Sentiments et Ressentiments
Chapitre 7 : Chapitre 6 - Peur et insécurité
15280 mots, Catégorie: G
Dernière mise à jour 08/11/2016 21:19
Chapitre 6 : Peur et insécurité
Le lendemain de cette visite pleine de bonnes et mauvaises surprises, Ichigo se trouvait dans le bureau du duc et tentait tant bien que mal de remettre ses idées en place et de se concentrer. Mais apprendre que Yuzu était retenue prisonnière par un fou furieux et que Karin risquait le même sort à tout moment, tout ça le rendait fou de colère et d'inquiétude.
Le pire de tout était de ne pas savoir qui était le ravisseur et quand il allait passer à l'action. Saurait-il protéger sa sœur de cette ordure ? Il l'ignorait mais il ferait tout ce qui était en son pouvoir pour l'empêcher de s'en prendre à sa sœur cadette.
En quittant Karin et sa femme le matin-même, Ichigo put remarquer dans leurs yeux la peur qui les dévoraient de l'intérieur. Tout cela allait certainement mal finir, songea-t-il le regard dans le vague. Il ne pouvait demander à Orihime de prendre la responsabilité de la protection de Karin, elle avait besoin de repos. Il n'avait plus qu'une seule chose à faire...
Plongé dans ses papiers, Toshiro sentit tout de même la tension extrême qui émanait du corps de son régisseur. Il leva doucement ses yeux turquoises et les plongea dans ceux noisettes de son employé. Le roux avait les sourcils froncés – encore plus que d'habitude – et ses prunelles lançaient des éclairs. Qu'avait-il bien pu arriver pour qu'il soit dans cet état ?
L'atmosphère de la pièce dans laquelle ils se trouvaient devenaient de plus en plus étouffante et le duc se décida à prendre la parole d'une voix où perçait une inquiétude grandissante :
_ Vous n'êtes vraiment pas à prendre avec des pincettes, aujourd'hui. Tout va bien, Kurosaki ?
La voix de son jeune maître le ramena brutalement à la réalité. Il ne manquait plus que ça ! Ichigo ne voulait surtout pas inquiéter le duc, il avait d'autres chats à fouetter. Mais il consentit à répondre dans un soupir irrité :
_ Mon père a reçu une lettre de menaces, hier après-midi, qui disait que ma sœur Yuzu est retenue prisonnière.
Le jeune homme roux serra le poing tellement fort que ses phalanges en devenaient blanches. Il tenta de contenir sa colère et poursuivit :
_ Karin est en danger, elle pourrait elle aussi être enlevée.
Le visage de Toshiro exprimait de la stupéfaction. Une inquiétude sourde montait en lui sans qu'il ne puisse la réprimer. Mais qu'est-ce que ça voulait dire ? Il ne voyait vraiment pas pour quelle raison les jumelles Kurosaki seraient en danger. Quelque chose clochait, il en était sûr... Mais quoi ?
Le seigneur aux cheveux d'argent se leva précipitamment de son fauteuil et faisait les cent pas dans la pièce, afin de réfléchir.
_ C'est vraiment étrange... pensa le duc à voix haute. Pourquoi s'en prendre à vos deux sœurs ? Ça me laisse perplexe...
_ Je ne sais pas, Votre Grâce, murmura le régisseur perdu. Je ne comprends pas non plus pour quelle raison on voudrait leur faire du mal.
Toshiro se plaça devant la fenêtre et laissait dériver son regard de glace sur le jardin enneigé qui s'étendait loin devant lui. Il n'aurait jamais imaginé une telle chose. Décidément, plus le duc réfléchissait, plus il sentait que quelque chose allait mal tourner. Mais quoi ? Il serra les poings si fort que les paumes de ses mains commencèrent à saigner. Il se maudissait pour son impuissance.
Le jeune duc se retourna vers Ichigo, de la détermination dans ses yeux de glace.
_ Vous pouvez compter sur mon aide, Kurosaki.
Les mots prononcés par le seigneur n'étonnèrent pas plus que cela le régisseur. Ichigo connaissait assez bien le duc Hitsugaya pour deviner ses réactions.
_ Je vous remercie, Votre Grâce, fit-il en s'inclinant avec reconnaissance.
Il était vrai que l'aide d'un pair du royaume – qui plus est un duc – n'était pas à négliger. Un peu rassuré par cette offre, Ichigo se remit au travail, suivi aussitôt de Toshiro.
Karin ne bougeait pas de sa chambre dans laquelle elle était restée enfermée depuis le retour de chez son père. Elle ruminait sa rage et son désespoir. À un certain moment, la jeune fille avait cru entendre sa belle-sœur qui l'appelait derrière la porte mais elle n'avait pas ouvert. Karin culpabilisait d'inquiéter Orihime à ce point mais elle voulait que personne ne soit témoin de sa tristesse.
La brune laissait errer son regard sombre dans la pièce et ses yeux se posèrent sur la fenêtre. Elle se leva péniblement de son lit et se dirigea vers la porte vitrée afin d'admirer le jardin enneigé de son frère.
_ Yuzu... Tu me manques tellement... murmura-t-elle dans un souffle.
Karin avait beau chercher, elle ne comprenait pas pourquoi quelqu'un s'en serait pris à sa sœur jumelle. De plus, elle-même était aussi en danger de subir le même sort.
La sœur d'Ichigo entendit soudain frapper à la porte de sa chambre. Elle supposa qu'il s'agissait encore d'Orihime. Une fois arrivée à la porte, elle la déverrouilla et l'ouvrit pour laisser apparaître le doux visage brisé par l'inquiétude de sa belle-sœur. La culpabilité l'assaillit de plus belle.
_ Karin... soupira la rousse de soulagement. J'ai cru que tu n'ouvrirais jamais.
_ Excuse-moi, Orihime mais j'avais besoin de rester seule quelques moments, expliqua la jeune fille avec un petit sourire d'excuse sur les lèvres.
La femme d'Ichigo balaya ses protestations d'un mouvement de la main et posa ses prunelles grises sur le visage de Karin marqué par la fatigue. « Rien d'étonnant après ce qu'on a appris hier », songea Orihime avec inquiétude. Elle ne montra cependant rien de son tourment à Karin et l'invita à la suivre dans la cuisine afin de l'aider à préparer le déjeuner.
Alors qu'elles descendaient toutes les deux, deux coups secs retentirent à la porte à leur grande surprise.
_ Tu attendais quelqu'un ? demanda Karin interloquée.
_ Non, attends-moi là, je vais voir...
La brune ne comprenait pas qui pouvait leur rendre visite à un moment pareil de la journée. Elle savait qu'il fallait être très prudent, à cause de la menace qui pesait sur elle. En effet, Karin avait entendu son frère aîné recommander à sa femme d'être très prudente pendant son absence. Ce qui n'allait pas calmer ses nerfs déjà bien tendus...
La jeune fille retint un soupir de colère et de désespoir mêlés. Sans que rien ne le laisse présager, le regard turquoise du duc Hitsugaya apparut devant ses yeux. Ce qui la calma un peu. L'effet que ses prunelles de glace avaient sur elle était vraiment fou. Mais ce n'était pas le moment de penser à cet homme, se sermonna la brune en se pinçant le bras. Sa sœur était en danger, bon sang !
Karin ne vit pas qu'une personne s'approchait d'elle et sursauta en entendant une voix connue s'adresser à elle :
_ Salut Karin, comment vas-tu ?
Elle se reprit très vite en remarquant la présence de l'ami de son frère. Sa visite allait lui changer les idées, elle en avait bien besoin.
_ On va dire que j'ai connu mieux... Et toi, tu vas bien ?
_ Il y a une rumeur qui court en ce moment, et je dois dire qu'elle m'inquiète, révéla Renji en prenant place sur un fauteuil en face des deux femmes.
_ Quel genre de rumeur ? questionna la maîtresse de maison calmement.
Karin serrait les poings sur ses genoux et ne prononça pas un mot. Elle espérait qu'elle n'avait pas mis son frère dans l'embarras, de quelque manière que ce soit. Mais la phrase de l'homme aux cheveux rouges pétrifia les deux jeunes femmes instantanément.
_ Il paraîtrait que ta sœur jumelle aurait été enlevée, c'est vrai ? fit Renji en s'adressant directement à Karin, le regard sombre.
À cette évocation, les prunelles de nuit de la brune se mirent à briller de larmes contenues. Elle baissa la tête vivement afin que personne ne remarque ses larmes mais le vicomte était quelqu'un d'observateur malgré ses tendances à faire l'idiot.
Karin hocha la tête à l'intention du jeune homme qui en restait muet de stupeur. S'il avait su que tout ça était vrai, il serait venu bien plus tôt !
_ Bon sang ! Mais qui est l'ordure qui a fait ça ?
_ On ne sait pas, Renji, avoua Orihime en soupirant. Mais ce qu'on sait en revanche, c'est que la même chose pourrait arriver à Karin.
_ Comment ça ?
Karin respira profondément et releva la tête pour regarder l'ami de son frère qui semblait véritablement furieux. Elle était vraiment émue de sa réaction, elle ne s'y attendait pas du tout. La jeune fille prit la parole d'une voix où perçait une peur contenue :
_ Quand nous sommes allés chez mon père, hier après-midi, il a reçu une lettre qui n'avait pas d'expéditeur. Il l'a ouverte et on a découvert que Yuzu a été kidnappée.
Voyant qu'elle ne pouvait plus continuer, Orihime raconta la suite.
