L'Héritage des Ombres : Le Souffle de la Résistance

Chapitre 2 : Monteriggioni en Flammes

4789 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 27/03/2024 21:23

L'air nocturne de Monteriggioni était saturé d'une électricité qui donnait à la peau une sensation de picotement, comme si la tension était si épaisse qu'on pouvait presque la saisir. La lune, voilée par des nuages épars, projetait des ombres inquiétantes sur les rues pavées et les remparts en pierre de la cité fortifiée. C'était une soirée où chaque craquement de brindille, chaque souffle de vent semblait amplifié, comme l'écho lointain d'un danger imminent.


D'ordinaire, Monteriggioni était un havre de paix, où les rires des enfants et les voix chantantes des marchands remplissaient l'air. Ce soir-là, elle était méconnaissable. L'atmosphère de la petite cité toscane était celle d'un essaim de fourmis qui, sentant la menace d'un prédateur approchant, se préparait à défendre sa colonie jusqu'à la mort.


Des guetteurs, les visages tordus par l'appréhension, étaient placés à intervalles réguliers le long des remparts. Leurs yeux, habitués à l'obscurité, scrutaient chaque recoin de la vallée environnante, cherchant des signes, des mouvements, n'importe quoi qui trahirait l'approche de l'ennemi. Ils étaient soutenus par des arbalétriers, les doigts nerveux effleurant leurs carreaux d'acier et ajustant la tension de leurs arbalètes. Chaque outil de guerre avait été inspecté et réinspécté, chaque arme prête à tirer au moindre signe d'agression.


Dans les rues, la communauté elle-même était en état d'urgence. Hommes et femmes, du plus âgé au plus jeune, avaient abandonné la quiétude de leurs foyers pour participer à la préparation collective. Les cliquetis de marteaux résonnaient alors que des planches de bois étaient clouées sur les portes et les fenêtres, transformant chaque maison en une forteresse miniature. Les enfants, trop petits pour comprendre pleinement la gravité de la situation mais assez vieux pour sentir l'inquiétude de leurs parents, aidaient à transporter des sacs de grains et des jarres d'eau vers les souterrains, en cas de siège prolongé.


Ezio Auditore, le Maître Assassin, était un homme que peu de choses pouvaient surprendre, mais ce soir-là, ses sens étaient en alerte maximale. Dès qu'il avait pris connaissance des rapports sur les mouvements suspects dans la vallée, une inquiétude sourde avait commencé à l'envahir. Pas une simple vague intuition, mais une certitude claire et tranchante comme l'acier de sa lame d'assassin.


Surplombant tout cela depuis les remparts, Ezio ne détachait pas son regard de l'horizon. C'était là, au loin, un fourmillement d'ombres qui grandissait à chaque instant, une menace insondable mais inéluctable. À côté d'Ezio, son oncle Mario Auditore, seigneur de Monteriggioni et lui aussi un Assassin expérimenté, marquait un profil imposant. Les années avaient peut-être blanchi sa barbe et alourdi ses mouvements, mais le feu du combat brillait toujours dans ses yeux.


"Mario, es-tu prêt pour ce qui s'annonce?" demanda Ezio, sans détourner son regard de l'horizon sombre.


"Prêt comme on peut l'être face à une menace inconnue, mon neveu," répondit Mario d'un ton qui trahissait un mélange de résignation et de détermination. "J'ai fait en sorte que nos réserves d'armes soient accessibles et que les tunnels d'évacuation soient dégagés. Si le pire arrive à passer, la population saura où se réfugier."


Ezio hocha la tête, reconnaissant mais pas totalement rassuré. Les préparatifs étaient nécessaires, mais il savait que même les plans les mieux conçus pouvaient s'effondrer dans le chaos d'une véritable bataille.


Le cri du guetteur les fit tous deux sursauter. "Ils arrivent!"


À ces mots, Mario posa sa main sur l'épaule d'Ezio, un geste qui se voulait autant réconfortant que galvanisant. "Quoi qu'il arrive, souviens-toi : nous sommes des Auditore. Nous ne cédons jamais."


