Le Coeur en Feu

Chapitre 13 : Rencontre fortuite

4849 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 12/03/2024 15:54

Ce soir-là ils étaient allés applaudir et encourager Marjane au roller derby d’Austin. Suite à leur précédente intervention auprès et la blessure de la bloqueuse Marjane avait été rancardée par le groupe pour prendre sa place. Et au vu de ses prouesses sur la piste l’équipe avait eu raison de lui faire confiance. Marjane ne faisait aucun cadeau aux filles d’en face. Malheur à celles qui croisait sa route !


A la fin de la compétition TK se rendit au bar pour ravitailler les garçons. Il discutait avec le barman lorsque Carlos le rejoignit. 

 

-Et son mec est policier, s’écria Carlos à la dernière réplique du barman faisant perdre instantanément à ce dernier son sourire. 


La réaction de Carlos l’avait certes excité mais TK en était aussi flatté. Il comptait pour lui. Alex n’aurait jamais eu un tel comportement ; le mec fort, virile, qui marque son territoire. Alex était beaucoup plus effacé dans leur relation. Ce qui objectivement parlant aurait peut-être dû mettre la puce à l’oreille de TK.


La plupart des gens auraient pu trouver l’attitude de Carlos machiste et dominatrice. Bien au contraire pour sa part TK adorait ça ! Après tout Carlos était né au Texas et élevé dans un milieu traditionnel mexicain pour lequel les valeurs masculines avaient une place prépondérante dans l’éducation d’un garçon. Qui plus est Carlos était issu d’une famille possédant un ranch et avait également baigné dans les valeurs du rodéo. 


TK se sentait en sécurité auprès de Carlos et le voir ainsi marquer son territoire touchait TK et le confortait dans ses sentiments et sa place dans leur relation. D’autant qu’il n’y avait rien de malsain dans cette attitude ; bien au contraire Carlos était la personne la plus gentille, la plus douce et la plus attentionnée que TK connaissait. Mais TK en apprenait davantage sur son partenaire suite à sa réaction ce qui était loin de lui déplaire. 


Après leur aparté au bar le couple rejoignit le reste de la bande et apprenait avec surprise les fiançailles de Marjane à l’âge de 12 ans. 


Au moment de monter dans la Camaro et alors que Carlos tournait la clé pour démarrer le moteur TK glissa sa main sur sa nuque. 


-Quoi ? demanda-t-il avec deux grands yeux innocents en se tournant vers TK. L’innocence même songea TK. 

-Viens par-là, murmura le pompier un doux sourire sur les lèvres. 


Carlos ferma les yeux au contact du baiser qui lui enflamma les sens. 


Ce soir-là en rentrant chez Carlos, les deux amants n’eurent pas le temps d’atteindre la chambre du policier. 


-----------------------------------------------------------------------------------------------

 

Le lendemain matin TK fût réveillé de la plus douce des manières. Carlos avait entrepris de recouvrir la totalité de son corps de baisers. TK frissonna sous les lèvres de son partenaire et les caresses.  

-Bonjour, marmonna-t-il encore ensommeillé. 

-Bonjour, murmura Carlos d’une voix grave en déposant un ultime baiser sur ses lèvres. 

-Tu sais que je suis de garde ce matin ? demanda TK en s’étirant comme un chat. 

-Je t’emmène au boulot, je mettrais les gyrophares et la sirène, répondit Carlos en dévorant sa nuque.

-J’ai déjà entendu ça quelque part, s’écria TK en riant. 


Sauf que ce jour-là il accepta avec plaisir l’offre de Carlos. Il n’avait aucune raison de sa carapater ce matin-là. Il roula sur le corps de Carlos en riant. 


-----------------------------------------------------------------------------------------------


En fin de journée, TK et Carlos se rendirent au marché bio du nord d’Austin qu’ils affectionnaient tous les deux et qu’ils adoraient faire ensemble depuis qu’ils étaient en couple. Ils discutaient justement de Marjane et de ses fiançailles suite aux informations que TK avait pu glaner à la caserne. 


