Une courbure de l'espace-temps (saison 2)
Chapitre 30 : La fin de quelque chose
3759 mots, Catégorie: M
Dernière mise à jour 05/07/2024 08:40
Repères chronologiques : cette scène s'insère comme une scène coupée de The Umbrella Academy, saison 2, épisode 10, au cours de la scène de la lecture de la lettre d'Allison à Raymond, qui commence à 41:40. Ce chapitre est conçu pour être lu sur la même bande-son : Wicked Games (Parra for Cuva ft. Anna Naklab).
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Samedi 23 novembre 1963, 19h57
Il est étrange de regarder vers un horizon auquel vous n'appartenez pas.
J'ai souvent pensé à ceci sans le prononcer à voix haute, depuis ma fracassante arrivée, en 1961. Que cette époque n'était pas la mienne, même si j'ai tout fait pour tenter de m'y sentir bien. C'est de nouveau ce que je me dis, à présent que mon regard se porte vers la prairie glacée où tous les corps des agents de la Commission ont été 'nettoyés', par leur propre organisation.
La nuit est en train de tomber sur le Texas, avec ses couleurs d'azur et d'ocre. Sur les champs qui nourrissent Dallas, et au delà. Tant d'âmes vivent ici, inconscientes de tout ce que nous venons de traverser. Encore plus inconscientes de tous les défis que l'humanité va continuer d'imposer à sa propre espèce et à son environnement, dans les décennies à venir. Ce monde est fou. Mais rétrospectivement, j'y tiens.
Je fais un pas intangible et invisible sur la terrasse qui s'avance au devant de la ferme des Cooper, dans le dos de Viktor qui regarde dans la même direction que moi, assis sur les marches. Lentement, je prends une grande inspiration, profitant de mes sens revenus. Percevant de nouveau les odeurs de la terre, du foin, et même celle - âpre - de la mitraille qui a plu ici dans la journée. Sur ma peau, le froid semble tenace, même si le coeur d'Harlan s'est apaisé. Il s'est reposé dans sa petite chambre, heureusement préservée, il a mangé décemment. Sissy et Viktor sont restés près de lui, longtemps. Et j'ai deviné que que ce dernier avait réussi à le délivrer des 'marigolds' qui avaient circulé entre eux.
Ce calme pourrait presque sembler paradoxal, au terme de cette journée. Mais quand je suis revenue à moi dans la grange, j'ai compris en un instant que La Directrice avait été neutralisée. Que Lila avait déguerpi, d'une manière qui ne m'a pas étonnée, mais qui a laissé le coeur de Diego fendu en deux. J'ai appris que le Suédois avait tourné les talons.
Que le temps avait bel et bien repris son cours.
Que Cinq avait obtenu une mallette.
Et que ce coucher de soleil serait ici notre dernier.
Oui, il est vraiment étrange de regarder vers un horizon auquel vous n'appartenez pas. Et pourtant, je les aurai même chéries, ces années soixante dures et excluantes, à la fois exaltées de l'espoir incommensurable donné par certains. Les proto-hippies, les tous premiers nerds, les rêveurs, les poètes, les engagés. Et ceux qui ont accepté d'être simplement - humblement - humains. Certains d'entre eux, sans conteste, m'auront marquée pour la vie.
Je pense à Mark et Wayne, ce soir. A tous les 'Enfants', surtout à Kitty et Jill, Timothy et Allen, et même à Priscilla. Je pense à Lloyd : je ne lui en veux pas. J'imagine aussi Ray - seul ce soir - dans la maison qu'il a partagée avec Allison qui à présent s'en retourne vers sa fille. A Sissy, qui a finalement fait le choix de rester ici.
Et je pense à Dave.
Tout comme Klaus, resté à l'intérieur dans le salon dévasté, derrière moi.
Plus qu'aucun être traversant cette année 1963, il aura marqué ma courte vie ici, du haut de ses quelques dix-sept ans. Pas pour ce qu'une autre version de lui avait été pour Klaus, non. Pour ce qu'il était déjà ici, et maintenant.
Nous le savons, Klaus et moi : à cette heure, s'il n'a pas renoncé, Dave doit être en train d'embarquer dans l'un des véhicules garés devant le bureau de recrutement d'Avon Street. Comme tous les samedi, le bus bleu de l'Air Force emportera les jeunes recrues, y compris les aspirants Sky Soldiers, dont l'épaule de Klaus est encore tatouée du blason. Le crâne, le fusil, la feuille de palmier. Mais ce minibus n'est jamais le seul, garé là. Juste à côté, un bus rouge emmène les jeunes Marines, pour des destins à la fois similaires et différents. Une implication toute autre dans la guerre du Vietnam, notamment. Et en cet instant, alors que je repasse à travers le mur du salon, je sais à quoi pense Klaus, en laissant retomber son sourire de nostalgie, de peine et d'espoir entremêlés.