_ Mais il nous a recommandé de faire attention à Karin, qu'un accident était si vite arrivé...
Renji ne revenait pas de ce qu'il venait d'apprendre. Si seulement il s'attendait à une chose pareille... Et Ichigo ? Qu'avait-il l'intention de faire, dans tout ça ? Il imaginait sans peine la peur et la fureur qui devait habiter son ami à cet instant.
_ Il a dit autre chose ?
Orihime secoua la tête en signe de dénégation.
_ Juste qu'il allait prendre contact avec le père d'Ichigo pour une demande de rançon, acheva-t-elle en réprimant son impuissance.
Pour le vicomte, quelque chose ne tournait pas rond dans cette histoire. Qui pourrait s'en prendre aux filles d'un petit seigneur sans titre de noblesse ? Ça n'avait pas de sens ! Ou alors, il s'agissait de quelque chose d'infiniment plus vicieux... Cette idée était plus plausible. Peut-être que le ravisseur cherchait à punir quelqu'un à travers les deux jeunes filles...
Plus il y pensait, plus cette idée méritait d'être approfondie. L'ananas rouge n'eut pas le loisir d'y réfléchir davantage car la porte d'entrée claqua, laissant tout le monde surpris.
Personne n'attendait de visite à cette heure. En voyant son mari, Orihime fut tout de suite rassurée. Pendant un bref instant, elle était effrayée à l'idée que ce soit le ravisseur.
_ Ichi-nii ? On ne t'attendait pas avant ce soir !
_ Salut, Ichigo, le salua Renji. Ta femme et ta sœur m'ont expliqué les dernières nouvelles.
Les éclairs dans les prunelles noisettes du jeune régisseur n'étonnèrent pas l'homme aux cheveux rouges.
_ Tu as appris qu'une ordure avait enlevé ma sœur...
_ En effet, acquiesça sombrement le vicomte. Si tu as besoin de moi, n'hésite pas à venir me chercher.
_Merci, mon vieux.
Le roux prit place sur le canapé, entre sa sœur et sa femme. Mais il ne put pas profiter longtemps de leur présence car elles se levèrent pour aller préparer le déjeuner, laissant ainsi les deux hommes seuls dans le salon.
_ Dis, Ichigo, l'interpella son ami. Il y a quelque chose qui me chiffonne dans cette affaire...
Le frère de Karin, soudainement intéressé par ce qu'il entendait, se mit face à Renji et l'écoutait attentivement.
_ Je t'écoute.
_ Franchement, pourquoi s'en prend-on à tes sœurs ? Ce n'est pas logique, quand on y réfléchit deux minutes. Ton père n'a pas de titre de noblesse.
_ Oui et ?
Le rouge leva les yeux au ciel, agacé de se faire couper la parole. Même s'il comprenait l'impatience d'Ichigo.
_ Tout me laisse à penser qu'on chercherait à atteindre une autre personne à travers ta famille.
Ichigo réfléchit quelque minutes à l'idée émise par son pas-si-idiot-que-ça d'ami. Qui pourrait-on chercher à atteindre à travers ses sœurs ? Cette supposition était plausible, cependant.
_ Ton hypothèse se tient, en effet, concéda le jeune homme. Mais reste à trouver à qui on veut s'en prendre.
_ Vrai.
En voyant les deux femmes revenir avec deux plats, Ichigo et Renji se jurèrent d'en parler plus tard, en privé.
Deux heures plus tard, Orihime et Karin étaient parties faire des courses, accompagnées du valet du vicomte. En effet, Renji avait jugé cela plus prudent, par le danger qui courait. La lueur de reconnaissance qu'il avait brièvement aperçu dans les yeux de son ami d'enfance l'encouragea dans cette idée.
_ Tu es sûr qu'elles sont en sécurité avec lui ? ne put s'empêcher de demander Ichigo, anxieux.
_ Tu ne vas pas empêcher ta sœur de sortit, tout de même, elle a besoin de respirer, soupira le rouge en réprimant un sourire moqueur. Ne t'inquiète pas, Rikichi est digne de confiance et il les protégera bien, crois-moi.
Rassuré par les paroles de son ami, Ichigo laissa échapper un soupir de soulagement. Il fallait vraiment qu'il arrête de s'inquiéter comme ça, sinon il n'allait pas faire de vieux os. Mais c'était plus fort que lui.
_ Je ne sais plus quoi faire, Renji, souffla-t-il désemparé. Toute cette tension n'est pas bonne pour Orihime et le bébé. Je ne sais pas quoi faire pour rassurer Karin, et je me demande si Yuzu est encore en vie, à l'heure qu'il est.
Décidément, Ichigo s'inquiétait encore plus qu'il ne le croyait. Mais il fallait qu'il comprenne que ça ne donnait jamais rien de bon.
_ Tu sais, à t'inquiéter comme ça, tu vas finir par faire peur à tout le monde dans ton entourage, tenta de le raisonner le vicomte. Et ça n'amènera rien de bon, tu peux me croire.
Renji se leva et alla rejoindre Ichigo sur le canapé. Il posa sa main sur son épaule pour lui donner de sa force.
_ Tu n'es pas tout seul. Pourquoi te mettre autant de pression sur tes épaules ?
_ C'est plus fort que moi, je crois.
_ Tu arrêtes tes conneries et réfléchis calmement.
Il en était désolé pour le régisseur mais il fallait qu'il se reprenne et vite. Il n'avait pas le droit de flancher de cette façon.
_ Il faut vraiment que tu changes d'attitude sinon tu mets ta sœur en danger.
À cette phrase, Ichigo se raidit instantanément. Il avait raison ! Mais quel idiot ! Il se laissait porter par la vague alors qu'il devait la combattre de toutes ses forces. Il était vraiment temps que quelqu'un lui remette du plomb dans le cerveau et il savait qu'il pouvait compter sur son ami d'enfance pour ça.
C'était décidé : il allait faire le maximum pour protéger sa sœur et retrouver sa jumelle. Quoi qu'il en coûte !
Se promenant dans le village avec Orihime, Karin était émerveillée par ce qu'elle voyait. Les maisons pittoresques donnaient du charme aux rues et les marchands étaient vraiment sympathiques. Tout ici respirait la joie et la bonne humeur. Elle avait eu raison d'accompagner sa belle-sœur, elle ne le regrettait pas un seul instant.
_ C'est le village qui dépend du château du duc Hitsugaya, lui apprit Orihime, un doux sourire aux lèvres. D'ailleurs, tu peux l'apercevoir, là-bas,indiqua-t-elle en montrant l'horizon devant elles.
Du peu qu'elle pouvait en apercevoir, Karin était sous le charme de la demeure ducale. Il devait être immense, jugea-t-elle.
_ Il est aussi grand que je l'imagine ?
_ Plus encore de l'intérieur, fit Orihime. Il est magnifique.
Quelques instants plus tard, les deux femmes reprirent leur route, le valet du vicomte Abarai sur leurs talons. Au détour d'une ruelle étroite, Orihime remarqua la présence du duc Toshiro Hitsugaya, sortant d'une boutique de chaussures.
_ Bonjour, Votre Grâce ! l'interpella la rousse en agitant la main à son intention.
_ Bonjour Orihime, comment allez-vous ?
Un peu plus loin, le jeune seigneur vit celle qui ne quittait pas ses pensées. Elle était absorbée par une vitrine d'un magasin de vêtements. Son empressement était vraiment attendrissant, songea Toshiro, un léger sourire aux lèvres.
Quand Karin revint vers sa belle-sœur, quelques secondes plus tard, son cœur manqua un battement. Le duc bavardait avec Orihime et il l'avait vue. Elle ne pouvait pas s'éclipser sans paraître impolie, donc elle se résolut à le saluer.
_ Mademoiselle Karin.
_ Bonjour, Votre Grâce, fit-elle en exécutant une révérence.
La brune remarqua que le duc ne la quittait pas du regard, comme s'il cherchait à lire en elle. Elle se sentait happée par l'intensité contenue dans ses prunelles turquoises. Son cœur battait la chamade dans sa poitrine et la jeune fille se sentait perdre pied, peu à peu.
_ Vous tenez le coup ? s'enquit-il d'une voix tendue. J'ai appris pour votre sœur jumelle...
_ On va dire que oui, même si ce n'est pas aussi simple, répondit obligeamment Karin, en baissant les yeux afin de cacher ses larmes. J'essaie, en tout cas...
Toshiro ne savait que dire devant la détresse contenue dans la voix de la jeune sœur de son employé. Qu'est-ce qui lui prenait ? Ce n'était pas dans ses habitudes de réconforter les autres. « Mais elle est différente » lui souffla sa conscience.
_ Je me doute que ce ne doit pas être facile, mais heureusement, vous n'êtes pas seule...
Karin posa ses yeux de nuit sur Orihime qui finissait leurs achats et sourit, les larmes aux yeux. Il avait raison : elle avait son frère et sa femme, ainsi que l'espoir de revoir sa sœur en vie. Elle devait tenir, ne serait-ce que pour Yuzu.
_ Vous avez raison, dit-elle avec une lueur d'espoir dans ses yeux.
Sur ces paroles, le jeune homme aux cheveux d'argent prit congé de la brune. Après un dernier signe de main pour le carrosse ducal qui s'éloignait, Karin partit rejoindre Orihime qui finissait de ranger les courses.
_ Le duc est reparti ? demanda Orihime, tandis que le valet prenait le sac.
_ Oui, à l'instant. Il avait des choses importantes à régler, parait-il.
