karin adressa à la femme de son idiot de frère un sourire reconnaissant. Les questions de son frère mettaient sa patience à lourde épreuve et il ne l'ignorait pas. Certes elle reconnaissait qu'elle avait un caractère difficile et que celui de Yuzu était plus doux, mais quand même.
Son impatience devait se voir sur son visage car Hitsugaya lui jeta un regard où elle pouvait discerner une lueur taquine. Elle évita son regard transperçant et se servit son entrée. Entre deux bouchées, Karin vit qu'Ichigo ne la quittait pas des yeux. Elle retint un soupir d'impatience et décida de l'ignorer.
Toshiro comprenait dans un certain sens l'impatience de la jeune fille en face de lui. Il était vrai que son aîné la fixait sans cesse et que cela pouvait être déstabilisant, voire énervant.
Ce côté de son caractère ne le laissait pas indifférent, il s'en amusait. Posant ses couverts, il vit soudain Karin baisser la tête. Elle avait mangé en gardant son visage baissé et il en ignorait la raison. Était-ce lui qui la mettait mal à l'aise ? Ce n'était pas son intention, cependant...
Une heure et demie plus tard alors que le carrosse le ramenait chez lui, Toshiro ne savait pas trop quoi penser de la jeune fille. Elle le déconcertait et il n'aimait pas ça. Le fait qu'elle ait autant de pouvoir sur lui l'intriguait et l'énervait à la fois.
La même idée lui revenait encore : la jeune Kurosaki devait lui avoir jeté un sort. Le duc n'était pas le genre d'homme à se laisser troubler pas une fille, aussi étonnante soit-elle. L'impassibilité qui le définissait d'ordinaire était mise à rude épreuve avec la jolie brune. Bon sang ! Pourquoi ne pouvait-il pas s'empêcher de penser à elle ? Elle ne quittait quasiment jamais ses pensées et il commençait vraiment à se poser des questions sur les raisons d'un tel comportement.
Le carrosse s'arrêta et il passa la tête par la petite fenêtre. Le jeune seigneur constata avec étonnement qu'il était déjà chez lui. À peine était-il descendu du carrosse que le majordome vint à sa rencontre.
- Monseigneur ! Vous voilà ! s'écria Shin en reprenant son souffle.
- Que se passe-t-il ?
Le fidèle domestique ne répondit pas tout de suite, le temps que son souffle redevienne normal. Il était vraiment affolé, songea son jeune maître.
- Votre bureau a été fouillé ! Je n'ai touché à rien jusqu'à votre arrivée mais il faut que vous voyez ça !
Hitsugaya écarquilla les yeux à cette nouvelle inquiétante. Qui pourrait vouloir s'intéresser à... ? Le jeune homme espérait que ce n'était pas ce à quoi il pensait et il courut jusqu'à son bureau sans prendre le temps d'enlever son manteau. Ce qu'il vit en ouvrant la porte le laissa pantois.
Tous les papiers encore sur son bureau hier après-midi étaient éparpillés sur le sol. Les tiroirs avaient été forcés et tout ce qu'ils contenaient avait subi le même sort. Qui avait pu bien faire une chose pareille ? Et surtout, que cherchaient les voleurs ? Sans perdre de temps, Shin et son seigneur ramassaient tous les documents et les posaient sur le bureau ducal.
Une feuille froissée attira l'attention du duc. Il ne l'avait jamais vu auparavant et se demandait ce que ça pourrait être. En déchiffrant le message, le sang de Toshiro se glaça. Qu'est-ce que ça voulait dire ?
Une personne n'apprécie pas votre comportement...
Cessez immédiatement de faire l'idiot ou...
Tout finira mal... pour vous !
Un accident est si vite arrivé.
Ce message n'est pas une farce, méfiez-vous !
Le Diable n'est jamais loin...
Les lettres étaient collées, celui qui avait envoyé ce message avait été assez intelligent pour ne pas l'écrire à la main.