Il se demande - comme moi - dans lequel des deux bus Dave sera monté.
J'approche, au milieu de la dévastation de ce qui était encore hier le salon de Sissy, et qui n'est plus qu'une vaste passoire cribée d'impacts de balles. Marchant immatériellement, au travers d'un tas de gravas écroulés, jusqu'au niveau du canapé où il est assis au sol en dessous du cadre à moitié décroché. Je reste là un moment, jusqu'à ce qu'il abandonne son recueillement. Alors, je m'accroupis à côté de lui, et je me rends juste tangible ce qu'il me faut pour lui parler.
"Cinq dit qu'on part dans moins d'un quart d'heure", lui dis-je tandis qu'il laisse de nouveau pendre les dog-tags à son cou, et il soupire avec une forme de soulagement.
"T'es là. Pendant un moment, j'ai cru que tu t'étais remise à me ghoster".
Paradoxalement, il était moins inquiet quand j'étais un fantôme. Parce qu'il pouvait me voir, et même me tracer si j'étais hors de son champ de vision. Mais à présent, il ne reste plus rien en moi d'énergie spectrale qu'il pourrait détecter. Je suis tapie à la frontière de la matière et de l'énergie, économisant mon pouvoir, autant que je le peux. Mais je suis en vie.
"Je garde mes forces pour me matérialiser en entier au moment du départ. Si c'est comme avec le vortex en 2019, je ne veux pas risquer de laisser un morceau de moi ici".
Je vais économiser sur la visibilité : je me rendrai juste matérielle quand Cinq activera la mallette. Et Klaus le comprend, car il hoche la tête lentement. Sans me voir, mais en s'adressant à la source de mon filet de voix.
"Ton corps sera exactement comme avant, quand tu vas le rematérialiser ?" demande-t-il, et j'en souffle de rire.
"Pourquoi, il y a quelque chose qui pourrait te manquer ?"
Il hausse les épaules en laissant un brin d'innocence balayer un peu de sa tristesse nostalgique.
"J'en sais rien. Tu aurais pu en profiter pour te mettre à jour. Ben se laissait bien vieillir".
Il ne le voit pas, mais je cligne des yeux. Je m'étais toujours demandé pourquoi Ben n'avait pas gardé les traits d'adolescent sous lesquels il était mort. Mais maintenant, j'ai compris. J'ai compris que son désir de continuer à exister avec ses frères et soeurs avait inconsciemment fait évoluer son apparence spectrale.
"Non", lui dis-je avec un vague sourire qu'il ne voit pas, mais qu'il entend.
Klaus sait tout de moi, y compris mes complexes, y compris mes dysphories. Et pourtant, en cet instant, je ne ressens rien d'autre que l'envie de revenir, exactement dans l'état où j'étais avant tout ça.
"Je pense que tu me retrouveras au tatouage près. Même celui que je croyais regretter".
Il rit doucement, alors que nous entendons les autres commencer à se rassembler au dehors, sur le balcon.
"Alors tu seras comme ces vieilles bagnoles qu'on fait recarosser. On ne peut pas faire la différence, même s'il ne reste plus rien de l'original".
Et il plisse les yeux, épuisé, mais à la fois paradoxalement joyeux.
"Mais tu es sûr que tu ne veux même pas quelques centimètres en plus ? Moi je les aurais pris".
"Pas en hauteur, j'imagine".
Nous gloussons de façon idiote, comme nous l'avons fait si souvent, puis il regarde au travers de la fenêtre, alors que le soleil est maintenant complètement couché. Dehors, la nuit est noire et glacée. Et si tout se passe bien, ce n'est pas sur le Texas de 1963 que nous verrons l'aurore se lever.
C'est la fin de quelque chose.
Avec la certitude que nous avons changé, même si nous retournons là d'où nous sommes venus. Enfin presque. Dans un futur où Reginald Hargreeves aura eu devant ses yeux la preuve que Viktor était capable de contrôler honorablement son pouvoir, où il ne lui aura possiblement pas fait subir l'ostracisation et l'étouffement ayant conduit à la première Apocalypse. Un pari risque de Cinq, c'est un fait. Mais j'ai cet espoir de revoir The City intacte, Argyle Park, Hargreeves Mansion. De ne pas arriver au milieu d'un monde dévasté.
