Mes mémoires

Chapitre 26 : Quelque chose cloche

2552 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour il y a 4 mois

Cette nuit-là, j’avais eu un mal fou à trouver le sommeil. Est-ce que les effets de la Devil’s pouvaient faire encore, comme une sorte d’effet ? Je n’en savais rien et je ne voulais pas en parler. Par peur du jugement, sûrement, et puis… Je ne pouvais pas en parler à mon entourage, il s’en inquiéterait trop et je ne voulais pas les faire souffrir. Je ne voulais pas leur montrer que j’étais faible en retombant là-dedans, en n’en reparlant. Lorsque le réveil de mon portable avait sonné, je grognais. PUTAIN ! C’était un enfer. Pourquoi avais-je dû parler de Mylo ? C’était sa faute ! Mais putain ! Comment pouvais-je penser à ça… Il n’était pas fautif. C’était tout simplement mon cerveau qui faisait des associations d’idées. Assise sur le bord de mon lit, j'avais les mains dans mes cheveux, les tirant à m'en arracher quelques mèches. Des larmes coulaient le long de mes joues, non, ça ne pouvait pas m’arriver ! Pas à moi ! J’étais forte ! Lizzy n’avait plus aucune emprise sur moi et j’étais libérée. Putain pourquoi le fait d’avoir donné l’idée d’aller voir Mylo me faisait tellement de mal ? Du mal à en avoir des crampes au cœur. Pourquoi ? Pourquoi au juste ? Mon estomac se serrait et j’entendais ma mère m’appeler. Visiblement, elle voulait que l’on déjeune ensemble. La plaie ! Je ne voulais pas, je ne voulais pas l’affronter. J’étais une lâche. Je l’avais été hier soir et je le serai aujourd’hui. PUTAIN ! Je m’habillais en vitesse et descendais, je n’avais pas non plus envie d’aller en cours…


« ‘Jour… » dis-je mal réveillée.

 

Ma mère remplissait mon bol de céréales et le remplissait avec lesdites céréales et du lait. Prenant une cuillère, je la plongeais à l’intérieur du bol, les yeux rivés sur l’effet que cela donnait. J’avais un coude sur la table et le poing collé à ma joue.


« C’est par rapport à hier ? » 


« J’en sais rien… » J'étais légèrement sur la défensive et ma mère l’avait très bien entendu. 

 

« Jinx. Tu peux me parler, tu le sais très bien ! Je ne te jugerai jamais…

 

Elle posa sa main sur la main et je me crispai, arrêtant de touiller ce qui était devenu une bouillie dans mon bol.


« On doit voir Mylo samedi prochain. Je sais pas si c’est bien ou pas pour moi, mais… C’est moi qui ai lancé l’idée, je peux pas me défiler.

 

« Je comprends, mais si tu te sens trop mal à cause de ça, les autres le verront, y compris Mylo. Tu voudrais qu’il te voit dans un état pareil ? »

 

Je soupirai, ma mère était dans le vrai.


« Non… »


« Alors dis-le aux autres, ils comprendront. D’accord ? »


« Oui mom. »

 

Dans le fond, je savais qu’elle avait raison, mais… Je ne voulais pas faire faux bond à Ekko, Vi et Claggor. Je ne voulais pas les décevoir, alors que faire ? Ma mère me caressa la joue en souriant avant de se lever.


« Allez, c’est l’heure du boulot pour moi. Ne sois pas en retard pour tes cours. »


« Oui oui ! »

 

Une fois que la porte était fermée, je me levai pour jeter mon petit déjeuner à la poubelle. Je n’avais plus faim depuis que je ruminais, soit hier soir. Débarrassant la table, je soupirais, que pouvais-je faire au juste ? Bon... Pour l’instant, je devais me préparer pour aller en cours. 


Une vingtaine de minutes plus tard, avec une sucette à cancer dans la bouche, j'étais en route pour le collège. Vivement les vacances, j’en avais plus qu’assez de devoir me lever tous les matins pour aller en cours. Certes, j’aimais m’instruire, j’adorais ça, mais le rythme ne me convenait pas. Trop lent à mon goût, je m’ennuyais là où la plupart galéraient. Mes notes avaient légèrement baissé l’espace du temps où j’avais traîné avec Liz’... Merde, encore elle ! Elle ne voulait plus me lâcher depuis hier. J’espérais que ce soit passager, sinon les efforts que j’avais faits pour remonter ma moyenne ne se verraient plus, même avec mes facilités. Je ne voulais pas qu’on se pose des questions à mon sujet telles que : « Pourquoi tes notes ont baissé ? » ou encore : « Tes notes chutent, que se passe-t-il ? » Non… Je ne voulais pas de ce genre de questions. Pourquoi ? Peut-être parce que ça enfonçait le couteau dans la plaie ? Sûrement parce que cela me ramènerait à ma propre chute ? Comment expliquer ? Je n’en savais rien. J’étais perdue. Totalement paumée dans l’océan de mes pensées. Tellement que je ne voyais pas ma meilleure amie venir vers moi.


