Mes mémoires

Chapitre 27 : Traumatisme

1907 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour il y a 4 mois

 Le samedi arrivait enfin ! Nous allions pouvoir revoir notre ami. Était-ce bon pour moi avec mes doutes et mon impression d’être diminuée de plus en plus et de jours en jours ? Tout s’accentuait depuis la semaine dernière, depuis cette journée au parc avec les autres. Lizzy me suivait partout où j’allais.  Enfin…   J'avoue m’être peut-être inventée sa voix qui s’insinuait dans mon crâne. Heureusement, j’avais mes anxiolytiques, même si je les prenais parfois avec de l’alcool, mais ça... Personne ne devait le savoir. Qui voudrait le savoir ? Vi ? Ekko ? Claggor ? Mes parents ? Non, je ne savais pas, pas encore du moins.


Nous arrivions à l’accueil du centre où l’on nous mena aux jardins, là où se trouvait Mylo. Il était assis sur un banc et nous faisait un geste de la main avec énergie. Il semblait aller bien mieux et j’en étais heureuse, vraiment. Il paraissait avoir décroché et il n’y avait plus de traces sur ses avant-bras ni sur ses bras tout court. Juste et je savais… Je savais que je n’étais pas à la hauteur de tous. Comment leur expliquer alors ? Je savais que j’avais besoin d’eux, mais je n’osais pas leur demander, je ne voulais pas paraître faible, surtout auprès de ma sœur et de mon petit ami. Je sortais de mes pensées lorsque j’entendis le mot « définitivement ». À propos de quoi ? Par chance, Claggor reprit la parole.


« Sérieux, tu sors à la fin du mois ?! Putain faudra fêter ça ! »


« Bah ouais grave ! » s’exclama Vi avec joie.

 

Quant à moi, je lui faisais un sourire chaleureux. Bordel, il avait remonté la pente si vite ? Je me sentais misérable à cet instant précis. Mes épaules s’affaissèrent légèrement et je soufflais pour reprendre contenance et faire l’hypocrite enjouée. C’était la première fois, même si au fond j’étais heureuse. J'étais aussi et sûrement : juste égoïste et égocentrique, il fallait croire… Heureusement, cette bonne nouvelle annoncée, nous passions encore quelques heures avec lui et lorsque la fin des visites fut proche, nous décidions de partir, mais aussi de nous séparer pour rentrer. Sauf Vi qui nous indiquait qu’elle avait quelque chose d’autre à faire. 


Lorsque j’arrivais chez moi, je me décidais à prendre un bain pour me détendre. Ma mère allait rentrer sous peu et je voulais être apaisée de cet après-midi qui avait été très dur pour mon cœur tout comme mon esprit. Dans mes songes, j'entendis à peine la porte s’ouvrir, mais par contre, pas la voix de ma mère. Finalement, elle m’appela enfin et je lui dis que j’étais dans la salle de bain. Il était temps que je sorte de mon petit cocon d’eau chaude, de toute façon l’eau avait refroidi. Me rinçant tout de même, je descendais au rez-de-chaussée et venais embrasser ma mère.


« Le boulot a l’air dur en ce moment ! »

 

Ma mère soupira.


« Éreintant. »

 

Je lui souriais et allais la prendre dans mes bras, ce qui l'a surpris, je le sentais à sa manière de me tenir contre elle. Pourtant, je ne disais aucun mot. Pourquoi cette étreinte ? Parce que… J’en avais besoin pour ancrer mes racines au sol qui commençaient à s’affaisser. Je me rendais doucement compte que je perdais pied en réalité et cela ne m’aidait pas. J’avais besoin d’aide, mais tout le monde me croyait forte. Je ne parlais jamais de mes nuits sans sommeil qui se faisaient de plus en plus nombreuses. Mes notes ne chutaient pas, je m’accrochais encore aux études pour ne pas les inquiéter. Ils savaient tous que c’était une chose importante pour moi, alors, même si j’y perdais goût, je me forçais, il ne fallait pas que cela se voit ! Il y a quelques semaines, on m’avait déjà fait la remarque, alors cette fois, je voulais montrer que j’étais passée au-delà de ça ! Que le docteur Donovan faisait bien son boulot et en soi, il le faisait bien. D’ailleurs, à présent, j’étais aussi sous anti dépresseurs. Il pensait très certainement à une dépression mélancolique. Mais c’était surtout parce que je ne me confiais pas totalement sur mon mal-être grandissant. Il avait tout de même compris que je n’allais pas bien, d’où cette médication. Ce qui me faisait peur, en revanche, c’était qu’ils apprennent ma détresse. Certes, je voudrais qu’on m’aide, mais à la fois, je n’avais pas envie de déranger tout mon entourage. Ma mère passait sa main devant mon visage, ce qui me fit secouer la tête pour reprendre mes esprits. Ma mère prit la parole.


« Ça va ? Absence épileptique ? Tu as pris tes médicaments ce matin ? »

 

Je lui souris.

 

« Oui, ne t’en fais pas. »

 

Ma mère mettait les morceaux de viande dans la poêle et m’invitait à mettre la table. Évidemment, je le fis, je n’aimais pas rester sans rien faire et encore moins ne pas aider les gens. Lorsque le repas fut prêt, nous nous installions à table et un voile se baissa sur mes yeux. Comme si j’étais en pilotage automatique. Il régnait un silence de mort dans la maison et cela m’oppressait. Je décidais donc de prendre la parole sans vraiment réfléchir à ce que je voulais dire.


