Obstination

Chapitre 4 : Edward

2450 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 26/01/2022 22:49

Elle était là, étendue dans son lit, la douleur déformait ses traits si parfaits. Ma Renesmée, ma chère petite fille. Malgré les dix-huit années qui s’étaient enchaînées depuis sa naissance, ce petit mot était toujours aussi insensé, nous avions une enfant, Bella et moi. Le destin avait pris une tournure merveilleuse, dans mes songes les plus poussés je n’aurais ose imaginer avoir ma propre famille, vivre paisiblement les décennies interminables de nos existences.


Elle était là, son cœur battant, ses joues rosies par l’afflux de sang, la peau tiédie par la vie qui s’y diffusait. J’attrapais sa main, espérant qu’elle se réveillerait enfin. Nous étions à son chevet depuis des jours, Carlisle était venu, dans l’espoir de nous prêter main forte, mais même ses connaissances médicales n’étaient suffisantes pour poser un diagnostic précis. Ses constantes étaient normales, seul son pouls et sa température étaient plus faibles qu’ordinaire, mais nous ne parvenions à la sortir de sa torpeur.

J’essayais de contenir ma détresse pour Bella, elle aurait tout donné pour souffrir à la place de notre fille. Elle n’avait quitté la pièce une seule seconde, et faisait des allers retour continue dans la chambre, jour et nuit. Quand elle perdait le contrôle, elle s’agenouillait près de Renesmée, la suppliait de revenir à elle. Je ne pouvais défaillir moi aussi, je devais être fort pour elles.

L’esprit de Renesmée était devenu hermétique, quand j’essayais d’entendre ses pensées, je me sentais aspirait dans un trou noir, c’était violent. Son esprit n’était pas muet comme celui de Bella, j’y pénétrais sans difficulté, mais alors, une grande masse noire semblable à un mur s’érigeait, m’incitant à ne plus interférer avec sa conscience. C’était elle qui choisissait de partager ou non les images qu’elles souhaitaient, elle n’avait pas besoin de mots pour s’exprimer, il lui suffisait de nous toucher. Elle pouvait momentanément me laisser accéder à ses pensées, mais pour cela elle devait s’affranchir de toutes les barrières qui s’érigeaient en elle, ce n’était plus naturel. Son instinct de protection avait ainsi évolué depuis l’enfance.


Je m’assis à ses côtés et espérais qu’elle sentirait ma présence, mes mains de glace contrastaient avec la tiédeur des siennes. Soudain j’entendis sa voix, mais ses lèvres demeurèrent immobiles. Elle était là, quelque part, à demi consciente.


- Nous sommes là Ness, je t’en supplie ouvres les yeux. L’implorais-je.


Je fus soudainement envahi par une flopée de souvenirs, ses souvenirs. Les moments heureux de son enfance furent une véritable bouffée de bonheur quand ils m’apparurent, j’ignorais que sa mémoire remontait aussi loin, j’entendais notre berceuse, je voyais ses doigts Minuscules sur les touches du piano quand je la jouais avec elle. Je pouvais toucher les flocons de neige qui chatouillait ses joues, l’odeur du sel, de la mer, le bruit des vagues quand elle contemplait l’horizon. J’assistais à ces scènes comme Téléporté dans le passé, c’était bien plus fort qu’ordinaire, quasi réel. Son pouvoir était décuplé, exacerbé.


Brusquement, ses joies se mêlèrent à ses peines, à ses déceptions. Une figure se distingua des autres. Jacob. Elle l’aimait, d’un amour pur et sincère. Je n’en fus pas étonné, bien que j’eusse redouté le moment où elle prendrait conscience de ses sentiments pour lui, c’était une évidence. Nous aurions pu empêcher cette relation de grandir, tenter de les éloigner à la minute même où il s’en était imprégné. Elle aurait eu le choix, peut-être qu’elle aurait considéré d’autres alternatives. Ainsi elle ne ressentirait le manque viscéral de sa présence.