Et de revoir Granny.
"Je regrette de partir juste avant que la mode des pattes d'eph commence à s'installer...", soupire Klaus en se levant et s'étirant comme un chat.
"Bof. Tu ne t'es jamais privé pour en porter".
Il rajuste son long manteau noir, et commence à traverser le salon en enjambant l’abat-jour et les débris de mobilier texan. Abandonné, le tourne-disque défoncé ne chantera plus : Sissy et Harlan viennent de quitter cet endroit pour commencer une autre vie au Nouveau Mexique. Et Klaus glousse doucement :
"Je regrette aussi de n'avoir pas vécu dans une ferme comme celle-là. Tu sais ? Proche de la nature... avec les pains de viande, les siestes crapuleuses dans la paille et les beuveries de foires agricoles. Oh et les vestes en cuir à franges sexy".
Quel monceau de clichés, qui omet aussi beaucoup de l'intolérance ordinaire des communautés d'ici, qui lui a valu un bon coup de poing dans la face récemment. Mais j'éclate de rire, ce qui nous fait du bien à tous les deux.
"Eh, c'est toi qui a refusé d'acheter un chapeau de cowboy, sur la route de Baja. Pourtant, ça t'allait bien..."
Il rit brièvement puis s'arrête, regardant à travers moi. Ce simple souvenir lui ramène tout, d'un seul coup : la poussière sous les roues de Priscilla, les veillées sur le toit, les méandres du Delta du Colorado. Les nuits sans sommeil de Rio. Les Bribes de Destinée sous les aurores boréales d'Islande. Les marchés colorés de Delhi, les routes sinueuses de Rishikesh où il avait pourtant vomi. Les postures de yoga des ashrams. Toutes ces énergies et ces destins que nous avons croisés.
Nos vies sont faites de rencontres, de choix, et de leurs conséquences.
Nous ignorons ce que seront celles résultant de notre passage ici. Mais nous ne regrettons rien de ce que nous avons vécu, je le crois. Et nous en repartons même en ayant un peu grandi, ces dernières années. Depuis nos premiers jours sur la route, et ce chapeau qu'il avait refusé d'acheter.
"Klaus, Rin, on met les voiles".
Avec ces très simples mots, tandis que nous sortons au dehors, Cinq vient de rendre ce départ plus concret que jamais. Sur l'herbe encore saupoudrée de neige, au devant de la ferme, il règle la mallette tandis que nous nous rassemblons. Il regarde partout autour de lui pour me chercher et vérifier que j'ai suivi, alors je racle discrètement ma gorge à côté de lui, pour lui signifier que je suis bien là.
Bon sang, il fait encore un froid polaire. Et je n'en ai que plus envie encore de retrouver le temps en permanence dégueulasse de The City.
"Tout le monde est prêt ?"
"Allons-y".
"Parfait".
Il ne m'en faut pas plus pour mobiliser toutes les forces que j'ai réussi à économiser. Même si je reste invisible, je sens pour la première fois depuis ma 'mésaventure à la Klaus' l'intégralité de mon corps se rematérialiser. Avec une forme de joie - d'euphorie, même - s'ajoutant à la perspective de rentrer à la maison. Cinq l'avait promis, et il semble finalement être sur le point d'y arriver. Comme Ulysse, ramenant son équipage à bon port.
'Oikade'.
"C'est parti", murmure Diego tandis que je pose une main sur l'épaule de Viktor, et une autre sur celle de Klaus. Mais ce dernier s'exclame, avec un bref recul :
"Attendez !"
Il soulève ses sourcils, plus touché que ce que je pensais par ce départ et la conversation que nous venons d'avoir. Puis il file une dernière fois en direction du balcon qui court le long de la maison... et décroche d'une jardinière un chapeau de cowboy, abandonné en arrière du destin de Sissy. Je souris dans l'ombre, tandis que Diego plaisante quant à l'idée de l'abandonner ici. Mais il ne le ferait pas : jamais. De ceci, je suis sûre à présent. Heureusement, Klaus ne l'entend toutefois pas, et il revient, fier comme un coq, ajustant son nouveau couvre-chef préféré.
Je replace mes mains parfaitement tangibles sur les épaules de ceux avec qui je m'apprête à me faire emporter. Au moyen d'une mallette dont j'ignore tout, mais avec une confiance infinie en Cinq, et au fond envers le futur.