-Waouh retour à Miami alors ? demande Carlos.

-Y’a moyen ouais. C’est ce qui était prévu une fois qu’ils seraient mariés mais je crois que Marjane avait plutôt dans l’idée que ça se ferait après ses 30 ans par-là, répondit TK en sentant l’odeur d’une citronnelle du stand. 

-Ça fait longtemps à attendre, répliqua le policier. Pour lui je veux dire. C’est quand même une très belle fille.

-Je serais incapable de tenir tout ce temps, s’exclama TK. 

-Tant mieux ! Nous au bout de 15 minutes l’affaire était pliée, répondit Carlos provoquant le rire de son compagnon.

-Et pourquoi forcément Miami ? demanda de nouveau le mexicain alors qu’ils poursuivaient leur déambulation. Les gens aussi ont des dents au Texas. Pourquoi il n’ouvrirait pas un cabinet ici ?

-Leurs deux familles sont en Floride.

-La famille…je vois, répliqua Carlos en fronçant le sourire. Non, je comprends tout à fait. Renoncer à ça c’est pas rien. 

-Tu le ferais ? demanda TK innocemment.

-Pour la bonne personne…oui. 


Cette réponse enchanta TK qui se mit à sourire bêtement. Après avoir regardé le stand de miel et attendant que son pompier fasse un choix Carlos regarda autour de lui. C’est là qu’il les vit. Ses deux parents de l’autre côté de l’allée. Le sang vida son visage. Sa bouche devint sèche. 


-Oh non c’est une blague, marmonna-t-il alors que l’air lui manquait. 

-Quoi ? Y’a un souci ? s’inquiéta TK voyant son partenaire soudain très mal à l’aise, perdant tous ses moyens. 

-Carlitos ! Carlitos ! s’écria une femme au bras d’un homme à chapeau texan blanc constata TK en se retournant. 

-Heyyy, s’écria justement l’homme au chapeau. 

-Salut Maman, salut Papa, répondit Carlos.

-Attends c’est tes parents ? demanda soudainement TK avec un large sourire alors que Carlos semblait toujours aussi mal à l’aise. 

-Ça se voit pas hein ? Il ferait même pas un câlin à sa mère. Allez viens par-là, s’exclama Andrea Reyes en prenant le policier dans ses bras. 

-Je suis ravi de vous rencontrer ! Depuis le temps, s’exclama TK avec enthousiasme en serrant la main du père puis de la mère de Carlos. 


Le pompier était trop heureux de cette rencontre fortuite. Depuis un moment il tenait vraiment à rencontrer les deux personnes qui avaient élevé Carlos et fait de lui l’homme qu’il était. La mère de Carlos avait l’air adorable, solaire et lumineuse, un large sourire aux lèvres. Son père avait également l’air très gentil. Pourtant une certaine solennité se dégageait de lui, une certaine retenue sur laquelle TK n’arrivait pas à se positionner. 


-Maman, Ppa’ je vous présente TK. Un collègue. 


TK tiqua immédiatement à la présentation que fit Carlos. 

Pardon…songea-t-il, un collègue ?...

 

Lui qui avait hâte de rencontrer les parents de son amant ; c’était la douche froide. TK vécu cette désignation comme un coup de poignard en plein cœur. Comment Carlos pouvait le présenter ainsi ? Cette présentation lui fit énormément de mal. 

 

-Oh vous êtes policier aussi TK ? demanda Gabriel Reyes. 

-Plutôt pompier en fait, répondit TK soudain mal à l’aise. 

-Ah. Bon, je vous en tiendrais pas rigueur.

-C’est gentil, répondit Carlos avec un sourire faux. Mon père est Texas Ranger, précisa-t-il à TK qui ne pouvait plus le regarder. Alors comme ça tu t’es mis aux graines germées toi ?

