Trafic

Chapitre 6 : Rencontres en altitude

Catégorie: K+

Dernière mise à jour 10/02/2009 19:20

 

Chapitre cinq
 
Rencontres en altitude
 
 
Tony DiNozzo reprend son souffle. Courir comme un dératé n’est vraiment plus de son âge… à moins qu’un petit régime sans pizza ne s’impose ?
Lorsque Tony avait repris ses esprits, Sheppard et Gloria montaient dans l’avion. Sans réfléchir, Tony s’était donc élancé dans l’espoir de s’y accrocher. Quelle idée stupide !
Après un tour en hélicoptère, le voila tenté par une expédition de haute voltige. Heureusement pour DiNozzo, le Piaggio s’était tout d’abord mis dans l’axe de la piste, effectuant une rotation de quinze degrés sur sa droite. Ainsi mis hors de portée visuelle, l’agent du NCIS avait pu approcher de la porte d’accès et subrepticement pénétrer dans la carlingue. Là encore la chance était de son côté. Le compartiment arrière était vide d’occupant et ni Gloria, ni le militaire n’avaient prêté attention au bruit métallique de la porte. Trop accaparés par les manœuvres de Sheppard puis par le décollage, les deux trafiquants n’avaient pas quitté la cabine avant. Comment auraient-ils pu, ne serait-ce qu’imaginer, la présence d’un intrus ?
 
Le cockpit est isolé du compartiment arrière par une fine cloison. Quelques centimètres qui séparent les méchants, leur otage et le gentil flic.
Une discussion animée oppose les passagers du P180 Avanti II et fait écho dans tout l’avion.
- On se pose et on le tue !
- Calme-toi Gloria. 
Le capitaine tient fermement un zat’nik’tel dans sa main. Gloria discute comme si Sheppard était quantité négligeable dans le cockpit mais le capitaine, lui, ne le lâche pas des yeux.
- Que veux-tu qu’il fasse ?
- Rien, je n’en sais rien ! Mais je te dis que ce type est dangereux, il faut le tuer et maintenant !
- Ok et qui pilotera le Piaggio ? Toi peut-être ?
- Et ton copain ?
- Mon copain, comme tu dis, ne va pas tarder à arriver sur l’aérodrome…tout comme la police !
- D’accord, d’accord, je n’ai pas la solution, mais Sheppard me donne la chair de poule. Ce type est dangereux.
 
Gloria est debout, légèrement en retrait entre les deux sièges du cockpit. John Sheppard est installé aux commandes de gauche et le capitaine est à droite, assis de biais sur le siège du copilote. Sa position lui permet de surveiller Sheppard. Ce dernier est particulièrement calme depuis le décollage.
Le capitaine interprète ce silence comme de la résignation mêlée aux plaisirs de la navigation. En tant que marin, il connaît les sensations d’ivresse que procure la maîtrise d’une telle technologie. Gloria quand à elle est persuadée que la concentration de John cache une intense réflexion à visée défensive.
Tout deux sont dans le vrai.
 
John ne fait plus qu’un avec la machine. Les vibrations, le ronronnement des moteurs et tous les petits craquements de tôles sont autant de signaux traduisant la vie de l’appareil. Une existence chimérique dont le pilote est imprégnée jusqu’au plus profond de son être. L’espace habitable du cockpit ainsi que le compartiment arrière font unité avec Sheppard. Chaque particule d’air, chaque molécule ou atome forme un tout dont la moindre modification est perceptible par l’ensemble. Aussi lorsque la porte arrière s’est ouverte puis doucement refermée, cela n’a pas échappé au prisonnier. Si Gloria et le capitaine de la Navy ignorent la présence de Tony DiNozzo, ce n’est pas le cas du pilote aguerri qu’est le colonel John Sheppard. Au moment du décollage, John était soulagé car il avait un plan. Maintenant tout est à refaire. Pourtant la finalité n’est plus la mort mais l’espoir. 
 
