Le Convoi de la dernière chance (Vol. 1.)

Chapitre 13 : Chapitre 12 : Le convoi de la dernière chance

Chapitre final

Catégorie: M

Dernière mise à jour 10/11/2016 01:39

Chapitre 12 : Le convoi de la dernière chance.

Tara toqua à la vitre arrière et fit signe à Travis et Dean de se tenir prêts avant de descendre du véhicule. Les deux personnes étaient encore assez éloignées mais elle constata que c’était un chien qui courait à leurs côtés. L’une des deux silhouettes humaines qui approchaient au pas de course trébucha brutalement et tomba. L’autre s’arrêta et fit demi-tour.
Ethan ne fit pas mine de sortir et elle contourna le capot du véhicule avant de se diriger vers l’endroit où se trouvaient les deux personnes. Les deux militaires s’apprêtaient à la suivre mais elle leur fit signe de rester de rester en arrière et de la couvrir.
Elle s’enfonça prudemment dans le champ dont les herbes folles lui arrivaient au genou et garda la main sur la crosse de son arme. Elle ne tenait pas à pêcher par excès de confiance. Tara n’apercevait plus la personne qui avait chuté mais elle avait l’autre bien en vue. Celle-ci était agenouillée à l’endroit de la chute et semblait fébrile, le chien n’était plus visible mais elle l’entendait pousser de petits gémissements plaintifs.
Elle était maintenant assez proche et pouvait voir distinctement la personne agenouillée : c’était Lydia. Elle sentit son cœur se serrer et couvrit rapidement la distance qui la séparait encore de la femme.

-Lydia ? lança-t-elle en tentant de contrôler l’inquiétude qui la gagnait. Et c’est …

Elle s’interrompit en reconnaissant son mari étendu au sol. Lydia avait retiré le plastron et elle pouvait apercevoir plusieurs bandages imbibés de sang. Le chien était couché aux côtés de son mari. Sa gorge se serra et elle sentit des larmes lui monter aux yeux tandis qu’elle s’    affaissait aux côtés de l’ex sage-femme.

-T’inquiètes pas, dit celle-ci en s’activant. Il est pas en arrêt cardiaque. Il a perdu connaissance mais ses plaies se sont rouvertes et il perd du sang, il faut qu’il bénéficie de soins au plus vite.

-Qu’est ce qui s’est passé ? D’où sort ce chien ?

-Je t’expliquerai, en attendant faut bouger.

Tara fit signe à Travis qui descendit de la plateforme et courut dans leur direction. Tara empoigna son mari, imitée par Lydia mais cette dernière s’effondra sous le poids de l’homme en grimaçant de douleur.

-Je suis désolée, s’excusa la jeune femme en se redressant. Je pourrai pas t’aider avec ton mari dans mon état.

-Pas grave, lui répondit-elle en recommençant la manœuvre avec l’aide de Travis.

Ils l’enlacèrent, chacun d’un côté, en passant le bras sous l’aisselle et le trainèrent ainsi jusqu’au véhicule. Ils l’allongèrent au milieu de la plateforme et Travis remonta avec Dean. Lydia s’accroupit et attrapa le chien puis se redressa et s’apprêta à monter dans le véhicule.

-Je ne suis pas sûr que ça soit une bonne idée pour le chien, lâcha Dean. Depuis quand est ce qu’il vous accompagne ? Est-il en bonne santé ? Là où nous allons nous ne pouvons pas nous permettre d’avoir une source de danger sanitaire potentiel voir de danger tout court.

-Ca fait plus d’une journée et il n’a pas l’air malade ni d’avoir de puces, répondit Lydia. De plus il nous a sauvés la vie en nous signalant la présence de zombies ce matin donc si on ne l’emporte pas je reste ici et vous pourrez toujours essayer de m’emmener de force, ajouta-t-elle avec un air de défi.

-Bien, on décidera plus tard, faut qu’on dégage, coupa Tara en se réinstallant à la place conducteur.

