A Galaxy Railways Story : Reiko

Chapitre 69 : Le jardin de Perséphone

6737 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 13/10/2024 15:28

Chap 69 : Le jardin de Perséphone


- Si vous l’aviez souhaitez, je vous aurais accueillis en ma demeure pour la nuit.

- C’est très aimable, déclara Reiko en tirant sur les rênes de son cheval, mais mon époux est probablement en ce moment même sur le pied de guerre pour nous retrouver. Je n’aimerais pas l’inquiéter davantage. 

- Je comprends, répondit Ivan. Il est normal qu’il se soucie de la sécurité de sa moitié.

- Vous n’imaginez pas à quel point…, soupira-t-elle.


Une escouade composée d’une dizaine de soldats, du Seigneur de l’est et des agents de la SDF, cheminait sur une piste en terre battue, éclairée par la lumière des astres célestes, à laquelle s’ajoutait celle des torches.


- Ici, vous utilisez des cosmo-guns mais vous n’avez pas de voiture ?, fit très judicieusement remarquer Manabu.

- À cause des émanations provenant du noyau de la planète, les véhicules dépourvus de bouclier, qu’ils soient thermiques ou électriques, ne fonctionnent pas ici. Nos armes lasers nécessitent quant à elles des recharges électro-magnétiques que nous faisons importer. Et, comme vous l’avez sûrement deviné, de par la nature de cet endroit, il est impossible d’avoir recours à ce que vous appelez “l’électricité”. 

- Je vois, siffla la pilote. Un retour aux sources en quelque sorte.

- Au Moyen-Age, tu veux dire, se moqua l’artilleur.


Reiko glissa une œillade vers leur hôte et ravisseur. Lorsqu'elle avait exigé leur libération immédiate, celui-ci n’avait pas tergiversé une seconde, proposant même de les raccompagner jusqu’à la gare. Sa seule condition avait été de les abandonner un kilomètre avant leur destination afin de ne pas tomber nez à nez avec l’armée du camp adverse, familière des lieux. 

Songeuse, la jeune femme ne s’aperçut pas que sa monture faisait des écarts sur la route.

Quand elle avait questionné Ivan Zarnitsky sur la raison pour laquelle il ne mettait pas lui-même un terme à cet odieux trafic, celui-ci avait allégué que, pour le bien de son peuple, il ne pouvait risquer une guerre ouverte.

Des guerres… Ses prédécesseurs en avaient déclenchées à chaque génération, épuisant de ce fait les ressources de Wilane et l’énergie de sa population. 

Le dirigeant du pays de l’est avait donc grandi dans une atmosphère belliqueuse, en assistant, impuissant, aux tueries de masse. 

Depuis quelques années, à force de travail, il était parvenu à trouver un terrain d’entente avec l’actuel Seigneur de l’ouest. Ce pacte, des plus fragiles, était susceptible de voler en éclat à tout instant.

Cependant, des événements récents avaient changé la donne. Des témoignages lui avaient été récemment rapportés concernant des exactions commises par Walemborought, qui n’hésitait pas à capturer des humains parmi les tribus indigènes parsemant son territoire, allant jusqu’à violer la frontière pour kidnapper des habitants de l’est.

Et cela, il ne pouvait le tolérer.

Toutefois, pieds et poings liés, il comptait sur l’aide de la Space Defence Force pour faire chuter Allison de son piédestal.


- Quelle aventure, grommela-t-elle.


“Pourquoi est-ce toujours Manabu et moi qui sommes pris dans des histoires qui nous dépassent ? Bruce va avoir un infarctus, c’est sûr… L’enquête sera sans doute délicate à mener.”

D’autant plus que l’acheteur principal de Walemborought n’était pas étranger au commerce des créatures biologiques…

La militaire serra les dents à s’en faire saigner la gencive.


- Et il va falloir la contacter, elle. Misère…

- Dame Speed, faites atten…


Ivan Zarnitsky n’eut pas l’occasion d’achever sa phrase car le fracas du martèlement de sabots lui coupa l’herbe sous le pied.

Incapable de maîtriser son cheval quand il se cabra, Reiko fut propulsée hors de sa selle et effectua un vol plané majestueux avant de s’étaler dans le gazon desséché.

Le souffle court, elle pivota sur le dos en ahanant. Une douleur lancinante lui vrillait l’épaule et une migraine lui brouilla la vue. 

“Je me suis cognée… Bordel.”

Elle ne perdit néanmoins pas connaissance et, malgré le choc qui troubla sa vision, elle contempla, sidérée, une charge digne de celle d’Eomer du Rohan.

Des cavaliers, perchés sur des destriers à la robe claire, dévalaient la pente à faible dénivelé, haute d’une trentaine de mètres, qui bordait le talus.


- Ils ont descendu notre éclaireur !, crut-elle entendre.

- Koko…!