- Monseigneur, que se passe-t-il ? s'inquiéta le majordome en le voyant immobile, les yeux rivés sur une feuille.
Au son de la voix de son domestique, le duc Hitsugaya reprit ses esprits et lui demanda, avec un calme qui n'était qu'apparent :
- Dites-moi, Shin... Savez-vous si quelqu'un a pénétré dans le château pendant mon absence ?
L'homme réfléchit un instant et lui répondit, désolé :
- Non, Monseigneur... Personne n'est venu rendre visite à Votre Grâce...
Le majordome s'interrompit soudain, un souvenir troublant lui revenant à l'esprit. Comment avait-il pu oublier cet événement ?
- Je me rappelle maintenant qu'un homme masqué est venu cette nuit...
- Que voulait-il ? le coupa le duc agacé.
- C'est lui qui a dévasté votre bureau, Monsieur, annonça le majordome tendu. Aussitôt qu'il s'est aperçu de ma présence, il s'est enfui, ajouta-t-il en terminant de ramasser les feuilles éparpillées. Je n'ai pas pu savoir ce qu'il cherchait.
Quelque chose ne tournait pas rond, le duc en était certain. Que signifiait tout cela ? Toshiro l'ignorait mais il le découvrirait, d'une façon ou d'une autre. Il s'en faisait le serment.
Sur son lit, Karin songeait au duc, une fois de plus. Elle devait s'avouer qu'elle ne comprenait vraiment son comportement avec lui. La brune ne pouvait nier qu'elle l'appréciait beaucoup mais pourquoi ce sentiment de malaise quand elle était avec lui ? Elle se trouvait si hésitante... Ça ne lui ressemblait vraiment pas et il y avait de quoi s'en inquiéter.
Prenant le taureau par les cornes, Karin se leva et descendit rejoindre Orihime et Ichigo qui discutaient en bas. Au moment où elle allait annoncer sa présence, une phrase de son frère attira son attention. Elle se résolut donc à écouter ce qu'ils disaient – non sans mauvaise conscience.
- J'ai senti que le duc était contrarié, au moment de nous quitter... Tu penses que c'est quelque chose de grave ? entendit-elle Orihime demander, non sans anxiété.
- Je ne sais pas, mais personnellement je trouve que la façon dont Sa Grâce se comporte prête à confusion, tu n'as pas tort, analysa le roux.
De quoi parlaient-ils, à la fin ? La jeune fille ne comprenait ce qui se disait. Tout s'embrouillait dans la tête de Karin et elle ne supportait pas ce mystère.
- Pourquoi dis-tu ça, Ichigo ? Je sais qu'il l'apprécie mais ça ne va pas plus loin, contra fermement Orihime.
Quels sous-entendus étranges... La jeune sœur du régisseur secoua la tête et colla de nouveau son oreille à la porte.
- Ce n'est pas ce que je voulais dire, Orihime, la rassura-t-il immédiatement. Je ne parlais de la manière dont il se comporte avec ma sœur, je sais que le duc est un homme d'honneur...
- Très bien, soupira sa femme. De quoi parlais-tu, alors ?
Ichigo garda le silence pendant quelques minutes, le temps de tout mettre en ordre dans son esprit. Puis Karin le vit se tourner vers la rousse en lui prenant les mains en répondant doucement :
- Je me demandais quelle pouvait être la raison pour laquelle Sa Grâce était contrarié, rien de plus.
La jeune femme hocha la tête sans répondre. Karin jugea que le moment était bon pour manifester sa présence. Elle entra donc dans le salon au moment même où son frère allait reprendre la parole.
- Tout va bien ? s'enquit la brune innocemment.
- Ne t'en fais pas, Karin.. Ce n'est rien de grave, assura son aîné.
Orihime ne quittait pas la sœur de son mari des yeux. Elle trouvait que la jeune fille se comportait étrangement depuis le départ du duc. Pour quelle raison ? Orihime se jura de faire sa petite enquête.
