L'Héritage des Ombres : Le Souffle de la Résistance

Chapitre 3 : Le Retour d'Arianna

4059 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 03/04/2024 22:38

Le soleil d'après-midi baignait les rues pavées de Rome d'une lumière dorée, une chaleur enveloppante qui caressait la peau d'Arianna Valentini alors qu'elle traversait la place du marché, ses deux enfants à ses côtés. Il faisait bon vivre dans la Ville Éternelle, où l'histoire ancienne cohabitait avec les révolutions du présent. Le murmure du peuple se mêlait aux bruits ambiants : marchands, troubadours, et murmures de révoltes. Rome était un monde en lui-même, et Arianna avait trouvé sa place en son cœur palpitant.


Ce n'était pas un hasard si Arianna était connue en ces lieux, non pas seulement comme une mère dévouée, mais comme une figure de la résistance romaine. Inspirée par le Codex de son grand-père, elle avait passé les deux dernières décennies à éduquer et à guider, à construire quelque chose de plus grand qu'elle-même. Et dans cette grande entreprise, elle n'était pas seule. Niccolò Machiavelli, avec son air toujours si pensif, était un ami et un allié, bien que leur relation fût complexe, parsemée de secrets et d'ambiguïtés.


Les proches d'Arianna à Rome n'en savaient que peu sur son passé tumultueux. Ils la considéraient comme une femme mariée, mais supposaient que l'homme avec qui elle avait échangé ses vœux avait disparu, avalé par la mer du temps et de l'oubli. Seul Machiavelli connaissait les nuances de la vérité, les ombres qui s'étiraient derrière elle jusqu'à une autre vie, une autre identité.


Arianna avait élevé seule Isabella et Frédérico, les fruits d'un amour passé mais non oublié. Élevés dans les ombres des secrets de leur mère, ils étaient devenus des apprentis Assassins accomplis, leurs yeux scintillant du même feu que celui qui avait jadis brûlé dans les yeux de leurs parents. Arianna savait que leur futur était aussi imprévisible que dangereux. Ses pensées s’égaraient tandis qu’elle regardait ses enfants marcher dans les ruelles étroites du marché. 


Isabella, avec son visage énergique et ses yeux pleins d'intelligence, déambulait à travers la place du marché, tenant une liste de courses soigneusement écrite à la main. Frédérico, moins porté sur les détails mais toujours désireux d'aider, la suivait, un sac vide à l'épaule prêt à être rempli.


"Frédérico, nous avons besoin de trois citrons, pas deux. La recette de Mama est très précise là-dessus," dit Isabella, consultant sa liste.


"Tu es aussi exigeante que Mama," rit Frédérico en se dirigeant vers l'étal de fruits.


Arianna les observait, un sourire tendre aux lèvres. À 39 ans, elle se sentait parfois fatiguée par le poids des responsabilités et des secrets, mais ces moments simples de la vie quotidienne étaient ce qui la gardait ancrée. Elle avança vers un étal voisin, où un marchand vendait des épices exotiques. Ses doigts effleurèrent les petits sacs de cannelle et de noix de muscade.


"Madame Valentini, quel honneur de vous voir ici! Avez-vous besoin de safran aujourd'hui?" demanda le marchand, reconnaissant sa cliente habituelle.


"En fait, oui, j'ai l'intention de préparer un ragoût spécial ce soir," répondit Arianna, échangeant quelques pièces d'or contre un petit sac de safran.


Alors qu'elle s'apprêtait à rejoindre ses enfants, son regard croisa celui d'un homme à quelques mètres de distance. Leurs yeux se rencontrèrent pendant un instant, mais il détourna rapidement le regard. Arianna ressentit un picotement familier dans la nuque, celui de l'instinct qui l'avait maintenue en vie pendant toutes ces années.


"Frédérico, Isabella, il est temps de rentrer," dit-elle doucement, dissimulant son inquiétude derrière un sourire.


"Mais Mama, nous n'avons pas encore pris le fromage," protesta Frédérico.


"Nous en avons assez à la maison. Venez."


Tandis qu'ils quittaient la place du marché, Arianna jetait des regards furtifs autour d'elle. L'homme avait disparu, mais l'inquiétude demeurait. Ils se dirigèrent vers ce que tout le monde croyait être une école d'art, mais qui servait de façade pour le quartier général de la résistance. En arrivant, Arianna remit les sacs à Isabella et Frédérico.


