Vers l'Innommable

Chapitre 3 : Lamae Bal

3820 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 09/11/2016 20:25

Il faisait presque nuit lorsque je repris connaissance. Ma tête avait heurtée une souche lors de ma chute. Elle me faisait atrocement souffrir.. Mais j'étais heureux de constater que mon esprit été redevenu clair, libéré de l'emprise malsaine que les yeux de du totem avaient sur moi. Je n'étais pourtant pas refroidi par cette expérience honteuse. Je n'avais fait que constater l'apparence du sanctuaire. Ce n'était que le travail préléminaire. La raison de ma présence ici était scientifique : je devais retourner l'étudier, rédiger mes hypothèses...

Je constatais alors l'absence de mes guides. Bien que je ne m'en souvenais pas, il était certain que ceux-ci avaient assisté à ma crise de folie. Mais aucun n'étais venu me secourir. Aucun ne se trouvait dans les environs. Leur aurais-je transmis ma panique ? Seraient-ils retournés à notre camp de base, à la cabane du chasseur sans plus se soucier de moi ? Je pestais contre leur couardise et leur égoïsme, et décidais d'aller jeter un oeil voir s'ils m'attendaient dans la clairière.

J'aperçu de la lumière en provenant. J'accelérais le pas dans un premier temps, croyant qu'il s'agissait d'un feu de camps allumé par mes compagnons. Mais mon oeur explosa dans ma poitrine lorsque j'entendis la rumeur de centaines de voix psalmodier un chant.

Je fais maintenant appelle à tout mon courage pour continuer à écrire. Ma main tremble sur la feuille. Et si je n'étais pas persuadé que mon témoignage pourra sauver des vies dans le futur s'il est entendu, j'abandonnerais aussitôt mon récit. Je ressentait jusqu'à cet instant une peur de l'inconnue somme toute banale, et une bonne dose de dégoût devant les éléments sacrilèges (cerfs, Hists, gemmes...) qui constituaient ce sanctuaire. Aucun mot ne pourrais décrire les sentiments que je ressenti ensuite. Quoique j'écrive ici, ce sera en dessous de la vérité.

J'étais trop loin pour comprendre les paroles du chant. Mû par une curiosité morbide qu'ô combien je regrette à présent, je m'approchais discrètement. Les voix provenaient de cercle intérieur, au plus près de la statue. Je courrais plié en deeux d'ombres en ombres, m'applatissant par moment contre le sol le temps de faire un nouveau point. J'escaladais les murailles successives, jusqu'à la dernière. Celle là, je la contournais jusqu'à atteindre une portion plus basse, d'un mètre de haut environ derrière laquelle je me dissimulais, et jetais un coup d'oeil intrigué à la scène. Qu'elle folie m'avais pousser à faire cela?

Un immonde rituel blasphématoire se déroulait au pied des degrès de pierre au sommet desquelles le totem régnait en maître sur la cérémonie. Je frémissais à la vue de telles horreurs. La centaine de participants se vêtaient tous de longues robes et manteaux noirs, une capuche dissimulant leur visage. Certains portaient des cagoules voir des masque à l'imitation de ceux des Ordonnateurs du Tribunal Dunmer. Les torches qu'ils portaient éclairaient un symbole peint sur le devant de leur robe, un effrayant  crâne blafard entourés de mains squelettiques. Le rituel ne semblait pas être organisé. Chacun paraissait faire ce qu'il lui plaisait. Mais tous chantaient le même hymne aux paroles incompréhensibles.

Ils se fouettaient, se roulaient dans la boue comme atteint de démence. Ils se prosternaient devant la statue sacrilège. Des femmes et de jeunes hommes furent violemment désabillés, et subirent d'atroces sévices sexuelles que la décence m'interdis de relater ici. Le pire étant que ces victimes avaient l'air "consentantes", et subirent la peine et l'humiliation sans se débattre ni chercher à s'enfuir. Je voulais fuir. Mon instinct me l'ordonnait. Mais j'étais malgré moi cloué ici.

Je notais que les officiants n'étaient pas seulement des Argoniens, mais que toute les races de Tamriel étaient représentées ici. Il y avait des Nordiques, des Bretons, des Bosmers, des Kahjiits...

Les plus proches, à une dizaine de pas de moi étaient manifestement dans un état de trouble. Je les voyais s'agiter, et renifler — je dis bien " renifler " —  dans ma direction, me forçant à me baisser en panique, mon coeur s'affolant dans ma poitrine. Mara soit louée, ils ne me virent pas — ou plutôt, ne me sentirent pas. Ce n'est que bien plus tard, en repensant aux évenement de cette nuit que je compris l'origine de mon salut : j'avais peu de temps auparavant rampé dans les charognes de cerfs. Leur odeur c'était mêlée à la mienne, la rendant impossible à distinguer de la puanteur du charnier.