« Mylo sort à la fin du mois… »

 

Je sentis le regard de ma mère se poser sur moi alors que j’avais le nez dans mon assiette. J’avais dit ça d’un ton plat.


« MAIS ! C’est génial ça ! Tu n’as pas l’air très heureuse, ça va ? »

 

Je jouais avec ma fourchette, plantant les pics dans la viande en levant la tête.


« Oui. Désolée, je suis un peu ailleurs en ce moment. »

 

Ma mère soupira.


« Tu crois que je ne l’ai pas remarqué ? Ça fait un petit moment même… Depuis Li… »

 

Je plantai ma fourchette avec force dans mon morceau de viande en regardant ma mère d’un regard assassin et serrai les dents en prenant la parole.


« Ne prononce surtout pas son prénom ! »

 

Ma mère écarquilla les yeux et parla d’un ton confus.

 

« Jinx… Que t'arrive-t-il ? »


« Rien, pardon… Je veux juste… Plus entendre parler d’elle… »

 

Ma voix se voulait légèrement brisée, ne pas pleurer, surtout ne pas pleurer… Ma mère opina de la tête.


« Tu n’as plus faim ? »


« Non, pas vraiment. »

 

« Jinx… Ça devient inquiétant là ! »

 

Je me mettais à ricaner joyeusement et venais embrasser ma mère. Il ne fallait pas lui faire peur, surtout pas.


« Ne t’en fais pas, maman, je mangerai plus tard si j’ai faim. »

 

Ma mère soupira.

 

« Bien, je te fais confiance ma fille. »


 Elle me sourit tristement et je m’en voulais pour ça, mais je ne savais pas quoi faire d’autre. Ni en parole, ni en acte. J’étais comme… Inapte à tout. Je l’aidais donc à débarrasser et elle m’annonçait qu’elle allait se coucher. J’acquiesçais et allais me mettre dans ma chambre pour essayer d’étudier. Malgré mon manque de concentration, j'y arrivais tout de même un peu, même si… Tout à coup, je repensais aux scarifications. Inconsciemment, ma main ouvrit le tiroir de mon bureau dans lequel étaient mes ciseaux. Ce ne fut que lorsque je sentis le morceau de métal froid au niveau de mes côtes, endroit où je l’avais toujours fait, que je sursautai. Et comme si je me réveillais d’un long rêve, non, d'un long cauchemar, je serrais les dents et jetais les ciseaux à l’autre bout de la pièce. Je devais lutter, qu’est-ce qui me passait par la tête au juste ? Je posais mes coudes sur le bureau et portais mes mains jusqu’à mes yeux, des larmes coulant le long de mes joues, un cri étouffé aurait pu être entendu si l’on était à quelques centimètres de moi. Heureusement qu'il n'y avait personne ! Bordel, je me sentais de plus en plus mal. Pourquoi je replongeais aussi vite ? Il fallait que je me change les idées. J’envoyais un message à Vi bien qu’il soit tardif, évidemment, je savais qu’elle allait me répondre quand elle le pourrait.


« Ma sœur, j'ai besoin de passer du temps avec toi et p’pa… »

 

Vi semblait ne pas dormir étant donné que sa réponse ne tarda pas.


« Bien sûr, sœurette ! Je dis ça à Vander demain en me levant, ça lui fera plaisir ! Y’a un problème ? »

 

J’hésitai avant de répondre, soupirant.


« Je t’expliquerai plus tard, juste… Ne me pose pas de question maintenant. Seulement quand on se verra. »

 

Ma sœur ne répondit pas, mais je savais qu’au fond elle ne devait pas être rassurée. Quelle conne je faisais. Je n’aimais pas ce que je devenais, non, je n’aimais pas du tout et pourtant… C’était la seule chose que j’arrivais à faire. Je n’étais rien d’autre qu’une merde… Oui, c’est tout ce que j’étais. Tout ce que j’étais devenue. À cause… D’elle ! Elle ? Je la vis soudain dans le reflet de ma fenêtre alors que je l’avais ouverte pour fumer. Ce qui eut pour effet de me faire basculer pour me retrouver au sol, me brûlant avec la fraise de ma cigarette au passage.


« Putain… » sifflais-je à voix basse pour ne pas réveiller ma mère. 

On ne savait jamais, je ne voulais, encore une fois, pas l’inquiéter. Mais, je me demandais ce qu’elle allait penser du fait que j’allais aller chez mon père à partir de demain. Serait-elle contente que je veuille passer du temps avec eux ? Sûrement, mais… Allait-elle penser que je la fuyais ? Fort probable. Rha tout s’embrouillait dans ma tête ! Je ne voulais pas qu’elle pense cela, même si je devais bien avouer que c’était en quelque sorte ça. Si mon entourage était effrayé par ce que je dégageais. Ma mère, elle, était aux premières loges pour voir ma chute. Je savais que ce qu’elle voyait de moi la tourmentait. Je savais aussi qu’elle plongeait doucement dans la peur de me perdre ? Peut-être. La question était : quand en parlerait-elle à mon père ? Ou même au docteur Donovan ? Je n’avais pas envie d’y penser pour être honnête, je voulais juste oublier. Me remettant droite, je finissais ma clope et l’écrasais dans le cendrier. Je mettais de la musique sur mon ordinateur portable et me laissais tomber comme une loque sur le lit où je m’endormis sans m’en rendre compte.

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