- Il est déjà l'heure de préparer le dîner, s'écria-t-elle soudain. Karin, veux-tu me donner un coup de main ?
- Bien sûr, acquiesça-t-elle avec un grand sourire.
Les deux femmes partirent en direction de la cuisine en laissant le roux seul dans le salon. Celui-ci se posait encore des questions qui le tracassaient beaucoup. Il avait vu – ou plutôt entrevu – la lueur de déception dans le regard sombre de Karin lors du départ de son seigneur. Ce fut très bref mais il ne l'avait pas manquée.
Son intuition se renforçait à mesure que les jours passaient et cela ne lui plaisait vraiment pas. Mais tant que le roux n'en avait pas la preuve, tout restait à l'état de supposition. En secouant la tête afin de chasser les pensées inopportunes qui occupaient son esprit, Ichigo se leva et se dirigea dans son bureau pour finir le travail en retard. En espérant que cela lui changerait les idées...
Dans la cuisine, les deux femmes de la maison bavardaient gaiement tout en préparant le dîner du soir. Karin ne pensait pas au duc et cela lui faisait du bien. Elle était reconnaissante à sa belle-sœur de lui changer les idées.
- Dis Karin, tu penses que c'est une bonne idée de mettre de la pâte de haricot rouge dans le rôti de bœuf ? demanda soudain Orihime comme si c'était une question de vie ou de mort.
- Écoute, je ne doute pas un instant de tes talents de cuisinière mais si tu mets « ça » dedans, je doute qu'Ichigo apprécierait ton initiative,répondit-elle avec l'ombre d'un sourire.
- Oui, je crois que tu as raison, fit la rousse en reposant le pot dans le placard.
Tout en mélangeant la préparation, Karin laissa ses pensées vagabonder vers un endroit interdit. Décidément, il ne quittait jamais – ou presque – ses pensées, ça en devenait vraiment agaçant. Pourtant, il y avait beaucoup de choses auxquelles elle pourrait songer mais il fallait toujours qu'elle en revienne à LUI.
Énervée, elle tourna la cuillère en bois plus vite dans le saladier, ce qui alerta Orihime qui s'occupait de faire chauffer de l'eau pour les pâtes.
- Karin ? l'appela-t-elle. Tu te sens bien ?
Au son de la voix de la rousse, Karin cessa immédiatement son geste en laissant tomber l'ustensile dans le plat. Elle soupira bruyamment, comme pour évacuer son trop plein d'émotion.
- Je ne sais pas, Orihime, répondit la brune après quelques secondes. Trop de choses tourbillonnent dans mon esprit et je ne sais plus où donner de la tête...
- Tu veux en parler ? proposa sa belle-sœur d'une voix douce.
- Je peux toujours essayer, accepta la brune en prenant place sur chaise.
En se mettant en face d'elle, Orihime se demandait ce qui pouvait perturber la brune à ce point.
- Je t'écoute, Karin.
Celle-ci bougea sur sa chaise, mal à l'aise. Elle prit la parole pour tout raconter – presque tout – à la femme d'Ichigo dans les grandes lignes.
- Voilà... Alors en fait, la disparition de Yuzu me tracasse beaucoup et je ne sais quoi en penser...
Le duc Hitsugaya se trouvait dans son bureau, il rangeait correctement tous les documents trouvés par terre non sans soupirer d'agacement. La personne qui avait fait ça avait sûrement de bonnes raisons pour agir ainsi, mais lesquelles ? Il parcourait de son regard turquoise la lettre étrange qu'il avait ramassée parmi tout le désordre mais ne comprenait pas sa signification.
Il avait émis plusieurs hypothèses mais aucune ne lui convenait. Que cela pouvait-il bien vouloir dire ? La question tournait en boucle dans sa tête et commençait vraiment à éprouver ses nerfs.