Tony inspecte les lieux à la recherche d’une stratégie.
Plusieurs caisses sont accessibles mais il ignore l’effet que produiraient ces étranges armes sur les cloisons de l’avion. Il en est de même de son 357. L’arme « empruntée » à Stilton est particulièrement lourde et difficile à manier. Pourtant cela ne pose aucun problème à Tony DiNozzo. Entre l’agent et le 357, c’est une longue histoire d’amour. Tony connaît l’arme sur le bout des doigts. Il connaît son poids, sa puissance et sa vitesse de frappe. 371 mètres par seconde, de quoi surprendre le premier adversaire venu. De quoi surprendre surtout l’utilisateur non initié.
Tony ignore de quel côté se trouve Sheppard. S’il tire à l’aveuglette, le projectile traversera la fine cloison, ce qui ralentira fortement sa vitesse mais ne l’empêchera pas d’atteindre une cible de l’autre côté. Une blessure sans doute moins grave qu’en impact direct, mais sûrement suffisante pour immobiliser un adversaire. Le risque de blesser son ami est trop important. D’autant que sans Sheppard, l’avion est voué au crash. DiNozzo prend donc le parti d’attendre qu’un des trafiquants franchisse la porte. Il choisit son angle de tir afin d’atteindre sa cible sans risquer une balle perdu dans le cockpit.
L’attente commence. Stressante. Longue. Enfin, pas tant que ça finalement.
 
A peine dix minutes se sont écoulées quand la porte s’ouvre. Gloria fait son apparition dans le chambranle puis avance tout en laissant la porte de cloison ouverte.
Tony hésite. Malgré ses précautions, s’il tire maintenant, il risque d’atteindre la verrière et il ignore si celle-ci résisterait à l’impact.
Quelles en seraient les conséquences ? Trop d’inconnues dans l’équation. Trop de doutes. Tony décide d’attendre une meilleure opportunité. Celle-ci ne tarde pas à se produire.
Gloria pénètre plus profondément dans le compartiment et s’engage dans la petite cabine faisant office de sanitaires. Sournoisement, Tony se glisse devant la porte fermée à clé de la cabine. Il est tiraillé entre une irrésistible envie de rire et une non moins impérieuse envie de meurtre. L’image d’une Gloria sadique et dominatrice, tuée d’une balle en pleine tête alors qu’elle est assise sur la lunette des toilettes, a un petit goût sucré de douce vengeance.
L’image lui rappelle immédiatement celle de Pulp Fiction lorsque le tueur à gage, en l’occurrence Travolta, se fait descendre. Il visualise la scène en ajoutant le joli minois de Gloria à la place de celui de l’acteur.
Hum… finalement, ce n’est pas si mal.
Galant, Tony souhaite laisser une chance à Gloria. C’est du moins la version officielle qu’il donne à son cerveau. Mais la partie cachée de son esprit, celle qui fait passer le boulot avant les nanas (partie particulièrement bien camouflée), sait qu’en fait, DiNozzo souhaite garder en vie les trafiquants afin de remonter la filiale. Il prend donc la seule solution possible, foncer dans le tas... ou plutôt dans Gloria!
D’un magistral coup de pied, il fait voler en éclats la porte qui isolait la belle. Surprise, Gloria relève la tête et regarde fixement Tony. Elle le regarde mais ne réagit pas. L’étonnement arrête également DiNozzo dans son élan. Gloria n’est pas du tout en train de satisfaire un besoin impérieux, du moins pas celui imaginé préalablement par l’agent du NCIS.
En fin de compte Pulp Fiction était une bonne évocation.
Gloria porte un garrot légèrement serré au-dessus de son coude gauche. Elle regarde bêtement l’agent, la seringue bien en main et l’aiguille toujours plantée dans sa veine turgescente.
Gloria navigue dans les songes euphoriques de la drogue. Surpris Tony tarde à réagir. Ce n’est pas le cas du capitaine qui s’est immédiatement redressé lorsque Tony a "délicatement" ouvert la porte de la cabine. Le militaire se précipite sur DiNozzo avec la ferme intention de lui tirer dessus, qu’importent les conséquences sur l’avion. Mais l’avion ne semble pas du tout d’accord pour se laisser faire. Avec rudesse il fait une embardée propulsant tout ses occupants sur son flanc droit. Une brutale chute de palier fait « voler » les malheureux qui se relevaient à peine. Un nouveau changement de cap achève de désorienter les passagers.
Dans le cockpit, Sheppard, bien sanglé sur son siège n’a pas souffert de ses manœuvres hautement risquées. Un rapide coup d’œil derrière son épaule lui apprend qu’il est arrivé à ses fins. Désarmé, le capitaine est couché à même le sol. Un petit filet de sang prend naissance dans son cuir chevelu et s’écoule lentement le long de sa tempe. Sonné, il n’y prête pas la moindre attention et secoue doucement la tête pour chasser son trouble et retrouver ses esprits. Près de lui, Tony est également un peu désorienté. Gloria quand à elle semble perdu dans une autre dimension. Sheppard ne quitte pas ses instruments de vol. Il a fait un demi tour en direction de l’aérodrome, espérant y trouver de l’aide tant au sol que dans les airs.
- Tony, secouez-vous ! Je ne peux pas lâcher les commandes. J’ai fait ce que j’ai pu, maintenant c’est à vous de jouer.
 