Ezio acquiesça, sentant une vague d'énergie nouvelle l'envahir. Le moment était venu. La menace qui s'annonçait n'était plus une simple rumeur ou un frisson d'anticipation. Elle était là, aux portes de Monteriggioni, et il était temps de faire face.


Ezio ne perdit pas un instant. À peine ses pieds avaient-ils touché le sol qu'il se précipitait déjà à travers les rues pavées, son manteau d'Assassin flottant derrière lui comme un étendard. "Arbalétriers aux positions !" cria-t-il, sa voix tranchant à travers le tumulte. Les soldats, déjà sur le qui-vive, ajustèrent leurs arbalètes avec une discipline bien rodée.


"Archers, enflammez vos flèches !" Les archers, qui attendaient déjà avec leurs arcs bandés, saisirent des torches et allumèrent les pointes de leurs flèches enflammées. L'air se remplit d'une odeur de soufre et de tension palpable.


"Citoyens, aux souterrains !" Ses paroles furent relayées par Mario, qui ajouta avec un grondement sonore, "Veillez à ce que les femmes et les enfants soient les premiers à y entrer. Allez !"


À côté d'Ezio, Mario semblait une tour d'acier. Les années avaient peut-être entamé sa vigueur, mais pas son courage. Il portait son épée à la main, prêt à repousser l'envahisseur jusqu'à son dernier souffle si nécessaire.


Ezio, enfin, leva les yeux vers les remparts, maintenant garnis de ses combattants, et vit le reflet rougeoyant des torches ennemies dans leurs yeux. C'était un tableau saisissant, les visages tendus, marqués par l'ombre et la lumière, tous tournés vers lui en attente de son commandement.


Prenant une grande respiration, il cria, "Tenez vos positions et préparez-vous pour l'impact !"


Presque comme s'ils avaient attendu son signal, un rugissement venu du camp ennemi déchira la nuit. Les tambours de guerre se firent plus forts, plus insistants. La mer de torches était maintenant une vague déferlante de feu et d'acier, se rapprochant inexorablement de la ville.


"Cesare Borgia ne sait pas ce qui l'attend," murmura Mario, son visage éclairé par les lueurs de la bataille qui s'annonçait.


Ezio, la main sur la garde de son épée, sentit son cœur battre dans sa poitrine comme un tambour de guerre à lui seul. "Il va bientôt l'apprendre," répondit-il, fixant l'horizon, où le destin de Monteriggioni serait bientôt scellé.


-


Le premier choc contre les remparts fut d'une telle violence qu'on aurait dit que la colère de Dieu s'abattait sur la terre. Les murailles de Monteriggioni vibrèrent, les pierres et les bois craquèrent comme si elles allaient céder. Mais elles tenaient, témoignant de la solidité de leur construction.


Dans le ciel nocturne, des dizaines, puis des centaines de flèches incendiaires furent lancées. Elles créaient des arcs lumineux, semblables à des étoiles filantes, avant de s'écraser dans les rangs ennemis. Les cris de douleur et de surprise se mêlaient aux rugissements des tambours de guerre et aux hurlements des commandants.


Mais c'était une bataille inégale. L'armée de Cesare Borgia était immense, bien équipée, et menée par des capitaines sans scrupules. Les premières échelles furent posées contre les remparts, et les soldats ennemis commencèrent à grimper avec une rapidité terrifiante.


Ezio se tenait sur les remparts, l'épée à la main, coupant les cordes des échelles, repoussant ceux qui arrivaient au sommet. À côté de lui, Mario faisait de même, sa grande épée fendait l'air avec une force brutale, envoyant hommes et échelles dans le vide.


"Mario, nous ne pouvons les tenir longtemps !" cria Ezio, en parant un coup d'épée qui aurait été fatal.


"Je sais, mon neveu ! Mais nous tenons pour chaque minute, chaque seconde !" répliqua Mario, en transperçant un assaillant qui avait presque franchi le sommet des remparts.


Ezio jeta un regard vers les portes de la ville. Il savait que les citoyens, sous la protection des gardes restants, se dirigeaient déjà vers les souterrains. Chaque seconde gagnée ici était une vie sauvée là-bas.


Tout à coup, un bruit sourd retentit, différent des autres. Un boulet de canon venait de frapper la tour ouest, la faisant partiellement s'effondrer. Des cris d'horreur et de panique s'élevèrent des remparts.


