Amiral. M
BUREAU DU CHEF DE L’ÉTAT, ROTONDE DU SÉNAT,
CORUSCANT
Dans le tic-tac assourdissant de l'antique pendule du bureau, le chef d’état de l’Alliance Galactique toisait les membres de son cabinet militaire. Le ministre de l'Économie détourna les yeux, l'air mal à l'aise, mais l’amiral Cha Niathal et le colonel Jacen Solo affichaient une expression proche du défi.
— Vous plaisantez ? demanda le président Omas d'une voix tendue.
— Malheureusement non, répondit Derine, la mine sombre. Il fouilla dans ses mémopuces, puis fit un effort pour croiser le regard du président. « Les trois derniers trimestres confirment tous la projection. » De biais, il lança un coup d'œil assassin à sa collègue militaire. « C'est le budget naval. On ne peut pas continuer à construire des bâtiments à la cadence actuelle sans ...
— Si on ne continue pas à en construire, le coupa sèchement Cha Niathal, tout s'effondre. Nous sommes assis sur une bombe emballée, chef d’état. Le tiers au moins des planètes occupées de la confédération abritent des groupes de cinglés qui exigent la "libération" de leur monde, et, comme si ça ne suffisait pas, tous nos voisins comme Hapes ou les Chiss s'arment à outrance. Ce n'est qu'une question de temps avant que l'un d'eux nous tombe dessus.
— j'ai l'impression que vous noircissez le tableau, Cha, intervint Grim Bergren.
Le ministre des Affaires étrangères lissa sa moustache si fine qu'on l'aurait dite dessinée au pinceau et fronça les sourcils.
— Nos voisins s'arment, c'est exact – j'en ferais autant à leur place –, mais aucun n'est assez puissant pour nous attaquer.
— Pour l'instant, peut-être, dit le colonel Jacen Solo d'un ton lugubre; cependant, si nous nous retrouvons impliqués quelque part ou si une révolte majeure éclate, certains seront tentés d'essayer un coup de main. Voilà pourquoi il nous faut davantage de bâtiments. Et, avec tout le respect que je dois à monsieur Derine, ajouta Jacen d'un ton qui n'avait rien de particulièrement respectueux, ce n'est pas la flotte qui grève le budget, mais l'allocation du minimum vital. Il va falloir expliquer aux allocataires que tout tonneau a un fond et les convaincre de cesser de boire comme des trous en attendant que nous nous remettions sur pied. Si nous pouvions nous débarrasser de ces parasites ne serait-ce que quelques années...
— Oh, l'excellente idée ! gronda Derine. Tout comme l’idée de lancer un raid sur Corellia pour affaiblir ses infrastructures militaires, n’était-ce pas vous Jedi Solo qui avait certifié que cette action ramènerait le système Corellien à la table des négociations ?
— Messieurs cela suffit, intervint Omas d’une voix apaisante. Nous devons rester sur le sujet principal, soyons réalistes : le plan du colonel Solo n'a pas apporté les réponses espérées.
— Je regrette de vous contredire, monsieur le chef d’état, intervint Niathal. La base du plan demeure valable, et d'ailleurs nous n'avons plus le choix. Nous avons simplement mal estimé les dépenses encourues.
— Ainsi que les revenus générés, fit Derine d'une voix lugubre. Nous ne pouvons pas pressurer les économies planétaires à l'infini, mais sans davantage de rentrées d'argent, impossible de maintenir à la fois les dépenses du sénat galactique et un armement suffisant pour conserver nos acquis.
— Combien de temps avons-nous ? demanda Omas.
— Je ne sais pas exactement. Je peux plâtrer les fissures pendant quelque temps, voire conserver une façade de bonne santé Financière en déshabillant celui-ci pour habiller celui-là, mais, si les courbes des dépenses ne s'inversent pas radicalement ou si nous lie trouvons pas une source de revenus de premier ordre, nous vivrons à crédit et ça ne pourra qu'empirer. » Il eut un sourire dépourvu d'humour. «Dommage que la plupart des systèmes dont nous nous sommes emparés n'aient pas été en meilleure forme économique que nous.
