Torchwood 4x01 : Cardiff, 2093.
Plusieurs années passèrent. Elle avait remis le dossier à sa place et avait pratiquement fait une croix sur ses recherches, jusqu’à ce jour d’août, sur cette scène de crime. Elle ne le savait pas, mais ce meurtre serait la clé qui permettrait d’ouvrir tous les secrets liés à sa mère et à sa mort.
Le corps était maintenant allongé sur la civière, les autres équipes étaient arrivées et avaient délimité la zone avec les rubans jaunes « do not cross »… Gareth avait prit la déposition de l’homme qui avait fait la macabre découverte, avait pris en note les différents éléments de la scène du crime et avait laissé la place à l’équipe scientifique pour les relevés d’indices. Eirwen était restée en retrait, pour une fois, cette mort la paralysait sans qu’elle sache pourquoi. Lorsqu’elle releva les yeux, elle aperçut une silhouette près de l’entrée du parking public. Un homme, apparemment, portant un long manteau, et les observant. Eirwen le fixa, l’homme également. Ils soutinrent chacun le regard de l’autre pendant de longues secondes avant que l’inconnu ne détourne la tête et parte en direction du parking.
Eirwen : Hé vous là bas !
Gareth : Eiry ? Qu’y a-t-il ? Tu as vu quelque chose ?
Eirwen : Il y avait un homme… il nous espionnait, on dirait…
Gareth : T’es sûre, j’ai rien vu…
Sans répondre à son coéquipier, elle s’élança dans la direction qu’avait pris l’inconnu. Le parking était à moitié rempli, Eirwen avait donc une bonne visibilité. Du coin de l’œil elle l’aperçu, il pénétrait dans la cage d’escalier.
« Tu es coincé » pensa t-elle.
Elle s’élança derrière lui. Des bruits de pas raisonnaient dans la cage d’escalier, il était en train de monter. Elle essaya de faire le moins de bruit possible, afin de savoir à quel étage il s’arrêterait. Il avait apparemment atteint le toit du parking… Elle monta les marches 4 à 4 et déboula, arme à la main. Personne, pas une voiture … Où était-il passé. Le silence qui régnait lui dit qu’aucune voiture n’était en train de descendre. Alors où était il passé ? Elle s’approcha du rebord, pencha la tête par dessus et examina les environs. Ses yeux se posèrent sur une silhouette postée à l’entrée d’une ruelle adjacente au lieu de crime. C’était lui ??? Comment était-ce possible ? La même corpulence, le même manteau, la même coiffure… Ce ne pouvait être le même homme. Il la regardait, elle crut deviner un sourire sur son visage. Mais avant qu’elle puisse en être sûre, il s’était détourné et remontait la ruelle en direction d’un véhicule noir garé à quelques pas de là.
Lorsqu’elle redescendit rejoindre Gareth, elle ne savait pas quoi penser de ce qu’elle venait de vivre. Comment un homme avait-il pu aller du toit du parking à la ruelle, située 6 étages plus bas, en une poignée de secondes ?
Gareth : Alors cet homme ?
Eirwen : J’ai perdu sa trace au dernier étage…
Gareth : Sûrement un badaud curieux…
Eirwen : Oui…ça doit être ça… dit-elle sans conviction…
Ils remontèrent en voiture et prirent le chemin du commissariat. Gareth avait pris le volant, elle n’avait pas envie de conduire… Sur le chemin du retour, elle laissa ses pensées divaguer, les yeux dans le vide, sans se soucier de la route ou de ce que lui disait son partenaire. Elle ne remarqua même pas qu’ils étaient arrivés et que la voiture était arrêtée. Gareth avait déjà fait le tour du véhicule et l’attendait en bas des marches.
Gareth : Eiry ? Tu viens ?
Eirwen : Hein… Heu oui, j’arrive…
Ils entrèrent dans la salle centrale, qui regroupait l’ensemble des bureaux des officiers. Leurs deux bureaux se faisaient face. Ils s’assirent chacun au leur.
Eirwen : ça te dérange de t’occuper du rapport… j’ai pas tout suivi…
Gareth : De toute façon, je les fais toujours les rapports, c’est pas ton truc … dit il en plaisantant.