- Franchement, ça me dépasse, marmonna-t-il en la reposant dans le tiroir qu'il referma ensuite. Pensons à autre chose pour le moment...
Toshiro n'eut pas le loisir de le faire car Shin pénétra dans le bureau avec un air étrange sur le visage.
- Que se passe-t-il, Shin ? s'enquit le jeune duc d'un ton neutre. Vous n'avez pas l'air bien...
- Mademoiselle Hinamori demande une audience, Monseigneur, l'informa le majordome.
Le duc fronça les sourcils à cette annonce. Elle venait souvent lui rendre visite, en ce moment et cela l'intriguait. Sa fiancée n'avait jamais été particulièrement empressée auparavant, son comportement avait changé du tout au tout. Il réprima un soupir de frustration puis répondit à son domestique, d'une voix tendue :
- Conduisez-la dans le petit salon vert et servez-lui du thé ainsi que des petits gâteaux en attendant mon arrivée.
- Très bien Votre Grâce, fit Shin en s'inclinant.
Le domestique sortit de la pièce et referma la porte derrière lui. Une fois seul, le duc continua de ranger les derniers documents qui lui restaient non sans pester contre sa fiancée. Que voulait-elle encore ? Il n'était pas vraiment pressé de le savoir...
Sa tâche accomplie, le jeune seigneur sortit de son bureau pour rejoindre sa promise qui l'attendait dans le petit salon. Il marcha tranquillement, sans se presser. Son esprit était accaparé par une certaine lettre qu'il n'avait pas encore ouverte de peur de voir ce qu'elle contenait, ainsi que par une certaine jeune fille brune dont il ne parvenait pas à s'éloigner.
Arrivé devant la porte du salon où patientait sa fiancée, Toshiro s'arrêta et inspira profondément. Elle avait mal choisi son moment pour le déranger dans son travail et il n'avait pas terminé. Mais on ne faisait pas attendre une dame, même si ce n'était pas l'envie qui lui manquait. Il ouvrit donc la porte et vit que la jeune femme se trouvait assise sur le sofa où elle sirotait tranquillement son thé.
À sa vue, Hinamori se leva et l'accueillit avec un sourire.
- Bonjour, Votre Grâce, le salua-t-elle avec une révérence parfaite.
- Bonjour, mon amie. Quel bon vent vous amène ?
Parfaite. Trop parfaite. Et Toshiro n'était pas homme à aimer la perfection chez les êtres humains. Cela cachait souvent autre chose, une part sombre bien dissimulée aux yeux du monde entier.
- Je suis désolée de venir vous déranger alors que vous devez avoir beaucoup de choses à faire mais je crois qu'il faut que vous soyez au courant, fit-elle en s'asseyant.
Le jeune duc prit place à ses cotés tandis que sa phrase résonnait dans son esprit.
- Au courant de quoi, mon amie ?
- Tenez, je préfère vous le montrer plutôt que de vous le dire, annonça Hinamori en lui tendant une feuille chiffonnée.
Son fiancé la prit et déplia soigneusement le papier pour commencer la lecture. Il écarquilla les yeux de surprise en voyant le contenu de cette lettre.
L'homme à qui vous êtes fiancée n'est pas celui que vous croyez...
Faites attention à vous et ne commettez pas d'impairs
Où vous le regretterez !
Prenez garde :
Le Diable n'est jamais loin...
- Quand l'avez-vous reçu ? s'enquit le seigneur, une lueur de contrariété dans ses prunelles turquoises.
- Hier dans la soirée, répondit obligeamment la jeune femme. Je croyais à une farce mais un événement m'a fait changer d'avis.
- Que s'est-il passé ?
Sa jeune fiancée croisa délicatement ses doigts, signe qu'elle était inquiète. De l'appréhension transparaissait d'ailleurs dans ses yeux sombres. Rares étaient les moments où le duc l'avait vue aussi bouleversée.