L'orgie dura des heures sans que je puisse n'en détacher les yeux. Puis d'un seul geste, tout les cultistes cessèrent leurs activités et se regroupèrent à genou au pied de l'autel. Ils scandèrent leur chant obscène ne nouveau, si fort que je me bouchais les oreilles. Ma conscience ne pouvait accepter un telle abomination. Une femme se leva. Un groupe de cultiste accouru aussitôt faire de leur corps un escalier qui lui permis de grimper au pied de la statue, du haut de laquelle elle domina l'assemblée.

J'observais attentivement cette femme. Une allure de Nordique. Elle portait une robe blanche toute simple. Les lunes me révèlerent sa peau maladivement pâle, ses yeux rouges. Sa bouche tordue dans un rictus méprisant. L'assemblée scanda un mot, répété à l'infinie par une centaines de voix.

"Lamae Bal, Lamae Bal, Lamae Bal..."

J'eu un choc lorsque j'en compris enfin la signification. Cette... femme, était une vampire. Une créature monstrueuse ne vivant que pour tuer afin de continuer à vivre. "Lamae Bal"... La légende raconte que ce mot désigne la première vampire jamais créée. C'était autrefois une Nédique, une humaine de l'ancien temps prêtresse d'Arkay. Afin de nuire au Divin, le prince Daedra pervers Molag Bal s'empara de sa prêtresse, et dans son incommensurable cruauté, il la viola, la tortura, la mutila et la rejetta corrompue sur les terres de Nirn. Ainsi naquis le mal qui aujourd'hui gangrène notre société.   C'était impossible.... la statue était sculptée de manière très grossière, mais mon esprit ne pouvait s'empècher de trouver une nette ressemblance entre la figure féminine et la femme qui dirigeait le rituel. Toute deux portaient le même collier, le même sourire... La conclusion s'insinua dans ma tête. La femme ETAIT la figure féminine. Et la figure fémine ETAIT Lamae Bal, première vampire de Tamriel. Mais alors, la figure masculine n'était autre que...

Un nouvel évenement me détourna de mes pensée. D'un geste Lamae Bal convoqua un groupe de cultiste. Ils arrivèrent au pied de l'autel, traînant enchaînés une demi-douzaine de silhouettes nues. Je reconnus avec horreur mes guides argoniens. C'est donc là qu'ils étaient passés ! Les malheureux n'avaient pas fuis, ils avaient été capturés  par cette horrible secte!

Les vampires — car nul doute n'était plus possible : chacun d'entre eux était l'une de ses terribles engeances — les poussaient sans ménagement, avec brutalité. Ils avaient été désabillés. leur corp portait les traces de tortures sans nom. Mon coeur se serra de pitié pour ces pauvres gaillards que mon orgueil avait mené ici. Leurs geôliers les reniflaient avec un appétit morbide. Comme je m'en voulu cette nuit là d'avoir dévoré lorsque j'étais jeunes les ouvrages de la bibliothèque de l'université qui traitaient de la maladie du vampirisme ! Car je savais quel sort ces créature leur réservait.

On força mes guides à se mettre à genoux devant la terrifiante Lamae Bal, illuminée dans sa majesté. Les malheureux n'essayaient même plus de se débattre. Ils étaient brisés.

La vampire originelle parla, en langue tamrielienne cette fois-ci. Je compris chacun des mots qui sortirent de sa bouche maudite. Ils sont gravés dans mon esprit, mais je ne les coucherais pas sur le papier. Sachez seulement qu'elle prononça un discours chargé de haine, dans lequel elle condamnait les cinq argoniens à une mort lente et cruelle pour avoir osé s'aventurer ici.

Dès qu'elle se fût tue, Lamae Bal se métamorphosa. J'en restais tétanisé, et parvint tout juste à empêcher ma bouche de hurler mon horreur. Ce qui apparu devant moi n'avais plus rien d'humain. La peau de la vampire se déchira comme le cocon d'un papillon. Dans un craquement qui claqua jusque dans mon crâne, les os de son dos éclatèrent, et deux ailes pointues en jaillirent. Ses mains se changèrent en griffes puissantes. Sa tête se transforma en celle d'une gargouille mafaisante, chauve et à la peau huileuse. Elle était plus grande, maintenant qu'elle n'était plus prisonnière de son envellope corporelle. Voilà la véritable nature de Lamae Bal. Comment aurais-je pû prendre conscience que j'avais en face de moi le plus puissant vampire de tout les temps si je n'avais pas assisté à cette métamorphose ?

D'un saut, d'un simple battement d'elle, la chose bondit sur les prisonniers et en empalla un du bout de ses griffes. Mon pauvre camarade se débattait. Je voyais son visage figé de peur, de douleur et d'incompréhension. Lamae Bal se gorgea de son sang et le jeta au milieu de la foule lorsque qu'il en fut vidé.