- Nab… Nabu… 


Son équipier s’agenouilla à ses côtés. Il avait réussi à calmer sa monture, de justesse certes, mais s’en était sorti sans dommage.


- Tu peux te lever ?

- Je… Je crois…, marmonna-t-elle tandis qu’il passait un bras autour de ses hanches.

- Reiko !, s’écria une voix grave et enrouée.

- J’ai des hallucinations ?

- Laisse Yuuki, je m’en occupe. 

- Bruce ?


En effet, il s’agissait bien du Commandant de l’unité Sirius, littéralement dévoré par l’angoisse et les traits cernés, qui bondissait agilement de sa selle.


- Chérie, tu es blessée ? Il t’ont… Est-ce qu’ils t’ont fait quoi que ce soit… Est-ce que…

- J’ai rien, je t’assure. Je dois t’expliquer… Ce n’est pas… Les choses ne sont pas ce qu’elles semblent… Hé ! Non, atten... !


L’artilleur se dressa devant sa partenaire en secouant négativement la tête. Puis, il signa quelques gestes rapides avec les doigts.

“Ennemi ici. Ne pas parler. Explications plus tard.”

Elle se mordit les lèvres, révoltée par la scène qui se déroulait sous ses yeux. Plusieurs soldats étaient étendus dans l’herbe, touchés par des faisceaux lasers provenant de l’un ou l’autre des deux camps. La bataille avait cependant tourné court car Ivan s’était rendu afin d’éviter toute effusion de sang inutile.

Solidement encadré par des mercenaires à la botte de Walemborought, il fixait son rival héréditaire en arborant un air impassible.

De là où elle était, Reiko ne put saisir la teneur des paroles qu’ils échangèrent mais la suffisance affichée par Allison lui donna la nausée et la mit dans une colère noire. 

“Ce sale fils de…”

Elle enfonça ses ongles dans la terre pour se retenir de l’insulter.

“Dire que je me suis faite avoir par la bonne humeur feinte de cet enfoiré.”


- Je vais te porter.

- Non, je peux marcher, l’interrompit-elle. Tu es venu seul ?

- Ouais.


Le sniper détailla sa femme, comprenant sur le champ que quelque chose d’important lui échappait. D’une part, contrairement à son séjour dans la base humanoïde qui lui avait laissé des séquelles pérennes, cet enlèvement ne paraissait pas l’avoir traumatisée outre mesure. D’autre part, son comportement n’était pas adéquat dans la situation présente.

“Je l’ai rarement vue aussi furieuse. Contre qui est-elle si remontée ? Ivan… ? Non… Ce ne serait quand même pas…”, pensa-t-il, surpris, en suivant le regard de sa conjointe jusqu’au mannequin royal à la chevelure dorée.


- Que s’est-il passé ?

- J’ai attrapé le rhume à cause de la brise fraîche du soir, maugréa-t-elle.


Autrement dit en langage codé : “Je ne peux pas m’exprimer maintenant.”


- Si vous étiez restés à l’intérieur aussi, répondit-il sur le même ton en l’aidant à se mettre debout, captant parfaitement l’allusion. 

- Nous avons été pris par le temps.


Sous-entendu : “Nous avons une information cruciale à te communiquer.”


- Ah, je vois. Vas-y tranquillement.

- Oh, Juliette ! 


Les poils de la pilote se hérissèrent. Elle était une piètre comédienne et berner ce maître supposé de la manipulation était au-delà de ses compétences.

“Merde, Diversion.”


- Je vais m’évanouir, murmura-t-elle en rivant ses prunelles dans celles de son mari.

- Hum. Je suis là, lui promit-il.


Il n’était pas dupe du jeu de sa compagne et la souleva du sol. Presque aussitôt, elle enfouit son visage dans les plis de la veste du Commandant.

“Si Allison m’interroge, je suis foutue. Plutôt lui faire croire que je suis une chiffe molle. Et puis, étant donné mon fiasco de toute à l’heure, c’est pas tout à fait faux…”

Manabu, qui n’était guère meilleur menteur que son amie, s’était éclipsé, prétextant porter secours aux blessés pour esquiver Walemborought.


- Comment va-t-elle ?, s’enquit le Seigneur de l’ouest.

- Certainement un traumatisme crânien. Je la ramène à Yûki. 

- Je me tiens à votre disposition. Je suis tellement navré que nos conflits internes aient un tel retentissement sur votre peloton.

- Ce n’est pas de votre fait. Qu’allez-vous faire d’eux ?

- Nous avons de la place pour les héberger, argua Allison, laconique.

- Et lui ?, demanda Bruce en désignant Ivan d’un geste du menton.

- Je ne peux décemment pas le garder prisonnier sous peine d’ouvrir les hostilités avec ses sujets. Je vais accélérer la négociation du traité de paix et le renvoyer chez lui.

- Ça me paraît raisonnable. Yuuki ! Viens me filer un coup de main.