Gareth alluma son ordinateur, Eirwen fit de même, mais pas pour les mêmes raisons… elle voulait savoir qui était cet homme, et ce qu’il faisait sur les lieux du crime. Elle se connecta au réseau de télésurveillance qui couvrait la ville de Cardiff et sélectionna les caméras qui se trouvaient aux abords du parking. Elle les visionna une par une… elle aperçu enfin la silhouette qu’elle cherchait… mais elle n’arrivait pas à avoir une photo assez nette pour lancer une recherche dans la base de donnée. Elle changea de caméra et trouva celle couvrant la fameuse ruelle. La chance lui sourit, lorsque l’homme l’avait regardée depuis la rue, son visage avait nettement été filmé par la caméra. Elle fit un zoom et captura l’image qu’elle transféra dans le logiciel de recherche. Elle lança l’application et attendit… attendit… attendit…
Les visages défilaient devant ses yeux, la banque de données des délinquants et meurtriers avait été infructueuse et maintenant c’était la banque de données des citoyens britanniques qui était passée au crible. Cette banque de données avait été créée, il y a des années, à la demande du Gouvernement suite à l’accroissement des problèmes générés par la légalisation de la loi sur la génétique et le clonage dans les années 2070. l’Adn ne pouvant plus être une preuve irréfutable, la bonne vieille méthode de la reconnaissance faciale était redevenue le seul moyen d’identifier les criminels.
Gareth : Tu restes là Eiry ?
Eirwen : Oui, j’ai un truc à terminer…
Gareth : Bonne soirée alors.
Eirwen : à toi aussi … lui répondit-elle les yeux toujours fixés sur l’ordinateur.
Les tasses de café et les heures passèrent. A 23h50, Eirwen s’adossa à sa chaise et posa les pieds sur le bureau. Elle lança une nouvelle recherche dans la base de donnée des personnels militaires, sa dernière chance de trouver l’inconnu… sinon, elle devrait faire appel à Interpol, et sans indice elle se verrait refuser sa requête… Dix minutes plus tard, elle s’endormit. Elle fut réveillée par le bip de l’ordinateur. Un peu désorientée mais surtout courbaturée par la mauvaise position dans laquelle elle avait dormi, elle mit un moment à réaliser où elle était. Lorsqu’elle fut tout à fait réveillée, elle vit sur son écran une fenêtre ouverte, disant « un résultat trouvé ». Elle cliqua immédiatement sur « OK » et une nouvelle fenêtre s’ouvrit, faisant apparaître le visage de l’inconnu. Mais aucune information sur son nom ou qui il était… seule indication notée à coté de la photo : autorisation niveau 1 requise.
Autorisation niveau 1 … la plus haute autorisation existante… uniquement obtenue lorsque l’on faisait partie des plus gradés de l’armée ou de la garde rapprochée du 1er ministre. Seule une vingtaine de personnes devait avoir cette autorisation. Qu’est-ce que c’était que ce bordel ?? De rage, elle éteignit son ordinateur et regarda l’horloge. 4h25… trop tard pour le dernier bus, trop tôt pour le premier… elle passerait la fin de la nuit au poste. Elle se dirigea vers la machine à café, elle était vide… Elle se mit à penser qu’elle aimerait bien que le jeune Jones soit là pour lui en faire un … il avait un don pour faire le meilleur café du coin… Elle se résolu à prendre un sachet de café instantané, par flemme d’en faire un elle-même, versa les granules dans une tasse et fit couler de l’eau très chaude dessus. Pas besoin de le faire chauffer se dit-elle, puis retourna à son bureau. Les premiers policiers arriveraient dans une heure… la première équipe commençait à 5h30, elle à 9h00. Elle se dirigea vers la salle de repos et s’allongea sur le canapé pour essayer de dormir un peu.
Ce fut son portable qui la réveilla.
Gareth : Nom de Dieu ! T’es où ?
Eirwen : Qu’est-ce qui se passe ?
Gareth : ça fait 20 minutes que je te cherche partout…
Eirwen : Je suis dans la salle de repos, j’arrive.