Dean n’insista pas et aida Lydia, qui avait toujours le chien sous les bras, à monter. Tara démarra en trombe et effectua un demi-tour. Elle voulait rentrer au plus vite au camp, il n’était pas question que Driss la quitte maintenant qu’ils s’étaient retrouvés.
Le trajet de retour sembla durer plus longtemps que celui de l’aller, même s’il n’en fut rien. La jeune femme jetait fréquemment des coups d’œil furtifs dans le rétroviseur intérieur afin de voir comme les choses se passaient sur la plateforme arrière.
Elle s’engagea en dérapant sur le chemin qui conduisait à la cabane devenue le QG temporaire du détachement militaire et pila en haut de celui-ci.
Elle constata en sortant du véhicule que les remorques des deux autres avaient été attelées et que la troisième attendait à l’extérieur de la cabane. Le capitaine n’avait donc pas mentit, ils comptaient quitter la zone au plus vite.
Tara se rendit à l’arrière du véhicule, imitée par Ethan. Les deux militaires avaient déjà dégagé la plateforme et aidaient Lydia à trainer Driss vers la cabane. Un militaire s’approcha pour retenir le chien et se positionna en retrait avec celui-ci.

-Madame ! l’interpella une voix autoritaire alors qu’elle s’apprêtait à entrer dans la cabane à la suite du petit groupe.

Elle se retourna et se trouva face au commandant du détachement.

-Est-ce bien votre mari et l’un des disparus ? enchaina celui-ci.

-Oui, c’est bien lui et pardonnez-moi mais je vais le rejoindre de ce pas, répondit-elle en tournant les talons.

-Une minute, nous n’avons pas fini de parler, lança le militaire en la retenant par le bras. Où est l’autre ?

-Il faut que je me rende à ses côtés et je n’en sais rien, insista-t-elle en tentant de se dégager.

-Vous irez tout à l’heure, fit-il d’un ton autoritaire en raffermissant sa prise. En attendant vous allez devoir m’expliquer ce qu’il s’est passé aujourd’hui. Le médecin de l’unité s’en occupera très bien de votre cher et tendre, ajouta-t-il en faisant signe à un de ses hommes qui pénétra dans l’habitation en refermant la porte.

Tara tenta une nouvelle fois de se détourner mais la poigne de l’homme et son regard insistant la persuadèrent de coopérer.

-Bien, venez-vous asseoir près du feu avec moi, dit-il d’une voix radoucie lorsqu’il fut certain qu’elle ne tenterait plus de se défiler.

Elle le suivit et ils s’assirent autour de l’âtre. Les autres membres du groupe étaient assis à part et leur jeter des coups d’œil occasionnels. Elle aperçut Eugene occupé à rassurer  Jill qui semblait quelque peu inquiète.

-Bon, commençons… Où avez-vous récupérer votre mari pour commenc..

Il fut interrompu par l’arrivée de Lydia, encadrée par Travis et Dean.

-Ah, parfait, nous sommes au complet, commenta le capitaine avec un sourire chaleureux. Un peu de café peut-être ? proposa-t-il en attrapant une tache et en piochant dans la bouilloire suspendue au-dessus du feu.

-S’il vous plaît, accepta Lydia alors que Tara refusait poliment l’offre.

-Revenons-en à nos moutons maintenant, reprit le capitaine en tendant une tasse remplie à Lydia. Où est ce que vous vous êtes retrouvés.

-A plusieurs kilomètres de là, répondit Tara. Dans les champs. On suivait les indications d’un homme mourant rencontré sur la route, nous avons abandonné celui-ci à son sort.

-Qu’est-ce qui vous fait croire qu’il était mourant, interrogea le capitaine. D’où est ce qu’il sortait ce pauvre diable ? Etes-vous bien sûr que ce n’était pas un espion ou un guetteur ?

-Il venait du village de nos agresseurs d’après ses dires. Il nous a dit qu’il y avait eu plusieurs prisonniers qui s’étaient échappés et que ceux-ci avaient laissé un joli bordel derrière eux. Il nous a indiqué la route à suivre pour aller vérifier par nous-même et vu son état je pense pas qu’il pouvait nous mentir.

-Bien, mais qu’est-il arrivé à votre autre compagnon ? s’enquit le capitaine en adressant un regard insistant à Lydia.

-Il est mort … fit simplement celle-ci. Tué par nos geôliers …

-Toutes mes condoléances donc, mais un point me chiffonne tout de même. Si ces hommes étaient si bien armés que ce qui nous a été rapporté, comment êtes-vous parvenu à prendre la fuite ? Comment pouvons-nous être sûrs que l’on ne vous a pas laissé partir intentionnellement ?

-Vous ne pouvez pas être sûrs, nous même nous ne le sommes pas, répondit Lydia en baissant les yeux. Trois gardiens nous ont aidés à prendre la fuite, faut croire que le chef n’était pas aimé par tous, deux ont été tués et nous avons exécuté l’autre après un incident. Nous avons marché plus d’une journée avant de tomber sur Tara.