- Laissez-moi vous…

- Non, ça ira, vous avez assez à faire.


“Si Zarnitsky dit la vérité, les soldats de l’est seront vendus comme esclaves… Ou pire. Il faut que l’on agisse vite.”, songea la militaire, glacée par cette perspective peu réjouissante.

Manabu surgit alors aux côtés de son supérieur, pressé de vider les lieux.


- Que vous a dit Ivan ?, le questionna le Seigneur de l’ouest en s’éventant avec indolence.

- Il était contre l’implantation de cette gare et nous a sommés de partir. Je suis désolé, Bruce. Il a débarqué avec ses soudards et nous avons été contraints d’obéir. Nous lui avons dit que nous n’étions pas décisionnaires et qu’il encourait les représailles du Galaxy Railways… Il nous a libérés à condition que tu lui obtiennes un entretien avec Layla Destiny Shura. Dieu merci, vous êtes parvenus à nous localiser… 


“Bien joué, Nabu ! Continue de l’embobiner.”


- Tu me feras un rapport exhaustif, Yuuki.

- À tes ordres.

- Mmmh, les réfractaires au progrès sont un fardeau que nous devons tous supporter, lança Allison en se dissimulant derrière son éventail.

- Il semblerait que ça complique notre mission, en effet, lâcha Bruce en fourrant sa chère et tendre dans les bras de Manabu, qui changea de couleur au contact si rapproché de la gente féminine.


Puis, le sniper mit adroitement le pied à l’étrier et enfourcha son cheval.


- Je la récupère.

- Euh… Oui.

- Vous, dit-t-il en interpellant un homme de Walemborought, trouvez lui une monture.


Une fois Manabu confortablement installé sur une jument alezane, le Commandant donna le signal de départ.


- Yah !


Quand elle fut sûre qu’elle était hors de vue de l’armée de l’ouest, Reiko tourna lentement la tête et, démunie, observa Ivan devenir le captif de son ennemi ancestral.

“Comment va-t-on faire maintenant ?”


***


- Quelqu’un m’explique ?, ordonna Bruce, tandis que Yûki rangeait sa trousse de soins.


Un bandage noué autour du crâne, le bras à nouveau en écharpe, Reiko échangea un regard de connivence avec Manabu.


- Allison est un putain de salopard.

- Koko !, s’offusqua l’artilleur.

- Une ordure ? Un connard ?

- Arrête ! Ils ont compris !


L’unité Sirius au grand complet était réunie dans la voiture cafétéria de Big1 car la pilote avait catégoriquement refusé une énième batterie d’examens puisqu’elle n’avait pas envie de vomir et que sa migraine s’était spontanément résorbée. 


- Chéri, il se produit des choses inquiétantes au Château d’Edelweiss. Des choses qu’on ne peut pas ignorer.

- Et j’en déduis que vous tenez ces renseignements de Zarnitsky ?

- Il ne nous a pas demandé de le croire sur parole, intervint Manabu. Il nous a simplement encouragés à investiguer plus en avant. 

- Ne tournez pas autour du pot, s’impatienta le Commandant. 

- Walemborought et ses sbires livrent des humains à l'Empire Mécanique qui a investi une planète artificielle, Grande Andromède, dans la galaxie du même nom. Vous étiez au courant ? J’imagine que non.


“Merde, elle sait”, se lamenta Bruce avec fatalité.


- Pour le moment, ils ont recours à des vaisseaux de transports furtifs mais, en s’appropriant la création de la ligne, ils pourraient démultiplier l’ampleur de ce trafic. D’après le Seigneur de l’ouest, il n’y a pas encore de gare sur la planète d’accueil des humanoïdes, ce qui ne saurait tarder. Selon ses espions, il semblerait que la Compagnie soit proche d’accorder son aval.


“Shura est en train de perdre son combat contre les actionnaires… L’argent a toujours gain de cause, finalement. Il va falloir que j’envoie Black à la pêche aux infos.”

Lorsque son épouse tapa du poing sur la table, le sniper sursauta.


- Nouvelle Andromède, Néo Râ-Metal, Grande Andromède… Ivan n’était pas sûr de sa dénomination… Enfin, peu importe son nom, les desseins des robots sont clairs comme de l’eau de roche. Non contents d’avoir transmuté des âmes de jeunes enfants en pièces de rechange pour forteresse, ils ont cette fois-ci décidé de les utiliser en guise de “matière énergétique”, destinée à améliorer, renforcer ou alimenter les corps en métal haut-de-gammes des aristocrates comme le Comte Mécanique de Tetsuro.

- Pas possible, souffla Killian, choqué.

- Et Allison s’est dévoué pour fournir cette matière première ?, compléta David.

- Exactement, affirma Reiko. Contre rétribution pécuniaire, tu t’en doutes. Il s’est débrouillé pour nous attirer dans ses filets avec cette mise en scène grotesque où il a simulé une attaque de l’est. Il voulait se faire passer pour le bon samaritain, alors qu’en réalité il est la sombre crapule qui a instauré une traite d’esclaves abominable.