La rousse ne répondit pas, réfléchissant à cette éventualité. C'est vrai qu'il avait beaucoup de choses à voir pour le bal, il ne devait pas avoir une minute à lui. Et encore, elle ne savait pas tout de son emploi du temps.
_ Bon, nous n'avons plus rien à prendre, nous pouvons rentrer.
Emboîtant le pas à Orihime, Karin s'immobilisa soudainement. Une sensation désagréable lui parcourait la colonne vertébrale. Comme si on la fixait... La jeune fille se retourna vivement mais ne vit rien. Accusant le coup, elle se sentit vaciller un instant. « Encore cette présence hostile » songea-t-elle avec angoisse.
S'étant aperçue que Karin ne la suivait pas, Orihime revint sur ses pas et vit que la sœur de son mari était figée sur place par la frayeur. Que s'était-il passé ?
_ Karin ? Tu vas bien ? Réponds-moi !
La voix paniquée de la rousse parvint difficilement jusqu'à sa conscience. Karin secoua la tête avec énergie pour reprendre ses esprits.
_ Il était là, murmura-t-elle en tremblant comme une feuille. Je suis sûre qu'il était là, à me fixer.
En entendant ces mots, le jeune Rikichi partit aussitôt dans la direction indiquée par Karin. Mais le valet revint bredouille, la personne était déjà partie.
Orihime resta figée par la surprise en entendant les paroles de sa jeune belle-sœur. Mais qui était là ? La présence qu'elle avait ressentie, quelques jours plus tôt ? Si c'était le cas, il fallait avertir Ichigo au plus vite.
_ Madame Kurosaki, je n'ai vu personne, fit le valet sur un ton désolé. Il a dû s'enfuir aussitôt que mademoiselle Karin a ressenti sa présence.
_ Dans ce cas, rentrons immédiatement !
De retour chez elle, Orihime se rendit directement dans le salon sans même prendre le temps de retirer son manteau. Essoufflée, elle peinait à parler. Renji et Ichigo cessèrent immédiatement de parler en remarquant la peur de la rousse.
_ Calme-toi, Orihime, l'encouragea son mari en prenant ses mains dans les siennes. Assis-toi et dis-nous ce qui s'est passé pour que tu sois aussi nerveuse.
Il fallut quelques instants supplémentaires à la jeune femme pour reprendre son souffle. Prenant une intense bouffée d'air, la rousse plongea son regard gris inquiet dans les prunelles d'Ichigo. Cela avait toujours eu le don de la calmer quand elle était stressée. Cette fois-là ne fit pas exception.
_ Quand nous étions sur le point de sortir du village, Karin a ressenti la même présence désagréable que l'autre jour, balança Orihime, apeurée.Ta sœur était pétrifiée par la peur.
À ces mots, la colère du régisseur s'enflamma de plus belle. Ainsi, cette ordure prenait un malin plaisir à les narguer, il allait prendre des mesures radicales.
_ Je m'occupe de tout, il ne jouera plus longtemps à ça, crois-moi...
Ichigo regarda autour de lui dans l'espoir d'apercevoir sa sœur cadette mais il ne la vit nulle part.
_ Si tu cherches Karin, elle est montée directement dans sa chambre dès notre retour, lui annonça sa femme en enlevant son manteau. Je crois qu'elle a besoin de rester un peu seule.
Son mari acquiesça sans mot dire. Il imaginait sans peine la frayeur de sa sœur cadette et ça le rendait fou de rage d'être aussi impuissant à la protéger. Sans desserrer les dents, le jeune homme se leva et alla en direction de la fenêtre. Il se posa devant et laissa errer ses prunelles noisettes sur le ciel gris. « Même le ciel partage mon humeur » songea-t-il amèrement.
_ Et toi, ça va ?
Orihime se tourna vers Renji, les yeux dans le vague.
_ Oui je crois.
Ichigo s'approcha soudain de la rousse et posa ses deux mains sur ses épaules.
_ Je ne laisserai pas ce monstre vous faire du mal, tu as ma parole.
Il prit sa femme dans ses bras et la serra contre lui. Cette ordure ne perdait rien pour attendre. À cause de lui, Orihime était paniquée. Il allait le lui payer !
_ Bon, je vais vous laisser, annonça Renji en se levant de son siège. Je crois que vous avez besoin de vous retrouver entre vous.
_ Merci, Renji.
Une fois le vicomte parti, le roux conduisit sa femme dans leur chambre afin qu'elle se repose.
Quelques heures plus tard, alors que le jeune homme travaillait dans son bureau, il entendit un bruit étrange venant de l'étage. Préférant jouer la carte de la prudence, Ichigo monta voir ce qui se passait. Avec soulagement, il remarqua que ce n'était que sa jeune sœur qui avait claqué la porte un peu trop fort.
Les yeux encore endormis, Karin aperçut la silhouette rassurante de son frère au bout du couloir. Elle se décida alors d'aller à sa rencontre.
_ Orihime m'a raconté ce qui s'était passé, cet après-midi, fit Ichigo en réprimant un soupir. Tu es sûre que tout va bien ?
_ Je suis encore un peu secouée mais ça va mieux, murmura Karin en levant la tête vers lui. Je commençais juste à avoir faim...
Il est vrai que l'horloge indiquait déjà 21h30. Il n'y avait rien de plus normal à ce que sa sœur ait faim. Ils descendirent dans la cuisine et et Ichigo prépara un dîner rapide composé de sandwichs et d'une salade.
Aussitôt le repas terminé, Karin déplaça son regard sombre vers la porte d'entrée. Elle ressentait quelque chose d'étrange mais cela ne lui était pas hostile. Quelques secondes plus tard, ils entendirent frapper à la porte. Interloqué, Ichigo se leva et alla voir qui était le mystérieux visiteur nocturne. Quelle ne fut pas sa surprise de se retrouver face à face avec son père !
_ Papa ? Mais qu'est-ce que tu fabriques ici ?
_ Je viens rendre visite à mes chers enfants, voyons !
Isshin entra sans plus de cérémonie et se dirigea dans le salon, son fils sur les talons.
_ Ma petite fille ! Comme tu m'as manqué ! pleura le père en serrant la brune dans ses bras.
_ On s'est vus hier, papa, fit remarquer la jeune fille désabusée en s'éloignant de lui.
Ichigo serra les poings, la comédie de son père lui tapait sur les nerfs. C'était à chaque fois la même chose !
_ Dis papa, tu trouves que c'est une heure pour rendre une petite visite de courtoisie ?
_ Désolé, Ichigo, mais il fallait que je vous vois, tous les deux, fit Isshin sérieusement. Vous avez des nouvelles ?
_ Non, aucune.
Le visage de son père se ferma instantanément. Il s'y attendait, hélas. Mais il n'arrivait pas à comprendre pour quelle raison quelqu'un s'en prendrait à ses filles. Tout ça le rendait perplexe. Rien de bon ne sortirait de cette histoire, Isshin en était persuadé.
_ Je ne sais pas où ce malade veut en venir, mais une chose semble certaine : il veut faire du mal à quelqu'un à travers Yuzu et Karin, lança Ichigo en regardant sa sœur qui avait baissé les yeux.
_ Qui ?
_ Je ne sais pas, papa.
Karin réprima un tremblement en songeant à ce que sa jumelle devait endurer. Yuzu était gentille et serviable, pourquoi voudrait-on lui faire du mal ? L'esprit embrouillé, la jeune fille ne savait plus où elle en était.
Toshiro était dans son bureau et relisait la lettre envoyée par son père. Tout ça le préoccupait énormément, il fallait le dire. Pourquoi maintenant ? Plus le duc réfléchissait, moins il comprenait ce qui se passait. Son père savait qu'il allait mourir, mais comment c'était possible ? Quelqu'un en avait voulu à sa vie... Si il retrouvait la personne responsable de tout ça, il le lui ferait payer au centuple. Il tapa du poing sur l'accoudoir de rage et de frustration.
_ Père, Mère, qui vous a tué ? chuchota-t-il pour lui-même.
Le jeune seigneur se leva et alla se poster devant la fenêtre. La neige tombait fortement, on dirait une tempête. Toshiro avait toujours aimé la neige, du plus loin qu'il se souvienne. Il se revoyait enfant avec ses parents en train de faire des bonhommes de neige dans le jardin. Il esquissa involontairement un sourire triste à ce souvenir. Il secoua la tête afin de chasser ses pensées douloureuses.
Tout à coup, quelqu'un frappa à la porte.
_ Entrez ! fit-il en se réinstallant à son bureau.
Ce n'était que son majordome qui lui apportait la collation qu'il avait demandé, quelques minutes plus tôt. Shin posa le plateau sur le bureau et recula de quelques pas.
_ Vous n'avez besoin de rien d'autre, Votre Grâce ?
Toshiro leva la tête et posa son regard de glace sur son domestique qui attendait une réponse.
_ Non, ça ira, refusa le duc.
Le majordome acquiesça de la tête et sortit de la pièce, laissant son jeune seigneur en paix. Shin avait remarqué la lueur qui assombrissait le regard de son maître mais il ne savait pas à quoi c'était dû. Peut-être son mariage imminent ?
Ses pas le conduisirent dans la cuisine où l'attendaient tous les autres domestiques, impatients d'en savoir plus.
_ Alors ? questionna Aika avec curiosité.
Le majordome prit place sur une chaise et sirota son thé avant de répondre.
_ Je n'en sais pas plus, soupira-t-il, déçu.
