♠ ♦ Alice in Wonderland ♥ ♣
Chapitre 29 : ♠ ♦ Le retour des souvenirs ♥ ♣
2794 mots, Catégorie: T
Dernière mise à jour 30/01/2017 20:45
Je cavale dans la forêt située derrière l'orphelinat. Monta me suit, essoufflé. « Alice ! Attends-moi ! ». Il finit par abandonner, et retourne dans la cour de l'école. Moi, je continue ma course. Je me retrouve dans une clairière. Un terrier me fait face, tout comme le minuscule lapin blanc que je suivais. Soudain, l'animal se transforme en enfant. Un garçon brun, aux yeux rouges, avec de longues oreilles blanches de lapin. Il me regarde, en reculant doucement. Il sort sa montre à gousset dorée de sa poche, et saute dans le terrier. Ma curiosité me pousse à le suivre.
Chute libre au milieu d'objets divers. Atterrissage dans une salle circulaire. Des portes condamnées. Une minuscule clef sur une table. Je tente de déverrouiller chaque porte avec. Aucune ne s'ouvre. Je trouve une toute petite porte derrière un rideau satiné. La clef ouvre uniquement cette porte. Je suis trop grande pour y entrer. Une potion sur la table. Une étiquette sur le bouchon : « Bois-moi ». Je bois. J'ai maintenant la taille d'une souris. Comme une idiote, j'ai laissé la clef sur la table. Je suis trop petite pour la récupérer. Un gâteau dans un écrin est posé à mes pieds : « Mange-moi ». Je croque un morceau. Je suis à présent géante, ma tête frôle le plafond. Je range le gâteau dans la poche de mon tablier. Je récupère la clef et bois la boisson qui m'a fait rétrécir. J'ouvre à nouveau la porte, sors de là, et croque un bout de gâteau pour retrouver ma taille normale.
Le Pays des Merveilles. Ses insectes aux apparences de chevaux à bascule ou d'oursons en peluche. Ses fleurs aussi bavardes que des vieilles commères. Ses animaux qui se transforment en humains. Ses décors aussi colorés qu'étranges. Sans oublier ses habitants fous. Des jumeaux me font face . Ils sont à peine plus âgés que moi. L'un a des cheveux, l'autre pas. Mais je sens leur fraternité. « Bienvenue au Wonderland ! » L'un prend ma main gauche. L'autre prend ma main droite. Tous deux me conduisent dans ce monde mystérieux. « Auriez-vous vu un garçon-lapin ? », ai-je demandé. « Il a rejoint Blue Habashira, le chef des Rebelz. », répond celui au crâne rasé. « Nous allons t'y conduire, ma beauté. », continue celui avec des courts dreadlocks. Je suis forcée de les suivre.
Un pré-adolescent aux yeux et aux cheveux verts. Assis sur un champignon géant, un narguilé posé près de lui. Tout vêtu de bleu. Les jumeaux m'escortent devant lui, et s’éclipsent en ricanant. « Qui es-tu ? » « Euh... Alice. » « Tu hésites, sous-merde ? » À sa droite, le garçon-lapin me fixe, ses bras derrière la tête. « Tu penses que c'est la bonne personne, Kuro ? » « J'en suis certain, Blue. C'est elle. » Le dit ''Kuro'' s'approche de moi et me regarde dans les yeux. Le dit ''Blue'' porte sa main à son cœur, avant d'esquisser un malicieux sourire, laissant pendre sa langue. Kuro détale soudainement à la vitesse de la lumière. Je veux le suivre. Blue dit : « Il est encore en retard... » Je me lance à sa poursuite.