Bruce s’adossa dans le canapé, dubitatif.


- Et comment le prouver ?, les interrogea le cadet.

- Il faut qu’on fouille son manoir. Il y a forcément un endroit où il cache sa “marchandise”, avança Manabu.

- Et Ivan et ses soldats. Faut qu’on les tire de là. 

- Alors qu’il t’a enlevée ?

- C’est un détail, anata. Il avait ses propres motivations. S’il avait déclenché les hostilités, c’est l’intégralité de son peuple qui en aurait subi les conséquences.

- Tu lui trouves facilement des circonstances atténuantes, persifla le Commandant. Et tu es un peu trop promptes à foncer dans le tas dès qu’on évoque les humanoïdes.

- Il va être exécuté, c’est évident, non ?! Allison veut faire place nette et il n’hésitera pas à se servir parmi les habitants du royaume de l’est pour que cet immonde “commerce” ne prospère. 

- Je suis d’accord. Il serait indécent que la SDF se cantonne à être spectatrice de cette horreur, approuva Louise.

- On doit vérifier ces dires par nous-même, insista l’artilleur. Fermer les yeux est inconcevable.

- Reconnaît que s’il n’avait pas procédé de cette façon, jamais nous ne l’aurions écouté, plaida la pilote.

- La SDF ne se défile pas.

- Bien dit, Manabu, abonda l’ingénieur en lui assénant une claque monumentale dans le dos.

- Si des gens souffrent ou sont blessés, il faut les secourir, renchérit Yûki.

- Oui, cette mission est plus importante que la supervision de la construction d’une gare qui sera exploitée à mauvais escient !, s’exclama Reiko. Ils comptent sur nous.


“Cette histoire prend des proportions phénoménales… Nous ne sommes pas en mesure de gérer ça.”

Néanmoins, Bruce ne pouvait ignorer l’enthousiasme qui suintait par tous les pores de son équipage. Une opération pour que la justice triomphe ? Pour sauver des hommes, des femmes ou même des enfants en situation périlleuse ? Une cause qui mérite que l’on se batte pour elle ?


- Non, c’est définitivement hors de question, objecta le sniper en douchant l’ardeur générale.

- Hein ?


Un silence abasourdi envahit le wagon, uniquement troublé par le sifflement de la bouilloire.


- Ce n’est pas de notre ressort et, sans renfort, c’est voué à l’échec… Et puis, dans l’hypothèse où vous êtes dans le vrai, Walemborought s’est probablement préparé à ce que nous réagissions de la sorte. Il n’est pas fou et je suis sûr qu’il est du genre à toujours avoir un coup d’avance. Non, ce serait du suicide.

- Tu suggères de ne rien faire ?, s’étouffa Reiko en se maîtrisant difficilement. D’attendre la mort de personnes innocentes ?

- Je vais prévenir le QG en espérant qu’il détache une section des SPG. Notre ordre de mission est précis et, au vu des événements récents, je dois informer Tôdo pour qu’il nous dicte la conduite à suivre.

- “En espérant”, gronda l’artilleur. Et dans le cas contraire ?


Les mâchoires de Bruce se contractèrent. Il détestait qu’on le prenne pour un lâche et il détestait encore plus ces œillades à la fois accusatrices et moralisatrices.

Si ça ne tenait qu’à lui, il infiltrerait les quartiers ennemis exclusivement muni de son fusil d’assaut. Mais mettre en danger son unité alors que la probabilité de réussir était inférieure à dix pourcents ? C’était inenvisageable.

“Freiner l’empressement de ses troupes. Voilà aussi ce qu’est le travail d’un Commandant. Un travail dont je me passerais bien...”


- Se désintéresser de la détresse de ces gens ? Tu n’y penses pas !, se rebella Louise.

- Quel est le rôle de la SDF ?


Seuls des regards fuyants lui répondirent.


- Quel est le rôle de la SDF ?, répéta-t-il.

- Mais tu te fous de qui… ?, commença sa femme, dont la goupille de sécurité venait de sauter.

- Quel est le rôle de la SDF ? Vous êtes sourds ou simplement débiles ?

- Protéger les passagers et les infrastructures du Galaxy Railways. Veiller sur l’intégrité et la neutralité de la Compagnie, récita Killian d’une voix morne.

- Et ça justifie de les laisser crever comme des chiens ?, se récria la pilote, furieuse.

- Si tu t’es engagée pour agir selon ton bon plaisir, tu t’es trompée de pavillon, la rembarra Bruce sur le même ton.

- Ah ouais ? Si aider son prochain est un caprice, alors oui, je me suis visiblement plantée en beauté.

- Je ne suis pas là pour que vous discutiez mes ordres. Je commande, vous obéissez, c’est pas plus compliqué que ça.