"Allez à la cuisine et commencez à préparer le dîner, je dois aller au bureau pour un instant," leur dit-elle.


Les deux acquiescèrent et se dirigèrent vers la cuisine. Arianna se dirigea vers son bureau, où l'homme du marché l'attendait déjà. Il avait ôté sa capuche, révélant un visage marqué par des années d'expérience.


"Quelles nouvelles, Antonio?" demanda-t-elle en s'asseyant derrière son bureau.


"Madame Valentini, une attaque se prépare contre Monteriggioni. Nos espions ont vu des mouvements de troupes qui suggèrent une offensive majeure."


Le visage d'Arianna se raidit. Monteriggioni était non seulement un bastion clé pour les Assassins, mais c'était aussi le lieu où tout avait commencé. Une attaque là-bas avait des implications à la fois stratégiques et personnelles.


"Quand cette attaque est-elle prévue?"


"Nous ne savons pas encore, mais nous devons agir rapidement. Chaque moment que nous perdons donne aux ennemis plus de temps pour se préparer."


Arianna prit une grande respiration. La gravité de la situation l'atteignait de plein fouet, mais elle savait qu'elle devait rester calme pour prendre les bonnes décisions.


"Rassemblez les chefs de cellules. Nous devons planifier notre défense et contre-attaque. J'en discuterai aussi avec Machiavelli, il pourrait avoir des informations supplémentaires."


"Compris, Madame."


Antonio sortit, laissant Arianna seule avec ses pensées. Elle ouvrit un tiroir de son bureau et en sortit une carte de Monteriggioni, ses doigts effleurant les contours des murs et des rues qu'elle connaissait si bien.


Elle allait devoir prendre des décisions difficiles dans les jours à venir, des décisions qui affecteraient non seulement sa famille mais aussi le destin de la résistance elle-même. Mais dans cet instant, Arianna se sentait prête à affronter ce qui l'attendait. Elle était une mère, une résistante, une Assassin. Et elle ferait tout ce qui était nécessaire pour protéger ceux qu'elle aimait.


Elle se leva, ajusta son manteau, et sortit du bureau. Le poids du monde était lourd sur ses épaules, mais elle portait ce fardeau avec la dignité et la force qui l'avaient définie tout au long de sa vie.


-


Arianna se dirigea vers la salle à manger où ses enfants avaient déjà commencé à préparer le repas. Les odeurs de basilic et de tomate remplissaient l'air, et les deux jeunes adultes étaient en pleine discussion sur la meilleure manière de couper les légumes. En les voyant, Arianna sentit un mélange de fierté et d'appréhension. Elle savait que ce qu'elle s'apprêtait à leur dire changerait leur vie.


"Isabella, Frédérico, il faut que nous parlions," annonça-t-elle, le ton sérieux.


Les deux arrêtèrent ce qu'ils faisaient et lui lancèrent un regard interrogateur.


"Qu'est-ce qui se passe, Mama?" demanda Isabella, percevant l'urgence dans la voix de sa mère.


"Monteriggioni est en danger. Une attaque se prépare. Nous devons agir."


Isabella et Frédérico, qui avaient grandi à écouter des histoires de courage et de bravoure, sentirent pourtant leurs cœurs se serrer à l'évocation de ce lieu. Monteriggioni n'était pas qu'une forteresse, c'était leur second chez-soi, le lieu de leurs étés ensoleillés, des rires avec leur oncle Mario, des conversations avec leur tante Claudia, et des contes au coucher racontés par leur grand-mère Maria. Et il y avait aussi l'ombre de leur père, Ezio, toujours présente mais jamais pleinement là. Ils l'avaient croisé de loin quelques fois, échangeant des regards emplis de questions mais sans réponses.


"Cette fois, ce n'est pas une visite ordinaire. Nous partons pour Monteriggioni, mais pour le protéger," continua Arianna. Ses yeux, d'habitude si lumineux, étaient ternis par l'inquiétude. "Préparez vos affaires, nous partons à l'aube."