C'était le signal. Les cultiste se jetèrent sur les autres avec une brutalité inimaginable, et se partagèrent cet odieux repas contre-nature. Seul l'un des argoniens fût tiré de ce massacre par l'intervention de Lamae Bal, avant qu'il ne lui soit fait le moindre mal. Je ne comprenais pas. Je à la fois envie de vomir, pleurer, crier, fuir. Mais je restais pétrifié derrière la muraille de basalt, les sens au ralentis.

La majorité de la foule n'avait pas fais un geste lorsque leur reine leur avait offert mes guides. Je compris qu'ils s'agissait de vampire d'un rang moindre, qui n'étaient pas autorisés à se mêler au festin cannibal. Mais un autre groupe survint alors, trainant avec lui une troupe appeurée de jeunes cerfs qui braillaient leur souffrance d'une manière à briser le coeur. Le reste des monstres impies insensible à la pitié se ruèrent sur les innocents animaux et les déchirèrent de leur dents exactement comme la caste supérieure l'avait fait avec les argoniens.

Le festin dura ce qu'il me sembla être des siècles. Lorsqu'il s'acheva, les cultistes décapitèrent soigneusement les cerfs et enterrèrent à moitié les têtes, laissant les bois dépasser. Quand aux restes de corps, ils les laissèrent pourrir sur place avec les autre. Il y eu ensuite un instant de vide, pendant le quel les vampire semblèrent se reposer. Puis ils retournèrent se mettre à genoux devant l'autel. Chose surprenante, leur reine se joignit à eux. Elles s'inclina également, tenant toujoursle dernier argoniens aux yeux fous entre ses griffes.

Tous levèrent les bras, et tous scandèrent un mot. Lorsque je compris le sens de ce mot, mon être entier se révulsa. Non, ç a ne pouvait être vrais.... Je refusais d'assister à ce que je devinais qui allait suivre. Je m'ordonnais de bouger mais mon corps s'y refusa, comme dans ces cauchemars où quelque créature affreuse nous poursuit, mais que nos jambes restent clouées au sol.

"Molag Bal, Molag Bal, Molag Bal..." hurlaient les vampires avec ferveur, les bras tournés vers l'idole.

J'espère de tout mon coeur le reste n'est qu'une vision apportées par la fièvre des marais et la puanteur de la clairière. Car si ce à quoi j'ai assisté s'avère être la vérité, les conséquence pour notre civilisation... sont au delà de toute prévision. Fait ou hallucination, voilà ce que je vis :

Le ciel se déchira dans un cyclone bordé de nuages d'un bleu glacial. Le bruit du tonnerre surpassa l'incantation des cultistes. Et un bras... un bras d'une taille colossale, plus massif que vingt fois la Tour d'Or Blanc traversa l'oeil du cyclone. Il était gris, d'une texture pierreuse. Un main immense aux griffes crochues, cyclopéennes, le terminait. Un voix parla, en provenance du cyclone. Cette voix s'insinua dans mon esprit comme l'avait fait les yeux de la statue un peu plus tôt. Je me bouchais les oreilles dans une ultime tentative de ne plus l'entendre, en vain. Elle était dans ma tête. Aurais-je été sourd que je l'eusse quand même entendue. Elle était aussi froide que la glace, pleine de haine et d'arrogance.

Je perdrais la raison si j'essayait de retranscrire ici ses paroles. La voix était heureuse de voir ses serviteurs à genoux. Il se gorga de la peur qu'elle lisait dans le regard du pauvre guide argonien. Je compris pourquoi Lamae Bal l'avait préservé du massacre de ses camarades. Elle gardais celui-là comme tribut à son maître, l'horrifiant prince Daedra dont le nom n'est jamais que murmuré, la voix emplie de peur : Molag Bal, seigneur de la domination.

Il parla "d'ancres" dont la construction profressait partout sur Tamriel. Je frémis en essayant d'imaginer de quelle sorcelerie il pouvait bien s'agir. Il évoqua bien d'autre chose, sur lesquelles je reviendrais à la fin de mon récit. Car elles sont au coeur de la mise en garde qu'est ce témoignage.

Le maître dialogua un instant avec sa servante Lamae Bal, qui gardait le front enfoncé dans la boue en signe de soumission. "Nirn sera bientôt à vous, monseigneur", affirma la vampire à un moment. Quel sens donner à ses paroles ? Puis la main gigantesque s'empara de l'argonien, avec délicatesse. Le pauvre était minuscule au milieu de ce poing au delà de toute échelle qui l'emportait vers l'oeil du cyclone. J'en vint à envier le sort qu'avais subis ses camarades. Les tourments que Molag Bal faisait endurer à ses victimes, nul n'est assez téméraire pour les évoquer à voix haute.