"Mario, la tour !"


"Je vois, Ezio! Fais ce que tu peux ici, je vais voir ce que je peux faire!"


Ezio hocha la tête, son cœur battant la chamade, et redoubla d'efforts. Les assaillants étaient de plus en plus nombreux, mais chaque coup d'épée d'Ezio était un message, un défi. Il était le Maître Assassin, le défenseur de Monteriggioni, et tant qu'il serait en vie, la ville ne tomberait pas sans combat.


Mais malgré son courage et sa détermination, une question tournait dans son esprit, obsédante et effrayante : pourront-ils tenir assez longtemps ?


Le combat sur les remparts s'intensifiait, chaque pouce de terre se payant au prix du sang. Les forces de Monteriggioni se battaient avec tout ce qu'elles avaient, mais l'armée de Cesare Borgia ne montrait aucun signe de fléchissement. Au contraire, la masse des assaillants semblait de plus en plus imposante, comme une vague incessante s'apprêtant à submerger une falaise.


Ezio, l'épée toujours à la main, repoussa un autre soldat ennemi, le jetant du haut des remparts. Il jeta un regard en direction de la tour ouest détruite. De la fumée s'en élevait toujours, masquant partiellement la lueur sinistre des torches ennemies.


C'est alors qu'un cri retentit depuis la base des remparts : "La grande porte ne va pas tenir !"


Ezio ressentit une bouffée d'adrénaline. Il lança un dernier regard vers ses compagnons d'armes sur les remparts. "Tenez aussi longtemps que vous le pouvez !" leur cria-t-il, avant de descendre en courant les escaliers de pierre qui menaient à la grande porte.


Arrivé au bas, il vit son oncle Mario, déjà là, l'épée à la main, son visage marqué par la suie et la fatigue. Les portes en bois massif de Monteriggioni étaient endommagées, brisées en plusieurs endroits par les coups répétés du bélier ennemi.


"Tu as été rapide, Ezio," gronda Mario, tout en repoussant un autre assaillant qui avait réussi à pénétrer par une brèche.


"Pas assez," répondit Ezio, se plaçant à côté de son oncle. "Nous devons les arrêter ici et maintenant, ou la ville est perdue."


Mario hocha la tête gravement, et les deux hommes se préparèrent pour l'assaut suivant. La grande porte craquait sous la pression, chaque coup du bélier la rapprochant un peu plus de l'effondrement.


Les deux Assassins se tenaient côte à côte, chacun conscient que ce qui allait suivre serait un moment décisif, non seulement pour la survie de Monteriggioni, mais aussi pour leur propre destin.


Le monde d'Ezio sembla se figer à l'instant où la grande porte s'effondra dans un grondement de bois et de métal déchirés, laissant la voie libre aux forces de Cesare Borgia. Cesare entra en premier, monté sur un cheval noir comme la nuit, un sourire cruel et satisfait étirant ses lèvres. Son armure étincelait dans l'incandescence des torches et des feux qui brûlaient derrière lui.


Mario, visiblement affaibli mais toujours aussi combatif, chargea vers Cesare en poussant un cri de guerre. "Pour Monteriggioni ! Pour la famille Auditore !"


Ezio ne pouvait que regarder, l'épée en main, comme au ralenti, alors que son oncle atteignait Cesare et que leurs lames s'entrechoquaient avec un bruit métallique aigu. Mais quelque chose clochait : Mario peinait à repousser les coups, son âge et ses blessures prenant le dessus.


Et alors, ce qui devait arriver arriva. Avec une vitesse étonnante, Cesare désarma Mario d'un coup de lame avant de l'embrocher d'un geste rapide et précis. Mario eut juste le temps de poser ses yeux sur Ezio, un mélange de regret et de fierté dans son regard, avant de s'effondrer sur le sol, inerte.


Le cœur d'Ezio se figea. Chaque partie de son être voulait s'effondrer à côté du corps de son oncle, mais il y avait quelque chose dans le regard de Mario, quelque chose qui lui criait de continuer, de se battre. Les larmes aux yeux mais la mâchoire serrée, Ezio reprit ses esprits. Il n'y avait pas de temps pour le deuil, pas encore.