Sans un mot, Frédérico et Isabella se levèrent. Ils se connaissaient si bien, il n'y avait pas besoin de discuter. Dans le silence, leur relation parlait d'elle-même, un mélange de respect, d'amour et d'une loyauté inébranlable, tant pour leur mère que pour la cause qu'elle défendait.


Les préparatifs se déroulèrent dans un silence concentré. Chacun savait ce qu'il avait à faire. Épées, dagues, et autres armes furent soigneusement sélectionnées et rangées. Des vêtements de voyage, des cartes, et le nécessaire pour plusieurs jours de trajet furent empaquetés avec soin.


Alors qu'ils étaient sur le point de partir, Arianna se tourna vers ses enfants. "Nous reviendrons, tous ensemble," dit-elle doucement, une promesse silencieuse flottant dans l'air. Cette fois, Monteriggioni n'était pas simplement le décor de leur bonheur d'été, mais le théâtre d'un conflit imminent.


Et dans l'obscurité de l'aube naissante, ils partirent.


-


Les sabots des chevaux frappaient la terre comme un tambour lointain, rythmant la course effrénée d'Arianna et de son groupe à travers les vallées et les collines de la campagne italienne. À ses côtés, ses enfants, Isabella, d'une grâce presque féline même en armure, et Frédérico, les yeux ardents de détermination, la suivaient sans faille. Derrière eux, quelques alliés de confiance galopaient, chacun sachant ce qu'il y avait à perdre. Le temps était leur ennemi, un adversaire insaisissable mais constant.


"Des cavaliers, là-bas ! Et ils sont pourchassés !" cria Frédérico, pointant vers une éclaircie où des figures se déplaçaient à toute allure.


Arianna fronça les sourcils, un mauvais pressentiment tordant son estomac. "Plus vite !" ordonna-t-elle.


Alors qu'ils réduisaient la distance, le groupe de cavaliers se distingua à l'horizon, vêtus de couleurs sombres et poursuivis par d'autres en armure métallique.


"Ce sont les hommes d'Ezio," murmura Isabella, les yeux grands ouverts d'inquiétude.


Le cœur d'Arianna se serra à la mention du nom d'Ezio. Elle pressa les flancs de sa monture, ses yeux fixés sur le groupe devant eux. Et alors, elle le vit. Ezio était à terre, un bras et une jambe clairement blessés par des flèches. Des cavaliers ennemis se tenaient au-dessus de lui, lances pointées, prêts à en finir.


"Frédérico, maintenant !" cria-t-elle.


Sans hésiter, Frédérico pressa les flancs de son cheval et fonça, l'épée en main. D'un mouvement fluide, il faucha l'homme qui menaçait Ezio, sa lame tranchant l'air avant de trouver sa cible.


Arianna rencontra le regard d'Ezio. Il y avait tant à dire, tant à expliquer, mais ce n'était ni le lieu ni le moment. Il s'effondra, inconscient, et Arianna sentit son cœur s'arrêter pendant une fraction de seconde interminable.


Elle sauta de son cheval et courut vers lui, tombant à genoux à son côté. Avec une rapidité et une précision nées de décennies de survie et de combat, elle vérifia ses signes vitaux. Il était faible, mais vivant. "Prenez-le avec précaution," ordonna-t-elle, "emmenez-le. Il a besoin de soins immédiats."


Alors que ses ordres étaient exécutés et que le tumulte de la bataille s'éteignait peu à peu, Arianna sentit une paix étrange l'envahir. Elle tenait la vie de l'homme qui avait été tour à tour son amour, son ennemi, et son énigme, entre ses mains. Et elle savait qu'elle ferait tout pour le garder en vie. Mais pour l'instant, tout ce qui comptait, c'était de gagner du temps.


Et le temps, comme elle le savait trop bien, était le plus insaisissable des ennemis.


-


La lumière dorée de l'après-midi donnait à la chambre une allure presque surnaturelle, comme si le temps lui-même avait décidé de suspendre son vol, ne serait-ce que pour un instant. Ezio Auditore, l'Assassin légendaire, était allongé dans un lit d'apparence modeste, mais ses traits étaient ceux d'un homme qui avait traversé des années de lutte et de sacrifice.