-Aaah. Il a pris au moins 7 kilos pendant le confinement. Regarde va falloir ajouter des trous à sa ceinture, répondit la mère de Carlos.

-C’est plus acceptable la grossophobie Maman

-T’as qu’à dire ça à son hypertension, répliqua Andrea.

-J’ai plus besoin de ma ceinture de cow-boy, c’est elle le shérif à la maison. Je te ferais coffrer tout le monde moi c’est du vol de vendre ça aussi cher. 

-Allez viens mi amor par ici, y’a de belles côtes de blettes qui n’attendent que toi. 


Pendant leur échange de banalités TK n’écoutait plus la conversation. Carlos, par ces deux mots « un collègue » l’avait profondément blessé. C’était comme si le policier avait renié tout ce que faisait leur relation et leur sentiment en quelques secondes. TK sentit la colère monter en lui. Comment Carlos avait pu faire une telle chose ? C’était comme si TK n’existait soudainement plus pour lui et que leur relation n’avait aucune légitimité. Un goût de bile monta dans la bouche de TK. 


-Je vais prendre des côtelettes à la place, poursuivait Gabriel. On se voit dimanche chez tia Lucy ! termina-t-il alors que sa femme l’entraînait vers le marchand de légumes. 

-Sans faute. A dimanche ! répondit Carlos. 

-C’était un plaisir TJ ! s’écria Andrea déclenchant une grimace chez TK. 


-Ouais content de vous avoir vus…répliqua justement le pompier une colère sourde montant en lui. 

-C’était un peu gênant…fit Carlos en regardant son partenaire. 


TK était soufflé. Carlos n’avait même pas corrigé sa mère. Il était tout simplement dégoûté d’un tel comportement. Sans un mot il se dirigea vers la voiture à grandes enjambées voulant couper court aux traditionnelles courses au marché.


-On est d’accord que ce n’est pas un collège de travail ? s’exclama Andrea en s’éloignant avec son mari. 

-Bien sûr que non, répondit le Texas Ranger avec un petit rire. 

-Mais pourquoi nous avoir mentit ? 

-Aucune idée, répondit Gabriel en tordant le nez face à l’étalage de blettes face à lui. 

-Celui-là alors…soupira Andrea. Ce « TJ » m’a l’air très gentil en tout cas. 

-C’est « TK » je crois, répondit Gabriel avec amusement.

-Oh…répondit Andrea constatant qu’elle avait encore une fois écorché un prénom. 


-----------------------------------------------------------------------------------------------


-Mais enfin pourquoi t’as la haine comme ça ?! s’exclama Carlos en rentrant chez lui à la suite de TK qui ouvrit violemment la porte. 

-J’ai pas la haine.

-C’est pour ça que t’as pas lâché plus de deux mots tout le trajet de retour ?

-Je croyais que tu t’adressais à « TJ », répondit méchamment TK. 

-C’est ça qui te contrarie à ce point ? Ma mère se trompe tout le temps sur le prénom des gens, répondit Carlos avec ironie. 

-Tu l’as pas reprise quand elle a dit ça ! s’écria le pompier. 

-Je le ferais la prochaine fois, répondit doucement Carlos.

-Tu t’es dit que c’était sans importance car dans ta tête y’aura pas de prochaine fois ! s’écria TK en haussant le ton. 

-Tu me fais quoi là ? Arrête.

-Un « collègue de travail » ? répondit TK en rangent violemment ses affaires dans son sac de sport. Tu sais si je suis un collègue de travail ce qu’on a fait ce matin c’était vraiment pas professionnel !

-C’est vrai que les RH auraient sûrement des choses à redire à ce sujet, répliqua Carlos avec humour.  


Mais TK était furieux. Il n’avait absolument pas le cœur à rire. 


-Non désolé, repris le policier, je m’attendais pas à les croiser aujourd’hui. J’ai paniqué.