- Je ne sais si... cela s'est vraiment passé... mais... le majordome de mon père m'a révélé que quelqu'un s'était introduit dans notre manoir,avoua-t-elle d'une voix hésitante.
- Étrange, en effet, murmura le jeune homme. Quelqu'un s'est aussi introduit dans mon château dans le but d'y dérober quelque chose... Peut-être que ces deux événements sont liés d'une manière ou d'une autre.
Le duc remarqua l'expression interloquée de son visage. Apparemment, personne ne l'avait mise au courant.
- Nous trouverons le coupable, fit le duc déterminé. Et nous découvrirons son but caché.
La jeune fiancée du seigneur semblait rassurée, son visage était redevenue paisible. Puis il vit qu'Hinamori ne le lâchait pas des yeux. Essayait-elle de lire en lui ?
- Vous semblez préoccupé, Votre Grâce, dit-elle soudain. Avez-vous des soucis en dehors de notre mystérieux visiteur ?
- Non, tout va bien.
Il aurait vraiment aimé que ce soit le cas mais il ne voulait pas lui dévoiler ses tourments intérieurs, elle n'avait pas besoin de le savoir.
Hinamori le fixa de ses prunelles d'où perçait aucune émotion. Elle voulait découvrir ce qui chagrinait son duc à ce point, elle n'était pas dupe. La jeune femme n'ignorait pas que son fiancé n'était pas le genre d'homme à se confier mais elle avait très bien vu l'étincelle dans ses prunelles.
Il était préoccupé par une chose encore plus importante que ce qui s'était passé, encore plus importante qu'elle. Elle se ferait un devoir de tout découvrir, elle ne lâcherait rien. Rien ni personne ne pourrait l'évincer.
Pendant que sa femme et sa sœur préparait le dîner dans la cuisine, Ichigo se trouvait à son bureau. Le jeune homme venait de terminer le travail en retard et fermait les yeux, sans penser à rien. Soudain un bruit venant de l'entrée parvint à ses oreilles. Ne sachant pas si Karin et Orihime avaient entendu, il se leva tranquillement et se dirigea vers la porte d'entrée.
Quelle ne fut pas sa surprise de voir apparaître sur le perron son meilleur ami Renji. Ichigo connaissait Renji Abarai depuis qu'il était enfant, c'était un de ses plus anciens et proches amis. Il s'effaça afin de le laisser entrer.
- Salut, vieille branche ! La forme ? le salua son ami en entrant dans la maison.
- Salut Renji, tout va bien et toi ?
L'homme avait une couleur de cheveux encore plus improbable que celle d'Ichigo. Ses cheveux avaient la couleur d'une tomate bien mûre et tout était naturel. Renji jeta un regard oblique à son presque frère tandis qu'il le suivait jusqu'au salon.
- Tranquille, comme d'habitude, répondit Renji en regardant partout. Dis-moi, où est cette sœur dont tu m'as tant parlé ?
Il avait à peine fini de poser la question que Karin et Orihime arrivaient dans la pièce avec un plateau plein de bonnes choses à grignoter ainsi que des rafraîchissements.
- Ichigo ! Tu avais oublié de me dire que ta sœur était jolie comme un cœur ! s'écria l'ami du régisseur.
À ces mots, Karin se mit à rougir. Elle tourna la tête pour ne pas montrer sa gène et faisait mine de servir le thé dans les tasses pour se donner une contenance. Quelques instants plus tard, la jeune fille sentit la présence de son frère aîné à ses côtés.
- Petite sœur, je te présente un de mes plus vieux amis, le vicomte Renji Abarai.
Sa gène disparue, Karin jaugea le nouvel arrivant d'un œil critique. On aurait dit que ses cheveux ressemblaient à un ananas rouge. Légèrement plus grand que son frère, il la dépassait d'au moins deux têtes.
- Enchantée, fit la jeune fille en inclinant la tête. Karin Kurosaki. Je me présente vu que mon imbécile de frère ne le fait pas.