- Inutile de le rappeler, on l’a tous très bien compris, grommela Reiko, ulcérée.

- Tu as décroché un avertissement pour insubordination, félicitation. 

- T’oserais pas…

- Je vais me gêner. Et, puisque Yuuki a également enfreint le règlement, tu viens tout juste de lui en faire gagner un aussi. Des revendications supplémentaires ? Non ? David et Louise, vous serez de garde jusqu’au matin. Les autres, interdiction de se promener dehors sous peine de suspension à effet immédiat. Rompez maintenant, intima-t-il en quittant la voiture, le cœur lourd.


Tandis qu’il franchissait le panneau coulissant, il n’eut pas besoin de se retourner pour sentir le regard brûlant de reproches de sa belle qui le fixait impitoyablement.

“Qu’elle me pardonne ou non ne fait aucune différence. Je ferai passer son bien-être avant tout le reste. Et puis, je ne leur ai pas menti, nous ne sommes pas en capacité de répliquer.”

Il se dirigea vers la “control room”, encore plus maussade que d’ordinaire.

“Je l’aime à en mourir mais je doute qu’elle puisse en dire autant aujourd’hui.”


*** 


- On doit y aller, les gars, s’excusa David. 

- On lui fera entendre raison demain, proposa Louise, désolée.

- Ouais, “Les ordres sont les ordres”. On n’y déroge pas, grogna Manabu. 


Ils observèrent leurs compagnons vider les lieux, désabusés. Seul demeura Killian après le départ de Yûki. 

Reiko s’affala sur un canapé en enfouissant son nez entre ses mains.


- Est-ce vraiment mon mari, cet homme froid et sans pitié ? Je refuse de le croire… Je refuse… Je refuse…


La colère céda la place aux sanglots et Reiko se recroquevilla sur le divan, l’âme déchirée par l’attitude de son conjoint. 


- Il ne le fait pas de gaieté de cœur, tenta de la consoler l’artilleur. Il essaie de nous préserver. Il ne veut pas nous impliquer dans une bataille qu’on ne peut pas remporter.

- Et ? N’est-il pas de notre devoir de porter secours aux nécessiteux ? Qu’ils soient ou non des voyageurs ? Et ce peu importe les risques ? Je me fous qu’on soit en infériorité numérique… Je m’en fous… Personne n’a le droit de rabaisser un être humain plus bas que terre. Bruce… Il devrait le comprendre mieux que personne. Il sait.. Il sait ce que j’ai vu… Ce que j’ai… Subi. Une vie d’esclave… Ne mérite pas d’être vécue…

- Sempaï…


La pilote essuya ses larmes, se rendant compte qu’il n’était pas de bon ton de s’épancher devant un cadet.


- Pardon… Je ne voulais pas… Je me suis laissée déborder par mes émotions. Va te reposer. On avisera en fonction de la réponse du QG… Les SPG interviendront sûrement… Ils interviendront sûrement…

- Tu es sûre ?

- Va te reposer, il n’y a rien que l’on puisse faire pour l’instant. 


Killian acquiesça et sortit à son tour du wagon. Le fils de Kanna fit à nouveau chauffer l’eau dans la bouilloire et servit une tasse de thé bouillant à son amie. Cette dernière avait retrouvé son calme et réfléchissait à toute allure.


- Ça va mieux ?, la questionna Manabu après qu’elle eut bu le liquide chaud et fumant. 

- Mmmh, merci.

- Qu’est-ce qu’on fait ?

- Si on désobéit, on sera suspendu sans autre forme de procès. Dans le meilleur des cas.

- C’est pas ça qui t’arrête d’habitude, Koko.

- Et toi donc !

- Je ne veux plus qu’il y ait de mort. Je ne veux pas qu’ils soient vendus non plus… Si tout ça est réel… Nous devons nous en mêler.

- Je suis aussi de cet avis.

- Bruce ne va pas apprécier.

- Ça m'est égal, soupira-t-elle.


Le jeune homme hocha doucement la tête.


- Dans ce cas, j’ai un plan qui nous vaudra très probablement un renvoi en bonne et due forme. 

- Puisque nous avons choisi le mauvais pavillon, est-ce bien important ?


***


Killian se détourna lorsque trois coups résonnèrent contre la porte de la voiture-dortoir qu’il partageait avec son instructeur. 


- Oui ?


Le battant s’entrouvrit, dévoilant les visages fermés de Manabu et de Reiko.


- Est-ce qu’on peut entrer ?


Le cadet nota les traits tirés de la pilote et se mordilla les lèvres, contrarié qu’elle se soit faite houspillée de la sorte par son mari.

“Et il l’a faite pleurer, ce rustre. Elle est trop bien pour lui. Il la traite toujours si mal, c’est insupportable.”


- On a un service à te demander, lança l’artilleur sur un ton des plus solennels.

- Mais tu n’y es obligé en rien, lui assura sa sempaï.