Lorsqu’elle arriva à son bureau, les cheveux hirsutes, les yeux explosés et les vêtements en piteux état, Gareth l’attendait, trépignant.
Gareth : T’as passé la nuit ici ?
Eirwen : Ouais… J’ai pas vu l’heure hier soir… j’ai loupé le dernier bus… Il est quelle heure ?
Gareth : 9h25… On nous attend chez le coroner pour les résultats de l’autopsie du gars d’hier.
Eirwen : Super… La journée commence bien…
Gareth : Prends toi un café et on file… t’es dans un état !
Eirwen : Merci pour le compliment…
Gareth : C’en était pas un… lâcha t-il énervé.
Eirwen se dirigea pour la 10e fois en quelques heures vers le coin café du commissariat. Jones devait être arrivé, car une bonne odeur de café emplissait cette partie de la salle. Elle se dit qu’un jour elle le remercierait pour ce café et qu’elle lui demanderait son prénom…
C’est à peine réveillée qu’elle s’installa dans la voiture et qu’ils prirent la direction de la morgue de l’hôpital Albion. Eirwen comata tout le long du chemin et ce ne fut que lorsqu’ils entrèrent dans la salle d’autopsie, que l’odeur de mort qui y régnait la réveilla totalement. Elle crut que le café ingéré peu de temps auparavant allait faire le chemin inverse, mais elle s’obligea à garder le contrôle de son estomac et lui imposa de conserver le liquide.
Le médecin légiste : Bonjour, je suis le docteur Fuller.
Gareth : Inspecteurs Lloyd et Morris. 14e. On vient pour le corps amené hier soir.
Le médecin légiste : Ah oui, l’écorché… je dois dire que je reste sceptique devant les résultats. La seule conclusion plausible, c’est une attaque de loups ou d’ours… en tous cas d’un animal avec des crocs… Mais à Cardiff, je doute qu’il y ait de telles bêtes sauvages. Il a été déchiqueté sur 80% de son corps, son foie et la moitié de ses poumons ont été dévorés et ses deux bras démembrés. J’ai rarement vu ça, sauf sur des blessés par mines lors de la 4e Guerre du Golfe. Mais là, les marques de crocs annihilent cette hypothèse. C’est tout ce que je peux dire sur ce cas. Les échantillons ont été envoyés au labo et ne devraient pas tarder, je vous tiendrais au courant.
Gareth : Merci docteur Fuller.
Eirwen qui n’avait rien dit suivit son coéquipier. A peine avaient-ils passé les portes, que le médecin les rattrapa.
Le médecin légiste : Ils ont les résultats… Ils vous attendent au laboratoire n°2, troisième étage. Ils disent que c’est urgent…
Gareth : Merci, on y va.
Ils montèrent les escaliers quatre à quatre, arrivés au 3e étage, le portable de Gareth sonna. Il décrocha, s’entretint quelques instants et raccrocha.
Gareth : C’est mon fils, il a chuté dans la cour de l’école et s’est fracturé le bras. Michelle est absente, je dois y aller… ça ira ?
Eirwen : Ce ne sont que des résultats, je devrais pouvoir m’en occuper seule. Dis bonjour à Mike de ma part.
Gareth : Merci, je te revaudrais ça… ça ira pour rentrer ?
Eirwen : Oui, j’appellerai une voiture !
Elle suivit le couloir menant au laboratoire n°2. L’odeur des différents produits mélangés les uns aux autres commençait à lui donner mal à la tête et les tressaillements des néons n’arrangeaient rien. La porte du laboratoire était grande ouverte alors qu’un panneau indiquait « laisser fermé ». Elle jeta un rapide coup d’œil à la pièce. Elle semblait en ordre… mais au moment où elle allait y rentrer elle vit, à moitié cachée derrière le bureau, une jambe qui dépassait. Elle se saisit de son arme et entra brusquement dans la pièce, balayant du regard les moindres recoins. Personne… Elle se dirigea vers le corps, prit son pouls. Il n’était qu’inconscient…
Un bruit de verre brisé retentit dans la pièce adjacente. Elle s’y dirigea, l’arme braquée devant elle, l’esprit attentif au moindre mouvement. Elle poussa la porte doucement, et entra. Elle resta bloquée sur le seuil de la porte, devant elle, lui tournant le dos, l’homme du parking… Elle prit son courage à deux mains, et braqua l’arme en direction de l’inconnu.