N'y tenant plus, Renji éclata de rire à la remarque de la brune. Il ne s'attendait pas à ce qu'elle ait le même caractère difficile que son frère, il ne pouvait que s'en réjouir.
Karin esquissa un sourire moqueur à l'intention d'Ichigo qui s'était renfrogné. Pour le peu qu'elle pouvait en juger, l'ami de son aîné était sympathique et ouvert. Mais qui savait comment les choses allaient évoluer ? En tout cas, elle était heureuse de cette rencontre qui lui faisait penser à autre chose.
Tout le monde prit place sur le canapé et les fauteuils pour déguster les gâteaux préparés par les deux femmes. Renji faisait honneur à la cuisine de ses dames, les amuses-gueules paraissaient lui plaire au plus haut point.
Après une gorgée de thé, Ichigo reposa sa tasse et concentra ses prunelles noisettes sur son ami de toujours.
- Que nous vaut le plaisir de ta visite, Renji ? interrogea-t-il.
L'interpellé prit le temps d'avaler le contenu de sa tasse ainsi que quelques douceurs avant de lui répondre avec un sourire amusé sur ses lèvres :
- Faire la connaissance de ta sœur, bien sûr ! Pour quelle autre raison serais-je venu sinon ?
- Ichigo, on pourrait penser que la visite de Renji te gène, fit remarquer Orihime d'une voix douce. Personnellement, ça me fait plaisir que tu sois là, en tout cas, dit-elle au jeune homme en souriant.
- Merci, Orihime, déclara Renji, la main sur le cœur. Toi au moins, tu sais comment recevoir les gens.
- Si on devait compter sur mon frère pour être aimable, on y serait encore à Noël, lança Karin d'un ton moqueur.
En entendant sa voix, l'ami-ananas de son frère tourna la tête vers elle et la jeune fille put voir une lueur d'amusement dans ses prunelles. Elle sentait qu'elle allait bien s'entendre avec lui, son instinct le lui disait.
- Tu n'as pas la langue dans ta poche, toi ! Ça me plaît !
- Renji, mets-la en sourdine, tu veux ? grogna Ichigo, vexé.
La brune mit la main devant sa bouche pour empêcher son idiot de frère aîné de remarquer le sourire qui lui brûlait les lèvres. En jetant un coup d’œil distrait à l'horloge accrochée au dessus de la porte, elle nota avec surprise qu'il était déjà l'heure de dîner. La jeune fille n'avait vraiment pas vu le temps passer... Elle le fit comprendre à sa belle-sœur qui n'avait pas manqué de le remarquer elle aussi.
- Renji, veux-tu dîner avec nous ? proposa Orihime.
Ichigo soupira, s'attendant à cette invitation. Il ne pourrait pas manger tranquille si son ami était là et il le savait. Enfin, c'était juste une idée, comme ça.
- J'en serais ravi, Madame Kurosaki, s'amusa à répondre le jeune homme aux cheveux rouges.
La jeune femme se tourna vers Karin qui se dirigeait déjà vers la salle à manger et l'appela pour lui demander :
- Karin, est-ce tu pourrais mettre la table pour quatre personnes le temps que je rapporte le plat, s'il te plaît ?
- Bien sûr !
Elle partit rapidement faire ce que la rousse lui avait demandé afin de ne pas retarder le moment du repas et de rendre service à Orihime.
Pendant que Karin installait correctement les couverts autour des assiettes, Renji et Ichigo la rejoignirent en bavardant gaiement. La jeune fille ne put retenir un petit rire devant l’imbécillité des deux hommes. La jeune fille avait à peine fini de mettre la table qu'Orihime arrivait déjà avec l'entrée.
Tout le monde s'assit à sa place et attendait la maîtresse de maison avant d'attaquer le repas à proprement parler. Renji salivait devant les plats posés devant lui et se disait qu'Ichigo avait décidément bien de la chance d'avoir une femme comme elle.