La voix de Sheppard secoue autant DiNozzo que le capitaine. Tout deux se relèvent en même temps et se font face. Le capitaine cherche du regard son zat’nik’tel disparu quelque part au fond de la cabine. Tony a également perdu son magnum pendant les violentes secousses.
Les deux hommes se regardent avec la même résignation. D’un geste magnifiquement symétrique ils extirpent une lame l’un de sa chaussure, l’autre de sa ceinture, et la brandissent triomphants. La lame de Tony conserve quelques traces du sang frais de Stilton. Le capitaine se méprend quand à son origine, pensant qu’il s’agit de celui de Gloria. Cela ne l’émeut pas pour autant. Il sourit en faisant danser son couteau d’une main à l’autre. Un petit jeu qui effraie sans doute le malfrat basique au(x) neurone(s) ramolli(s), mais pas un Tony DiNozzo qui entre Baltimore et Philadelphia, en a connu d’autres.
Furieux de l’échec de son petit manège, le capitaine lance la première attaque. Un coup brutal et franc qui ne rencontre que le vide. Tony embraye aussitôt sur un coup que le trafiquant bloque d’une magnifique parade. Lame contre lame, leurs corps se rapprochent jusqu’à se frôler. Tony sort alors sa botte secrète. Une technique imparable dont il partage visiblement l’exploitation outrancière avec Sheppard, le sourire charmeur, celui qui déstabilise tout adversaire.
- Vous connaissez West Side Story? 
Devant l’air ahuri du militaire, Tony commence à fredonner des paroles très légèrement modifiées.
 
Gloria, I've just met a girl named Gloria.
And suddenly that name will never be the same to me.
Gloria! I've just killed a girl named Gloria,
and suddenly I've found how wonderful a sound can be.
Gloria! Say it loud and there's music playing.
Say it soft and it's almost like praying.
Gloria, I'll never stop Killing Gloria!
 
Sans laisser le temps à Tony de finir son couplet, le capitaine se jette sur lui et tout deux tombent violemment au sol.
Sheppard regarde le combat qui se déroule maintenant sur le plancher de l’appareil. Il n’ose pas brusquer l’avion de peur de faire pencher la balance du mauvais côté. Tel qu’il le voit, le corps à corps est si extrême qu’il lui est impossible de savoir qui fait quoi. Seuls des râles et gémissements sont perceptibles. Un cri puis un second vient clore le combat. Le capitaine est allongé sur Tony. Aucun des deux ne bouge. Du sang commence à s’écouler sur le sol, dansant de gauche à droite selon l’inclinaison de l’appareil.
Subrepticement d’abord, puis avec plus d’énergie, une main commence à se dégager de l’étreinte. Sheppard ignore qui en est l’heureux propriétaire. Enchevêtrés comme ils le sont, Tony et le militaire sont d’un simple regard, absolument indissociables.
La main se balade sur le sol puis sur le dos du capitaine pour enfin attraper sa veste et le tirer sur le côté. Tony se libère enfin du poids mort de son adversaire. Il prend une profonde inspiration puis se redresse et sourit à Sheppard. Il tient toujours fermement son couteau au ridicule manche en bois de cerf. La lame dégouline du sang du capitaine… à moins que ce ne soit celui de Tony.
Plus DiNozzo s’avance plus il devient évident qu’il est lui aussi blessé.
- Tony, ça vas ?
- Coriace, le bougre ! 
Il regarde son T-shirt éventré et examine sa blessure. La grimace qu’il fait à cet instant est plus de l’ordre de l’agacement que de la douleur.
-  Il a réussit à m’avoir. Bon, c’est superficiel de toute façon et….quoi ?! 
Sheppard a blêmit. Sans lâcher ses commandes, il tend sa main gauche en direction de Tony, présentant la paume dans un signe d’apaisement.
-  Gloria, pose ça tout de suite. Gloria, tu m’entends ? 
 
