BioShock Beyond – Tome 1 : Une histoire des profondeurs
Chapitre 2 : Sur les traces de Sullivan
2601 mots, Catégorie: M
Dernière mise à jour 21/07/2021 15:50
Partie II
Plusieurs mois plus tard…
5.
Alan et moi avions trouvé refuge au zoo depuis ce qui s’était passé. Dans la nuit du 31 décembre 1958, un attentat avait eu lieu au Restaurant Kashmir. C’est ainsi que la guerre civile avait commencé, entrainant avec elle Rapture vers sa chute. Durant l’attentat, le propriétaire du zoo avait péri, nous laissant le champ libre pour prendre complètement possession des lieux.
Rapture était encore habitable mais était devenu un endroit très dangereux. Ryan, quant à lui, avait perdu la raison : il faisait tuer tous ses opposants sur la Place Apollon. Il avait nationalisé presque toute la ville. Sa prison secrète, Perséphone, qui fonctionnait à plein régime, était désormais au main de Lamb. Pire encore, de façon inexpliquée, Atlas et tous les chrosômes enfermés dans le magasin Fontaine’s, que Ryan avait fait couler, s’étaient échappés et étaient de nouveau à Rapture. Cette ville était devenue la définition même de l’apocalypse et tout le monde devenait fou.
La vie avait repris tant bien que mal, mais tout avait changé. Les chrosômes rôdaient dans les rues, à la recherche de la moindre goutte d’Adam à déguster sur les Petites Sœurs, bien que les Protecteurs veillassent au grain. En moins d’un an, la situation était devenue insupportable. Heureusement, le zoo était assez éloigné des lieux principaux de la ville et de toute cette agitation. De fait, aucun chrosôme n’était venu jusqu’au zoo et c’était une aubaine pour nous. Mais nous nous attendions au pire.
Quant à moi, j’étais encore en train de chercher des réponses à propos de la mort de ma femme. Plus je cherchais, plus je me disais que ce Sullivan devait avoir raison. Mais quelque chose clochait et je devais savoir quoi. Je ne bougeais presque plus du zoo, je me contentais d’observer le lion à l’intérieur de son enclos et d'écouter en boucle les messages diffusés par les haut-parleurs encore en activité. C’était Alan qui allait chercher les provisions, sans essayer de prendre d’Adam, dont lui non plus n’avait pas besoin, fort heureusement.
Ce dernier n’avait pas eu d’autre choix que de rester ici. Il habitait près de la Place Apollon et son appartement avait été complètement saccagé, comme tant d’autres. Et il était toujours sans nouvelle de son amie Sarah. Il était bien allé faire un tour aux Pêcheries Fontaines, mais avait failli se faire tuer par un chrosôme. Par sécurité, en prévision d’un futur empirement de la situation, nous avions préféré rester au zoo et nous installer.
Un jour, Alan revint de son expédition avec une nouvelle qui allait changer beaucoup de choses pour moi.
Les fesses posées sur mon banc, un revolver à la main, pour les cas de danger extrême, je tournai la tête vers lui.
— Vous n’allez pas en croire vos oreilles ! Je crois que j’ai quelque chose qui pourrait vous intéresser.
— Qu’y a-t-il ? fis-je, intrigué.
— Figurez-vous que l’une de mes relations, qui se baladait du côté des Suites Mercure, m’a annoncé qu’Anna Culpepper avait trouvé la mort dans sa salle de bain, il y a une semaine de cela.
Légèrement attristé par cette nouvelle, je pivotai complètement mon corps vers lui en tournant les épaules.
— La pauvre ! Elle s’est suicidée ?
— D’après ce qu’on m’a dit, un flic a laissé un journal audio sur place. Il avoue l’avoir tué, en la noyant dans sa baignoire.
Je fronçai les sourcils.
— Un flic ? Quel flic ?
— Sullivan, m’annonça-t-il avec enthousiasme.
Ce qu’Alan venait de m’annoncer semblait confirmer mes doutes quant à la mort de ma femme. Anna Culpepper était une chanteuse assez turbulente et avait plusieurs fois menacé Ryan et Cohen, son pire ennemi. Le fait qu’un agent de la sécurité travaillant pour Ryan ait perpétré son meurtre semblait donc indiquer qu’elle avait trouvé la mort à cause de ses opinions.