— Et vous êtes sûre qu'on ne peut pas réduire les frais de la flotte, Cha ?
— Non, sauf à courir de très graves risques, monsieur. Le colonel Solo a tout à fait raison quant à la réaction de nos voisins si nous laissons paraître la moindre faiblesse. » À son lotir, elle eut un sourire sans joie. « Nous avons dû nous montrer trop bons professeurs.
— Peut-être, fit Solo, mais ça, il y a moyen d'y parer. Tous les regards se portèrent sur lui et il haussa les épaules. Il suffit de les renvoyer à la niche sans attendre. En plaçant nos loi ces restantes sur nos frontières, il doit être possible d'imposer une paix telle que nous la voulons.
— Crénom, colonel ! s'exclama Bergren, d'abord vous nous assurez que nous ne pouvons pas conserver nos acquis sans nous saigner à blanc, et maintenant vous envisagez de déclencher une série de nouvelles guerres ? Parlez-moi des mystères de l’esprit militaire!
— Une minute, Grim », murmura Omas. Il regarda le colonel, la tête penchée de côté. « Vous croyez que ça marcherait, Jacen ?
— Je crois, oui, répondit Solo d'un ton plus circonspect.
Le problème, ce serait le minutage. » Il appuya sur un bouton et une carte holo apparut au-dessus de la table. La sphère hypertrophiée de la République galactique prenait tout le quadrant nord-est et Jacen indiqua un semis de systèmes stellaires ambre et rouges au sud et à l'ouest. « L'empire Chiss est la plus proche puissance multisystème. La plupart des gouvernements monosystèmes ne sont que du menu fretin et une seule force d'intervention suffirait à anéantir chacun d'eux, malgré leurs programmes d'armement. Ce qui les rend dangereux, c'est la probabilité qu'ils rejoignent la confédération si nous leur en laissons le temps. »
Omas hocha la tête d'un air songeur, puis tendit le doigt pour toucher une des perles de lumière à l'inquiétant éclat rouge sang. « Et les impériaux ? demanda-t-il.
— Ça, c'est l'inconnue de l'équation, admit Solo. Ils sont assez puissants pour nous résister, en supposant qu'ils en aient le cran.
— Alors pourquoi ne pas les éviter ou au moins les garder pour la fin? demanda Bergren. Leurs Moffs sont très divisés sur la position à prendre envers nous : ne pourrions-nous pas en profiter pour faire d'abord sa fête au menu fretin?
— Notre situation serait encore pire », objecta Derine. Il appuya sur un bouton devant lui et les deux tiers des lumières ambrées de la carte de Jacen devinrent d'un gris-vert maladif. « Chacun de ces systèmes est autant dans le pétrin que nous, économiquement parlant. C'est à nous que cela coûterait de l'argent de nous en emparer, et les autres sont des affaires où nous ne gagnerions rien. Ceux dont nous avons vraiment besoin se trouvent plus au sud, en bas, du côté du nœud d’Ansion, ou à l'ouest, dans le consortium Hapes.
— Hors de question d’attaquer Hapes, c’est un membre de l’alliance galactique, intervint Omas d’une voix stricte.
— Cela nous ramène donc aux Vestiges de l’Empire, intervint Niathal. Nous sommes tous d'accord; nous devons agrandir notre territoire, or les vestiges sont sur notre chemin et nous en emparer donnerait un solide coup de fouet à notre économie. Le problème, c'est : que faisons-nous ?
— Des idées sur la façon de procéder ? demanda Omas.
— Laissez-moi voir ça avec mon équipe, déclara Jacen. Surtout avec les services de renseignement ; j'ai une idée, mais il faut que j'y travaille. » Il inclina la tête. « Je devrais pouvoir vous fournir un rapport, dans un sens ou dans l'autre, d'ici un mois. Ça ira ?
— Parfaitement, colonel », dit Omas avant de clore la séance.