-Je vois, et le chien ? Il était prisonnier avec vous ou vous avez visité un refuge de la SPA ?

-Ni l’un ni l’autre. Il nous a quasiment sauvés la vie et il restera avec moi, fit-elle d’un ton ferme.

-Vous inquiétez pas, il n’ira nulle part. Ces petites bêtes sont très efficaces pour repérer des zombies et nous alerter, il faudra tout de même qu’il soit ausculter car il n’est pas question de ramener des parasites là où nous allons.

-Et où allons-nous ? intervint Tara.

-Vous le saurez bien assez tôt. Qu’est-ce qu’ils vous ont fait là-bas et comment votre ami est-il mort ?

Le visage de Lydia s’assombrit et la réponse se fit attendre un moment dans un silence pesant. Elle finit par répondre, le regard perdu dans les flammes.

-Ils nous ont torturés tous les trois puis ils nous ont fait combattre dans une arène contre des gars à eux puis contre une meute de zombies, c’est là que Banon est mort.

-De vrais cinglés, commenta le capitaine. Et que voulaient-ils savoir ces messieurs en vous torturant ?

-Ils ne voulaient rien savoir, c’était du pur sadisme.

-Bien, ça ira pour ce soir, allez vous reposer et faites rentrer vos amis, conclut le militaire.

Elles s’exécutèrent toutes les deux et Tara entra dans la cabane pendant que Lydia se dirigeait vers le groupe assis autour de l’autre feu. Le médecin était penché sur son mari qui avait été allongé sur un vieux matelas. Dans la faible lumière de la lampe à pétrole amenée pour le soldat, elle vit que son homme était torse nu et couvert de bandages. L’équipement antiémeute avait été jeté dans un coin de la pièce. Le soldat se tourna vers elle lorsqu’il l’entendit approcher.

-J’ai fait ce que j’ai pu, commenta-t-il en se relevant. Les mecs qui s’en sont occupés ont pas été tendre mais il devrait s’en sortir. Je vous laisse, s’il va pas bien cette nuit vous savez où me trouver.

Le militaire attrapa la lampe, sortit et Jill se glissa dans la cabane, suivie par les autres. Elle courut vers sa mère, qui était en train de s’asseoir aux côtés de son mari, et se jeta dans ses bras. La jeune femme berça doucement sa fille.

-Tout va bien, chuchota-t-elle doucement. Papa est à nouveau là et il va guérir très vite, il fait seulement un petit dodo.

La petite fille ne répondit rien et s’endormit. Tout le monde se coucha en échangeant les politesses d’usage. Seuls Lydia et Eugene manquaient mais la jeune femme devinait parfaitement pourquoi ils tardaient et, bien qu’une petite pointe de jalousie la piqua, elle les comprenaient parfaitement.
Elle étendit Jill sur un matelas libre à côté d’elle. Au même moment, la porte de la cabane s’ouvrit sur Eugene et Lydia se tenant main dans la main. Ils entrèrent et allèrent se coucher sur des matelas libres sans dire un mot.
Tara contempla son mari. Tous ces bandages, quelles tortures avaient-ils pu lui faire endurer là-bas. Comment était-il arrivé à survivre à l’arène, elle le savait fort et qu’il ne se laissait pas abattre facilement mais cela l’impressionnait qu’il ait pu endurer tant d’horreur sans rien lâcher.
Elle en vint à se demander, bien malgré elle, si l’homme étendu devant elle était toujours l’homme qu’elle avait épousé après tout ça. Il ne pouvait pas ressortir de tout ça indemne et elle en vint presque à redouter le moment où il se réveillerait. Il semblait si paisible à l’instant présent, sa poitrine se soulevant doucement au rythme de sa respiration.
Elle avança la main et caressa doucement la partie du visage non bandée. Il n’avait pas de fièvre, c’était déjà ça. Elle se sentait vidée, physiquement et émotionnellement. Après toutes ces journées à courir après lui et à se ronger les sangs, le fait de l’avoir retrouvé ne lui procurait pas la joie qu’elle aurait espéré. Le voir revenir dans cet état la blessait autant que cela la réjouissait, à quel point est-ce qu’on lui avait amoché qu’elle aimait ?
La jeune femme chassa ses idées noires et s’étendit à côté de son mari, le fixant dans l’obscurité. Celui-ci semblait traverser une période de sommeil agité, elle attrapa sa main et la serra doucement pour le rassurer. Elle se demanda s’il revoyait les horreurs qu’on lui avait infligées.