-T’espérais qu’on se croiserais jamais ?

-Non c’est faux, assura Carlos. 

-Ils savent que t’es gay ? demanda brusquement TK. 

-Évidemment qu’ils le savent. 


La réponse blessa encore davantage TK. 


-Waouh alors c’est pire que ce que je pensais. Ils le savent mais tu leur cache quand même que je suis ton mec, s’écria le pompier. 

-C’est…c’est…plus compliqué que ça.

-Qu’est-ce que ça peut avoir de si compliqué Carlos ?! cria TK. 

-On n’a pas tous eu des parents qui nous ont déroulé le tapis rouge pour qu’on sorte du placard d’accord !? Faut pas être aussi naïf ! Chez moi c’est plus traditionnel, j’ai pas envie…de…de leur balancer ça au visage.


La dernière phrase de Carlos blessa encore davantage TK. Elle lui fit l’effet d’un coup de poing en plein visage. Alors c’était ça…


« Leur balancer au visage », repris TK. Quoi, tu veux pas leur balancer au visage que t’as rencontré une personne qui t’aime plus que tout et que t’aime aussi à ce qui paraît ? s’écria TK les yeux humides. J’ai fait un peu de place dans ton placard Carlos, termina TK d’une voix grave et sans appel. 


TK quitta la maison de Carlos en claquant la porte. Carlos resta figé dans l’entrée pendant plusieurs minutes après le départ de TK alors que les larmes lui montaient aux yeux. Il avait fait une erreur, une grosse erreur en cachant sa relation d’avec ses parents à TK. 


Mais il avait seulement paniqué en les voyant apparaîtrent tout à coup et il s’était dégonflé. Il avait fui la situation en présentant TK comme un collègue. Mais il savait qu’il s’agissait d’un comportement impardonnable. Comment aurait-il lui-même réagi si TK l’avait présenté à son père comme un collègue de travail ? 


D’autant qu’il avait dit à son partenaire lors de la soirée au roller derby adorer dire à qui voulait bien l’entendre que TK était à lui. Mais cette assurance avait totalement disparue face à Andrea et Gabriel Reyes. Alors qu’il aimait plus que tout TK, face à ses parents il était redevenu cet adolescent caché et honteux incapable de dire la vérité à ses parents.


Pourtant rien n’aurait été plus simple que de le présenter comme son petit ami. Il lui suffisait de dire « Voici TK, mon petit ami ». Mais Carlos en avait été incapable. Pris par surprise de voir apparaître tout à coup ses parents ; de nouveau, il avait été incapable de leur dire la vérité. Par le passé il n’avait jamais eu besoin de leur présenter ses boy-friends ou conquête d’un soir. Mais cette fois-ci il sentait que quelque chose avait changé. TK était différent. Cette relation était différente. Carlos n’aurait pas su l’expliquer mais il le sentait au plus profond de lui-même.


Carlos savait qu’il lui avait fait du mal. Il l’avait vu sur son visage et surtout dans ses yeux. Et TK était incapable de mentir ou alors très mal. Carlos savait donc pertinemment ce que cette rencontre avait provoqué chez lui. 


Il avait trahi sa confiance. 


-----------------------------------------------------------------------------------------------


TK, rentra chez lui, blessé et très en colère. Comment Carlos avait pu lui faire un coup pareil ? 


Comment ? 


De toutes les personnes qu’il connaissait il ne serait jamais attendu à cela de la part de Carlos. Il se sentait trahi, rejeté. Son rythme cardiaque s’accéléra si bien qu’il dû s’arrêter sur le bas-côté pour se calmer. La tête et les mains appuyées sur le volant il soupira en fermant les yeux. 


Comment Carlos avait pu faire une telle chose ? 