_ J'espère que notre seigneur va trouver un moyen de se débarrasser de cette peste, cracha Miyako. Parce que si elle devient la nouvelle duchesse, c'est moi qui m'en vais, malgré l'affection que je porte à Sa Grâce.
Beaucoup de domestiques étaient d'accord avec cette affirmation. Mais certains – comme Shin et Tamashi – ne pourraient pas partir du château.
_ Tu abandonnerais le duc entre ses griffes ? s'épouvanta la jeune femme de chambre. Je croyais que tu l'aimais comme un fils, Miyako !
_ Crois-moi Aika, ça me ferait très mal de partir mais je ne pourrai pas supporter que cette idiote devienne la nouvelle duchesse ! Monsieur Toshiro mérite mieux que ça !
Tout le monde garda le silence après l'éclat de la cuisinière. Il est vrai que si Melle Hinamori devenait la nouvelle dame du château, leur vie deviendrait un enfer. Il fallait trouver un moyen pour empêcher ce drame d'arriver mais ils ne pouvaient rien faire, en qualité de simples domestiques.
_ Ce n'est pas une femme pour lui, renchérit le majordome sur un ton définitif. Et je suis sûr que Sa Grâce le sait.
Tous acquiescèrent sombrement.
_ D'après certaines rumeurs qui courent dans le village, il paraîtrait que notre duc apprécierait la compagnie de la jeune sœur de Monsieur Ichigo, révéla Aika sur un ton de conspiratrice.
_ Quelle gentille jeune fille ! s'extasia la cuisinière en chef. Elle ferait une parfaite duchesse !
_ Comme tu dis !
Les domestiques burent tous leur thé tranquillement en continuer de polémiquer sur cette rumeur qui, si elle s'avérait exacte, rendrait folle de jalousie la fiancée en titre. Cette idée amena un sourire triomphant sur les lèvres de Miyako et Aika.
_ Comme j'aimerai la voir morte de peur à l'idée de ne pas obtenir le titre qu'elle convoite depuis tant d'années... fit sadiquement la femme de chambre en reposant sa tasse.
_ Ce serait tellement hilarant !
Cependant la bonne humeur retomba bien vite. Ce n'était pas près d'arriver et le mariage ducal était prévu pour dans un mois et quelques jours. Le jeune duc ne reviendrait pas sur un engagement établi publiquement à moins d'un scandale qui pourrait entacher l'honneur de la famille ducale.
_ C'est beau de rêver, soupira Shin en remuant le liquide au fond de sa tasse. Pourquoi feu Sa Grâce le cinquième duc a-t-il choisi pour son enfant unique une femme qui ne le rendra pas heureux ? Qu'avait-il en tête ?
Personne ne répondit mais il était vrai que le vieux duc n'avait pas fait preuve de discernement dans le choix de la fiancée de son fils. Le seul qui pouvait y changer quelque chose était le fiancé lui-même mais pour cela, il fallait qu'il trouve quelque chose de compromettant qui obligerait le duc à rompre les fiançailles.
_ Quand je suis entré dans son bureau, tout à l'heure, j'ai remarqué que Sa Grâce était vraiment préoccupé par quelque chose, dit le majordome. Il tenait dans ses mains ce que je pense être une lettre.
_ Elle doit beaucoup le travailler, déclara Tamashi. Ce n'est pas la première fois qu'il la lit, je suppose qu'elle a toute son importance.
Ses compagnons hochèrent la tête. Personne ne savait ce que contenait cette fameuse lettre mais ils étaient curieux de le découvrir.
Quelques jours plus tard, Karin errait sans but dans la maison de son frère. Il était très tôt et personne n'était encore réveillé. La jeune fille dormait de moins en moins et se fatiguait très rapidement. Ne pas avoir de nouvelles de sa sœur jumelle lui mettait les nerfs en pelote.
_ Yuzu, où es-tu, bon sang ?
La brune mourrait d'envie de frapper quelque chose mais si elle le faisait, elle risquerait de réveiller son frère et sa femme. Entre ses pensées pour le duc Hitsugaya et celles pour sa sœur, elle ne savait plus où donner de la tête.
La peur lui nouait les entrailles et pourtant, elle n'était pas du genre à être facilement effrayée. Mais cette fois, c'était différent : sa vie et celle de sa sœur étaient menacées. Il y avait de quoi avoir la trouille ! Elle ne savait pas du tout ce qui l'attendait mais une chose était sûre : si jamais ce monstre s'en prenait à elle, il allait connaître sa douleur.
Cette pensée fit sourire la brune. Elle n'était pas du genre à se laisser faire et le ravisseur s'en mordrait les doigts. Mais si Yuzu était blessée, elle ne répondrait plus de rien ! Foi de Karin !
_ Il faut que je m'occupe sinon je vais devenir folle, chuchota-t-elle pour elle-même. Je ne peux pas sortir seule, c'est trop dangereux... Il ne me reste que le bureau de mon frère. J'emprunterai un livre pour passer le temps.
Sa résolution prise, elle se dirigea dans la seule pièce de la maison où elle se sentait pleinement en sécurité : le bureau d'Ichigo. La présence de son frère la rassurait, elle sentait son odeur partout dans la pièce. Elle prit un livre sur une étagère et alla s'installer correctement dans un fauteuil.
Quelques heures plus tard, la jeune fille fut réveillée par son père qui se tenait devant elle avec un sourire débile.
_ Qui c'est qui va faire un gros câlin à son papounet ? Qui c'est ?
Ichigo soupira en entrant dans la pièce . Son idiot de père ne pouvait s'empêcher de jouer les imbéciles heureux. Que c'était agaçant !
_ Pas moi, balança Karin en se levant du fauteuil où elle s'était assoupie. Salut Ichi-nii...
_ Bonjour Karin...
Le roux survola la pièce de ses yeux noisettes et revint sur sa sœur.
_ Depuis quand es-tu là ?
_ Depuis ce matin, six heures, je crois...
En entendant la réponse de sa cadette, Ichigo secoua la tête de découragement. Décidément, il n'y en avait pas un pour rattraper l'autre dans cette famille de dingue.
_ Tu n'arrivais pas à dormir, c'est ça ? demanda le jeune homme tout en sachant la réponse.
Karin ne répondit pas, sachant pertinemment que son frère connaissait la vérité. Depuis ces événements fâcheux, la jeune fille peinait à trouver un sommeil paisible. Elle s'épuisait de jour en jour.
_ Il faut que tu te reposes un peu, c'est important tu sais, soupira le roux. Demain, c'est le bal du duc et tu dois être en forme.
Elle avait oublié ce détail ! Elle espérait que ça allait lui changer les idées, elle en avait vraiment besoin. À la pensée qu'elle allait revoir le duc Hitsugaya, le cœur de la brune s'emballa dans sa poitrine. Rien qu'à penser à ses yeux turquoises et à ses cheveux d'argent, elle se sentait fondre. Qu'elle était faible !
Mais à ce bal, elle allait forcément tomber sur la fiancée du duc. Qu'elle aimerait éviter cette rencontre... La future duchesse était tout ce qu'elle ne serait jamais. Cependant, elle était tout de même curieuse de voir à quoi elle ressemblait, cette Hinamori. Et cette soirée était l'occasion pour ça.
_ Allô ! La Terre appelle Karin !
La voix de son frère aîné l'arracha de ses douces pensées et la ramena à la triste réalité. Elle réprima un soupir de tristesse.
_ Désolée, j'étais ailleurs...
_ On avait vu, petite sœur, se moqua gentiment Ichigo. Viens, on va rejoindre Orihime qui prépare le déjeuner.
S'apprêtant à suivre son aîné, Karin ressentit une drôle d'impression.
_ Ne te fais pas avoir, Karin...
Mais elle connaissait cette voix ! C'était celle de sa sœur jumelle ! « Tiens bon, Yuzu ! On va te sortir de là ! »
A quelques kilomètres de là, Yuzu se tenait assise contre le mur de sa cellule. Pendant un bref instant, elle avait pu entendre la voix de Karin. Cette pensée lui fit monter les larmes dans ses yeux clairs. Depuis combien de temps n'avait-elle pas vu sa sœur ? Elle ne saurait le dire. La prisonnière avait perdu depuis longtemps la notion du temps.
_ Il ne faut pas que tu sois attrapée, j'espère qu'on te protège, murmura-t-elle faiblement.
Ses forces l'abandonnaient d'heure en heure. Elle tenait uniquement grâce à sa volonté.
_ Comment va ma charmante invitée, aujourd'hui ?
Cette voix lui donnait toujours autant la chair de poule. Yuzu avait failli sursauter mais elle ne voulait pas faire ce plaisir à cette ordure.
_ Tu sais, le moment est bientôt venu pour que je passe à l'action, ma petite.
La jeune fille se figea en entendant ces mots. Oh non ! Il ne fallait pas qu'il...
_ Ta sœur va bientôt te tenir compagnie et vous aurez le restant de vos jours pour vous retrouver.
_ Laissez Karin tranquille !
L'homme prit le visage de l'aînée des jumelles dans sa main et la força à le regarder dans les yeux. Elle ne supportait pas ce contact et elle se retenait de trembler.
_ Sinon, que feras-tu ma jolie ? Tu es impuissante ici.
Il se pencha à son oreille et lui lécha le cou.
_ Lâchez-moi ! Vous êtes écœurant !
_ Et encore, tu n'as rien vu, belle enfant.