OOooO

Driss courait à en perdre haleine. Jill et Tara étaient en danger, il le savait. Il se trouvait dans un grand champ de maïs mais il ne parvenait pas à se souvenir comment il était arrivé ici. Il ne fallait surtout pas qu’il s’arrête, il devait courir. Son cœur battait à tout rompre, pourvu qu’il ne soit pas trop tard.
Les épis de maïs laissèrent brusquement place à des voitures et des camions. Il s’arrêta net.
Il était sur une double-voie encombrée de véhicules abandonnés et dans un état de délabrement assez avancé. Des sacs de voyage et des effets personnels tâchés de sang jonchaient le sol. Il n’y avait aucune trace des propriétaires de tous ces engins mais le sentiment oppressant que quelque chose de terrible se passait le tenaillait toujours avec force.
Il se fia à son instinct et remonta la colonne de véhicules immobiles. Certains étaient encombrés de cartons emportés par les occupants des véhicules espérant pouvoir sauver quelque chose de leur vie passée, c’était fou que les gens pensent à prendre ce qu’il y a de plus inutile au lieu de ce qu’il y a de plus vitale dans des situations pareilles.
Certaines voitures étaient encastrées les unes dans les autres, d’autres étaient stationnées en travers de la route. On pouvait mesurer l’ampleur de la panique lorsque tout le monde s’était retrouvé coincé ici, à la merci des cadavres ambulants. Plus loin, un camion était couché sur plusieurs voitures, sa remorque déversant des cartons éclatés et bourrés de friandises pour les gosses.
Driss pressa le pas, poussé en avant par cette menace omniprésente. Il entendit des cris de douleur au lointain et se remit à courir en se maudissant d’avoir perdu tant de temps.
Il arriva dans une large zone dans laquelle tous les véhicules avaient brûlés. La raison apparut sous la forme d’un camion-citerne accidenté. L’essence avait dut se répandre tout autour et prendre feu, carbonisant tout ce qui se trouvait dans la zone.
Driss nota qu’il n’avait vu aucun corps depuis qu’il s’était engagé sur l’autoroute et que le ciel gris-sombre ajoutait du surréalisme à la scène. Les cris devinrent plus pressants et il courut de nouveau aussi vite qu’il put. Il savait à qui ils appartenaient, son âme le lui hurlait.
Il aperçut une station-service, tout semblait provenir de là. Les cris s’étaient tus. Non il ne pouvait pas être trop tard, il ne le fallait pas. Des larmes de douleur lui échappèrent lorsque ses poumons se mirent à brûler dans sa poitrine, réclamant désespérément qu’on les laisse en paix. La peur s’insinuait désormais en lui : qu’allait-il trouver là-bas ?
Il trébucha, au niveau du panneau indiquant le prix du carburant dans la station, et se reprit de justesse. Il se maudit de sa maladresse et courut de plus belle, peu importe qu’une horde de zombies attirés par le bruit lui emboîte le pas, pourvu qu’il arrive à temps. Il distinguait mieux le parking maintenant : plusieurs véhicules de type militaire y étaient garés et de nombreuses formes sombres se tenaient s’y tenaient, alignées le long de l’espace magasin. Sans ralentir sa course, il chercha une arme à sa ceinture mais n’en trouva pas. Pourquoi n’en avait-il pas emporté, tout était si confus dans sa tête.