« Aïe ! »


« Hé ! Tu m’as foutu un coup de boule ! »


« Fallait m’éviter ! » dis-je d’un ton sec.


« Hé calme-toi... Pas la peine de me parler sur ce ton !


« Pardon. J’étais ailleurs. »


« Pas grave. »

 

Elle enroulait son bras autour de mes épaules.


« Allez, viens ! On va être en retard en cours si on se dépêche pas. Je sais que t’aime pas ça. »

 

Je pouffai.

 

« T’as raison ! »

 

Ma façon de parler était de nouveau normale. Pourquoi avais-je été si irritable tout à coup ? Bon… Il ne fallait pas que j’y pense. Les cours passaient lentement. Trop lentement. Comme souvent. Alors, je dessinais entre deux notes importantes. Ce n’était pas nouveau, j’avais toujours été ainsi. Et cela m’empêchait de discuter avec les autres à tout-va. Même si je ne le faisais que rarement en général. Et même si je m’ennuyais et que je dessinais souvent, j’étais plutôt assidue en fait.

 

Et avec dureté, la journée se finissait enfin ! Je disais au revoir à ma meilleure amie et vis Vi en train de m’attendre en face du portail de l’entrée du collège. Cela voulait dire en général que nous allions manger tous les quatre chez l’un ou l’autre de nos parents. Comme souvent, j’aurais pu avoir hâte. Là ? Depuis la « conversation » avec ma mère hier, ce n’était pas le cas. Et l’étreinte de ma grande sœur voulait en dire beaucoup. Je savais à présent lire dans sa gestuelle bien qu’elle l’ignorait. Ou peut-être que non ? Qu’importe, sans un mot, nous commencions à marcher tranquillement. Les mains dans les poches de son éternelle veste à capuche, elle ne disait rien. Ce qui m’étonnait, elle semblait être dans son état normal pourtant. M’étais-je, pour une fois, trompée. Mon jugement était-il altéré depuis ma prise de conscience ?


« Y’a un truc qui cloche, grande sœur ? » demandai-je.

 

Elle s’arrêta net.


« Ouais ! » répondit-elle sèchement.


« Qu’est-ce qui se passe ? »

 

J’étais en face d’elle et son regard n’augurait rien de bon. J’avais même l’impression que si elle pouvait, elle m’aurait frappé. Très certainement, oui !


« Ça fait des semaines que cette histoire est finie et là, du jour au lendemain, tu parles de devil’s ? T’as quoi dans la tête ?! »

 

Son ton était cassant alors que j’écarquillais les yeux sous cette révélation.


« Je... Écoute, je voulais juste me renseigner ça… »

Tout en me coupant la parole, elle profita d’être près d’une ruelle pour m’y faire entrer et m’agripper par le col. C’était la première fois qu’elle me faisait ça et c’était aussi la première fois que j’avais peur de Vi. L’appeler par le statut qu’elle possédait dans mon cœur était actuellement impossible, j’étais tétanisée. Ouais... J’en menais pas large, pas du tout, ma respiration était saccadée et j’en avais les larmes aux yeux quant à Vi elle serrait les crocs.


« Ça quoi ? Putain Jinx ! Tu vas pas retomber là d’dans ! Tu nous as dit que t’étais pas accro ! Tu nous as menti ? »


Ma frangine commençait à avoir les larmes aux yeux, tout comme les miens l’étaient. Ce qui me fit me rendre compte qu’elle avait plus peur qu’autre chose. C’était juste sa façon d’aborder le sujet qui était... Maladroit ? Elle me lâchait et se retournait, les poings serrés jusqu’à s’en faire blanchir les jointures de ses doigts. J’allais vers elle et posais ma main sur son épaule et d’une voix tremblante, je prenais la parole.


« Ne t’en fais pas pour moi. Je sais que je vais m’en sortir ok ? Je… J’ai juste besoin d’arrêter d’y penser à cause de… À cause de My’ »

 

Elle tournait la tête sur le côté, ne se mettant tout de même pas face à moi, sûrement pour que je ne vois pas ses larmes, mais… C’était loupé.


« Mylo ? Pourquoi ? C’est toi qui voulais le voir. »


« Je sais, mais... Depuis que j’en ai parlé, je repense à Liz’, à la drogue, aux scarifications. J'ai… J’ai l’impression que… »


« Ne dis pas un mot de plus, p’tite sœur... S’il te plaît… Je ne veux pas te perdre à cause de ces conneries… J’ai toujours rêvé avoir une sœur et maintenant que j’en ai une, je ferai tout pour la préserver…»


Des larmes coulaient le long de mes joues.


« Pardon... Pardon, grande sœur… »

 

Je fondis en larmes suite à mes excuses, tandis que la louve s’approchait de moi pour me serrer fort contre elle. Je m’en voulais tellement de la faire souffrir, de les faire souffrir, ce n’était pas la seule, je le savais. Sur ces pensées et cet épisode passé, nous allions chez Vi où l’on devait manger avec ma mère et mon père. J’espérais qu’un jour, ils se remettraient en couple d’ailleurs...