TK se sentait trahi car Carlos n’avait fait que le rassurer ces derniers mois et lui promettre de ne jamais le faire souffrir. C’était pourtant ce qu’il venait de faire ! En refusant de reconnaître leur relation devant ses propres parents Carlos avait renié l’existence de TK et de tout ce qu’ils représentaient l’un pour l’autre et cela faisait mal. Très mal. Il avait l’impression de se retrouver des mois en arrière alors qu’un autre homme l’avait jeté au restaurant pour son coach sportif. 


Comment Carlos avait pu ?  


Les larmes de TK commencèrent à couler sans qu’il puisse les retenir. Il aimait Carlos ; cela ne faisait aucun doute. Il l’aimait profondément et sans doute bien plus qu’il n’avait aimé Alex. Il sentait que les choses étaient différentes avec le policier. Il avait désormais très peur d’être de nouveau rejeté alors qu’il avait ouvert son cœur comme jamais auparavant. Avant Carlos avait-il seulement jamais été vraiment et réellement amoureux ? Que se passerait-il si Carlos décidait soudainement de tout arrêter malgré ses mots ? TK sentit qu’il pouvait s’effondrer à tout moment et pire encore il sentait que le policier pouvait lui briser le cœur. 


Pourquoi Carlos avait-il agi ainsi ? 



-----------------------------------------------------------------------------------------------



De son côté Carlos avait dû partir travailler le lendemain matin. Il n’avait pas dormi de la nuit. Il n’avait reçu aucuns messages de TK, pas un seul appel. Pourtant ils s’écrivaient à minima tous les jours quand ils ne dormaient pas ensemble ; au minimum pour se souhaiter une bonne nuit et une bonne journée. 


Mais du côté de TK c’était le silence radio. Rien. Est-ce que TK avait rompu avec lui ? Était-ce la signification de sa dernière phrase ?


Carlos était terrifié. Il l’aimait plus que tout. Il ne pouvait pas le perdre. Honnêtement si TK rompait avec lui le policier allait en mourir. 


Carlos n’avait pas dormi de la nuit, il avait la migraine et tout son corps lui faisait mal. Il n’avait jamais eu de telles douleurs physiques même à la suite d’une séance de sport particulièrement intense. Il était terrorisé à l’idée de perdre TK. Pour autant il savait aussi qu’il devait le laisser un peu respirer et ne pas le harceler. 


Carlos partit au poste dans le brouillard, comme un automate. Cette journée allait être insupportable. 



-----------------------------------------------------------------------------------------------



Dans sa chambre, allongé un bras sous la tête TK fixait le plafond. Après la conversation avec ses parents au petit-déjeuner sa colère était finalement un peu retombée. En effet, après les mots de sa mère le pompier s’était rendu compte qu’il n’avait réagi à l’attitude de Carlos qu’en fonction de son propre ressenti. Il n’avait pas pris en compte ce que pouvait cacher cette attitude de Carlos. Pourtant il avait tout de suite tout remis en question se sentant abandonné et rejeté. 


Néanmoins ces derniers mois rien dans l’attitude de Carlos ne lui avait permis de douter de ce que ressentait le policier. Il avait toujours été présent pour TK sans poser de questions. TK devait donc peut être remettre sa position en question. 


Par ailleurs Carlos lui avait clairement évoqué la veille au soir une situation familiale délicate dans un environnement traditionnel. Cela renvoya TK à sa propre adolescence et son propre coming-out largement facilité par des parents plus qu’ouverts d’esprit. Il avait d’ailleurs fini par lâcher le morceau suite aux questions de sa mère qui avait vu clair en lui certainement depuis sa naissance. TK n’avait donc eu aucunes difficultés en ce qui concernait sa sexualité, aucun tabou, l’annonce s’était faîte très naturellement. Même Enzo l’ex-mari de Gwyn n’avait rien eu à en redire. Bref, son coming out était passé comme une lettre à la poste au milieu de toutes les autres banalités. 