Avec un hurlement de rage, il chargea vers Cesare, le visage marqué par une fureur pure et simple. Ses émotions, sa douleur, tout était canalisé dans sa lame. Cesare, prenant conscience de l'assassin qui fonçait sur lui, tourna son attention vers Ezio. Leurs épées s'entrechoquèrent, des étincelles jaillissant au contact du métal.


Ce n'était plus seulement une bataille pour Monteriggioni, c'était une bataille pour l'âme d'Ezio, pour tout ce qu'il avait perdu et tout ce qu'il pouvait encore perdre. Chaque coup porté était un cri, chaque parade un murmure pour ceux qui avaient été pris trop tôt.


Le combat s'intensifia, mais Ezio sentait ses forces diminuer. Il savait qu'il devait mettre fin à ceci, pour Mario, pour sa famille, pour lui-même. Avec un dernier cri, il parvint à repousser Cesare, à le mettre à genoux, mais avant qu'il ne puisse porter le coup final, un autre soldat s'interposa, frappant Ezio avec l’acier de son marteau.


Ezio chancela, sonné, son épée glissant de ses mains alors qu’il paraît l’attaque. Ce moment d'hésitation fut tout ce que Cesare avait besoin. Alors qu’il reprenait son épée, prêt à en finir avec Ezio, un cri retentit soudain. "Maître Auditore !" Un capitaine de Monteriggioni, Marco, fonçait vers eux, une arbalète à la main. D'un tir précis, il désarma le soldat qui avait frappé Ezio, puis lança une seconde flèche en direction de Cesare qui fut contraint de se reculer pour l'éviter.


Profitant de cet instant, Marco atteignit Ezio, l'aidant à se relever. "Maître Auditore, il est temps de battre en retraite ! Nos défenses sont tombées !"


Ezio, encore sonné mais récupérant rapidement ses esprits, acquiesça. "Vers la villa. Protégez les citoyens et les documents importants. Je vous couvre."


Marco hocha la tête, jeta un dernier regard vers le corps sans vie de Mario, et s'élança vers les rues déjà en proie au chaos, hurlant des ordres pour organiser la retraite.


Ezio se baissa pour ramasser son épée, ses yeux croisant ceux de Cesare. "Ce n'est qu'un début, Borgia. Vous n'aurez pas la victoire si facilement."


Cesare ricana. "Les mots d'un homme battu. Mais si tu veux ta revanche, je t'attends."


Ezio ne dit rien de plus. Se tournant, il courut à grandes enjambées pour rejoindre ses hommes, la douleur de la perte de Mario ravivant le feu intérieur qui avait toujours été sa force. Monteriggioni était perdu, mais la guerre était loin d'être terminée. Pour chaque pierre de sa cité natale que Cesare avait brisée, pour chaque vie qu'il avait volée, Ezio le ferait payer. Et il commencerait par sauver ce qui restait de son chez-lui, en guidant la retraite vers la villa, le dernier bastion de la résistance Auditore.


-


Ezio fonça vers la villa, ses bottes frappant la terre battue en un rythme rapide et déterminé. Autour de lui, ses hommes, des visages graves sous la pression du moment, suivirent avec une urgence similaire. "Barricadez les portes ! Protégez les fenêtres !" ordonna-t-il, sa voix tranchant l'air avec la clarté d'un commandant rompu aux situations les plus extrêmes.


En quelques secondes, les portes massives de la villa se refermèrent avec un grondement sourd. Deux hommes en armure saisirent de lourdes poutres de bois et les plaçaient en travers, verrouillant ainsi l'entrée. D'autres se précipitèrent vers les fenêtres, emboîtant des planches de bois dans les cadres et les martelant avec des clous, leurs marteaux résonnant comme le battement de cœur anxieux de la cité.


Ezio, les yeux scrutant chaque détail, veillait à ce que rien ne soit omis. Il savait que chaque seconde comptait et qu'une négligence pouvait être fatale. "Ramenez plus de poutres ! Doublez les barrières aux fenêtres ! Et préparez de l'huile bouillante, au cas où ils franchiraient le dernier rempart !" ajouta-t-il, ne laissant aucun élément au hasard.