Ses oreilles captèrent des sanglots, qu’il reconnut comme ceux de Jill.  « Non, non, papa arrive, ne t’en fait pas » se dit-il mentalement. Il pouvait maintenant distinguer une rangée de personnes cagoulées, en tenue sombre ainsi que deux personnes agenouillées devant elles : l’une d’entre elle semblait être un enfant. Le cœur de Driss manqua de s’arrêter et il s’arrêta, les jambes sciées. Ce ne pouvait être qu’elles, il en était certain. C’était un cauchemar, ce n’était pas possible.
Il se força à avancer et se remit à trottiner. La distance à couvrir semblait infinie. Il arriva finalement sur le parking et s’arrêta, interdit.
Les véhicules portaient les croix sanglantes des véhicules des Rédempteurs, avec tout l’attirail macabre qui allait avec. Il y avait une dizaine de personnes encagoulées, en tenue de combat sombre, qui ricanaient en le regardant. La personne au centre portait simplement un complet avec chemise et cravate ainsi qu’un large chapeau de couleur noire : c’était le pasteur. Celui-ci s’écarta et tira sur une chaine, faisant passer devant lui un imposant zombie que Driss n’eut pas de mal à reconnaître : Banon. Non, cela ne se pouvait pas, il se souvenait de l’avoir achevé pour l’empêcher de revenir.
Lorsque les yeux de Driss se posèrent sur les personnes agenouillées, son cœur manqua un battement et il tomba à genoux. Tara et Jill étaient devant lui, les mains attachées dans le dos, couvertes de sang et atrocement défigurées. Jill sanglotait toujours et Tara avait les yeux perdus dans le vide.
Semblant s’apercevoir de sa présence, elles le fixèrent toutes les deux mais aucune ne sembla le reconnaître dans un premier temps. Puis une lueur d’espoir passa dans le regard de Tara et elle chuchota quelque chose à Jill qui s’arrêta alors de sangloter et le fixa comme si elle le voyait pour la première fois.

-Bienvenue Driss ! lança le pasteur d’une voix enjouée. Tu as mis le temps mais je suis content que tu nous aies rejoints à temps pour le grand final. Je m’étais pourtant montré miséricordieux, mais tu as choisis de me pisser dessus et de me quitter dans le sang et les larmes de mes douces brebis égarées. Peut-être que ce qui va suivre, te fera enfin reconnaître ta nature vile et pervertie d’homme, ajouta-t-il d’une voix remplie de mépris.

Pendant tout le discours, Driss avait fixé sa famille mais lorsqu’un bruit de chaine trainant au sol retentit, il redressa la tête et vit avec horreur que le pasteur avait lâché Banon et que celui-ci se dirigeait vers Jill et Tara en grognant.
Il regarda rapidement autour de lui, il n’y avait rien qui puisse l’aider, rien du tout. Il n’avait pas d’armes, la panique s’empara de lui. Il tenta de se relever mais ses jambes étaient comme paralysées, il réalisa qu’il allait assister à la mise à mort de tout ce qu’il avait de plus cher au monde.
Banon se jeta d’abord sur Tara et lui arracha la moitié de la gorge d’un coup de dent. Celle-ci ouvrit des yeux remplit de terreur et tenta d’articuler quelque chose mais vomit un torrent de sang à la place. Jill hurla et tenta de se traîner vers son père avec un regard suppliant mais il ne parvenait pas à bouger. Le regard de Tara devint terne et elle rendit l’âme. Le cœur de Driss se déchira.
Banon se releva ensuite et se dirigea vers Jill. La scène sembla soudain se dérouler au ralentit lorsque celui-ci empoigna Jill, la fit pivoter sur le dos et plongea ses mains décomposées dans le ventre de celle-ci. Le hurlement sa petite fille s’étrangla  lorsqu’il les en ressorti en tirant l’intestin et en le portant goulument à la bouche.
Quelque chose se brisa en Driss alors qu’il regardait le camionneur mâchouiller les entrailles de sa fille. Le pasteur avait gagné, il ne lui restait plus rien. Un flot de haine l’envahit : il fallait qu’il en finisse lui-même avec ce monstre qui se prenait pour l’instrument d’une colère divine quelconque.
Rassemblant toutes ses forces, il se releva et marcha d’un pas maladroit en direction de l’objet de sa haine.
Banon, sembla alors le remarquer et se redressa, menaçant. Driss choisit de l’ignorer, se concentrant sur Ferza, mais le zombie ne l’entendait pas de cette oreille car celui-ci s’élança vers lui.
La créature le percuta de plein fouet, l’envoyant au sol. En un éclair, l’immonde cadavre fut sur lui.

-Vois ce que tu as fait de moi, tu m’as abandonné, vois ton œuvre, fit la chose d’une voix désincarnée avant de planter ses dents dans la gorge du policier.

Un océan de douleur l’envahit et il ne se souvint pas à quel moment Banon avait été écarté mais il vit que le pasteur le surplombait, un sourire satisfait sur le visage.

-Bien, je pense que tu acceptes enfin ta vraie nature, te voici convertit mon fils et un grand avenir s’offre à toi, conclut-il avec un large sourire avant de se retirer dans l’hilarité générale.