Bien que l’homosexualité demeurât l’objet d’homophobie, de violences et d’injures TK devait bien reconnaître qu’avoir grandi dans une ville comme New-York l’avait bien aidé dans son parcours. En réalité son homosexualité n’avait jamais été le sujet ou le débat de grandes problématiques. TK n’avait jamais ressenti de honte et ses addictions n’y étaient aucunement liées. 


En revanche, pour Carlos cela avait dû être une autre histoire. Il était né dans un état du sud, au Texas, il était d’origine mexicaine et avait grandi dans un ranch et auprès d’un Texas ranger. Comment aurait-il pu avoir le même parcours que TK ? C’était impossible. 


TK fronça les sourcils. Jusqu’à quel point la découverte de son homosexualité avait-elle pu être pour, Carlos, un fardeau, une épreuve et une honte ? Qui sait combien Carlos avait dû souffrir à l’adolescence et même à l’âge adulte ? TK savait que faire son coming out n’était en aucune façon une garantie d’une vie plus sereine. A cette réflexion TK se rendit compte qu’il n’en aimait Carlos que davantage. 


Il se tourna sur le côté. TK avait le droit d’être blessé par l’attitude de Carlos. En revanche il avait commis une erreur en ne prenant en compte que ses propres sentiments et sa propre place dans leur relation. Jusqu’à la rencontre des parents de Carlos jamais ce dernier n’avait voulu cacher TK ou leur relation. Au contraire il la revendiquait et marquait son territoire. TK se rendit compte qu’il avait lui aussi commis une erreur pour n’avoir pas pris en compte également la position de Carlos. Pourtant être un couple c’était être deux ; penser à soi mais aussi à l’autre. 



-----------------------------------------------------------------------------------------------



TK se dandinait d’un pied sur l’autre derrière la porte d’entrée de Carlos depuis dix bonnes minutes. Il avait besoin de parler à son partenaire et d’avoir une franche explication. 



-----------------------------------------------------------------------------------------------



Lorsque Carlos constata qui se tenait derrière sa porte en regardant par la vitre attenante à sa porte son cœur fit un bond. Il n’avait pas eu de nouvelles depuis plus de 24h. Il devenait fou. Il était persuadé que TK allait finir par le larguer. En le voyant derrière sa porte il eût peur, peur de perdre un homme qu’il aimait profondément. Perdre un homme pour lequel il ressentait des sentiments jamais ressentis par le passé pour qui que ce soit d’autre. 


-Salut, s’exclama Carlos d’une petite voix en ouvrant la porte. 

-Salut. Je peux entrer ? demanda TK gêné. 

-T’as la clé non ? 

-Je me disais que tu voudrais peut-être la récupérer, répondit le pompier soudain très mal à l’aide face aux grands yeux bruns qui le fixait. 

-Pourquoi ? Pour rompre ? Enfin tu me diras c’est peut-être déjà ce que t’as fait hier…répondit Carlos méchamment qui avait senti son cœur se briser aux paroles de TK. 

-Non. Enfin…j’espère que non, répondit doucement son partenaire. 

-Je t’en prie, répondit Carlos en ouvrant plus grand la porte. 


TK entra dans la maison mal à l’aise. Il tordait ses doigts entre ses mains. Il devait lui parler et lui dire. 


-Bon. Écoute. Je sais que j’ai été hyper chiant, commença soudainement TK face à Carlos qui avait ses mains dans ses poches. 

-Non. Non pas du tout.

-Si je l’ai été et je voulais juste te dire que je suis pas désolé. Je suis pas désolé Carlos.


Aux paroles de TK Carlos haussa les sourcils. Il ne comprenait rien de ce que lui disait le pompier. 

 

-Je sais qu’à m’entendre on aurait cru que ta relation avec tes parents m’impactait moi mais en vérité elle nous impacte nous. Est-ce que tu comprends ? demanda TK les lèvres pincées. 