Or, ma femme était l’une de ses amies. Et si ce soir-là, le 20 décembre 1956, elle avait surpris une conversation qu’elle n’aurait pas dû voir ? Et si ce n’était pas les sbires de Fontaine qui avaient fait le coup mais ceux de Ryan ? Et si c’était Sullivan qui s’était occupé de ma femme comme il s’était occupé de Culpepper ?
Il me fallait trouver cet homme, il me devait sans aucun doute des explications.
6.
D’après ce que je savais de lui, Sullivan avait été un homme d’honneur, défendant la veuve et l’orphelin. Mais personne ne sortait indemne de Rapture. Ici-bas, à Rapture, le bien et le mal n’existaient plus. Cependant, sa loyauté envers Ryan avait dépassé les bornes : trop d’innocents avaient déjà perdu la vie.
Je ne savais pas où il habitait, mais j’avais appris de la bouche de ce bon vieux détective Booker Dewitt, qui le connaissait très bien, que Sullivan avait un bureau dans Port-Neptune, pas loin des Pêcheries Fontaine. C’est là que Sullivan et ses hommes interrogeaient leurs suspects.
Tout ce qu’il me fallait, c’étaient des réponses. La teneur de ses réponses allait ensuite me dicter ce que j’allais faire de lui. Malheureusement, Port-Neptune n’était pas la porte à côté. Même si Alan, qui avait accepté de m’accompagner, s’y était déjà rendu plusieurs fois, je doutais que le voyage serait sans encombre. Nous devions nous préparer à partir.
Grâce au ciel, une Farandole des prix et un El ammo bandito se trouvaient près de la station de bathysphères, à côté du zoo. Alan avait même appris à les pirater pour obtenir des prix avantageux. Avant de quitter le zoo, le lendemain, nous nous chargeâmes donc en munitions.
Tandis que je glissais des munitions de fusil à pompe dans ma poche, j’entendis un bruit près de l’entrée du zoo. Je demandai à Alan d’arrêter ce qu’il faisait. Le bruit ressemblait à du béton qu’on raclait avec une arme en métal. Chose plus étrange encore, il semblait venir de l’une des entrées que l’on avait condamnées. Progressivement le bruit se fit entendre de plus en plus.
— Savez-vous ce que c’est ? demandai-je.
— Si c’est que je pense, on n’est pas loin d’être fichus, répondit-il.
Alors que le bruit se rapprochait, nous chargeâmes nos armes, un fusil à pompe pour moi et un revolver pour lui. C’est alors que je me rendis compte que le bruit ne venait pas d’en face… mais d’en-haut. Effrayé, la bouche sèche, je levai les yeux. Avec horreur, je constatai la situation : un groupe de chrosômes plafonniers se tenait droit au-dessus de nous.
— Courez ! lançai-je à Alan sans réfléchir une seconde.
L’un des chrosômes me sourit et d’un coup sec lança un crochet vers moi, que je réussis à esquiver. Nous courûmes sans nous arrêter jusqu’aux escaliers, puis montâmes jusqu’à l’entrée du zoo, essayant d’esquiver les pluies de crochets. Alan tenta de tirer quelques balles en courant mais rata à chaque fois ses cibles. Seulement à cet instant, je me décidai à me retourner pour voir ce qu’il en était. Du haut des escaliers, je pensais avoir une meilleur vue sur nos ennemis. Alan le remarqua et s’arrêta également.
A vue de nez, il y avait 6 chrosômes, accrochés au plafond, déterminés à nous avoir. Je tirai sur celui de gauche qui grimaça. De nouveau, je tirai et visai la tête. Cette fois, il tomba à terre. Alan réussit également à en toucher un à l’épaule, puis à la tête et ce dernier tomba. Pendant, ce temps, je tentai de recharger mon arme, mais dû me baisser pour éviter une salve destructrice de crochet.
Mais alors que j’avais enfoncé la deuxième cartouche dans la chambre, un chrosôme se projeta vers moi, tomba sur mes épaules et me mit à terre. Son visage était caché par un masque de lapin, qui me rappelait étrangement la lubie de Cohen pour ces animaux aux grandes oreilles. J’entendis Alan crier mon nom, mais je compris qu’il était aussi trop occupé pour m’aider.
Un peu sonné par ma chute, et déstabilisé par son rire empli de folie, j’eus le réflexe de lui asséner un coup de crosse. Son masque se brisa en mille morceaux, laissant apparaître un visage à peine humain. Un frisson me parcourut, alors que mon corps était en plein ébullition. Un deuxième coup, puis un troisième. Finalement, il tomba légèrement à la renverse sur ma gauche. J’en profitai alors pour le pousser sur le côté. Je m’appuyai sur mon coude gauche pour enfin tirer une cartouche dans son visage, qui ne ressemblait plus à rien désormais.