Gloria n’est pas contente du tout. Elle vogue au milieu de nuages roses, verts ou bleutés et subitement voila que le rouge imprègne son rêve éveillé. Du rouge brute et violent, une couleur que l’on dit chaude mais qui lui glace le sang. Devant elle, Tony et John ne sont que des auras aux contours abstraits. Des coups de crayons jetés sans aucun talent par un artiste sans âme. Gloria est furieuse contre celui qui a eu l’outrecuidance de briser l’harmonie de son trip. Sans vraiment capter la nature de l’instrument qu’elle a en main, Gloria, met en joue DiNozzo.
-  M’avez gâché mon trip ! 
DiNozzo n’a pas besoin de voir pour comprendre ce qui se passe derrière lui. Il fixe son attention sur Sheppard. Il sait que le moindre faux mouvement peut amener la junkie à tirer. De toute façon, il se fait peu d’illusion quand à l’issue de cette confrontation. Reste à savoir quand agir. Le regard de Sheppard est le seul miroir reflétant la tension qui noue les trois protagonistes. Soudain une petite étincelle s’allume dans l’œil de John. Une fraction de seconde durant laquelle tout se joue.
Tony se laisse tomber sur le côté… lequel choisir ? Allez, au hasard, la droite !
Gloria appuie sur la gâchette et le Desert Eagle éjecte sa balle. La puissance de l’arme est telle que Gloria perd l’équilibre et s’écroule lourdement sur le sol. Le regard vide, l’écume aux lèvres, elle termine ridiculement son bad trip. Le magnum repose fumant à ses côtés. Tony DiNozzo s’en empare promptement. Sans ménagement, il ficelle les bras de la belle qui réagit verbalement par des monosyllabes sans aucun sens.
Enfin rassuré, DiNozzo rejoint Sheppard dans la cabine avant et se laisse tomber lourdement sur le siège copilote. Sheppard tente de faire fonctionner la radio récalcitrante.
- Je n’accroche aucun contact pouvant nous aider. Tony, regarde devant là-bas, tu vois la piste ? 
 