À ses côtés, Arianna Valentini-Auditore, son épouse en titre, bien que séparée par des circonstances et des choix, terminait de serrer un bandage autour de son bras meurtri. Les doigts agiles de la femme trahissaient des années d'expérience dans l'art de la guérison, un savoir-faire développé dans les ombres, loin des salons feutrés de la noblesse ou des antichambres des puissants.


"Arianna," murmura Ezio, ses yeux rencontrant les siens comme s'il avait besoin de s'assurer qu'elle était bien réelle.


"Ne parle pas. Tu es blessé," répondit-elle en ajustant le dernier tour de bandage. Ses mains tremblaient légèrement, trahissant une tension qu'elle s'efforçait de masquer.


Ezio esquissa un sourire, aussi faible que lui-même l'était à ce moment. "Toujours aussi directe, n'est-ce pas ? Un trait de caractère que j'ai toujours trouvé... rafraîchissant."


Arianna termina le nœud du bandage et posa le reste du tissu sur une table voisine, couverte d'instruments médicaux et de petits pots d'onguents. "Quelqu'un doit l'être," dit-elle, une pointe d'ironie dans la voix. "Surtout dans un monde aussi compliqué que le nôtre."


Elle croisa les bras et se tourna vers Ezio, son regard sérieux et mesuré. "Tu as perdu beaucoup de sang," ajouta-t-elle, ne rompant pas le contact visuel.


Intrigué mais surtout préoccupé, Ezio s'empressa de poser sa prochaine question. "Où sommes-nous ? Et les autres, Claudia, Maria ? Sont-elles en sécurité ?"


Arianna remarqua immédiatement l'inquiétude dans sa voix et dans son regard. "Nous sommes dans une de mes maisons, à la périphérie de Rome. Quant à Claudia et Maria, elles sont en sécurité, avec les autres rescapés."


Un soupir de soulagement échappa à Ezio, comme si un poids venait d'être soulevé de ses épaules. Il était clair que le soulagement n'était pas seulement physique, mais aussi émotionnel.


Après un moment de silence, Ezio prit une grande inspiration. "Mario... Mario est mort, Arianna."


Arianna le fixa, abasourdie. Mario avait été plus qu'un mentor pour eux; il avait été un père, un guide, un ami. "Mon Dieu, Ezio... je suis tellement désolée."


Les yeux d'Ezio s'assombrissent, comme si une partie de lui-même avait été arrachée. J'étais là, à ses côtés. Je n'ai pas pu faire grand-chose. C'était... c'était trop tard."


Arianna fixa la main d'Ezio, évitant son regard. "Mario était un combattant," dit-elle, sa voix neutre mais légèrement tendue. "Il savait à quoi il s'exposait."


Ezio la dévisagea, comme s'il cherchait à discerner ce qu'elle ressentait vraiment. "Est-ce tout ce que tu as à dire? Après tout ce temps?"


"Qu'attends-tu que je dise, Ezio? Que le monde est injuste? Que nous avons été trahis encore une fois? Je le sais déjà. Et toi aussi," rétorqua Arianna, son ton devenant plus acerbe.


Il y eut un silence inconfortable, les non-dits et les années de séparation pesant lourdement entre eux.


"Qu'est-ce qui va arriver maintenant?" demanda finalement Ezio, sa voix marquée par l'incertitude. "Maintenant que Monteriggioni est tombée, où vais-je aller ?”


Arianna prit une profonde inspiration avant de répondre, le poids de chaque mot mesuré. "Tu pourrais rester ici, à Rome. J'ai des contacts, des ressources."


La tension entre eux se raviva instantanément, chaque regard et chaque geste lourd d'années de non-dits. "Rester ici? Avec toi?" questionna Ezio, ses yeux s'assombrissant légèrement.


Elle lui rendit son regard, osant presque le défier. "Oui, avec moi. À moins que tu ne trouves cela trop... complexe?"


Ezio sembla chercher ses mots, chaque seconde ajoutant de la tension à l'air déjà lourd. "Ce n'est pas une question de complexité, Arianna. C'est une question de passés qui se heurtent, de visions qui pourraient ne pas s'aligner."


Arianna hésita un instant, puis décida de rediriger la conversation. "Les Borgia gagnent en puissance, Ezio. Nous avons besoin de toute l'aide possible. Une alliance, même temporaire, serait... nécessaire."