Il y eut un violent coup de tonnerre, suivit de quelques gouttes puis d’une pluie dense. Driss avait tout perdu et la vie le quittait désormais à mesure que la mort le gagnait. Il aurait tant voulu pouvoir arriver à temps et les sauver toutes les deux, s’excuser de ne pas avoir été à la hauteur et de les avoir laissées se faire prendre… La pluie, le ciel et le monde s’évanouirent, laissant place à l’obscurité.

OOooOO

Driss se réveilla en sursaut. Il faisait noir et il lui était impossible de savoir où il se trouvait mais il était bien vivant. Une main tiède pressait doucement la sienne et se desserra lorsqu’il la bougea légèrement.

-Chéri ? chuchota sa femme d’une voix ensommeillée. Tout va bien ?

Son cœur bondit de joie en l’entendant, c’était donc bien un cauchemar. Il semblait cependant si réel, il frissonna au souvenir de ces horribles visions. Elle était juste à côté de lui, et c’est tout ce qui comptait pour l’instant.

-Oui, murmura-t-il en se tournant vers elle. Mais où est-on ?

-En sécurité, je t’expliquerai, répondit-elle en l’attirant pour un long baiser.

Le policier se laissa aller en la caressant doucement et savoura ce doux plaisir. Il n’y avait pas de doute elle était bien réelle. Il l’attira à lui et ils se blottirent l’un contre l’autre. Il lui caressa doucement les cheveux jusqu’à ce qu’elle se rendorme puis sombra à nouveau dans le sommeil.

-Debout les civils ! On lève le camp ! lança quelqu’un.

Driss ouvrit les yeux et découvrit un soldat en tenue de combat de couleur sable. Il se redressa d’instinct, sur la défensive.

-Ah, je vois que la belle au bois dormant est bien réveillée, parfait, lança le militaire avant de pouffer de rire et de se retirer.

Tara s’écarta doucement et entreprit de réveiller Jill. Driss s’assit difficilement et tenta de mettre son équipement antiémeute. Les bandages qu’on lui avait fait au visage le gênant, il entreprit de les retirer.

-Papa ! lança Jill en l’apercevant.

-Salut ma petite princesse ! répondit celui-ci sur le même ton en ouvrant les bras pour l’accueillir.

La petite vint s’y blottir et il la berça sous le regard affectueux de Tara. Les autres occupants de la cabane se réveillaient également et, grâce à la rai de lumière filtrant par la porte entrouverte, il put voir que tout le groupe confié à sa femme était présent : Rodolph, Eugene, Sam, Ethan, Leslie, Rob, Jim, Kim, Ted, ainsi que Lydia.

-Qu’est ce qui t’es arrivé ? s’enquit la petite avec hésitation en le dévisageant et en remarquant tous les bandages.

- De vilains messieurs ont voulu me faire de gros bobos mais j’ai pu leur échapper, fit-il avec un sourire qui voulait rassurant.

-D’accord, et tu promets de plus partir ?

-Je ne partirai plus, confirma-t-il en lui faisant un bisou sur le front.

-Bien, t’as intérêt. Et tant que j’y suis… ajouta-t-elle avec un air espiègle avant de lui donner une petite tape. C’est pour avoir dit que j’étais petite.

Tara pouffa de rire et Driss ne put s’empêcher de sourire. Il repoussa doucement la petite et entreprit de finir d’enlever le bandage qu’il avait. Le sourire de Tara s’effaça lorsqu’elle découvrit la cicatrice circulaire qui le défigurait, Jill qui était allé embêter Sam ne remarqua rien.

-Les enfoirés … gronda-t-elle entre ses dents avant de s’approcher de lui et de l’embrasser à pleine bouche.

Le policier fut quelque peu déstabilisé par la réaction de sa femme dans un premier temps mais décida finalement de profiter du moment et l’enlaça.

-Je vais t’aider à te préparer, fit-elle en s’écartant.

Les occupants de la cabane sortirent au fur et à mesure, Jill et Sam les premiers, et Driss et Tara furent les derniers à quitter l’endroit. Un groupe de soldat entra dès qu’ils en eurent franchit l’embrasure.
De petits aboiements joyeux l’accueillirent lorsqu’il fut à l’extérieur : le chien avait été attaché à un arbre et tirait sur sa corde pour venir lui faire la fête. Le policier se dirigea vers lui et lui caressa affectueusement la tête avant de retourner auprès de sa chère et tendre.
Driss et sa femme s’approchèrent du feu de camp main dans la main. Tout le monde avait commencé à se restaurer. Ils s’assirent à la place qu’on leur avait réservée et personne ne fit de commentaires sur l’apparence de Driss, même Jill qui lança pourtant plusieurs regards insistants à son père. Ils prirent tous leur café et le policier aperçut les trois 4x4 noirs auxquels étaient attelés des remorques que les soldats étaient en train de charger avec ce qui avait été entreposé dans la cabane. Il dénombra une dizaine de soldats et l’organisation de ceux-ci lui laissa penser qu’ils avaient affaire à une unité régulière, tout n’était donc pas perdu.