La nuit a gagné la région. Forêts, montagnes, tout n’est que pénombre et dégradé de noir. Aucune ville en vue, rien que du noir, du gris et une piste éclairée par les gyrophares de la police et ceux des pompiers.
- C’est celle d’où on est partie ? Tu as fait demi-tour ?
- Bravo !
- Aucun mérite. Entre l’incendie et les lumières des voitures de police, c’est difficile de se tromper. Dis-moi, ça t’arrive de passer inaperçu ?
- Pas ces deux dernières années. Tony, tu as vu Ultime décision avec Kurt Russel ?
- Oui, superbe film de 1996 de Stuart Baird.
- Mouais. Tu te souviens de la fin ? 
Si la conversation ressemblait à une discussion mondaine, elle prend tout à coup une allure bien plus désagréable. Pour la première fois depuis l’arrestation de Gloria, Tony DiNozzo regarde franchement Sheppard. Jusqu’à présent, il n’avait pas eu le moindre moment de répit pour examiner de près son nouvel ami. Et ce qu’il voit ne le rassure absolument pas.
Sheppard est livide. Ses mains sont crispées sur les commandes avec tant de hargne que les jointures sont encore plus blanches, si c’est possible, que le reste. Une pellicule de sueur recouvre tout son front et ses yeux brillent étrangement.
- John ? Qu’est-ce qui se passe ?
- Je crois que tu vas devoir faire Kurt Russel. 
Tony ne comprend pas l’allusion. Ou plutôt ne veux pas comprendre.
- Et toi, tu fais qui ? Halle Berry peut-être ? 
- Aï, ne me fais pas rire. Prends les commandes.
- C’est hors de question.
- Écoute-moi bien. Je ne vois déjà plus grand-chose, excepté des points brillants qui me rappellent mon premier grand huit. 
D’une main, Sheppard abaisse un levier et pousse plusieurs boutons. Sa main tremble.
- Le train d’atterrissage est sorti et les volets sont ouverts. Tu restes dans l’alignement. Si tu rates l’atterrissage, remets les gaz à fond et reprends de l’altitude. Regarde cet écran, il indique ton assiette et celui-ci ta vitesse…
Tony fixe la piste qui d'un coup lui semble bien trop proche.
- John, ne me fais pas ce coup-là, ça ne m’amuse absolument pas ! Qu’est-ce que je fais avec la vitesse ? Elle doit être de combien ? John ?! 
Tony se tourne vers son pilote et réalise que Sheppard est inconscient. Il s’est effondré, la tête entre ses mains qui restent agrippées aux deux poignets du manche. Ce n’est qu’à ce moment que Tony DiNozzo remarque la trace rouge vif qui s’étale dans le dos de Sheppard. Finalement Gloria aura réussi son coup. Paniqué, Tony secoue Sheppard sans ménagement… et sans succès.
- John !! 
Aucune réponse de l'intéresse mais réaction immédiate de l’avion. Celui-ci plonge en piquet vers la piste. A deux mains, Tony tente de redresser l’appareil mais bien que très maniable cela nécessite un minimum de connaissance que Tony n’a pas. La piste se rapproche dangereusement. Des lumières rouges et bleues clignotent au sol. Tony distingue nettement les camions de pompiers et les voitures de police qui se dessinent avec de plus en plus de détails.
Une dernière pensée pour Sheppard.
- J’aurai préféré Halle Berry. Elle est vraiment plus sexy ! 
Une dernière pensée puis un flash blanc éblouissant suivit immédiatement après par une explosion au sol.
 
 
Six heures plus tôt
 
Une superbe main. Enfin !
McKay est aux anges. Depuis le début de la partie, c’est son premier jeu un tantinet correct. Une quinte, de quoi se refaire une santé et écraser ces militaires arrogants. D’un geste désinvolte il jette un jeton en l’air. La relance tombe sur le tapis dans un bruit strident. Ébahi, McKay regarde le jeton, l’examine sous toutes les coutures. Alors qu’il le tient bien en main, la sonnerie recommence. Le jeton vole à nouveau, pour le plus grand plaisir des militaires.
- Du calme doc, ce n’est que la radio. C’est étonnant car nous ne devions pas prendre contact avant plusieurs heures. 
Le caporal Butch, un militaire du Daedale, jette un regard noir à McKay.
- J’espère que votre copain n’a pas encore fait des siennes. 
Rodney prend son air le plus outré. Grande performance d’acteur.
- Évidement que non. Que voulez-vous qu’il lui arrive, seul en haute montagne ? Qu’il fasse exploser la montagne avec du C4 ?
Le sergent Chester rejoint le groupe, la radio toujours collée à son oreille.
- C’est pourtant ce qu’il a fait. 
McKay est scotché à la table, carte en main. L’inquiétude le gagne.
- On ne va pas arrêter la partie maintenant ? 
Le sergent s’énerve et hausse d’un ton.
- Vous voulez rester jouer pendant que le lieutenant-colonel Sheppard se débat dans les em…nuies ? A votre convenance !
- Parce que vous ne plaisantiez pas ?
- Est-ce que j’ai l’air d’un plaisantin ? 
A bien y regarder, le sergent Chester ressemble davantage à un bulldog en uniforme de l’armée qu’à un showman en représentation.
 