Ezio fixa Arianna, comme s'il essayait de décrypter le labyrinthe de ses émotions. "Une alliance temporaire, alors?"


Elle hocha la tête, évitant toujours son regard. "Temporaire, mais indispensable. Les Borgia ne sont pas des adversaires à prendre à la légère. Regarde ce qu’ils ont fait à Monteriggioni"


Le visage d'Ezio s'adoucit un instant avant de se raidir à nouveau, pesant visiblement l'offre. "Je suis d'accord que les Borgia représentent une menace. Mais peux-tu dire que nous serions capables de travailler ensemble, après tout ce temps, après tout ce qui s'est passé entre nous ?"


Arianna le considéra attentivement, cherchant quelque chose dans son regard. "Il y a une seule façon de le savoir," dit-elle finalement, presque comme un défi.


Ezio hocha la tête, gravité et hésitation se dessinant sur son visage. "Alors, je suppose que c'est un chemin que nous pourrions emprunter. Mais sois avertie, Arianna, ce ne sera facile pour aucun de nous."


Arianna se leva, rangeant ses fournitures médicales. "Je n'ai jamais cherché la facilité, Ezio," rétorqua-t-elle. "Et toi non plus, je crois."


Ezio se laissa retomber sur l'oreiller, les pensées clairement agitées. "Nos enfants," commença-t-il, "que sont-ils devenus?"


La mention des enfants fit se crisper Arianna. Son regard se détourna un instant, comme si elle cherchait refuge dans les ombres de la pièce. "Ils... Ils sont à l'abri, loin de tout ça," répondit-elle, sa voix tremblante, évasive.


Ezio sembla percevoir l'hésitation dans sa réponse. "Tu es toujours aussi énigmatique," dit-il, la pointe d'une accusation non exprimée flottant dans l'air.


Arianna redirigea rapidement le sujet. "Ce n'est pas le moment, Ezio. Nous avons des questions plus pressantes à traiter. Les Borgia ne vont pas attendre que nous réglions nos affaires personnelles."


Le regard d'Ezio s'assombrit un peu plus, mais il acquiesça. "Très bien. Alors nous avons une alliance, temporaire mais nécessaire dans les circonstances."


Arianna hocha la tête, gardant une distance émotionnelle manifeste. "Oui, temporaire mais nécessaire. Les temps exigent des mesures drastiques."


Un silence pesant s'installa, marquant la complexité de leur relation et des défis à venir. L'alliance était formée, mais le non-dit entre eux était un fossé béant qu'ils n'avaient pas encore commencé à combler. Chacun semblait mesurer mentalement la distance qui les séparait, tout en reconnaissant la lueur fragile d'une opportunité qui pourrait, peut-être, les rapprocher à nouveau.


-


Après une conversation tendue mais nécessaire, Arianna avait quitté la maison aux murs de bois et au toit de tuiles. Ses pas la menaient à travers les ruelles de Rome, où elle chercherait des herbes médicinales pour continuer à soigner Ezio. Elle était partie sans un mot de plus, laissant derrière elle un silence pesant. Un silence qui pesait sur Ezio, le forçant à méditer sur le gouffre qui s'était creusé entre eux au fil des années, et sur la vie et les enfants qu'il avait laissés derrière lui.


Alors qu'il se perdait dans ses pensées, la porte s'ouvrit soudainement. Une bouffée d'air frais entra, apportant avec elle le parfum distinctif de l'encre et du parchemin. C'était comme si la porte avait fait entrer non seulement un homme mais aussi une bibliothèque entière, une galerie d'art, et un laboratoire d'inventions. Le grincement des gonds annonça l'arrivée d'un vieil ami, et Ezio sut immédiatement qui venait de franchir le seuil. Léonardo da Vinci était à Rome.


Leonardo poussa la porte de la maison en bois, le grincement des gonds rompant le silence de la pièce où Ezio reposait. Ses yeux s'ajustèrent à la lumière tamisée de la pièce, capturant le visage fatigué mais déterminé d'Ezio. Le parfum de l'encre et du parchemin mêlé à celui de l'huile pour lampe s'infiltra dans l'air, comme un prologue sensoriel à la présence du génie polymathe qui venait d'entrer.