- Bon appétit ! fit la rousse en s'installant à table à son tour.
- A toi aussi, répondirent les autres en chœur.
Alors que chacun dégustait son entrée, personne ne parlait. Karin regardait du coin de l’œil son frère qui ne cessait de fixer son ami avec une expression de dégoût sur le visage. Elle tourna alors la tête vers son voisin de table et fut amusée par ce qu'elle voyait. Renji enfournait dans sa bouche tout ce qu'il pouvait à vitesse grand V.
- Ta femme cuisine toujours aussi bien, Ichigo, assura le goinfre en avalant la dernière bouchée. J'espère que tu te ménages quand même, Orihime... Il ne faudrait pas qu'il vous arrive quelque chose à toi et à mon filleul.
- Ne t'en fais pas, Karin est là pour me seconder maintenant, déclara-t-elle en caressant son ventre avec des gestes tendres..
- Je n'en doute pas mais un jour, elle partira vivre avec son époux...
- Ce n'est pas près d'arriver, le coupa Karin vivement.
L'interruption de la jeune fille étonna tout le monde.
- Pourquoi dis-tu ça ? Il n'y a aucune raison, affirma Orihime non sans arrière-pensée. Tu vas bien rencontrer quelqu'un, voyons.
- Tu me fais vraiment penser à quelqu'un, tu sais, indiqua Renji, pensif.
Ichigo comprit où son ami voulait en venir. L'expression nostalgique de son visage ne trompait pas.
Elle lui faisait rappeler une personne mais qui était-elle ? Karin était complètement perdue dans tout ça. Il avait l'air triste donc il s'agissait peut-être d'une femme. Ça se tenait mais elle n'en n'avait pas la certitude.
- A qui ?
- Rukia, dit-il dans un souffle. Rukia Kuchiki.
Karin était bouche bée. Kuchiki ? C'était une des meilleures familles du royaume de Karakura avec les Hitsugaya ! Sans compter la famille royale, bien sûr.
- C'est la sœur adoptive du duc Byakuya Kuchiki et on s'est rencontré lors d'un bal à la Cour, il y a de cela un an, expliqua Renji, les yeux dans le vague.
- Et tu en es tombé amoureux, c'est ça, continua Karin comme si c'était une évidence. Tu n'as pas choisi la plus accessible...
Renji soupira, il ne savait pas la sœur d'Ichigo si perspicace.
- En effet, petite sœur, le taquina Ichigo sans le quitter des yeux. Il en est raide dingue.
En entendant les mots de son soi-disant ami, Renji vit rouge. Une veine battait furieusement sur sa tempe. Il jura de se venger et pas plus tard que maintenant.
- Dis-moi, Ichigo, le nargua-t-il. Qui a mis trente plombes à comprendre qu'il était amoureux d'Orihime avant d'aller se déclarer ?
Orihime soupira sans pouvoir retenir un sourire amusé. Et voilà, ils se chamaillaient de nouveau, ils ne savaient pas rester longtemps tranquilles.
- Si je n'avais pas été là, vous ne seriez même pas fiancés, à l'heure qu'il est, l'enfonça Renji qui s'en faisait un malin plaisir.
Karin riait sous cape alors qu'elle écoutait les deux hommes se tirer dans les jambes comme deux enfants. C'était à celui qui aurait le dernier mot mais elle était douée à ce jeu-là, elle aussi.
- Ichi-nii est un handicapé des sentiments, de toute façon, se moqua-t-elle.
- C'est une caractéristique familiale, ma chère sœur, lança Ichigo avec un clin d’œil en prime.
La jeune fille leva les yeux au ciel. Elle s'attendait à cette réaction de la part de son frère, il ne pouvait en être autrement. La brune posa ses prunelles sombres sur sa belle-sœur qui avait l'air de se régaler du spectacle.
- Je n'en ai pas la preuve, mon cher frère, répliqua Karin sans se démonter.