Sa rapidité est plus qu'impressionnante. Je me perds dans une lugubre forêt. Des arbres menaçants. Un froid glacial. « Tu ne devrais pas te balader seule dans la Shadow Forest, Fuckin' Brunette... » Un garçon-chat aux courts cheveux noirs en bataille, assis sur une branche derrière moi. « Comment t'appelle-t-on, jeune fille ? » « Alice » « La Alice ? » Envoûtée par le délicieux sourire lunaire qui éclaire son espiègle visage. Étonnée que les nouvelles circulent si vite dans ce monde. Toute aussi surprise qu'il disparaisse, se fondant dans le décor, avant d'apparaître plusieurs mètres plus loin, à la sortie de la forêt. « Je vais te conduire au Lièvre, au Loir et au Chapelier. Mais je n'irai pas plus loin. »
Le Chat du Cheshire me laisse près du Poker Lake, dans la Zone Carreau, avant de disparaître, retournant dans sa Shadow Forest. Ce n'était pas ici qu'il devait me conduire... que me cache-t-il ? Je retrouve Kuro. Il me sourit. Il est accompagné de deux amis à lui. Ils semblent avoir le même âge, et ont l'air très complices. L'un a des cheveux blond platine très courts, et une cicatrice en forme de croix sur la joue droite. L'autre a des cheveux châtain clair aux reflets blonds, un peu décoiffés, et porte des lunettes de soleils teintées orange. « Tu dois être Alice ! Moi c'est Jumonji. » « Et moi je suis Togano, bienvenue ! » Je souris, en rougissant, toute intimidée. Tous trois ricanent de bon cœur. Kuro prend ma main, Jumonji entrecroise son bras avec le mien, et Togano me pousse doucement le dos pour que j'avance. « Mais, où me conduisez-vous ? » « C'est une surprise ! Mais dépêche-toi ! On va arriver en retard sinon ! ». Pour appuyer son propos, Kuro tapote le cadran de sa montre à gousset avec un grand sourire.
Nous nous cachons soudainement derrière un buisson. « Chut, c'est le Roi de Coeur ! » chuchote Kuro en mettant son index sur sa bouche. Je le vois, ce jeune souverain d'à peine treize ans, avec ses cheveux noir bleuté coiffés en ''banane rockabilly''. Il est suivi de nombreux Cavaliers Rouges. « Les Rebelz sont un poison pour notre monde. Ce clan répugnant veut barrer ma route : ils ont élaboré un plan pour me contrer. Mais ils n'y arriveront pas, je suis bien plus fort qu'eux, et je n'hésiterai pas à leur couper la tête si ils se mettent en travers de mon chemin ! » Il s'éloigne de plus en plus. Nous sortons de notre cachette. « Quel est ce plan ? », je demande. « C'est justement ce que nous sommes sur le point de fêter ! », lance Togano. « C'est la création d'un nouveau royaume dans la Zone Pique. » continue Jumonji avec un sourire satisfait.
Ils sont tous là ! Blue avec son narguilé, les Tweedle nettoyant leurs pistolets, le Cheshire et son sourire hypnotisant...Trois mecs que je n'avais encore jamais vu auparavant sont également présents : Un garçon-lièvre beaucoup plus vieux que moi, aux cheveux blonds en bataille, jetant habilement un sucre dans chaque tasse de thé, en ricanant avec démence. Un garçon-loir, semblant le plus âgé du groupe, mangeant des macarons en me regardant fixement, après avoir mollement baillé. Et un blond coiffé d'une longue queue de cheval et d'un somptueux haut-de-forme, servant une tasse de thé à chacun d'entre nous. Kuro, Togano, Jumonji et moi prenons place autour de la longue Table des 3 Fous, piochant quelques friandises au hasard. La bonne folie semble s'être emparée de nous tous. Edge, le jeune Chapelier, monte sur la table après avoir versé du thé dans chaque tasse et hurle : « Un Joyeux Non-Anniversaire au Royaume de Pique ! » Nous levons tous nos tasses et trinquons à la gloire des Rebelz, le camp auquel j'appartiens désormais.