Les trois acolytes s’assirent en tailleur au sol et, bras croisés, Killian écouta attentivement la stratégie de Manabu qui, bien qu’insolite, n’était pas inintéressante et surtout pas si difficile à appliquer


- Tu vas y arriver, Black ? Ça te semble faisable ?

- Ça ne devrait pas poser de problème. 

- Tu n’y es pas forcé, réitéra Reiko. Et si jamais tu souhaites quand même le faire, sache que nous garderons le silence sur ton implication. 

- Bruce ne saura pas que tu nous a aidés, ça ne compromettra pas ton avenir à la SDF, je t’en fais la promesse.

- C’est bon, il n’y a pas que vous qui êtes révoltés par l’injustice. Si vous pensez que mes maigres talents seront utiles, je ferai de mon mieux pour vous seconder.


La militaire tapota le parquet, songeuse.

“C’est audacieux, certes, mais réalisable ? Je n’en suis pas certaine.”


- Tu seras notre guide dans ce manoir. Les drones de la SDF ne détectent pas les signatures thermiques, non ? Par contre, ils sont à même de scanner les nombreuses strates ou plutôt étages d’un bâtiment ? Et possiblement des entrepôts ou geôles assez larges pour abriter beaucoup… Beaucoup de… Prisonniers ?

- Exactement, sempaï. Est-ce que vous allez les libérer ou…?

- Ce sera du repérage, allégua Reiko. Il nous faut des preuves pour convaincre Bruce et a fortiori la Compagnie. 

- Mais si l’occasion se présente ?, avança Manabu.

- On avisera, j’imagine. Je suis particulièrement préoccupée par le sort d’Ivan Zarnitsky. Je ne suis pas sûre qu’il voit l’aurore. Sa situation est précaire et inquiétante.

- Donc vous êtes sûrs qu’il a dit la vérité ?

- Il n’y a qu’un moyen de le savoir, signifia l’artilleur.

- Et si le Commandant s’aperçoit que vous vous êtes enfuis ?


La jeune femme haussa les épaules.


- Il fera bien ce qui lui chante. De toute façon, ces agissements signeront la fin de ma carrière puisque je n’en suis pas à mon coup d’essai. Manabu, tu devrais rester ici. Ton futur est à la Space Defence Force. Le mien… Je n’en sais trop rien.

- Pas question, n'oublie pas que t’es blessée. Ton bras gauche a salement été amoché. Et puis… Mon père se retournerait dans sa tombe si j’abandonnais ces gens à leur malheur.

- Okay. Comme le martèle Harlock, chacun est libre de ses choix tant qu’il fait face à leurs conséquences, conclut Reiko.Tu peux déverrouiller l’un des accès de Big1 ? Et dérober un drone ? Ils sont conservés dans le wagon-hangar.


Killian eut un sourire en coin en extrayant un ordinateur de sous son lit.


- Je suis un as de la technologie. Un baron rouge de l’informatique. Fais-moi confiance, ça sera un jeu d’enfant.


***


- Bouge, Koko.

- Attends une minute, j’ai presque fini.

- S’il vient, on est foutus.

- Il s’est enfermé dans la “control room”. Cesse de stresser, Nabu.

- T’es sûre que c’est une bonne idée de le prévenir ?


La pilote leva le nez du mot qu’elle était en train de rédiger.


- Il reste mon époux malgré tout. Je m’apprête à le trahir et… Peut-être même qu’il choisira de me quitter après ça. J’ai la sensation que nous empruntons des voies différentes, alors je ne peux pas exclure cette possibilité. Pourtant, je serai fidèle à mes principes. Advienne que pourra.

- Ça n’explique pas pourquoi tu tiens à lui dire ce que nous allons faire.

- Je ne veux pas partir comme une voleuse. S’il me vire ou pire, me largue, il doit le faire en toute connaissance de cause. 

- Il te pardonnerait même si tu faisais sauter le Quartier Général.

- Tu surestimes sa grandeur d’âme…


Reiko reposa son stylo, plia le papier et le glissa entre les rainures du cadre sur la commode. Cadre à la bordure dorée et baroque contenant une photo prise sur Mars il y a quelques mois. Sayuri, nichée contre sa mère, souriait à l’objectif de toutes ses dents, pendant que ses parents se fixaient amoureusement, vêtus de leurs plus somptueux kimonos.

“C’était avant l’enlèvement de Sayu. On avait l’air heureux, non ? Ma Yuyu… Est-ce que tu fais de beaux rêves en ce moment ? J’espère que ton sommeil est paisible.”


- C’est bizarre que tu doives encore partager le dortoir de Louise quand on est en mission.

- C’est le règlement et j’ai absolument pas envie de discuter de ça avec toi. 

- Bien reçu, t’as terminé ?

- Ouais, on décolle.


La militaire appuya sur l'interrupteur et rabattit méticuleusement le panneau.