"Ezio, mon ami! Comment te portes-tu?" demanda Léonardo, un sourire chaleureux éclairant son visage, où les rides avaient commencé à dessiner la carte d'une vie bien remplie.


"Ah, Leonardo! Toujours un plaisir," dit Ezio, essayant de se redresser malgré la douleur lancinante dans son côté. Son sourire était un peu forcé, mais authentique. "Je survivrai, comme toujours."


Léonardo s'approcha, déposant une petite mallette sur la table voisine. Le son du bois contre le bois semblait sceller un pacte silencieux entre eux. "J'ai apporté quelque chose qui pourrait t'être utile dans tes futures missions," annonça-t-il en déclipsant les verrous de la mallette. En ouvrant le couvercle, il révéla un ingénieux dispositif mécanique.


Ezio, intrigué, s'approcha malgré ses douleurs. "Tu ne cesseras jamais de m'étonner, Leonardo. Quelle est cette fois ta dernière merveille?"


Un éclair de fierté traversa le visage de Leonardo. "Une amélioration de ta lame secrète. Elle peut maintenant projeter des petits dards empoisonnés à distance. Étant donné le danger que tu rencontres souvent, je me suis dit que cela pourrait te donner un avantage certain."


Ezio examina l'appareil avec une admiration renouvelée. "Tu as toujours eu le don de créer des miracles à partir de bouts de métal et de cordes."


Léonardo rit doucement, touché. "Et toi, mon ami, tu as toujours eu le don de donner un sens à ces miracles."


Le regard d'Ezio se fit plus sérieux. "Arianna m'a dit que tu es aussi ici pour combattre les Borgia. C'est un ennemi redoutable."


Léonardo acquiesça. "Oui, c'est un combat difficile. Mais Arianna est une femme remarquable; elle a accompli des choses incroyables ici. Tu devrais être fier d'elle."


"Fier, mais aussi inquiet. L'ombre des Borgia est longue, et nous avons déjà perdu beaucoup."


"Ah, mais c'est là que nous intervenons, non? Pour raccourcir cette ombre et apporter un peu de lumière," rétorqua Léonardo, un feu sacré dans ses yeux.


Ezio hocha la tête, ses yeux plongés dans ceux de Leonardo, comme si son vieil ami avait une fois de plus dévoilé une perspective que lui-même n'avait pas envisagée. "Tu as toujours eu le talent de me faire voir les choses sous un autre angle, Leonardo. Peut-être est-ce là un nouveau départ pour tous. Un nouvel horizon après tant de couchers de soleil sanglants."


"Un nouveau départ nécessite du courage," répondit Leonardo, ses mains fermant délicatement la mallette, comme si chaque verrou capturait une part de leurs espoirs et de leurs peurs. "Un courage que ni toi ni Arianna ne manquez. L'avenir est une toile encore vierge, mon ami, et le courage est le pinceau avec lequel nous allons la peindre."


Leonardo marqua une pause, ses yeux scrutant le visage de Ezio. "Et qui sait? Ce nouveau départ pourrait également inclure un moyen de réparer certains des ponts brûlés du passé. Les erreurs ne sont que des leçons encore à apprendre, Ezio."


Ezio regarda son ami avec une attention renouvelée, puis ses yeux se déplacèrent vers la mallette sur la table, un objet concret qui promettait d'influencer un futur encore indéfini. Enfin, son regard glissa vers la porte, par laquelle Arianna serait de retour sous peu. Il se surprit à ressentir une vague d'espoir. "Peut-être bien, Leonardo. Peut-être bien."


Leonardo se leva, ramassant sa mallette et ajustant sa cape. "Alors, à l'avenir, mon ami. Qu'il soit tout ce que nous espérons et plus encore."


"Et si ce n'est pas le cas, nous le façonnerons jusqu'à ce qu'il le soit," rétorqua Ezio, un sourire réapparaissant sur ses lèvres.


Leonardo hocha la tête en accord, puis franchit le seuil, disparaissant dans les ombres de la rue romaine. Et alors qu'il sortait, les pensées d'Ezio s'étaient déjà projetées dans cet avenir incertain. Un avenir rempli de dangers, sans doute, mais aussi d'opportunités inexplorées; des opportunités pour la guerre et la révolution et, peut-être, juste peut-être, pour la réconciliation.

Laisser un commentaire ?