Rodney McKay lâche sans regret sa main et prend son ordinateur portable.
- Où allons-nous ?
- Un hélico nous attend dehors, il va nous conduire sur place. Caporal Butch, vous venez avec nous. 
Tous trois sortent précipitamment du douillet chalet pour affronter la nuit canadienne.
Le sergent Chester porte une combinaison militaire de montagne qui ne diffère que par l’écusson du Deadale et le drapeau écossais. Butch à la même tenue, affublée d’un drapeau canadien. McKay quand à lui, est vêtue d’une tenue classique de ski, blanche avec des étoiles rouges sur un bras. Seul son ordinateur exhibe le symbole Atlante. A côté des deux militaires, il fait vraiment touriste. Si on excepte son air soucieux et les plis qui froncent son front.

 
Comme prévu un hélicoptère de l’armée canadienne les attend pour les conduire sur les lieux. Une fois sanglé et équipé, McKay ose enfin interroger le sergent Chester.
- Que s’est-il passé ? Où est le colonel Sheppard ?
- Je n’en sais rien. On nous a juste prévenus qu’il y avait eu une explosion dans le restaurant d’altitude où il était censé déjeuner. D’après les experts déjà sur place, l’incendie est criminel. En fait, il souhaite notre présence pour reconnaître un corps qu’ils ont trouvé non loin de là.
- Un corps calciné ? On ne pourra pas faire la moindre identification !
- Non, un corps visiblement écrabouillé… sans doute jeté d’un avion ou plus probablement d’un hélicoptère. 
McKay regarde le sol rocailleux et partiellement enneigé qui défile sous ses pieds.
- John ? Mais qu’aurait-il fait dans un hélicoptère?
- Je vous le demande. Vous le connaissez mieux que nous. 
McKay et le militaire laissent la conversation mourir d’elle-même. Toutes sortes d’hypothèses courent dans le cerveau survolté de Rodney et aucune n’est agréable.
 
L’hélicoptère se pose doucement. La manœuvre est délicate. Un silence de plomb règne dans l’engin. Silence aussitôt suivit par un soupir de soulagement émanant du scientifique.
Soulagement de courte durée. Dès ses premiers pas à l’extérieur de l’appareil, Rodney réalise l’ampleur de l’incendie. Tout à coup tout semble devenir réel, la disparition de John, sa mort possible et même probable.
- Dans quel guêpier s’est-il encore fourré ?! 
La question est formulée à voix haute mais n’a pour destinataire que son chagrin et sa révolte. Pourtant une réponse lui parvient. Calme, posée, énoncée sans la moindre émotion apparente.
- Dans un trafic d’armes appartenant à l’armée. 
Furieux, McKay se retourne et apostrophe l’homme qui lui fait face.
- Le colonel Sheppard n’est pas un trafiquant. Si nous sommes sur T… au Canada en ce moment, c’est purement du au hasard.
- Calmez-vous docteur McKay. J’ai effectivement ouï dire que le colonel Sheppard avait l’art de mettre les pattes où il ne fallait pas. 
L’homme garde le même visage fermé et inexpressif. Sa phrase pourrait être insultante mais elle est au contraire rassurante. Une froide logique qui réchauffe le cœur du scientifique.
- C’est vrai, oui… Qui êtes-vous ? 
L’homme s’avance de plus près. Cheveux grisonnants, coupe réglementaire, l’homme est assurément de la maison. Reste à savoir de quelle maison. Il tend une main ferme et franche au docteur McKay qui l’accepte sans sourciller.
- Je suis Leroy Jethro Gibbs, du NCIS. Un de mes hommes est également porté disparu. 
Il esquisse un sourire si discret que Rodney n’est pas certain de l’avoir vu.
- C’est un peu comme votre ami. Toujours dans les ennuis. Mais c’est un excellent agent.
- Tout comme John… je veux dire, comme le colonel Sheppard. On peut lui faire confiance pour se tirer des pires problèmes…
Il termine sa phrase plus pour lui-même.
- …mais pas toujours en un seul morceau.  

Laisser un commentaire ?