-Où sommes-nous et qui  sont ces gens ? demanda-t-il à sa femme.

-Ils nous ont capturés puis gardés sous leur protection après notre séparation, ce sont des militaires mais ils n’ont pas donné beaucoup d’information sur leur provenance. Ils ont vu ce que les Rédempteurs ont fait à notre convoi et m’ont donné un peu de temps pour que je te retrouve avant de continuer leur chemin.

-Je vois…

Un des soldats, le seul à porter une casquette, s’approcha.

-Veuillez me suivre, fit le soldat en arrivant à sa hauteur.

Le policier obéit et suivit le militaire. Celui-ci l’entraîna à l’écart du camp.

-Capitaine Olavski, garde nationale de l’Arkansas, se présenta l’officier.

-Driss Webster, ex-swat de Charlotte, Caroline du nord.

-Bien, il parait que vous étiez le leader du groupe que nous avons récupéré. Félicitations pour avoir maintenu tout ce petit monde en vie mais j’aurai besoin de vous pour continuer de les gérer là où nous allons.

-Pas de problèmes, j’ai l’habitude maint…

-Avant tout, coupa l’officier. J’ai besoin de savoir s’il y a des tensions spécifiques au sein du groupe ou des personnes instables.

-Pas à ma connaissance, répondit Driss, étonné par la question.

-Bien, parfait. Je serai curieux d’entendre le récit de votre captivité mais ce n’est ni le lieu, ni le moment, nous en reparlerons, conclut le militaire avant de tourner les talons et de retourner à ses occupations.

Driss n’avait rien voulut dire mais il n’avait pas vraiment envie de rester avec ces gens dont il ne savait pas grand-chose. Garde nationale ou pas, il restait méfiant. Les militaires, tous envoyés au contact des zombies ou en mission de protection civile, avaient été submergés tellement vite qu’il doutait que des unités aient pu rester opérationnelles si  longtemps. Cependant, il n’était pas en position de proposer quoique ce soit, en échange de leur départ, à son groupe : ils n’avaient plus de véhicules, plus de vivres. La meilleure solution consistait donc à rester avec ces gens qui s’étaient occupés d’eux pendant sa captivité. Il n’avait pas d’autre choix que de collaborer avec ces soldats pour le moment. Il revint vers le feu de camp.

-Une simple formalité, commenta le policier en captant le regard interrogateur de sa femme.

Il finit son café puis se leva en même temps que Tara afin d’aller l’aider à rassembler leurs affaires. Les autres étaient déjà occupés avec les leurs et les soldats continuaient leurs allers retours. Ayant désormais peu d’effets personnels, tout fut rapidement emballé et ils revinrent tous près du feu afin d’attendre les consignes suivantes. Le capitaine revint vers eux.

-Répartissez sur les plateformes des trois véhicules, lâcha-t-il. Nous allons bientôt nous remettre en route.

Driss, Tara et Jill se dirigèrent vers l’un des engins. Driss monta en premier sur la plateforme, aida sa femme à monter puis attrapa Jill et l’installa sur ses genoux afin de prendre le moins d’occuper le moins de place possible. Ethan monta avec eux, suivit de Jim, les autres se répartirent dans les deux derniers véhicules. Ils se serrèrent au niveau de l’habitacle. Les soldats finalisèrent le chargement et se répartirent également. L’un d’eux se glissa vers la cabine du véhicule et agrippa les poignées au niveau de la mitrailleuse placée sur le toit de celle-ci. Le chien fut détaché et fut placé sous la responsabilité de Lydia. Le capitaine fut le dernier à  monter après avoir fait le décompte de ses soldats.
Ce dernier s’installa dans l’habitacle du 4x4 de tête et les véhicules démarrèrent aussitôt. Le policier et sa famille se trouvaient dans le véhicule en queue du convoi. Les véhicules rejoignirent la route et prirent à gauche avant d’accélérer brutalement. La cabane s’éloigna rapidement dans le lointain et Driss se demanda où ils allaient bien pouvoir se retrouver. L’air froid de la matinée commençant à se faire sentir, il enlaça sa femme qui se laissa faire, et serra doucement Jill contre lui avec son bras libre. Cette position était peu confortable mais elle le permettrait de conserver un minimum de chaleur.
Les véhicules progressaient vraiment très vite et Driss se demanda depuis combien de temps ils n’avaient pas voyagés à une vitesse aussi élevée mais également s’il était bien prudent de maintenir un rythme de croisière aussi élevé. Il espéra que ce contretemps ne les éloignerait pas trop de leur itinéraire. Personne ne parlait et les moteurs des engins étaient les seuls à rompre le silence pesant. De quoi auraient-ils pu parler de toutes façons, il ne connaissait même pas les militaires et il ne se sentait pas d’humeur bavarde. Le paysage vallonné défilait rapidement : les champs laissant place à des complexes fermiers puis à nouveau à des champs. La route semblait bien dégagée et il ne distingua qu’une poignée de cadavres ambulants errants dans les jachères ainsi que quelques voitures, accidentées ou abandonnées, poussées dans le fossé.