Alors que ses ordres étaient exécutés avec une précision militaire, il sentit une lourde responsabilité peser sur ses épaules. C'était une barricade improvisée, mais c'était tout ce qui se tenait entre les forces de Borgia et les vies innocentes qu'il s'était juré de protéger. Chaque planche clouée, chaque poutre en place, renforçait non seulement la villa mais aussi le fragile voile d'espoir qui pendait sur Monteriggioni.


Le regard d'Ezio balaya rapidement la cour, finissant par se poser sur deux figures familières, sa mère Maria et sa sœur Claudia. "Nous ne voulions pas partir sans toi," dit Maria, les yeux pleins d'une fierté voilée d'inquiétude. Ses paroles étaient un mélange d'amour maternel et de résilience face à l'adversité.


Pour un court instant, le monde sembla s'arrêter. Ezio les prit dans ses bras, étreignant fermement les deux femmes qui signifiaient tout pour lui. C'était un moment volé, une pause éphémère dans le tumulte, mais dans cette étreinte se trouvait toute l'affection et la détermination qui les avaient maintenus unis à travers les années.


"Il est temps. Prenez les souterrains, maintenant," ordonna-t-il, relâchant l'étreinte mais pas le regard intense qui liait leur trio.


Maria et Claudia hochaient la tête, aucun mot n'étant nécessaire pour comprendre la gravité du moment. Elles se tournèrent et s'éloignèrent, leurs silhouettes s'engouffrant dans la pénombre des souterrains. La lourde porte de pierre se referma derrière elles, cachant leur fuite et leurs destins incertains.


Ezio regarda la porte se fermer, une pointe d'inquiétude transperçant son armure d'assurance. Puis, il se retourna vers ses hommes, ses frères d'armes, qui l'attendaient en silence. Ses yeux rencontrèrent les leurs, et dans ce regard partagé, il y avait une résolution silencieuse, une acceptation du chemin périlleux qui les attendait.


"Avec moi," annonça-t-il, sa voix plus grave, comme s'il parlait autant à lui-même qu'à eux. "Il est temps de sceller notre sort."


Et avec ces mots, il se dirigea vers le prochain défi, chaque pas empreint du poids de la destinée et de la détermination de ne pas céder face à l'obscurité qui s'avançait.


Ezio s'avança vers les portes de la villa, son regard croisant celui de ses hommes. Chacun comprenait ce qui était en jeu. L'air se chargea de l'énergie électrique de l'anticipation, comme si la moindre étincelle pouvait déclencher une explosion.


"Préparez-vous!" hurla Ezio.


À peine eut-il prononcé ces mots que la porte fut assaillie par une batterie de coups de bélier, chaque impact faisant vibrer le bois massif. Les soldats de Cesare Borgia s'étaient regroupés devant l'entrée, leurs armes prêtes, leurs yeux luisant de l'excitation du combat.


Ezio donna un signe de la main, et une volée de flèches enflammées fut décochée depuis les fenêtres de la villa. Plusieurs ennemis tombèrent, mais d'autres les remplacèrent immédiatement, une vague humaine sans fin.


Avec un fracas monstrueux, la porte céda enfin, volant en éclats sous la force des coups. Les soldats ennemis se précipitèrent à l'intérieur, croisant le fer avec les défenseurs de Monteriggioni. Ezio, épée à la main, s'élança dans la mêlée, sa lame tourbillonnant dans un ballet mortel, fauchant un ennemi après l'autre.


Mais il y avait trop d'ennemis. À chaque soldat qu'il éliminait, deux autres prenaient sa place. Ezio jeta un coup d'œil vers l'entrée des souterrains. Les derniers citoyens, y compris des enfants et des vieillards, disparaissaient dans les ténèbres, poursuivis de près par quelques-uns de ses hommes.


Sans perdre un instant, Ezio se précipita vers l'entrée. "Courez! Allez!" cria-t-il, chassant les derniers résistants à l'intérieur. Lorsqu'il fut sûr que plus personne n'arrivait, il empoigna une barre de fer qui traînait à proximité et, avec l'aide de quelques soldats restés pour couvrir la retraite, il scella l'entrée avec des planches de bois, des clous, et tout ce qu'il pouvait trouver. Chaque coup de marteau résonnait comme un écho solennel, marquant la fin d'une ère et le début d'une nouvelle.