-Pas trop non…répondit Carlos qui était désormais perdu. 

-Euh…le fait que tu ne dises pas à tes parents que je suis ton mec ben ça m’a fait me poser des questions…ça m’a fait douter de notre couple et de ce que je représente à tes yeux…, répondit alors le pompier en s’asseyant sur le tabouret noir du salon. 

-Ça me fait de la peine et c’est justement pour ça que j’évitais que tu les rencontre, répondit Carlos en rejoignant son partenaire et en s’asseyant face à lui. Je voulais pas que ça se passe comme ça et…je…j’étais sûr que ce serait le cas.

-C’était obligé vraiment ? Je sais pas… Ils savent que t’es gay…répondit TK en prenant doucement les mains de Carlos dans les siennes. 


A ce contact, une douce chaleur se répandit dans le corps de Carlos. C’était comme reprendre contact, rallumer la lumière, communiquer à nouveau. 


-Ils sont au courant oui. J’ai fait mon coming out à 17 ans. Ça leur a fait un sacré choc. Je…je savais que c’était un séisme pour eux mais ils m’ont serré dans leur bras. Ils m’ont dit qu’il m’aimait et c’était réglé, raconta Carlos. Tu sais de quoi on a parlé ce matin-là ? De la saison de base-ball, du prix du sans plomb, du veau qui venait de naître au ranch. Pas un mot sur ce que je venais de leur dire. Ni ce jour-là, ni…depuis, termina Carlos les larmes aux yeux. 

-C’est dingue. Pourtant ils ont l’air adorables. 

-Ils le sont ça empêche pas mais…ils sont pas parfaits non plus.

-Tu sais mes parents ont beau être vachement ouverts d’esprit ils sont loin d’être parfaits. En voulant me conseiller ils ont passé plus de temps à parler d’eux-mêmes qu’à parler de moi, répondit doucement TK avec un sourire. 

-Ça explique pleins de choses, répondit Carlos en souriant à son tour. 

-Y’a bien une chose sur laquelle ma mère à raison, repris TK. Elle a dit que si ça m’avait tant touché c’était parce que je me sentais pas en confiance au sein de notre couple.

-Je vois. Ça me désole d’entendre ça, répondit Carlos en baissant les yeux. 

-Mais ce dont j’avais pas tenu compte c’était à quel point, toi, tu pouvais souffrir de ce manque de confiance et en avait souffert pendant une énorme partie de ta vie, repris TK en resserrant ses mains autour de celles du policier. Je veux que tu saches que je suis vraiment avec toi, à 100%. Tu peux dire à tes parents que je suis un ami, un collègue, ton styliste perso, continua le pompier faisant rire son partenaire, Je sais pas…Je m’en fiche d’accord ? Aussi longtemps qu’il le faudra.

-Et si…si ça évolue jamais ? demanda le policier avec une once de honte dans la voix. 

-Tu sais, rien ne reste figé éternellement Carlos. 


Ils restèrent silencieux quelques secondes en se regardant dans les yeux. La tempête était passée ; il avait simplement fallu discuter, communiquer pour se comprendre l’un l’autre. 


TK vint s’asseoir à califourchon sur les jambes de Carlos. Le policier entoura la taille de son partenaire de ses bras. TK engloba de ses mains le visage du mexicain et glissa doucement ses doigts dans les mèches noires. 


TK déposa doucement ses lèvres contre les siennes. Après ces 24h en quarantaine il avait besoin de renouer le contact avec son partenaire ; il avait besoin de le toucher. 


Carlos resserra son étreinte autour de son compagnon l’approchant un peu plus de lui s’enfonçant dans le fauteuil noir. Il glissa ses mains sous le sweat-shirt bleu marine faisant frissonner son partenaire. 


TK approfondit leur baiser les mains sur sa nuque. Hors de question pour lui de laisser partir cet homme-là ; parents ou non. 

Laisser un commentaire ?