Renji écoutait la conversation entre son ami et sa sœur. Tout cela était fort intéressant, se dit-il en se frottant les mains discrètement.
- Y aurait-il un homme qui ferait déjà battre ton cœur de femme, Karin ? demanda-t-il innocemment.
La réaction de la jeune sœur de son ami ne le déçut pas. Elle était estomaquée !
C'était quoi cette question à la noix ? Bien sûr que non, enfin ! Karin ne s'attendait pas du tout à ce que Renji pose cette question. Comment aurait-elle pu rencontrer « l'homme qui faisait battre son cœur » si elle ne sortait jamais d'ici ?
- Évidemment que non ! s'écria-t-elle véhémente.
- Ou même que tu trouverais simplement gentil ? insista l'ami d'Ichigo.
- Qu'est-ce que ça peut bien faire qu'il y en ait un ou non ? bougonna la brune, gênée.
Orihime la regardait d'un air qui voulait tout dire. Karin ne paraissait pas réaliser qu'elle était déjà sous le charme du duc Hitsugaya mais sa réaction prouvait que c'était bien le cas. Elle vit avec amusement la jeune fille marmonner dans son coin.
- Donc il y en a bien un, supposa justement Renji.
- Le duc Hitsugaya, soupira Ichigo en ayant assez de cette mascarade qui se prolongeait trop.
La réponse du roux surprit énormément son copain d'enfance. Il ne pensait pas qu'elle le connaissait.
- Et Sa Grâce apprécie beaucoup Karin, d'ailleurs, signala Orihime en finissant son assiette.
La jeune fille ne répondit pas et se contenta de finir son repas en silence. Était-elle si transparente ou simplement idiote de n'avoir rien vu venir ? À chaque fois qu'elle pensait avoir réussi à chasser le duc de son esprit, il fallait que quelqu'un se mette à parler de lui. Aurait-elle un jour la paix ?
- Avant de t'occuper des histoires de cœur de ma sœur, occupe-toi de convaincre Kuchiki de te donner Rukia en mariage, mon cher Renji,conseilla Ichigo, narquois.
Renji lui jeta un regard noir, ce sujet était sensible chez lui et Ichigo le savait pertinemment. Il avait déjà tenté deux fois de demander la main de la jeune sœur du duc Kuchiki à celui-ci mais à chaque fois, le duc avait refusé. Il ne savait plus quoi faire pour entrer dans ses bonnes grâces.
- Ichigo, l'appela sa femme, les poings sur les hanches. Tu sais très bien que Renji n'aime pas qu'on aborde ce sujet alors arrête d'en parler...
Le roux soupira bruyamment, sachant qu'elle avait raison.
- Excuse-moi, Renji, murmura-t-il penaud. Tu sais que je suis prêt à t'aider si tu le demandes.
- Oui je sais, merci Ichigo.
Karin ne savait pas que dans les familles nobles le mariage était aussi compliqué. Elle en était vraiment désolée pour l'ami de son aîné car elle l'avait senti très épris de cette Rukia Kuchiki. La jeune fille espérait que son frère adoptif se laisserait convaincre car elle sentait que Renji était un homme bien – mise à part ses ridicules chamailleries avec Ichigo.
- Continue d'y croire, lança-t-elle soudain. Ne baisse pas les bras, si tu l'aimes, bats-toi jusqu'au bout.
Les encouragements de la brune donnèrent du courage au jeune homme aux cheveux rouges. Il lui adressa d'ailleurs un sourire plein de reconnaissance.
La sœur d'Ichigo comprit que les paroles qui, à l'origine, étaient destinées à Renji, pouvaient très bien lui être adressées. Le duc avait pris de l'importance pour elle et elle ne voulait pas perdre l'amitié qui commençait à se nouer entre eux. Karin savait qu'elle l'appréciait un peu trop pour son propre bien mais elle ne parvenait pas à s'empêcher de se rapprocher de lui. Jusqu'où tout ça la mènera-t-il ?