Après un long moment, les véhicules ralentirent. Driss se demanda s’ils n’étaient pas arriver à leur destination mais le soldat debout sur la plateforme lui épargna des nœuds au cerveau en allant s’asseoir, laissant ainsi sa place à un autre soldat. Le conducteur du véhicule se retourna et le militaire qui venait de quitter son poste se pencha pour lui faire signe que tout allait bien, le pilote se retourna et le 4x4 reprit de la vitesse.
Les trois véhicules traversèrent en trombe un village abandonné, sans ralentir. Pourtant ce village n’affichait aucunes séquelles de quelconques mouvements de panique ou de scènes d’horreurs mais les dernières maisons s’effacèrent bientôt dans le lointain.
Les engins abordèrent une longue côte et, alors qu’ils abordaient la descente, un spectacle aussi impressionnant qu’inattendu s’offrit au policier dans le vallon situé en contrebas : des véhicules militaires de toutes sortes formaient un très large rectangle au centre duquel se situaient des camping-cars, des camions citernes et des tentes ainsi que d’autres véhicules militaires. L’ensemble occupait la majeure partie droite du vallon, à partir de la route.
Il pouvait distinguer des blindés identiques à ceux que possédaient les rédempteurs, la croix sanglante en moins, des hummers, des camions de transport. Il y avait là un vrai village mobile. Tous les véhicules avaient été équipés de « ramasse-lapin » bricolés, sûrement pour éviter que des cadavres ne viennent se loger dans les roues ou n’abiment la calandre des engins.
A mesure qu’ils s’approchaient, il pouvait distinguer des gens sortir des camping-cars et des tentes pour se diriger vers l’entrée du camp. Des tôles métalliques avaient été disposées le long des véhicules militaires délimitant la zone d’habitation, afin de former une protection minime contre les zombies, et des guetteurs se situaient sur certains de ces engins pour compléter l’ensemble.
La petite colonne qu’ils formaient s’engagea dans le vallon et longea le périmètre avant de ralentir et de s’engager dans un espace vacant entre deux véhicules. Son 4x4 cahota légèrement en quittant la route et s’enfonça dans le camp à la suite des autres. Plusieurs soldats replacèrent les tôles qu’ils avaient enlevées pour les laisser passer et reprirent leurs postes. Une foule de curieux s’étaient massés le long du parcours des engins. Il y avait là des hommes, des femmes, des enfants, des personnes âgées, des bébés. Toutes les catégories d’âges semblaient représentées.
Ceux-ci les regardaient tant avec méfiance pour certains, avec curiosité pour d’autres et échangeaient des mots à voix basse.
Le 4x4 stoppa net qui se trouvaient avec eux quittèrent aussitôt la plateforme. Ne connaissant pas trop la marche à suivre, Driss préféra ne pas bouger. Le capitaine vint finalement se placer à sa hauteur, accompagné par les autres membres du groupe.

-Vous pouvez descendre, ils ne vont pas vous manger, lança-t-il sur le ton de la plaisanterie.

Driss et ses compagnons et compagnes de voyages s’exécutèrent sous les yeux des spectateurs qui, ne savaient visiblement pas trop comment réagir non plus, et continuaient de les dévisager.

-Bienvenue dans le convoi de la dernière chance, ajouta le capitaine d’un ton joyeux qui surprit quelque peu Driss. Six-cents cinquante-sept âmes à ce jour !

 

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