Mon Dieu ! Combien de temps allait encore durer ce supplice ? Elle ne demandait qu'à mourir pour enfin avoir la paix. Mais elle ne devait pas flancher, il fallait qu'elle tienne. Yuzu voulait revoir sa sœur une dernière fois avant de quitter ce monde... Est-ce que son souhait lui serait accordé ?
_ Que cherchez-vous ? Pourquoi faites-vous une chose pareille ?
Le ravisseur poussa un soupir d'impatience. Voilà que cette petite peste recommençait avec ses questions ! Il allait lui faire voir qu'il ne fallait pas le provoquer.
_ Tu n'as pas à poser de question, tu n'es rien ici, rien qu'une prisonnière à éliminer...
Elle le savait. Elle allait vraiment être tuée par cet homme. « Que quelqu'un vienne à mon secours ». Ses yeux caramels se fermèrent tout seul et la jeune fille retomba dans l'inconscience.
_ Ne t'en fais pas, tu ne seras pas seule longtemps.
Sur ces mots, l'homme quitta la cellule avec un rire sadique.
« Petite Karin, tu seras bientôt à moi ! »
Pendant ce temps, ignorant tout de ce qui se passe, Karin se prélassait dans son bain. Mais elle n'arrivait pas à rester sereine bien longtemps. Le calvaire que sa sœur devait endurer lui tordait le cœur. « Que nous veulent-ils ? C'est quoi leur problème à ces types ? » La jeune fille ne pourrait profiter pleinement de sa nouvelle vie tant que sa sœur n'était pas avec elle.
_ Yuzu, tiens le coup.
La brune secoua la tête, chassant ses idées noires. Elle préféra songer à tout ce qui était arrivé depuis qu'elle était partie habiter chez Ichigo. Tout d'abord, un nouveau chez elle où elle se sentait bien. Pas la peur de mourir de faim, pas cette sensation de froid et surtout, elle n'était plus seule à ruminer ses sombres pensées.
Ensuite, la rencontre officielle avec le duc Toshiro Hitsugaya. Dès la première fois qu'elle l'avait vu, elle était tombée sous le charme de ses prunelles turquoises. Lui avait-il jeté un sort ? Toujours est-il qu'elle ne parvenait pas à se l'enlever de la tête. Où qu'elle soit et quoi qu'elle fasse, Karin pensait toujours à lui.
Certes l'amour qu'elle lui portait était une grande souffrance mais elle ne regrettait pas de le connaître. Ses sentiments ne seraient jamais réciproques et cette idée lui arrachait le cœur. Cependant ça valait le coup de souffrir si elle était avec lui. Sa seule présence lui suffisait.
La brune ne savait plus comment elle devait se comporter avec le jeune duc. Elle voulait l'éviter mais dans le même temps, ne pas le voir la faisait souffrir davantage. Il fallait vraiment qu'elle prenne une décision à ce sujet.
L'eau devenue froide, Karin fut contrainte de sortir du bain. Elle entoura son corps avec une serviette et se rendit dans sa chambre pour chercher des vêtements. Elle prit dans la penderie une robe toute simple et retourna dans la salle d'eau pour finir de se préparer pour le dîner. La jeune fille n'avait pas le cœur de dîner en famille mais il ne fallait pas qu'elle reste seule, sinon elle allait encore ressasser ses idées noires.
Soudain, elle entendit qu'on frappait à la porte de sa chambre.
_ Karin, le dîner est prêt, l'avertit Orihime à travers la porte.
_ J'arrive !
Les bruits de pas s'éloignait et Karin finissait de coiffer sa longue chevelure noire tout en laissant ses pensées vagabonder vers un terrain interdit. Pourquoi était-elle aussi fébrile à l'idée de revoir le jeune duc, le lendemain soir ? Elle était vraiment incorrigible...
La jeune fille ne parvenait pas à se faire à l'idée qu'il n'était pas pour elle. Ils n'appartenaient pas au même monde, songea-t-elle en sentant son cœur se broyer dans sa cage thoracique. Et de plus, il était fiancé à une autre... Cette idée lui faisait monter les larmes aux yeux. Dorénavant, Karin savait que si le duc ne l'aimait pas, elle ne se marierait jamais. Triste mais tellement vrai. Elle ne pourrait pas tomber amoureuse d'un autre homme que lui.
Séchant ses larmes d'une main rageuse, Karin se rendit dans la salle à manger où tout le monde l'attendait. Remarquant ses yeux rougis, la rousse fronça les sourcils. Elle avait encore pleuré ? Désolée pour la jeune fille, Orihime commença le service.
Elle aussi connaissait cette souffrance d'aimer sans retour. Pendant de longs mois, elle avait aimé Ichigo en secret et celui-ci ne l'avait pas remarqué. Grâce à son frère – Dieu ait son âme – et Renji, elle était mariée aujourd'hui à l'homme qu'elle aimait désespérément.
_ Tout le monde est servi ?
Tous acquiescèrent sans mot dire. Le comportement de la sœur de son mari inquiétait beaucoup Orihime. Elle chipotait dans son assiette sans vraiment manger. Mais que lui arrivait-il ? La rousse savait que le sort de Yuzu la préoccupait beaucoup mais elle sentait qu'il y avait autre chose. Karin était malade d'amour. Elle ne pensait pas que les sentiments de la brune pour le duc étaient aussi puissants.
Karin essayait de manger mais elle avait la gorge serrée. Trop de choses la travaillaient et elle n'arrivait plus rien à gérer. Elle avait la sensation que sa tête allait exploser sous le trop plein d'émotions.
Soudain elle sentit la main de son frère sur son épaule. Interloquée, la brune tourna la tête vers lui.
_ Karin, ça va ? Tu m'inquiètes, tu sais, murmura le jeune homme roux.
_ J'ai l'impression que je vais perdre la tête, je ne sais plus où j'en suis... J'ai l'impression de devenir folle ! fit-elle en prenant sa tête entre ses mains.
Décidément, sa sœur allait encore plus mal qu'il ne le pensait. Ichigo ne savait pas quoi faire pour l'aider et il détestait être aussi impuissant. Il capta le regard inquiet de sa femme et lui fit comprendre qu'il fallait lui parler. Ça devenait urgent...
Deux heures plus tard, alors qu'elle était dans son lit, Karin ne parvenait pas à s'endormir et n'arrêtait pas se tourner sans parvenir à trouver une place correcte. Pourquoi songeait-elle toujours à ce qu'elle ne devait pas ? Si elle ne se connaissait pas aussi bien, la jeune aurait pensé être masochiste. Aimait-elle vraiment souffrir ? On pourrait se poser la question.
« Assez rêvassé, il faut que j'arrive à dormir un peu, sinon je serai épuisée, demain soir... » Il ne fallait pas qu'elle paraisse à son désavantage, sinon la honte pour elle et sa famille. Sur cette bonne résolution, Karin ferma ses yeux et plongea dans un sommeil sans rêve.
Le lendemain matin, samedi, jour du bal au château du duc Hitsugaya.
La sœur d'Ichigo se tenait prostrée dans sa chambre, le stress l'envahissait à l'idée de faire ses premiers pas dans le monde. Elle espérait qu'elle serait à la hauteur de ce qu'on attendait d'elle. Noyée dans son appréhension, elle n'entendit pas Orihime frapper à la porte de sa chambre et entrer après s'être annoncée.
_ Karin, bien dormi? fit-elle en ouvrant les rideaux pour laisser entrer la lumière du soleil. Quelle belle journée qui s'annonce !
La brune était reconnaissant à sa belle-sœur de ne pas lui montrer sa peur et de faire comme si de rien n'était. Si seulement elle pouvait être comme elle...
_ Mieux dormi que d'habitude...
La réponse de Karin fit sourire la jeune femme.
_ Bien, on a pas mal de choses à faire aujourd'hui, fit Orihime en prenant le bras de Karin.
_ Quoi ?
La femme de son frère ne daigna pas répondre et l'entraîna dans la salle à manger. Karin manqua de trébucher dans les escaliers. Elle ne savait pas qu'Orihime possédait autant de fougue. Cette idée la fit sourire involontairement. Avec un mari comme son frère, il ne valait mieux pas en manquer, en effet.
_ Où est mon frère ?
_ Il est au château, il rentrera en début d'après-midi, lui apprit la rousse en déposant le bol de chocolat en face de la jeune fille.
_ Mais il avait une journée de congé, aujourd'hui ! s'écria Karin en écarquillant les yeux.
Orihime prit en face d'elle avant de répondre dans un soupir.
_ Apparemment Sa Grâce l'aurait fait demander ce matin, c'est tout ce que je sais.
_ Bizarre, murmura la brune. Tu crois que le duc a des problèmes ?
L'inquiétude qui transparaissait dans la voix de la brune fit sourire tristement Orihime.
_ Ne t'en fais pas, la rassura-t-elle. S'il y un homme capable de se sortir d'une situation difficile, c'est bien le duc.
L'affirmation de sa belle-sœur ne laissait aucune place au doute et Karin se sentit mieux pendant un instant. Elle attaqua alors son petit déjeuner avec appétit. Il fallait qu'elle prenne des forces pour ce qui l'attendait le soir même.
Un silence apaisant s'installa durant quelques minutes, durant lesquelles les deux femmes parlaient de tout et de rien. Mais le visage de Karin devint soudainement grave et ses prunelles noires montraient de la peur.
_ Dis, Orihime ?
_ Oui ?
_ Tu crois qu'Il va revenir ?
La question de la jeune fille fit sursauter la femme d'Ichigo qui ne s'y attendait pas du tout. Elle l'espérait de tout cœur mais elle en doutait. La personne qui voulait s'en prendre à Karin avait tout l'air d'être une personne qui ne reculait devant rien pour arriver à ses fins.