Je mis quelques secondes avant de me relever, mais je remarquai rapidement qu’Alan n’avait pas chômé. Il avait eu le quatrième chrosôme avant que ce dernier ne fonde sur lui. Il gisait étendu au sol juste devant lui. Il tentait de régler son compte au cinquième chrosôme qui continuait de lui lancer des crochets, se décalant à chaque lancé sur la droite. Je pensais qu’il avait la situation en main et allait continuer à s’occuper du sixième, lorsque je compris la stratégie du cinquième chrosôme au plafond. Je remarquai en effet une masse sombre, accrochée sur le mur en face de moi, vers lequel Alan se dirigeait inconsciemment.
Sans hésitation, je compris que je ne pouvais l’avoir au fusil à pompe, il était bien trop loin. Je lâchai mon fusil et sortis une mitrailleuse de ma grande veste. Alors que le sixième chrosôme, qui croyait ne pas avoir été vu, croisa mon regard, je lui assénai une salve de balles qui furent critiques, en évitant de viser Alan.
Le sixième chrosôme n’était toujours pas mort, mais Alan, qui avait achevé le cinquième, se tourna vers le mur et tira deux coups en direction du sixième chrosôme. Ce dernier avait sentit le vent tourner et tentait de remonter vainement de retourner au plafond. Il n’eut pas la chance de s’en sortir : Alan régla son sort au dernier en l’achevant d’un balle dans la tête, après sa lourde chute au sol.
7.
C’en était fini d’eux. Par chance, nous avions survécu. Nous nous regardâmes en même temps, essoufflés, mais en vie. Cette joie fut cependant contrebalancée par un triste constat : je venais de tuer des êtres humains pour la première fois de mon existence. La montée d’adrénaline que m’avait procurée l’apparition de ces démons de l’enfer, qui n’était autrefois que de simples habitants, m’avait empêché, je le crains, de me rendre compte de ce que j’avais accompli. Mes mains étaient désormais couvertes de sang. Encore une fois, un seul mot me venait à l’esprit : Rapture. Cet endroit était mauvais, malsain, rien de bon n’y poussait, rien de bon ne pouvait en sortir.
— Vous allez bien ? demanda Alan, toujours essoufflé, courbé, les mains sur ses genoux.
Je ne répondis pas immédiatement. A vrai dire, je ne savais pas si j’allais bien. C’est justement en pensant à cela que je sentis un liquide chaud couler le long de ma nuque. Je touchai l’arrière de mon crâne et sentis une plaie. Le chrosôme, qui m’avait plaqué au sol, avait dû me blesser sans que je ne m'en rende compte. Je regardai ma main et fut cependant rassuré par la petite quantité de sang. La réponse que je donnai à Alan fut franche et sans détour.
— Je veux quitter cette ville.
Il me regarda en fronçant les sourcils.
— Je veux trouver des réponses, continuai-je. Et quitter cette ville pour de bon.
Après un court silence, Alan donna son avis.
— Je crois que je suis d’accord avec vous. Il faut qu’on se mette en route.
Il avait raison. Nous ne devions pas nous laisser abattre. Je ne savais pas encore comment quitter cette ville, mais je ne tarderais pas à trouver. Il devait bien y avoir une bathysphère privée qui traînait par- là.
A la hâte, nous reprîmes nos affaires et prîmes la bathysphère en direction de Port-Neptune. Le trajet me permit de réfléchir à ce qui venait de se passer. Nous n’avions pas de Petites Sœur au zoo, ou quoi que ce soit qui contienne de l’Adam. Qu’est-ce qui les avaient attirés, alors ?
Peut-être ces chrosômes étaient-ils venus par hasard, mais j’en doutais. Je me rappelai alors que Yi Suchong, le scientifique aux yeux bridés, avaient mené des expériences avec des phéromones. Il en avait parlé dans un article du Rapture Tribune. Peut-être Ryan avait-il tout orchestré après tout. Il devait savoir que des individus se cachaient dans le zoo et pensait sans doute qu’ils conspiraient contre lui.
Mais le trajet fut moins long que ce que je pensais. Après avoir rejoint, l’Arcadie, qui n’était pas très loin, nous arrivâmes enfin à Port-Neptune, sains et saufs.