“Est-ce que les conséquences de mes actes sont irréversibles ?”

Le cerveau en ébullition, Reiko emboîta le pas à son équipier et tous deux cheminèrent à travers les voitures, tendus.


- On doit aussi éviter Louise et David qui font des rondes autour de Big1, fit remarquer Manabu. 

- Oui ça s’annonce délicat mais, lorsque ce sera fait, nous n’aurons plus que trois ou quatre kilomètres à parcourir pour rejoindre notre cible. 

- La forteresse d’Allison.

- Hum, la forteresse d’Allison. 


Il était près de quatre heures et demie du matin lorsqu’ils frappèrent à nouveau à la porte du cadet du peloton Sirius.


- Où en sont les préparatifs ?, l’interrogea d’entrée de jeu Manabu.


Killian Black leur adressa un clin d'œil mutin.


- J’ai failli m’ennuyer !


***


- Il en met du temps…

- On attend le signal, déclara Reiko, intraitable. Si on se fait prendre, c’est mort… Et Bruce nous renverra pour rien. Quitte à se faire virer, autant que ce soit après avoir obtenu des éléments incriminant ce fils de…

- Je suis d’accord, tant qu’on entraîne pas Killian dans notre chute.

- Mmmh. S’il est discret, il ne risque rien. Bruce ne se doutera pas qu’on l’a réquisitionné.

- Si tu le dis…


La montre connectée de Reiko vibra et un message s’afficha sur celle-ci. 

“Bonne nuit !” - KB.


- La voie est libre.


Le cadet était parvenu avec une facilité déconcertante à hacker le système de l’un des drones affectés à la section Sirius. Il s’était ensuite attelé à déverrouiller partiellement le toit du hangar pour permettre au petit robot de s’envoler. Dès lors, celui-ci effectuait des cercles concentriques à bonne distance du train pour ne pas être repéré par le duo constitué de Louise et de David.

Quant aux hors-la-loi de la SDF, ils attendaient, postés derrière le vantail du dixième wagon, que Killian leur débloque la poignée. Cette opération était également des plus épineuses puisqu’il s’agissait d’ouvrir la porte sans qu’une alarme ne s’actionne sur une console de la “control room”.

Un cliquetis retentit alors et le cœur de la pilote faillit bondir hors de sa poitrine. 


- Ils sont donc de l’autre côté de Big1, on va filer à l’anglaise. 

- Go !, l’encouragea l’artilleur. Et fais gaffe à ton bras.

- On s’en fout, grogna-t-elle. Je peux le bouger au besoin. 


L’air vif du soir leur fouetta les joues et une odeur de béton en train de sécher leur monta au nez.


- On y va !, ordonna Manabu, plus déterminé que jamais.


Sa collègue acquiesça et ils s'élancèrent dans la nuit, uniquement guidés par la lumière des astres nocturnes.

“Si on active, on a encore une chance de prendre Allison par surprise. Contrairement à ce que j’ai dit à Killian, je n’ai aucune intention de partir sans Ivan ou pire, en laissant ces pauvres hères livrés aux sombres desseins de Walemborought.”


- Nabu… 

- Ouais, on ne rentrera pas que tous les deux, hein ?

- Kanna m’en voudrait si elle savait que je t’embrigade dans de telles histoires, souffla-t-elle.

- Je n’ai pas souvenir que tu sois l’instigatrice de cette virée à la belle étoile. C’était mon plan, je te rappelle, chuchota-t-il.


L’échine courbée, les agents de la SDF se ruèrent en direction de la gare et plongèrent derrière un muret à moitié construit. Moins d’une seconde après qu’il eurent gagné leur abri, l'Officière radar et l’ingénieur apparurent vers la locomotive.


- C’était chaud, commenta Manabu.

- Killian a cru qu’on était capable de voler ou quoi ?

- Allez, dépêchons-nous.


Sans demander leur reste, ils s’éloignèrent en silence du chantier, veillant à ne pas faire rouler de cailloux sous leurs semelles. Toutefois, il manquèrent de se faire attraper lorsque Manabu se prit la cheville gauche dans un câble qui traînait au sol. Il réussit cependant à retrouver son équilibre de justesse en s’agrippant à un poteau mais ne put retenir un gémissement aigu de douleur. Reiko s’était alors figée, tous ses sens aux aguets, mais aucun bruit de pas ne résonna dans leurs dos.

Ils reprirent donc leur périple en redoublant de vigilance et finirent par atteindre la route principale menant au château du pays d’Edelweiss.

Même s’ils marchaient à un rythme soutenu, la militaire ne put s’empêcher de songer au pétrin dans lequel elle s’était fourrée.