« Tu penses quoi de Mom et P’pa ? » dis-je pour détendre l’atmosphère.


La louve avait remis ses mains dans les poches.


« Comment ça ? » m’interrogea-t-elle


« Ils vont se remettre ensemble ou pas ? »

 

« À mon avis ils le sont même déjà… »


« Oh ? »


« Franch’ment... Tu vas pas me dire le contraire ! Ils sont de plus en plus ensemble et vue leur capacité à nous cacher des choses importantes… En plus t’as pas l’odorat aussi développé, mais ça sent le parfum de maman dans toutes les pièces de l’appart”!»




« Oh… C’est toi le cerveau là… »

 

Je ricanais en même temps qu’elle, puis elle m’ébouriffa les cheveux. Au final, tout s'était arrangé ? J’avais grand espoir tout en me recoiffant.


« Hé ! Tu sais combien de temps ça me met à faire des tresses aussi longues ? »

 

« Ouais ! » dit-elle d’un ton assuré.


« Ah ? J’attends… »

 

Elle me regardait avec un sourire en coin.


« Longtemps ? »

 

Je lui donnais un coup derrière le crâne qui n'avait tout de même pas pour but de faire mal.


« Une demi-heure! » m’exclamais-je


« Ah ouaiiiis ! » s’étonna Vi.


« Bah ouais… »


Ma grande sœur haussa les épaules et prit la parole sur un ton désinvolte.


« Pourquoi tu les coupes pas ? »


« T’es folle ! T’as vu comme ils sont beaux ! » m’exclamai-je de nouveau


« Vrai, mais dans ce cas... Te plains pas ! »

 

Je soupirais et ricanais à la fois. Nous arrivions ensuite chez notre père et constations que notre mère n’était pas encore arrivée.


« Ah ! Coucou les filles ! J’ai déjà préparé le dîner, il est au chaud. Malheureusement, votre mère ne sera pas avec nous, elle a eu un empêchement. Elle doit faire la nuit. Je te ferai un doggy bag Jinx étant donné que c’est son plat préféré...


Moi et Vi nous regardions avant de taquiner notre père.

 

« C’est mignooooon… »

 

Pour la première fois, je voyais mon père rougir, nous avions passé la barrière de timidité des premières fois. Avant de se connaître totalement. Oh bien sûr, il y  aurait besoin d’encore beaucoup de temps, mais on le trouverait forcément ! Cela dit, je tapotai du coude les côtes de ma sœur, lui demandant s’il avait déjà vu Vander rougir. Et elle-même répondit par la négative. Nous regardions notre père.


« T’es bizarre. »


« Comment vous avez fait pour rester si longtemps éloigné ? » demandais-je.


« On a fait comme on a pu. Cela dit, on savait qu’on serait amené à se retrouver quand vous seriez en âge de comprendre. Le téléphone et les lettres ont beaucoup servi. »


« Des lettres, carrément ?! » dit Vi sur un ton ébahi.

 

Notre père rigola.


« Et oui, ça laisse plus de souvenirs que des coups de téléphone, vous ne trouvez pas ? »

 

Nous acquiescions toutes les deux et Vander nous invita à passer à table. Ses pâtes étaient très bonnes, aussi bonnes que les miennes, sans me vanter.


« Je vous ferai ma version ! On verra qui gagnera de p’pa ou moi ! »


« Tu sais ma fille, tout n’est pas compétition… »

 

Je lui souris.


« Faux ! La vie est une compétition de chaque instant. Qu'elle soit intérieure ou avec des membres extérieurs… »

 

Vi me regarda ainsi que mon père. Avais-je dit quelque chose de mal ? Ou n’était-ce pas assez clair ? C’était peut-être le cas alors...


« J’veux dire... La compétition intérieure, c'est juste faire des choix, ce sont des combats intérieurs qui ne cessent jamais. C’est, pour moi, réfléchir à toutes les possibilités devant nous, réfléchir à ce qu’est une bonne probabilité, laquelle est la meilleure. La compétition extérieure, c'est hm... Comme Vi!» Ma sœur fronça les sourcils et je ricanai avant de reprendre la parole.  « Te battre idiote! La compétition extérieure c'est juste se servir de ses muscles pour gagner. »


« Le cerveau, j’te dis ! P’pa ! Jinx c’est un vrai cerveau sur patte ! »


Notre père ricana.

 

« Je vois ça ! »

 

La soirée suivit ensuite son cours, nous la passions à rattraper le temps perdu, bien que nous évitions les moments qui auraient pu nous mettre mal à l'aise. Ce n’était pas le but et tout en fumant nos cigarettes, l’ours prit la parole.


« Ma fille à la fin de nos clopes, je te raccompagne. »


« Ok p’pa ! »

 

Oui, désormais, je n’avais plus peur de l’appeler ainsi. Au contraire, cela me semblait même normal et lui faire plaisir aussi.


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