_ J'aimerai le croire, Karin...
Il ne fallait pas se mentir : Karin s'attendait à cette réponse. Seulement c'était vraiment difficile à gérer, toute cette pression sur ses jeunes épaules. L'idée que le ravisseur puisse s'en prendre à elle à tout moment lui faisait froid dans le dos. Des picotements désagréables montaient le long de sa colonne vertébrale.
_ Je m'en doutais, soupira-t-elle en baissant les yeux. Je ne peux supporter cette attente, c'est insoutenable !
Orihime comprenait cette peur et tout comme Karin, elle voulait que Yuzu soit en sécurité. Mais pour le moment, la police ne disposait d'aucun élément concret qui permettrait d'avancer dans cette enquête. Ce qui mettait les nerfs de la famille Kurosaki à rude épreuve...
_ Si... tu savais... à... à quel point... j'ai peur, balbutia la brune en retenant ses larmes avec difficulté.
Orihime se leva de sa chaise et vint prendre la sœur de son mari dans ses bras, pour lui donner du courage. Elle se mit à lui caresser les cheveux tout en lui murmurant des paroles apaisantes.
_ Je le sais, Karin, tu peux me croire... Mais fais confiance à Ichigo : il ne laissera pas cette ordure gagner. Et encore une chose, continua-t-elle en la regardant dans les yeux. Si le ravisseur voit que tu es effrayée, il sera fier de son coup. Sois forte et montre-lui que tu ne le crains pas.
En for intérieur, Karin reconnaissait que sa belle-sœur avait entièrement raison. Elle se laissait aller et ça ne lui ressemblait pas. Il fallait qu'elle se reprenne et vite.
_ Tu sais, je te considère comme une petite sœur donc si tu as besoin de moi, je serai toujours là pour toi, déclara Orihime avec un doux sourire mouillé de larmes.
Le flot de larmes que Karin contenait avec peine depuis tout à l'heure dévalait ses joues sans qu'elle ne puisse les retenir. Les mots de la rousse la touchaient au cœur. Décidément, son frère avait de la chance d'avoir trouvé une femme comme elle.
_ Merci !
Une petite heure après cette séquence intense en émotion, Orihime et Karin s'étaient installées dans le bureau d'Ichigo. L'une brodait avec application tandis que l'autre lisait un livre parlant d'un amour impossible entre un noble et une paysanne. Voilà qui était bien à propos, songea Karin avec amertume. Évidemment, les deux héros du livre auraient plus de chance qu'elle : après tout il se marieront et vivront heureux pour l'éternité.
Avisant ce que la rousse était en train de faire, Karin se demanda ce que c'était.
_ Dis, Orihime... Qu'es-tu en train de faire ?
Celle-ci reposa son ouvrage à côté d'elle et se tourna vers Karin, remarqua la lueur intéressée dans son regard sombre.
_ Je brode le nom de mon bébé sur un bavoir que ton père m'a offert, il y a deux mois.
_ Je peux voir ?
La femme d'Ichigo hocha la tête et lui tendit l'ouvrit qu'elle prit avec précaution.
_ C'est vraiment joli, s'extasia la brune après quelques secondes de silence. Tu pourrais m'apprendre ?
Orihime songea que ce n'était pas une si mauvaise idée. Ça permettrait à Karin de penser à autre chose pendant quelque temps. Elle se leva en lui souriant et alla dans sa chambre où elle rangeait tout son attirail de broderie pour ramener tout ce qu'il fallait à Karin pour commencer.
_ Tiens voilà ton matériel...
_ Mais...
La rousse soupira de découragement en entendant les protestations de la sœur d'Ichigo. « Pas un pour rattraper l'autre » songea-t-elle attendrie.
_ C'est un cadeau que je te fais, ne le refuse pas.
En voyant la brune examiner son cadeau avec application, Orihime était contente d'elle. Ça pourrait toujours lui servir, pour son futur enfant, par exemple.
_ Merci, Orihime.
La jeune femme sourit sans répondre et commença à lui expliquer comment s'en servir. Karin écoutait avec attention les conseils de sa belle-sœur. Elle aimerait tellement lui poser une question mais elle ne savait pas si elle avait le droit de le faire. La brune ne voulait pas la mettre mal à l'aise. « J'attendrai un peu ».
Après trois quarts-d'heure, Orihime remarqua avec fierté que Karin avait compris tous les rudiments de la broderie. Depuis quelques instants, la rousse avait pu voir que la jeune fille semblait un peu mal à l'aise. Que lui arrivait-il ? Elle espérait qu'il ne s'agissait de rien de grave.
_ Karin, je te trouve bizarre... Quelque chose ne va pas ?
Décidément, elle était vraiment transparente. Comment Orihime avait-elle pu remarquer son malaise, alors qu'elle faisait tout pour le cacher ? La femme de son frère était étonnement perspicace, il faudrait qu'elle fasse attention à l'avenir.
_ C'est juste que quelque chose m'intrigue, à vrai dire, dit-elle sans conviction.
_ De quoi s'agit-il ?
Karin réprima un soupir de résignation. Elle savait que si elle n'avait pas de réponse, Orihime n'allait pas la lâcher. Pour ça, elle et son frère faisaient la paire. Elle se résolut donc lui parler de ce qui l'intriguait depuis pas mal de temps.
_ Tu es à combien de mois de grossesse ?
_ Cinq mois, pourquoi ? Ça t'intrigue, c'est ça...
_ Pas faux, lâcha la brune en posant ses prunelles noires sur le ventre arrondi de la jeune femme.
La fierté maternelle qui transparaissait dans le sourire éclatant de sa belle-sœur émut Karin aux larmes. Orihime ferait une bonne mère, elle en était persuadée. L'amour qu'elle portait à son enfant pas encore né était dans ses gestes doux et aimants. Karin avait remarqué que la rousse posait très souvent ses deux mains sur son ventre, comme pour le protéger.
_ C'est une fille ou un garçon?
_ Mon instinct me dit que c'est une petite fille, répondit Orihime en levant ses yeux gris sur la brune.
_ Tu as déjà trouvé une idée pour le prénom ?
Orihime sourit devant la curiosité de Karin. Elle comprenait parfaitement que tout ça pouvait être vraiment intriguant, elle ne lui jetait pas la pierre.
_ Si c'est une fille, on aimerait l'appeler Masaki, comme la mère d'Ichigo et si c'est un garçon, Sora. C'était le nom de mon frère aîné.
_ J'aime beaucoup !
À la mention du nom de son frère, Karin avait remarqué que les perles grises de la rousse s'étaient assombris et que les larmes menaçaient de couler à tout instant.
_ Tu as perdu ton frère, mais tu sais c'est une magnifique façon de lui rendre hommage, fit Karin en posant délicatement sa main sur l'épaule de sa belle-sœur. Je suis sûre que là où il est, il est fier de toi.
_ Merci, Karin.
Malgré le sourire qu'elle affichait, Orihime savait pertinemment que Karin était morte de peur. Toujours aucune nouvelle de la police qui recherchait Yuzu activement et qui protégeait sa jumelle comme elle le pouvait. Elle-même n'imaginait pas comment elle serait si on voudrait s'en prendre à elle.
La rousse leva ses yeux gris sur la fenêtre et se mit à penser à la conversation qu'elle avait eu avec Ichigo, il y avait trois jours de ça...
Flash-back trois jours auparavant :
Ichigo avait demandé à Orihime de venir la rejoindre dans son bureau quand elle aurait terminé de s'occuper de la maison car il fallait qu'il lui parle de quelque chose d'important, sans que Karin soit au courant.
En finissant de ranger la vaisselle, la jeune femme ne savait pas à quoi s'attendre mais elle se doutait que c'était important, vu l'expression anxieuse sur le visage de son mari.
Orihime entra dans la pièce et ferma la porte derrière elle, pour éviter les oreilles indiscrètes.
_Je t'écoute, Ichigo...
Le roux inspira une grande bouffée d'air frais et consentit à la regarder dans les yeux. Ce qu'il pouvait y lire n'était pas du tout à son goût. Le jeune régisseur serra les poings sous son bureau et commença à parler d'une voix où on pouvait percevoir de l'irritation.
_ J'en ai assez de ne pas avoir de nouvelles de la police, alors j'ai décidé de prendre les choses en main, fit-il en lui tendant une feuille.
Orihime prit le temps de déchiffrer ce qu'elle contenait et ce qu'elle pouvait y voir n'était pas vraiment surprenant de sa part. Il avait décidé de prendre les choses en main et personne ne pourrait l'en empêcher, pas même la police.
_ Tu penses que c'est une bonne idée ?
_ Oui mais il ne faut pas que ma sœur soit au courant, sinon elle paniquerait encore plus que maintenant, décida Ichigo en se levant pour se mettre à genoux devant sa femme. Tu sais, je ferai exactement la même chose si c'était toi...
Orihime posa son front sur celui de son mari et lui fit un sourire dans lequel on ne pouvait que voir l'amour qu'elle lui portait.
_ Je sais, Ichigo. Mais pour le moment, ce sont tes deux sœurs qui sont en danger.
_ Pas un mot à Karin, s'il te plaît Hime...
_ Ne t'en fais pas, je ne dirai rien.
Fin Flash-back.