 J’hésitais puis demandais à Bella d’appeler Jacob, de le faire revenir ici dans l’espoir que notre ange quitte les abîmes et revienne sur terre. Nous avions tenté trop tardivement de les séparer, quand Alice avait eu la vision la plus douloureuse de sa vie, Renesmée, le regard vide, l’âme éteinte gisant dans son propre sang. Les Volturis, qui considèreraient son union avec les loups comme une aberration, éradiqueraient notre enfant. Un souvenir me hantait, celui du soir où j’avais contraint Jacob à partir, à rompre les liens tissaient avec Renesmée. Je lui avais affirmé que c’était la meilleure chose à faire, la seule chose à faire pour la sauver ! Il m’avait promis de la protéger et il ne pouvait déroger à son devoir. Sans même hésité et malgré le calvaire que ce serait pour lui d’être loin d’elle, il était rentré à Forks. Pour cela il aurait ma reconnaissance éternelle. En repensant à cette scène, les images furent comme aspirées hors de mon être, avalaient puissamment par une force invisible. Dans un mouvement de recul, je coupais le contact entre nos doigts et la sensation cessa sur le champ. Je ne compris réellement ce qu’il venait de se passer, aucune explication tangible ne découla de mes analyses. J’entendis Bella reposer le téléphone, elle avait réussi à joindre Jacob, il serait là dans quelques heures. Peut-être était-ce une erreur, peut-être, regretterions-nous sa venue, mais pour l’heure il était notre dernière chance d’aider Renesmée.


Chaque heure qui s’écoulât par la suite nous désespérait davantage, nous n’avions quitté la maison depuis dix jours, Jacob était arrivé depuis peu quand le besoin de chasser ne fut plus contrôlable, l’odeur de Renesmée avait imprégné chaque particule d’oxygène respirable et il devenait difficile d’être à son chevet. L’appel du sang n’était plus négligeable, Jacob prendrait le relais quelques heures, nous nous sentions coupables. Dans ces moment-là, j’aurais aimé taire le monstre assoiffé en moi, mais il n’avait aucune clémence, inutile de résister. J’embrassais le front de Renesmée avant de jeter un rapide coup d’œil à Jacob. Il était changé, ses pensées étaient ternies, fades, éteintes. Il ne détournait son regard de son unique source de joie. C’était déroutant comme la gravité revêtait un tout autre sens pour lui, elle était son monde, il pouvait tout sacrifié y compris sa vie pour elle. Je ne lui avais jamais exprimé ma gratitude.


-      Je suis heureux que tu existes, que quelqu’un l’aime autant. Déclarais-je


-      Si seulement ça suffisait.


Je quittais la pièce et rejoignis Bella et Carlisle qui donnaient des nouvelles au reste de la famille. Tout le monde attendait, aucune évolution notable n’était constatée pour l’heure. Nous partîmes chasser laissant Renesmée entre de bonnes mains. Bella exprimait peu ses sentiments, mais nous partagions les mêmes inquiétudes. J’essayais de la rassurer comme je le pouvais, aucun mot n’étaient assez fort face à la détresse qu’une mère pouvait ressentir. Une fois la soif étanchée, elle s’adossa contre un chêne et je la rejoignis. Elle avait muri plusieurs théories sur le mal qui accablait notre fille. Nous pensions que sa croissance arrivait à son terme, que le venin se rependait dans ses veines comme lors de notre transformation, quand nous étions devenus des êtres de glace. Je lui confiais avoir infiltré l’esprit de Renesmée et le drôle de sentiment que j’avais eus quand mes propres pensées avaient été absorbés hors de ma chair.  


-     Nous devrions contacter Nahuel, il est le seul qui puisse comprendre ce qu’il lui arrive.


Nahuel, cet autre hybride, il s’était figé au terme de sa croissance, son cœur battait toujours après plus d’un siècle. Cette pensée me rassura, il était évident qu’il était le plus à même de nous renseigner, peut-être même était-il passé par là ? J’aurais dû y penser plus tôt.

-      Peut être aura-t-il une réponse. Espérais-je. Rentrons.


Je déposais un rapide baiser sur les lèvres de Bella avant de filer à travers l'épaisse végétation. Nous n’avions pas atteint l’orée du bois que j’entendis une voix s’élever au-dessus de tous les autres sons.


- Renesmée ! Nous prononçâmes à l’unisson.


Je manquais de sortir la porte d’entrée de ses gonds et déboulait dans la chambre en moins d’une seconde. Elle était là, enfin. Nous nous ruâmes dans ses bras, Soulagés. Elle nous sourit et nous rassura sur son état comme à son habitude. L’atmosphère était étrange depuis combien de temps était-elle éveillée ? Je remarquais de multiples poches de sang vides dans un coin de la pièce, en temps normal, elle ne chassait que rarement, sa soif était décuplée ces derniers mois.


Jacob, m’interpella mentalement, les traits tendus.


*Elle m’a parlé de La vision d’Alice, ce n’est pas moi * Entendis-je.


Je fus sidéré, elle m’avait véritablement dérobé ce souvenir


*J'ai brouillé les pistes pour le moment* pensa-t-il.