Tout revient d'un seul coup ! Tout cet incroyable mois passé au Wonderland, alors que je n'avais que 10 ans à peine ! Les souvenirs défilent tels des mots sur une interminable liste. Les titres que j'ai attribué à chaque Rebelz. Blue qui me permet d'assister à la confection des montres des Tweedle. La rénovation d'une ruine afin de créer un Château de Pique digne de ce nom pour Jumonji. Lorsque Hiruma apparaissait soudainement pour me surprendre, puis me câlinait en ricanant et en ronronnant pour s'excuser de m'avoir fait sursauter. Les nombreuses parties de cache-cache endiablées avec Agon et Unsui, dans les labyrinthes. Mes missions d'espionnage du Royaume de Coeur au côté de Marshall.Le jour où Edge m'a déclaré son amour en rougissant, entre deux gorgées de thé. Les balades dans la Zone Trèfle en compagnie de Togano. Toutes les fois où L m'a protégé des Gardes de Kotaro. Tout ce temps passé aux côtés de Kuro, qui s'est toujours occupé de moi comme si je faisais partie de sa famille. De toute manière, les Rebelz ont toujours été une petite famille, avec trois aînés à leurs têtes : L, Marshall et Blue, ceux qui ont formé ce clan, nous ont éduqué et ont fait de nous de bons Rebelz... Hormis Togano. Sa trahison me revient aussi. Son départ, aussi soudain que douloureux. Tout a failli s'effondrer. Jumonji était sur le point de baisser les bras. On l'a tous aidé : il fallait un Royaume de Pique pour affronter Kotaro. Et ensemble, nous nous sommes relevé, plus unis que jamais...
« Alice ! » J'ouvre brusquement mes yeux pleins de larmes. Mes mains sont toutes tremblantes et crispées. Mon regard chocolat est perdu dans le vide. Je convulse même légèrement, me mordillant la lèvre sans parvenir à m'en empêcher. Ma vision est trouble, mais redevient nette progressivement. Jumonji est assis près de moi, alors que je suis allongée sur le carrelage à damier du laboratoire de potions. C'est sa douce voix qui m'a sorti de cette violente vague de souvenirs. Délicatement, il prend mes mains et m'aide à m'asseoir. Je le serre soudainement contre moi, fondant en larmes. « Mon Modèle... Tu as réussi ! »
Visiblement ému que je l'appelle de nouveau comme ceci, titre que je lui ai attribué lors de ma première visite, Jumonji esquisse un sourire touché en me blottissant contre son torse.
« Je n'aurais jamais réussi sans ton aide, Alice. Sans votre aide à tous. Et tu le sais.
-Le départ de Togano, mon Confident... mes larmes coulent d'autant plus en me remémorant son départ brutal... tu en as été si affecté. On ne pouvait pas te laisser baisser les bras, si près du but ! Tu es un Roi de Pique parfait... bordel, je suis si fière de toi, Ju' ! »
Je me le revois, du haut de ses onze ans, tout démoralisé lorsque Togano est devenu Valet de Cœur. Cet acte était si sauvage et injustifié que Jumonji voulait tout abandonner. Le voir à présent si haut placé, à la tête de son Royaume, me fait un bien fou. C'est comme si j'avais relevé haut la main le défi le plus important de ma vie.
Après m'avoir étreint un long agréable moment, Jumonji se lève, et m'aide à en faire de même en tenant fermement mes mains frissonnantes. Lentement, je me tourne vers le reste des Rebelz... ma famille... ils sont tous là, alignés en face de moi, à me sourire tendrement. Un sentiment affreux s'empare de moi : la culpabilité. Je m'en veux terriblement de les avoir oublié. Pourtant, ce n'est absolument pas de ma faute...
Retirant doucement ma main de celle de Jumonji, je pense qu'il est grand temps pour moi de retrouver chacun de mes Rebelz. Mais les retrouver réellement, cette fois-ci.
En titubant, car ce retour aux sources m'a achevé, je fonce dans les bras de Blue. Il lâche un léger rire, tentant de dissimuler son émotion derrière son sourire fier.
« Mon Conseiller... putain, cette Potion d'Oubli est plutôt un poison ! Lui dis-je en tapant doucement son bras d'un air taquin, essuyant une de mes nombreuses larmes.
-C'était pour ton bien, sous-merde, murmure-t-il en tirant sur son narguilé. Tu n'avais que 10 ans... tu n'aurais pas voulu rentrer chez toi. Or, il le fallait. Pour toi, comme pour nous. Tu as bien vu à quel point le Wonderland te perturbait sous forme de rêves... alors si tu t'en étais complètement souvenue, imagine à quel point ton esprit aurait été agité...
-Je comprends... Je baisse les yeux faiblement, et lui souris. Tu as fait ce qu'il fallait.