La jeune femme savait que son mari avait pris une bonne décision mais il ne fallait pas que ça se retourne contre eux. On ne pouvait pas le prévoir mais il fallait tout de même rester prudent. Ichigo l'avait rassuré en lui disant que chaque candidat serait soumis à une enquête très poussée. Après tout, il bénéficiait du soutien du duc Hitsugaya.
En pensant à lui tout à coup, la rousse se demanda pour quelle raison il aidait Ichigo avec autant d'ardeur. Peut-être avait-il un intérêt tout particulier dans cette affaire. Cette idée la fit sourire. « Votre Grâce, ceci ne m'étonne même pas. Ainsi donc, vous... »
Karin interrompit brutalement ses pensées et lui indiquant l'heure sur la pendule.
_ Déjà 14h00 ? Vite, on doit se préparer pour ce soir !
Sans lui laisser le temps de protester, Orihime tira Karin par le bras et l'emmena dans sa chambre où elle ouvrit la penderie en grand. De temps en temps, la brune pouvait voir les prunelles grises de sa belle-sœur la jauger durant quelques secondes, puis secouer la tête pour reporter son attention sur les robes.
Karin se demandait pourquoi Orihime était aussi fébrile à l'idée de l'habiller pour le bal. Ce n'était qu'un bal, après tout. « Un bal où tu te retrouveras face au duc qui fait battre ton cœur » lui murmura sournoisement la voix de sa conscience. Son cœur dansait la salsa dans sa poitrine à l'idée de revoir ces prunelles de glaces tellement hypnotiques. Non, songea-t-elle vivement. Ce n'était pas le moment de rêver éveillée, elle devait se mettre en valeur pour le soir.
_ Regarde, Karin, dit Orihime au même moment en se retournant vers elle. Tu penses quoi de celle-ci ?
La jeune fille examinait la robe que sa belle-sœur lui montrait avec espoir. Elle était magnifique ! Le vêtement noir pailleté mettrait en valeur sa peau claire et ses yeux sombres. La soie tombait avec délicatesse et il ne faisait aucun doute pour Karin qu'elle choisirait cette toilette.
_ Elle est vraiment belle, répondit la brune en tendant ses mains afin de toucher le tissu.
_ Va l'essayer, alors, lui sourit la rousse.
Karin se rendit dans la salle de bain attenante à sa chambre et se mit en devoir d'enlever tous les vêtements qu'elle portait. Une fois parée de cette robe, la jeune sœur d'Ichigo sortit de la pièce et attendit le verdict d'Orihime, qui semblait être sans voix.
_ C'est une bonne ou une mauvaise chose que tu aies perdu ta langue ? se moqua-t-elle avec un brin d'appréhension.
_ Tu es magnifique, Karin ! J'avais raison, c'est le noir qui te met le plus en valeur, ajouta la rousse avec un sourire de victoire.
La robe de la plus jeune choisie, il était temps pour Orihime de choisir la sienne. Elle ne savait pas encore quelle tenue choisir et avec sa grossesse, ce serait encore plus compliqué.
_ On s'occupe de la tienne, maintenant ?
La voix de la sœur de son mari l'arracha à ses pensées. Puisqu'elle semblait désireuse de l'aider, Orihime la laisserait faire avec plaisir.
_ Suis-moi, l'invita-t-elle en sortant de la pièce.
Elles se rendirent ensemble dans la chambre maritale où Karin se sentait un peu mal à l'aise. Il n'y avait pas de quoi mais c'était plus fort qu'elle. C'était la première fois qu'elle mettait les pieds dans cette pièce depuis son arrivée dans la maison de son frère.
_ J'hésite entre ces deux-là, lui montra la maîtresse de maison.
_ Celle-ci, sans l'ombre d'un doute !
Karin avait choisi une robe de soie verte ornée de dentelle blanche sur le buste. Elle dénudait légèrement les épaules et tombait fluidement jusqu'aux chevilles.
_ Je vais aller l'essayer pour que tu puisses voir.
Pendant ce temps, la brune laissait errer ses yeux sombres dans la chambre. On ressentait la présence des deux personnes qui y dormaient. Sur la cheminée, elle remarqua des photos et curieuse comme elle l'était, la jeune fille ne put s'empêcher d'y jeter un œil.
Dessus, elle voyait Orihime plus jeune en compagnie d'un homme que Karin n'avait jamais vu. Ce devait être le frère de la rousse, devina-t-elle avec tristesse. Dire qu'elle n'aurait jamais la chance de le connaître, étant donné qu'un accident de cheval lui avait coûté la vie. Mais Karin en était sûre : Sora Inoue devait être quelqu'un de bien.
À peine avait-elle eu le temps de retourner à sa place qu'Orihime fit son apparition devant elle.
_ On dirait une princesse... souffla Karin, statufiée par la surprise.
La robe dessinait avec perfection la silhouette élancée de la jeune femme. Sa chevelure auburn attachée en chignon dégageait son cou et ses yeux gris légèrement maquillés lui dévoraient le visage. Il n'y avait pas à dire : Karin n'avait jamais vu de femme aussi belle.
_ Merci.
La porte d'entrée claqua soudain avec virulence et Karin descendit à toute vitesse tandis que la rousse se changeait, pour ne pas que son mari la voit ainsi habillée.
_ Tout va bien, Ichi-nii ?
Le régisseur tourna la tête vers sa sœur cadette et put voir dans ses prunelles qu'elle était inquiète.
_ Ne t'en fais pas, la rassura-t-il en posa son manteau sur le canapé du salon. C'est juste la fiancée du duc qui vient toujours au moment où il ne le faut pas.
Karin garda le silence et se dirigea lentement vers la cuisine où elle commença à prendre le plat de sandwichs pour les poser sur la table de la salle à manger.
Tandis qu'elle dressait la table pour trois personnes, elle sentit le regard noisette de son frère peser sur elle. Elle n'aimait pas qu'on la fixe de cette manière et Ichigo le savait. Alors pourquoi le faisait-il ?
_ Tu as quelque chose à me dire ?
La voix sèche de la brune fit sursauter son aîné.
_ Rien de spécial, c'est juste que je me demandais si tu avais trouvé ta robe pour ce soir...
_ C'est fait, Orihime m'a aidée, lui apprit Karin en posant la dernière fourchette à sa place.
En parlant du loup, celle-ci faisait son entrée dans la pièce comme si de rien n'était. Karin avait tout préparé donc elle n'avait plus rien à faire. Elle s'installa alors en face de son mari et tous commencèrent à manger de bon appétit les en-cas que la brune avait préparé seule.
Environ trois heures plus tard, pendant que les Kurosaki faisaient la route pour aller au château, Toshiro errait dans les couloirs tout en réfléchissant. Toute cette histoire avec son père le travaillait beaucoup et il ne savait quoi en penser. Avait-il raison de faire confiance à son instinct qui lui disait que ses parents avaient été assassinés ? Ou se fourvoyait-il ?
Et ce qui se passait avec les deux sœurs Kurosaki n'était pas anodin. Il pensait très – trop – souvent au danger qui menaçait la jeune Karin. Et le fait que sa jumelle soit déjà entre les mains de ce fou n'était pas pour le rassurer. Il aimerait avoir le fin mot de cette histoire mais il fallait prendre son mal en patience.
Le jeune duc se dirigea d'un pas rapide vers sa chambre afin de commencer à se préparer pour le bal du soir-même. Il se sentait étonnamment fébrile à l'idée de cette soirée. Décidément, quelque chose clochait chez lui, il en était persuadé. Le simple fait de revoir la sœur cadette de son régisseur lui faisait battre le cœur plus vite.
Que lui avait-elle fait ? Il ne se comprenait plus. Depuis qu'il avait fait sa connaissance, Karin Kurosaki ne quittait plus ses pensées troubles. Il ne pouvait nier la trouver belle mais il n'avait pas le droit de le penser. Il se devait d'être fidèle à sa fiancée tant qu'il n'aurait pas trouvé un moyen d'annuler leur engagement.
_ Dans quel guêpier me suis-je mis ? soupira Toshiro en retirant sa chemise noire. Je dois vraiment arrêter de divaguer.
Le jeune seigneur se posa devant la fenêtre de sa chambre. Le paysage enneigé ne l'apaisa pas, contrairement à ce qu'il espérait. La jeune fille l'avait charmé inconsciemment mais il devait rester insensible. Après tout, il était doué pour ce genre de choses.
_ Bon, il faut que je me prépare au lieu de rêvasser !
Sur ces paroles, le duc se dirigea dans la salle d'eau et entreprit de se changer. Quelques minutes plus tard, le voilà fin prêt à recevoir ses invités qui n'allaient plus tarder à arriver. D'ailleurs, il pouvait voir quelques voitures entrer dans la cour du domaine. Il descendit pour aller à leur rencontre.
Alors que le carrosse s'engageait dans l'allée qui menait au château, Karin posait des yeux émerveillés tout autour d'elle. Le parc était magnifique, la neige le nimbait d'une part de mystère. Ce devait être merveilleux de vivre dans cet endroit toute l'année. En face d'elle se trouvait la demeure du duc... Elle ne revenait pas de ce qu'elle voyait : le château était illuminé et elle se serait crue dans un conte de fées. Ne manquait plus que le prince charmant, songea-t-elle amusée.
Ichigo ne manquait rien des expressions sur le visage de sa jeune sœur. Il fallait dire que le duc n'avait pas fait les choses à moitié. Il posa son regard noisette sur sa femme et ce qu'il vit l'attendrit. Des étoiles pleins les yeux, celle-ci ne quittait pas le château ducal une seule seconde de son regard gris.