Elle se releva et s’approcha de la fenêtre, rien ne laisse supposer qu’elle avait passé plus d’une semaine dans le coma. Elle souhaita sortir s’aérer et j’enjoins Jacob à l'accompagner, terrifié à l’idée qu’elle m’interroge sur ce qu’elle avait vu. Ils partirent un long moment, j’informais Bella du problème que nous allions rencontrer. Elle s’était opposée au départ de Jacob, elle craignait que Sa fille ne soit brisée comme la fois ou je l’avais lâchement abandonné.

Je repensais à mes adieux, aux douloureux mois séparé d’elle et ne put que comparer ma souffrance à celle qu’éprouvait Jacob.


Quand la nuit fut tombée, Jacob rentra, Renesmée endormie dans ses bras. Nous pensâmes au pire, que son état s’était dégradé à nouveau, mais son sommeil était agité, elle rêvait. Les pensées de Jacob m’étaient dédié, j’appris avec horreur que notre secret commun était sur le point d’éclater. Elle nous en voudrait, et je devrais bien vite répondre de nos actes. Elle hurla le prénom de Jacob et ne tarda pas à s’éveiller à nouveau. Je lui donnais une bonne dose de somnifères que Carlisle avait laissé et autorisé Jacob à la veiller cette nuit-là en souhaitant que le reste de la nuit ne lui porterait pas tellement conseil, qu’elle oublierait tout.


Bien évidemment, le contraire se produisit, quand elle s’éveilla au petit matin et surgit dans le salon à la recherche de Jacob, puis quand, la mine sévère, elle me fit face, je compris que la vérité devait éclater, elle savait, je devais seulement confirmer ses doutes. Nous l’informâmes des choix que nous avions fait à sa place, et quand la révélation fut terminée, il ne me resta que son pardon à espérer. Elle fila rejoindre le loup, nous laissant ruminer sur nos erreurs.








Jacob n’accompagnait pas Renesmée quand elle retrouva notre foyer. Contre toute attente, il regagna Forks. Il fallut un certain temps pour qu’elle nous adresse la parole, mais quand elle le fit, nous fûmes sidérés. Ils sacrifiaient leur bonheur pour nous épargner. Le courage de ma jeune fille me déroutait, elle était bien plus forte que je ne le l’avais imaginé. Je me sentis égoïste, idiot, de dicter leur conduite, ils étaient raisonnables, solides. Je ne voulais plus m’interposer dans leurs vies, ils avaient le droit de la mener comme ils le désireraient désormais même si leur décision était la plus salvatrice.


Le printemps laissa place à l’été, notre vie reprit son cours normal, du moins pour des vampires. Renesmée était malheureuse et Bella l’était également de la voir souffrir. Aucune solution n’était meilleure que l’autre et nous n’étions en mesure d’intercéder face au destin. Bientôt sonnerait l’heure de notre départ, nous rejoindrions finalement l’argentine. Dans la crainte que Renesmée ne soit à nouveau affligé de maux inconnus, Carlisle avait contacté Nahuel et Huilen, ils nous avaient amicalement enjoint à nous installer près d’eux. Bien sûr, quelques soucis administratifs et la proximité de Forks était les motifs avancés officiellement, Renesmée n’aimait pas demander de l’aide et nous ne voulions la contrarier plus encore.


Jacob finir par réduire ses appels, cependant il téléphona, quelques jours avant le bal de fin d’année, Renesmée portait sa Robe quand la sonnerie la fit bondir. Plus rien ne comptait quand il était au bout du fil. Cette dernière conversation ne se déroula pas comme prévu, l’appel fut écourté. Quand elle raccrocha, elle perdit le contrôle de ses émotions, elle rêvait de revanche et de justice, ce qu’elle ne pouvait obtenir. Elle se blessa de rage et une impression de déjà-vu m’irrita. Elle avait mon tempérament, mais sur beaucoup de point, je voyais Bella dans ses réactions. Elle était entêtée et rien ne pourrait compromettre ses dessins aussi dangereux soient-Il. J’en étais terrifié.


Renesmée fut diplômée, je ressentis une fierté immense quand elle monta sur l’estrade et reçu les honneurs. Tout le long de la cérémonie, j'avais sondé son partenaire de bal afin d’être certain qu’il serait digne d’elle. C’était un adolescent banal, il pensait l’aimer, mais il ne la connaissait pas vraiment, il aimait un mirage, une illusion. Je ne décelais aucune mauvaise intention dans sa démarche, il allait pourtant très vite déchanter, il comptait révéler l’étendue de ses sentiments lors de cette soirée, convaincu qu’ils formeraient bientôt un couple digne du grand écran. Renesmée souhaita rapidement rentrer, après avoir obtenu le fameux Graal, son humeur n’était pas à la fête.




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