Une fois l'entrée solidement barricadée, il se retourna vers ses hommes, épuisés mais résolus. Ezio jeta un dernier regard autour de lui et saisit une torche à proximité. Ses yeux rencontrèrent ceux de ses hommes, qui acquiescèrent silencieusement, comprenant son intention.


"Avec moi," murmura-t-il.


Ils se dirigèrent vers une section de mur fragile que seul Ezio connaissait, cachée derrière des tonneaux et des caisses empilées. Il avait toujours su qu'il pourrait utiliser cette faiblesse structurelle en dernier recours. Ezio planta la torche dans un support sur le mur, libérant ses mains.


"Reculez," ordonna-t-il.


Ses hommes s'éloignèrent, formant un cercle autour de lui. Ezio empoigna un pic qui était adossé au mur, prit une grande respiration, et frappa de toutes ses forces contre le point faible du mur. Une fissure apparut, puis s'élargit. Il donna un second coup, plus fort cette fois, et le mur commença à trembler, des fragments de pierre et de terre tombant en cascade.


Finalement, avec un grondement sourd qui semblait venir des entrailles de la terre elle-même, le mur s'effondra, envoyant un nuage de poussière et de débris dans l'air et scellant définitivement l'entrée des souterrains.


La salle devint silencieuse, à part le crépitement de la torche et la respiration haletante des hommes. Ezio remit le pic à sa place et se tourna vers ses hommes, son visage marqué par l'émotion mais ses yeux brûlant d'une détermination inébranlable.


"Nous avons fait tout ce que nous pouvions ici," dit-il enfin, sa voix teintée d'un mélange de tristesse et de résolution. "C'est scellé, ils ne nous suivront pas. Maintenant, il est temps de partir."


Les soldats hochèrent la tête, leur visage reflétant le même mélange complexe d'émotions. 


-


Lorsqu'ils débouchèrent hors des remparts de la cité, le soleil lançait ses premiers rayons sur l'horizon, comme pour illuminer leurs actions désespérées. La lumière orange se reflétait sur les ruines fumantes de Monteriggioni, telle une toile macabre dressée par un artiste fou. Au loin, une colonne de silhouettes se détachait sur les collines. Les citoyens, sa mère Maria et sa sœur Claudia parmi eux, fuyaient pour mettre de la distance entre eux et l'enfer qu'était devenue leur maison.


"Nous devons faire diversion, maintenant," tonna Ezio, les yeux fixés sur chacun de ses hommes. Ces derniers, épuisés mais résolus, acquiescèrent. À quelques pas, une poignée de chevaux effrayés les attendait, miraculeusement épargnés par la furie destructrice de l'ennemi.


Sans un mot de plus, Ezio sauta sur le dos d'un cheval noir, sentant l'animal frémir sous lui. Ses fidèles lieutenants firent de même. "Nous allons les attirer loin de là. Leur donner une proie à chasser, un leurre à traquer," expliqua-t-il, les veines de ses tempes palpitant d'urgence.


Ils s'élancèrent alors au grand galop, les sabots des chevaux martelant le sol comme un battement de tambour rythmant leur course contre le temps. Derrière eux, le son menaçant des tambours de guerre des troupes de Borgia se fit entendre, plus intense, plus déterminé. Le sol semblait trembler alors que les soldats ennemis se lançaient à leur poursuite.


Un dernier regard par-dessus son épaule permit à Ezio de voir la foule de ses concitoyens, y compris Maria et Claudia, atteindre les hauteurs et disparaître derrière une crête. Cela lui donna la force de presser les flancs de sa monture avec plus de vigueur, accélérant encore alors qu'ils s'éloignaient, entraînant les troupes de Borgia dans une chasse stérile.


Les muscles de son corps étaient tendus à l'extrême, chaque fibre de son être prête à céder sous la tension, mais il ne céda pas. Chaque mètre gagné était une bouffée d'oxygène, chaque seconde de plus une victoire minuscule mais essentielle. Pour chaque moment que les troupes de Borgia perdaient à les suivre, les gens de Monteriggioni avaient une chance de plus de survivre.