“J’ai travaillé dur pour rejoindre la Space Defence Force et voilà que je fiche tout en l’air sur un coup de tête. Bruce ne me pardonnera pas cette trahison. Qui plus est, j’ai l’impression de passer ma vie à m’enfuir. Après l’incident du 999, lors des batailles contre l’Empire Mécanique… Je m’échappe et il me court après. Il doit en avoir assez de mon comportement d’indécrottable rebelle. Au fond, il n’a peut-être pas tort. Est-ce qu’une ancienne pirate a sa place à la SDF ? Ou est-ce que je me suis voilée la face pendant toutes ces années ? Quand il m’a suggéré que l’on abandonne nos fonctions, pensait-il déjà que j’étais inapte au service ?”


- Regarde, l’apostropha son partenaire. On est arrivés.

- Hé bien… Ça ne respire pas la pauvreté.


Une ville entourée d’imposantes murailles s’était développée au pied d’une forteresse perchée sur un promontoire rocheux. Cette dernière se composait de quatre tours d’un blanc immaculé surplombant la vallée et défiant le ciel, ultimes provocations d’un tyran se croyant au-dessus des lois des hommes.


- Cet enfoiré est là-bas, gronda la jeune femme.

- Ouais et il n’y est sûrement pas tout seul.

- Que veux-tu dire ?


L’artilleur poussa son équipière hors de la piste et tous deux s’embusquèrent dans un bosquet. 


- Il y a des gardes devant la grande porte.

- On n’avait pas anticipé ce… Euh détail.

- Comment entrer à l’intérieur de la cité sans attirer l’attention ? Ils ne nous connaissent pas, on se ferait arrêter à coup sûr.


Reiko se frotta les yeux en réfléchissant à toute vitesse.


- On escalade ?

- C’est trop haut, il y a au moins trente mètres. Une chute serait fatalement… Euh fatale.


Manabu marqua une pause avant de reprendre la parole.


- Tu entends ?


La pilote tendit l’oreille. Des tapotements feutrés se rapprochaient, qu’ils assimilèrent à des sabots de chevaux foulant la terre.


- Une charrette ?

- Non, notre chance, rétorqua Reiko.

- Elle transporte quoi ? Du foin ?

- Je crois, oui.

- On se cache dedans ?

- Trop risqué. Imagine qu’ils transpercent le chargement avec des armes tranchantes.

- Pas faux et les animaux ne mangeront pas du fourrage imbibé d’hémoglobine.

- J’ai une idée, dit-elle en dénouant l’écharpe autour de son bras. Mais tu ne vas pas aimer.


À la faveur de l’obscurité, lorsque le chariot tracté par les deux équidés parvint à leur hauteur, Reiko et Manabu, qui s’étaient stratégiquement positionnés dans des fossés de part et d’autre de la route, roulèrent sur celle-ci aussi vite que possible avant de disparaître sous la charrette. Puis, ils empoignèrent les essieux de toutes leurs forces, bloquant leurs pieds dans les interstices des planches, qui étaient assez larges pour qu’ils y glissent leurs orteils.

Reiko retint un cri de souffrance quand ses avants-bras se contractèrent. En dépit de ce qu’elle avait affirmé à son ami, elle n’était absolument pas en mesure de bander ses muscles. Il était toutefois trop tard pour reculer et elle fit appel à toute sa volonté pour ne pas lâcher prise.


- Quelle idée de… De merde… Je tiendrai pas… Longtemps.

- Courage, ânonna-t-il, on est déjà devant la herse.

- Ou… Ouais…


Durant un temps qui parut infini à Reiko, ils écoutèrent le paysan, qui ignorait avoir embarqué des passagers clandestins, négocier son droit de passage dans la ville.

“Je vais tomber… Je vais tomber…”

Contre toute attente, le chariot s’ébranla alors et ils pénétrèrent enfin dans la capitale d’Edelweiss.

Lorsqu’ils eurent parcouru une quarantaine de mètres, n’y tenant plus, la pilote se décrocha et heurta lourdement les pavés. Un sang chaud et épais ruisselait sur la veste de son uniforme et une douleur effroyable irradiait son côté gauche, se répercutant jusque dans son poignet.

L’artilleur de Big1 dut la saisir sous les aisselles et la tirer dans l’ombre d’une venelle car elle était dans l’incapacité de se mouvoir.


- T’as mal ? Attends, je refais ton bandage, proposa-t-il précipitamment.

- Pas la peine, essaie juste de comprimer la plaie pour enrayer l’hémorragie.

- Compris.


Une fois sa tâche accomplie, Manabu s’adossa à une paroi humide.


- On y est… Dans la fosse au lion.

- Hum, marmonna Reiko, fiévreuse, en contemplant le drapeau écarlate orné de trois fleurs blanches, flottant au vent au sommet des fortifications. La fosse aux lions, hein ? Moi, je dirais plutôt qu’on a atterri au beau milieu du jardin de Perséphone, la reine des enfers.

- Et est-ce qu’on peut revenir de ces enfers ?, la questionna-t-il, un brin anxieux.

- Si on ne regarde pas en arrière, oui, répondit-elle, laconique.

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