Tous trois descendirent du carrosse avec l'aide du cocher et se dirigèrent vers l'entrée. Karin suivit son frère et sa belle-sœur qui se dirigeaient vers le hall d'entrée où un domestique leur prit leur manteau. La jeune fille ne disait pas un mot, elle était stupéfaite. Elle n'imaginait pas qu'une résidence ducale était aussi somptueuse. Elle n'avait jamais rien vu de tel en dix-huit ans d'existence.
Un majordome les attendait et Ichigo lui adressa la parole avec un petit sourire.
_ Bonsoir Shin, comment allez-vous ? Je ne vous ai pas vu, ce matin.
_ Bien, Monsieur Ichigo et vous ? Fit le majordome sur le même ton en les conduisant à la salle de bal. Je n'avais pas une minute à moi.
Le roux sourit sans répondre. Il s'en doutait, un bal n'était pas facile à préparer.
Karin suivait le moment sans prononcer un mot, tellement la magnificence du château l'enchantait. Elle posait ses yeux sombres partout et nulle part. Elle voulait s'imprégner des lieux tant qu'elle le pouvait, car la jeune fille n'ignorait pas qu'elle n'aurait sans doute pas d'autres occasions de pénétrer dans ce lieu magique avant longtemps.
Tout le monde s'arrêta et le majordome fit un clin d'oeil aux Kurosaki avant de les annoncer d'une voix forte :
_ Famille Kurosaki : Monsieur Ichigo, Madame Orihime et Mademoiselle Karin.
Cette entrée solennelle intimidait beaucoup la jeune fille qui ne savait pas où se mettre. Elle ne se sentait pas à sa place parmi tous ces gens. Mais après un sourire d'encouragement du majordome, elle entra dans la salle de bal et tous les yeux furent rivés sur elle. Karin baissa les yeux, elle n'aimait pas être le centre d'attention de la foule.
Tournant la tête sur sa droite, elle put remarquer la présence de Renji qui se tenait proche de la fenêtre, perdu dans ses pensées. La brune ne savait pas qu'il était invité et elle s'en réjouissait. Au moins un visage connu.
_ Bonsoir, Renji, fit-elle tout bas en s'approchant de lui.
_ Karin ? Comment vas-tu ? répondit le jeune homme en lui souriant de toutes ses dents.
_ Je mentirai si je disais que ça allait... soupira-t-elle. Mais je ne pouvais pas manquer cette opportunité, donc me voilà.
Le vicomte souriait, amusé par le comportement de la sœur de son meilleur ami. Il savait très bien ce qui amenait Karin, en vérité. Orihime l'avait mis au parfum, non sans le prévenir de garder le secret.
_ Ne t'en fais pas, la rassura l'ananas rouge. Reste toi-même et ne pense pas au qu'en-dira-t-on.
Karin le remercia avec un clin d'oeil et parti rejoindre son frère qui n'avait pas bougé.
_ Tiens, Karin !
Mais la jeune fille ne l'écoutait pas. Elle avait vu l'interlocuteur de son frère et son cœur avait fait une embardée dans sa poitrine en constatant qu'il s'agissait du duc Toshiro Hitsugaya.
Le jeune seigneur réprima un sourire en s'apercevant qu'elle n'écoutait absolument pas son frère. Ce côté de son caractère n'était pas pour lui déplaire, il est vrai. Il la vit secouer la tête comme pour reprendre ses esprits et lui adressa un sourire timide.
_ Bonsoir, Votre Grâce, dit-elle en exécutant une révérence parfaite. Votre demeure est magnifique.
_ Bonsoir, Mademoiselle Kurosaki, répondit-il en s'inclinant devant elle. Merci pour ce compliment.
Une valse se fit soudain entendre et le jeune homme aux cheveux d'argent ne se fit pas prier pour lui demander, avec un brin d'espoir dans ses yeux turquoises :
_ Me ferez-vous l'honneur de m'accorder cette danse ?
_ Avec plaisir, Monseigneur, accepta-t-elle en lui tendant sa main.
Non loin de là, une jeune femme assistait à la scène, les yeux emplis de jalousie et de haine. Comment cette idiote pouvait-elle oser faire une chose pareille ? Hinamori se leva de la chaise et se dirigea vers le couple Kurosaki qui regardait la brune danser avec son fiancé.
_ Bonsoir, Monsieur Kurosaki, le salua-t-elle d'une révérence. Ravie de votre présence parmi nous, ce soir.
_ Merci, Mademoiselle Hinamori. Vous êtes ravissante, comme d'habitude.
La fiancée du duc accepta le compliment avec un sourire. Elle se tourna vers Orihime et lui adressa la parole, non sans perfidie :
_ Madame Kurosaki ! Je ne pensais pas vous voir ici !
_ Ravie de vous voir également, ma fatigue est passée donc je ne voulais manquer cet événement sous aucun prétexte.
Pendant ce temps, sur la piste de danse, Karin vivait un rêve éveillé dans les bras de son cavalier. Elle revivait les sensations qui l'avaient assaillie lors de leur première danse chez son frère.
De son côté, Toshiro songea qu'il ne l'avait jamais vue aussi jolie. Les cheveux relevés dégageait son cou gracile et ses yeux légèrement maquillés lui paraissaient être pareils à une nuit étoilée. Il ne pouvait s'empêcher de rechercher son regard sombre.
_ Je suis heureux de vous voir, Mademoiselle Karin.
Le cœur de la mentionnée manqua un battement à l'écoute de ces mots. Que voulait-il dire par là ?
_ Pour quelle raison ?
_ Je dois dire que je n'étais pas sûr de votre venue, avoua le duc en plongeant son regard dans le sien.
_ Je n'allais tout de même pas manquer l'occasion d'impressionner toutes ces personnes de la haute société, Votre Grâce, fit-elle avec autodérision.
Le jeune seigneur étouffa un rire. Décidément, elle ne manquait jamais de le surprendre.
La danse achevée, Toshiro la raccompagna à son frère qui affichait une mine assez inquiétante. Puis le jeune homme remarqua la présence de sa fiancée au côté des Kurosaki. Voilà qui expliquait la mauvaise humeur de son régisseur...
_ Mademoiselle Hinamori, commença Ichigo. Je vous présente ma jeune sœur, Karin Kurosaki.
Karin exécuta une révérence pour la saluer tandis que la jeune femme la jaugeait du regard. Ainsi voilà donc cette Karin dont elle avait entendu parler, songea-t-elle.
_ Et Karin, je te présente Mademoiselle Momo Hinamori, la fiancée de Sa Grâce.
_ C'est un honneur de vous rencontrer.
La fiancée du duc sourit à l'entente de cette phrase guindée.
La sœur d'Ichigo se sentait gauche et minable devant cette belle jeune femme. Elle avait l'impression d'avoir été rabaissée plus bas que terre. Son regard glacial lui avait donné des frissons désagréables. Pourquoi cette haine dans ses yeux ? Elle ne comprenait pas.
Tandis que le duc emmenait sa fiancée danser, Ichigo posa ses prunelles noisettes sur sa sœur qui semblait mal à l'aise. La présence de la future duchesse lui faisait toujours cet effet, à lui aussi.
_ Ne t'occupe pas d'elle, petite sœur, chuchota le roux à son oreille. Elle n'en vaut pas la peine.
La jeune fille hocha la tête sans répondre. Son frère ne devait pas l'apprécier pour parler d'elle de cette façon. Cette idée fit égoïstement plaisir à Karin qui ne put retenir un sourire.
Mais à la vue des deux fiancés sur la piste de danse, son sourire s'évanouit. Une jalousie violente s'empara d'elle et son cœur se broyait. Elle ne pouvait nier qu'ils formaient un beau couple. La souffrance était telle que les larmes menaçaient de couler à tout moment. Mais elle devait se reprendre, il ne fallait pas qu'elle fasse honte à sa famille.
Elle n'eut pas le temps de reprendre ses esprits car le majordome annonçait de nouveaux arrivants.
_ Sa Grâce le duc Kuchiki et mademoiselle Rukia Kuchiki.
Quelques heures plus tard, Karin bavardait avec Rukia comme si elle l'avait toujours connue. La timidité du début avait fait place à une complicité entre les deux jeunes filles.
_ Je ne savais pas qu'Ichigo avait une sœur... Quelle surprise quand le vicomte Abarai me l'a appris !
_ Pour tout dire, j'ignorais avoir un frère jusqu'à il y a deux ans de cela, avoua Karin sur le ton de la confidence.
_ Et quelle a été ta réaction quand tu l'as su ?
_ J'étais surprise et je ne m'attendais pas du tout à ça.
Décidément, elle était magnifique, songea Karin envieuse. La grâce de ses gestes, son attitude simple... Elle comprenait parfaitement que Renji soit tombé sous son charme.
La jeune noble partit rejoindre son frère, non sans promettre de se revoir. Karin se retrouva seule, son frère ayant invité Orihime à danser. Elle en profita pour réfléchir un peu. Enfin, l'espérait-elle car une personne prit place devant elle. Karin tourna la tête, légèrement agacée. Mais son irritation disparut quand elle vit qu'il s'agissait du meilleur ami de son frère.
_ M'accorderais-tu cette danse, jeune demoiselle ?
_ Bien sûr !
La jeune fille prit la main de Renji et le suivit sur la piste de danse. Soudain, un frisson désagréable lui parcourut la colonne vertébrale. Karin vit devant elle le regard plein d'animosité de la fiancée du duc. Mais que lui prenait-il ? Tout ça ne lui disait rien qui vaille.