Je ne sais pas si je fais bien.
*Clic !*
En une seule pression, l'objet est activé. Un son si simple, mais qui veut dire tant pour nous. Je lève les yeux une dernière fois sur le ciel noir texan, alors qu'un craquement électrique fait résonner l'énergie tout autour en déchirant l'espace-temps. Je prends une ample respiration, tranquille, bien que possiblement la dernière en ce temps.
Car - oui - il est étrange de regarder vers un horizon auquel vous n'appartenez pas.
Mais avec qui vous le faites peut tout changer.
*Swip !*
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"Le 2 avril 2019".
La première chose que je vois en rouvrant les yeux, tandis que Cinq énonce la date, lue sur le journal comme toujours posé sur la table ronde du hall d'entrée, c'est le carrelage noir et blanc ponctué de petites tommettes carrées. La lumière orangée des lampes murales. Et le jour qui filtre au travers des vitraux de la porte d'entrée. L'odeur des lieux me saisit. Celle de la cire des boiseries, des tapisseries anciennes et de la cuisine de Grace.
Hargreeves Mansion.
Point de gravats, point d'effondrement, point de désolation. L'aurais-je cru ? De retrouver ce clair-obscur étouffant est en train de faire monter des larmes à mes yeux.
Nous l'avons fait. Nous sommes de retour le lendemain de la première Apocalypse, qui - de fait - n'a pas eu lieu.
J'entends à peine Klaus s'émerveiller à l'idée que nous ayons pu enfin accomplir quelque chose avec succès. Je réalise à peine que tous exultent et m'entrainent - invisible mais matérielle - vers les beaux tapis du salon au style à la fois mauresque et art-déco. Je suis dans une forme d'état de choc, peinant à réaliser. Sidérée. Sujette à cette impression troublante de - peut-être avoir rêvé toutes les dernières années de ma vie. Avons-nous vraiment vécu tout ça, ou n'avons-nous fait que le rêver ? Mais la voix de Diego me ramène subitement à moi.
"Vous pouvez me dire pourquoi il y a un portrait de Ben, au dessus de la cheminée ?"
Cette interrogation vient d'emblée me saisir à l'estomac, tandis que je décroise les bras que j'avais serrés sur ma poitrine invisible. Klaus me bouscule en revenant en hâte du bar où il était déjà en train de fouiller, et tous nos regards convergent au mur. Diego a raison. Là, en lieu et place du portrait de Cinq qui ornait autrefois le salon, c'est le visage de Ben qui nous fixe dans la peinture à l'huile. Juvénile. Digne. Ectopique.
Au fond de moi, je sais déjà que quelque chose ne va pas.
"Je savais que vous finiriez par venir".
Un frisson glacé remonte le long de mon dos. Cette voix - maintenant - je la reconnaîtrais entre toutes. Depuis le "dîner léger", elle n'a cessé de hanter mes pensées : ses conseils et remarques perfusant ma conscience, comme un opiacé tenace. Plus âgé, tout en barbiche et cheveux gris, Reginald Hargreeves est bien vivant, et il nous scrute dans son complet bleu, au travers de son monocle.
"Vous êtes vivant..."
Comme en nous tous, je peux sentir l'énergie décontenancée qui bloque presque les mots de Luther dans sa gorge.
"Pourquoi ne le serais-je pas ?"
"Oui. Pardon... On est simplement contents d'être enfin à la maison... tous ensemble".
La sincérité est ténue, dans les paroles de celui qui était autrefois Numéro Un, et n'est plus que rancoeur envers cet homme qui s'est servi de lui pour mieux le rejeter. Mais Reginald Hargreeves balaye de toute façon sa phrase d'un simple soulèvement de moustache. Il y a quelque chose de différent dans son regard toutefois, même si je ne sais pas définir quoi.
"À la maison ? Ce n'est pas chez vous, ici".
Allison est figée, à côté de Viktor.
"Mais de quoi vous parlez ? Si, c'est l'Umbrella Academy".
Et Hargreeves s'insurge.
"Encore faux. Ceci, est la ~Sparrow~ Academy".
À ce mot, mon estomac se tord. Peut-être est-ce parce que je comprends les implications, parce que la réalité implacable est en train de percoler en mon fort intérieur : celle qui nous crie à tous que si nous sommes bien en 2019, nous ne sommes pas dans ~notre~ réalité. Mais il y a plus, sans doute parce que je me trouve juste au dessous de la galerie où Pogo m'a un jour révélé que Reginald Hargreeves avait toujours eu des intentions à mon sujet.