Eirwen : Qui êtes-vous ?
Inconnu : Vous savez que vous êtes assez bruyante pour quelqu’un qui essaye d’être discrète… Je vous ai entendu depuis que vous êtes entrée dans l’autre pièce.
Eirwen : Qui êtes-vous et que faîtes vous là ?
L’inconnu ignora sa question et continua ce qu’il était en train de faire.
Eirwen : Répondez ou…
Inconnu : Ou … quoi ? Vous allez me tirer dans le dos ? Non, j’en doute… vous avez trop de questions pour me réduire au silence… Mais de toutes façons, si ça peut vous faire plaisir, ne vous gênez pas pour moi.
Tout en finissant sa phrase il se retourna et fit face à Eirwen. C’était un homme auquel on ne pouvait donner d’âge… Il semblait avoir la trentaine mais possédait une présence centenaire… Il portait toujours ce long manteau alors qu’il devait faire 24° dehors. Emportés par le poids de l’arme, les bras d’Eirwen commençaient à s’affaisser, sans qu’elle s’en rendre compte.
Inconnu : Voilà qui est mieux, on va pouvoir discuter tranquillement.
Eirwen : Discuter ?
Inconnu : Je pense que vous cherchez des réponses, vu que vous avez demandé à consulter mon dossier.
Eirwen : Comment pouvez vous savoir ça ?
Inconnu : Je sais beaucoup de choses Eirwen Lloyd.
Eirwen : Comment savez vous mon nom ?
Inconnu : Je vous l’ai dit, je sais beaucoup de choses…
Eirwen : Quel est le vôtre, que l’on soit à égalité que cette question là !
Inconnu : Pleine de courage et doté d’un précieux sens de l’humour ! Je vous apprécie déjà Eirwen ! Je m’appelle John Wood.
Eirwen : Et qui êtes vous Mr Wood ?
John : Tout le monde et personne…
Eirwen : Ce n’est pas votre vrai nom n’est-ce pas ? Vous ne me le direz pas…
John : Et perspicace en plus ! Tout le portrait de vos aïeules… et effectivement, ce n’est pas mon vrai nom, mais peut-être gagnerez vous le droit de le connaître, ça ne tient qu’à vous…
Eirwen : Vous avez parlé de mes aïeules ? Comment les connaissez-vous ?
John : Oh, je n’étais jamais loin d’elles… sauf pour votre pauvre mère, je dois l’avouer, je suis arrivé trop tard…
Eirwen : Mais de quoi vous parlez ??? Que savez vous sur le meurtre de ma mère ?? Comment pouvez vous connaître toutes mes aïeules ?
John : Une chose à la fois… Vous me laissez finir ce que j’ai à faire, et on ira discuter… ok ?
Eirwen : Et qu’avez-vous à faire ?
John : Détruire des preuves… récupérer des résultats… effacer quelques souvenirs…
A ces mots, Eirwen releva le canon de son arme vers John qui s’était retourné vers la paillasse et récupérait divers tubes et résultats. Il mit le tout dans ses poches et se retourna à nouveau.
John (voyant l’arme pointée sur lui) : Je croyais qu’on avait réglé la question de l’arme…
Eirwen : mais… C’est du vol de preuves ! Et comment ça effacer des souvenirs ?
John : C’est seulement pour votre bien, vous n’êtes pas prêts à faire face à ces résultats et à ce qu’ils impliquent. Baissez ça et allons-y…
Il n’attendit pas qu’elle le fasse et se dirigea confiant et sans criante vers le bureau par lequel elle était entrée. Il sortit une espèce de seringue et l’appliqua sur le cou du scientifique affalé sur le sol.
John : Voilà, avec ça il ne se souviendra pas des 4 dernières heures… Que diriez vous d’un café ? Non, j’ai abandonné le café il y a des lustres… une bière ?
Eirwen : Il est 10h30 du matin… c’est pas un peu tôt pour une bière ?
John : il n’est jamais trop tôt pour une bière…