Le bras disparu dans l'oeil du cyclone, emportant son prisonnier hors du domaine des mortels. J'en ressentis un profond soulagement. C'était terminé. Le corps secoué de spasme, je forçais mes jambes à bouger. Enfin elles acceptèrent ! Titubant, trébuchant, je couru vers l'orée de la forêt. Mais ce n'étais pas terminé. Un bruit assourdissant retentit dans mon dos, et je me retournais paniqué pour voir des météores nimbés de flammes d'un bleu glacial jaillir du cyclone. J'accélèrais ma course en voyant qu'ils allaient s'écraser sur toute la surface de la clairière. J'atteins les arbres lorsque les premiers touchèrent le sol.

J'avais prévu de fuir, mais je ne pût m'empècher de rester encore un peu pour voir de quoi il s'agissait, depuis le couvert de la végétation. D'horribles créatures cauchemardesques surgirent des impacts, comme une armée surgie du sol. Des géants semblable à des amas de chair difforme et boursouflée, des statues de glaces animées, des roches vivantes et graciles, d'imposants guerriers en armure noire, des chimères ailées... trop, trop pour que je ne puisse les décrire.

J'eu alors la réponse à la question qui m'avait tant taraudé plus tôt dans la journée :à l'aide des vampires, ils créérent des portails à travers lesquels ils firent léviter des blocs de basalt qu'ils empilaient ensuite sur les murailles concentriques. Voilà comment elles aveint été construite. J'avais dis qu'aucune civilisation ne disposait de la technologie pour y parvenir. C'était oublier les civilisations blasphématoires prospérant en dehors de notre monde.

S'en était trop. Cette fois je pris la fuite, sans me retourner. Je couru à travers les marais en riant comme un démiurge. Je ne m'arrêta pas à la cabane du chasseur, mais sautais directement dans le bateau qui nous avais mené jusque là. Trois jours durant, je restais debous sur la barque, à manoeuvrer la perche. J'étais déshydraté, au bord de l'innanition et de la crise de paludisme lorsque des pêcheurs me trouvèrent.

Inquiets par mon état, aussi bien physique que mental, ils me conduirent au temple d'Arkay de la ville de Gidéon. Les prêtres trouvèrent sur moi une liste de contacts. Mon ami marchand, celui-là même qui avait trouvé le journal du chasseur argonien vint en personne me rapatrier en Cyrodiil. Ma femme fit le voyage également, mais resta m'attendre à Leyawiin.

Il me fallu longtemps pour me remettre de la dépression qui suivit ces événements. Je put heureusement compter sur le soutient sans faille de mes proches, en particulier de ma femme qui fit preuve d'un courage admirable. Je n'ai jamais eu la force de lui avouer réellement ce qu'il s'est passé au cours de mon expédition dans le Marais-Noir. Elle le découvrivra en lisant ces lignes.

Lors de sa discution avec Lamae Bal et ses fidèles, Molag Bal a évoqué la constructions "d'ancres" sur toute la surface de Tamriel. Il a utilisé le mot "coalescence", et a dit "les mortels crouleront sous le poids de leurs propre morts". Le fait qu'il se soit déplacé en personne n'est pas anodin. Et la construction dans cette clairière d'Argonie et sans nul doute l'une des ancres dont il a parlé. Ce sont des faits inquiètants qui tendent à prouver que le culte de Molag Bal est actif, et qu'il prépare quelque chose de grande envergure.

Je supplie les autorités compétentes, Légion, milices locales, Guilde des Guerriers de prêter l'oreille aux rumeurs qui naissent aux quatres coins de Tamriel. Il faut envoyer des troupes préparés partout où peuvent se trouver ces ancres et éliminer sans aucune pitié les sectataires qui se regroupent autour avant qu'elles n'aient le temps de représenter un danger.

Je vous conjure d'entendre ma mise en garde, de croire mon témoignage. Car il est trop réel pour n'être que le fruit d'une vision. De sombres années se profilent à l'horizon. Notre Empereur légitime a disparu. L'Archipel d'Automne, Val-Boisé et les Royaumes d'Elsweyr se sont proclamés en Domaine Aldméri, tandis que Skyrim, Morrowind et le Marais-Noir ont reformés le pacte qui les unissaient lors de l'invasion akaviroise. La guerre semble inévitable. Je supplie les peuples de Tamriel à faire preuve d'unité, car une menace plus grande encore s'élève en ce moment même derrière le voile d'Oblivion et dans la brume de vos marais. Ne perdez pas de vue notre véritable ennemi.

 

 

 

Professeur David Ontus, spécialiste émérite des cultes Tamrieliens.

Laisser un commentaire ?