Un homme qui se jouait des destins, provoquant des événements, laissant ensuite se dérouler les chaînes de causalité. Un érudit qui aimait Shakespeare, au point de forcer ses enfants à l'étudier. Un amateur de citations bien choisies, dont le vieux chimpanzé avait énoncé les lignes préférées. Ces mots shakespeariens, mon être dévasté ce jour-là n'a jamais réussi à les oublier : une parabole du destin issue d'Hamlet, que je crains d’aujourd'hui voir douloureusement prendre tout son sens.
'Nous avons beau braver les augures, même la chute d'un moineau est gérée par la providence. Si c'est maintenant, ce n’est plus à venir ; si ce n'est plus à venir, alors c'est pour maintenant ; si ce n'est pas maintenant, pourtant cela viendra. Être prêt est ce qui compte'.
Qu'est-ce qui est à venir ? Pour quel dessein Hargreeves se prépare-t-il tant ? Tandis que ces mots cognent sur ma conscience - à contrejour des vitraux de la galerie, à l'étage - Cinq silhouettes inconnues apparaissent, et une autre par le côté du bar, à notre niveau. Cette dernière est plus familière, quoiqu'à l'attitude inédite, qui fait s'arrêter Klaus alors que je sentais qu'il s’apprêtait à faire un pas.
Ben.
Avec une invraisemblable coupe de cheveux de petit con, une petite moustache ridicule, et un air suffisant qui donnerait envie de lui donner des baffes gratuitement, mais Ben. C'est bel et bien lui qui nous regarde fixement.
"Papa, c'est qui ces connards ?" dit-il en scrutant chaque visage visible, les yeux plissés d'étonnement critique.
Mais mon attention est attirée par autre chose. Magnétiquement. Quelque chose que je remarque dans l'énergie, avant même de le contempler par la vue. Des 'marigolds' qui semblent tout à coup m'aveugler alors que je ne les avais pas remarqués : pulsant de façon à la fois différente et familière. À l'étage, se trouve un cube contentant de l'énergie pure et vive, flottant au côté de l'escouade qui nous scrute depuis le balcon.
Si tous les autres ont les yeux sur Ben, les miens sont rivés à cette entité qui me considère en retour malgré mon invisibilité. Qui me 'voit' parfaitement au travers de l'énergie, au travers de la matière, son 'attention' entièrement tournée vers moi. Nous nous scrutons ainsi, comme si nous nous contemplions en miroir : à la fois différents et similaires, d'une façon que je ne comprends pas.
Ma gorge se noue tandis que mes doigts cherchent la manche de Klaus, je tremble en me demandant ce que Reginald Hargreeves a fait, après nous avoir tous rencontrés en 1963. Quelles orientations sa boucle de rétrocontrôle l'aura poussé à adopter après nous avoir tous évalués.
Quelle nouvelle réalité sa Providence a fondée sur les ailes du moineau.
Je vacille presque.
Et sous le coup de cette stupeur, en sentant l'ensemble de mon être commencer à revenir malgré moi à la visibilité, je murmure enfin en même temps que mes compagnons d'infortune :
"Et merde".
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Notes :
Il est vraiment étrange pour moi de quitter cette saison 2, car je m'y suis réellement sentie chez moi. Et à la fois... je suis particulièrement enthousiaste à l'idée de commencer à écrire la saison 3 ! Je commencerai ceci au retour de mes congés, au mois d'août... après avoir également vu la saison 4.
Enfin, les paroles de Pogo prennent leur sens, et nous rencontrons les Sparrows. Il se passe quelque chose avec Ben... et avec Christopher, n'est-il pas ? Si Rin a pu penser quelques fois que sept Hargreeves, c'était déjà trop : alors elle n'est pas au bout de ses peines. Et bientôt, les plans de Reginald Hargreeves adopteront le parfait alignement...
Encore une fois, je vous remercie de lire cette histoire, et de m'accompagner chaque semaine en me donnant la motivation de continuer ! Vos commentaires sont précieux, ils sont littéralement les marigolds qui me poussent à continuer. Si vous avez lu cette saison jusqu'à la fin, même si vous avez été jusqu'ici silencieux, laissez-moi un petit mot... même juste un petit smiley !
Et si vous souhaitez en savoir plus sur les jeunes années de Rin et Klaus, vous pouvez aussi découvrir le préquel "Bribes de mémoire", également sur mon profil.
À très bientôt... pour une troisième courbure de l'espace-temps ♡