Et pour cette infime chance, pour ce petit espoir, Ezio était prêt à tout risquer. Y compris sa propre vie.


Alors que le groupe de cavaliers se frayait un chemin à travers la campagne vallonnée, la horde de Borgia à leurs trousses semblait insatiable, comme un monstre à plusieurs têtes avançant inlassablement. Les hommes de Ezio, bravant la mort à chaque instant, sortaient leurs épées, ripostant aux tirs de flèches et aux attaques des cavaliers ennemis qui réussissaient à s'approcher.


Un par un, ils tombaient. Le premier à partir fut Marco, un jeune homme de Monteriggioni, fauché par une lame ennemie. Puis ce fut Tommaso, un vétéran dont l'expérience au combat n'aurait pas pu prévoir la lance qui le transperça. Les pertes étaient dévastatrices, mais Ezio et ses hommes savaient que chaque sacrifice augmentait les chances de survie de leurs proches.


À bout de souffle et sur le point de s'effondrer, Ezio sentit la fatigue s'accumuler dans chacun de ses muscles. Sa monture, elle aussi épuisée, trébucha sur une pierre et envoya son cavalier rouler sur le sol. Ezio s'écrasa violemment contre la terre battue, la poussière se levant autour de lui comme un nuage de défaite. Se redressant difficilement, il réalisa qu'il était le dernier encore en selle, ou plutôt désormais à terre.


Il parvint à se remettre sur ses pieds, à peine. À ce moment-là, une troupe de cavaliers de Borgia se rapprocha, leurs lances pointées vers lui, leurs visages masqués de casques métalliques sans âme.


Ezio savait qu'il était à bout, mais il ne montra rien. Avec un dernier éclat de détermination, il dégaina sa lame et se mit en position de combat. S'il devait mourir, il le ferait en homme libre, en protégeant ceux qu'il aimait.


L'impact fut brutal. Une flèche le frappa au bras, une autre dans la jambe. Chancelant, il tomba à genoux. Les cavaliers s'arrêtèrent devant lui, comme pour savourer cet instant de victoire sur un adversaire acharné.


Mais alors que le chef des soldats ennemis levait son épée pour porter le coup final, une expression d'étonnement traversa le visage de Ezio. Son regard ne fixait pas son ennemi imminent, mais l'horizon derrière lui. Des cavaliers surgirent à toute allure, vêtus non pas des couleurs des Borgia, mais d'un amalgame de tissus sombres. Le premier cavalier se jeta dans la mêlée, l'épée à la main, fauchant l'homme qui menaçait Ezio.


Le soulagement fut de courte durée pour Ezio, cependant. Le tumulte des combats, les cris des soldats mourants, tout semblait s'éloigner, comme s'il glissait sous l'eau. Ses yeux se troublèrent, mais pas avant d'avoir aperçu une silhouette familière parmi les nouveaux venus.


"Arianna," murmura-t-il, une vague de sentiments complexes le submergeant. Était-ce du soulagement, de la gratitude, ou un sentiment plus profond qu'il n'avait pas le temps d'analyser ? Tout ce qu'il savait, c'était que son dernier regard serait pour elle, et cela lui apportait une sorte de paix.


Avec cette ultime pensée, la conscience d'Ezio s'évapora, laissant son corps s'effondrer sur le sol. Arianna sauta de son cheval, courant vers lui avec une expression mêlée d'urgence et de soulagement, mais aussi avec quelque chose d'autre, quelque chose de plus tendre et vulnérable. Elle tomba à genoux à côté de lui, vérifiant rapidement ses signes vitaux, avant de donner l'ordre de le prendre avec précaution.


Le chaos du champ de bataille continuait de se dérouler autour d'eux, mais en cet instant, tout semblait incroyablement silencieux pour Arianna. Elle tenait entre ses mains le visage de l'homme qu'elle avait tant aimé, et qui avait causé tant de douleur et de confusion dans sa vie. Et pourtant, en cet instant, tout ce qui importait, c'était qu'il vive pour voir un autre jour.

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