-Évidemment, qu'est-ce-que tu crois ?! »
Cet air monstrueusement malicieux m'avait manqué. Je veux dire... lui, il n'a jamais changé. Mais cet oubli se fait cruellement ressentir à présent. Six ans dans le vent, à ne plus se rappeler de ma vraie famille... Blue ébouriffe mes cheveux pour m'embêter, ce qui me pousse à le câliner une nouvelle fois. Je chuchote de manière à ce que lui seul entende :
« Toi et moi, il faut vraiment qu'on discute. »
Il me lance un regard compréhensif de ses immenses yeux verts maquillés, et hoche la tête.
Je me tourne ensuite vers Kuro, qui tend ses bras vers moi en souriant. Mon Frère. Je me souvenais déjà de lui, mais me rappeler de toutes nos conneries et nos moments complices me soulage. Je ris de bon cœur en me collant à lui. Je n'avais jamais été aussi câline depuis que j'ai trouvé le Wonderland, il est vrai. Sur Terre, je n'ai jamais étreint mes amis de la sorte, à part Monta, car nous avons grandi ensemble. J'ai l'impression d'être de moins en moins sauvage depuis que je suis une Rebelz.
Ensuite, je lance un regard joueur aux Tweedle, mes Déconneurs qui écartent tous deux leurs bras pour m'accueillir. Je fonce entre les deux, en riant. Ils me serrent contre eux, se chamaillant presque pour me câliner, Agon tirant mon bras droit alors qu'Unsui tire mon bras gauche. Je sais qu'ils ne sont pas sérieux, et font ça pour me faire sourire, comme lorsque nous étions enfants. Et ça marche !
Je m'avance maintenant vers L et Marshall. L'homme-loir m'étreint maladroitement, rougissant un petit peu. Il me chuchote :
« Comment j'ai pu douter de ton identité ? Je m'en veux tu sais...
-Je n'avais plus toute ma plusoyance, mon Protecteur, dis-je avec bienveillance. Tu m'as toujours protégé, L, donc ne t'en veux pas pour si peu. Je me tourne ensuite vers Marshall, et reste de marbre. C'est dingue, je ne me souviens pas de toi, t'es qui ? »
L'homme-lièvre lâche la cuillère qu'il tenait. Alors que l'ustensile tinte sur le sol, il murmure en remuant ses oreilles : « Quoi ? » Brusquement, je lui saute au cou. Je m'exclame :
« Je plaisante, mon Bras Droit ! Évidemment que je me souviens de toi, et de tes lancées de théières dans la gueule des Chevaliers Rouges, j'éclate de rire en y repensant. Lui aussi.
-Putain, comment oublier ça, sans déconner ?! Lâche-t-il de sa voix douce en calmant son fou-rire. Il dit soudainement. Ah, bah, avec une Potion d'Oubli... j'suis con ! »
Il tape dans ma main en ricanant. J'approche enfin de Edge et Hiruma. L'un a l'air assez satisfait, l'autre perdu. Pour commencer, je me place face à Edge, qui me sourit, ému. Il est beau ce con. Je me souviens de notre histoire d'amour. Nous étions enfant... ce n'était évidemment pas pareil que le couple que je formais avec Hiruma il y a encore quelques minutes de cela... c'était différent. Mais c'était aussi très beau. Notre complicité, nos petits baisers timides, nos balades main dans la main, ou nos pique-nique face au sublime coucher de soleil. Certes, je n'avais que 10 ans, et lui 11... mais nous étions très amoureux.
Je me blottis contre lui. Je m'en veux de ne pas m'être souvenue de tout ça. J'ai l'impression que Edge est le Rebelz avec lequel j'ai passé le moins de temps depuis mon retour ici... il ne mérite pas ça, il est mon meilleur allié. « Ma Moitié... » Je n'ai chuchoté que ça. Notre câlin et nos regards en disent long, sur la manière dont je lui ai manqué, et aussi sur la façon dont je m'en mords les doigts d'avoir oublié tous nos moments de bonheur.
Puis je me tourne vers Hiruma, mon Ombre. Je prends ses mains, sans un mot. Il plonge son regard dans le mien, et esquisse un léger sourire. Un sourire triste, très triste. Je caresse sa joue et chuchote à son oreille : « Tu resteras toujours celui qui hante mes rêves. »
Il me répond simplement : « Bon retour parmi nous, Alice. »