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Chapitre 2 : The Immunity Syndrome 2.0

4017 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 23/01/2021 20:55

Pour celles et ceux qui connaîtraient peu / mal / pas du tout Star Trek, ou qui tout simplement auraient tout oublié, je vous fais un tout petit récap de l’épisode dont il est question ici, « The immunity syndrome » : une sorte d’amibe géante vient d’engloutir, peut-être sans s’en rendre compte, tout un système solaire, et l’Enterprise a été happé par son attraction. Tandis que l’équipage commence à se sentir mal en raison de la proximité de la chose, le capitaine veut envoyer une sonde habités dans l’amibe pour recueillir des informations sur sa composition et, éventuellement, réussir à la détruire (pour l’instant, rien ne fonctionne). Il hésite à envoyer Spock ou McCoy, tous deux parfaitement compétents et qualifiés pour cette mission suicide. Pour finir, il enverra Spock, plus résistant car Vulcain, et tout se terminera bien. C’est donc en plein milieu de cet épisode que se passe ce chapitre.


Chapitre 2 – The immunity syndrome 2.0


L’infirmerie de l’Enterprise était surchargée. A chaque instant, de nouveaux malades arrivaient, victimes des mêmes symptômes – fatigue musculaire, affaiblissement général, anémie pour les plus atteints d’entre eux. A l’instar du vaisseau, les corps des humains qui l’habitaient perdaient progressivement leur force, se vidaient de leur énergie. Il ne s’agissait cependant pas d’un virus, ni d’un microbe, ni de rien de connu. Bones pouvait leur administrer des stimulants, leur permettre de tenir et de repartir sur leurs deux pieds, mais cela n’empêchait pas ses patients de décliner lentement. Face à cette situation apocalyptique contre laquelle il ne pouvait rien faire, il sentait son angoisse augmenter de minute en minute : il avait l’impression d’en être réduit à appliquer une multitude de petits pansements sur une fracture ouverte.

A peine arrivé à l’infirmerie, après la discussion houleuse qu’il venait d’avoir avec Jim et Spock (lui, Leonard McCoy, avait « un complexe de martyre » ? Vraiment ? Le culot de ce Vulcain ! Ce n’était pas lui qui s’était précipité comme un crétin entre Kirk et une plante qui lançait des piquants empoisonnés ! Ce n’était pas lui qui était resté dans la cabine de Garrovick pour essayer de contenir un nuage mortel avec ses doigts ! Ce n’était pas lui qui avait enfreint les lois de l’arène pour le sauver ! Bref, ce n’était pas lui qui agissait illogiquement face au danger, alors son « complexe de martyre », il pouvait bien se le garder !), il ne voulait pas être confronté à sa propre inaptitude à sauver tous ces gens qui comptaient sur lui. Si au moins le capitaine l’envoyait dans cette navette à la place de Spock, peut-être pourrait-il enfin faire quelque chose…

– Christine, je vais aux réserves voir s’il nous reste encore des stimulants.

L’infirmière, concentrée sur sa tâche, acquiesça brièvement, et il quitta la pièce, se dirigeant à pas rapides vers les stocks. Il voulait fuir l’atmosphère confinée et délétère de l’infirmerie pour quelques instants encore. Marcher l’aidait toujours à réfléchir plus clairement. Les couloirs du vaisseau étaient désespérément vides, et les rares membres de l’équipage que croisa le médecin se dirigeaient en chancelant vers l’infirmerie. McCoy emprunta l’ascenseur, monta au pont numéro 9, quitta la cabine, se creusant la cervelle pour trouver une solution, ou simplement comprendre l’inexplicable…

C’est alors qu’il le vit, debout devant la porte grande ouverte de la salle des données : un type grand, mince, l’air passablement hagard, vêtu d’un pantalon beige et de deux hauts superposés, l’un bleu, à manches mi-longues, l’autre rouge, à manches courtes. Même pour un esprit aussi peu discipliné que celui de McCoy, il n’y avait rien de réglementaire dans sa tenue, et le médecin ne le reconnut pas comme un membre de l’équipage. Certes, il y avait des rotations de personnel, à chaque fois que l’Enterprise se posait sur une base, si bien que les enseignes changeaient assez souvent, mais Bones connaissait tout le monde à bord. Il était physionomiste et mettait son point d’honneur à faire passer les évaluations physiques et psychiques de chaque homme et femme présent(e) sur le vaisseau, et ce type-là, il en était sûr et certain, il ne l’avait jamais vu de sa vie.

– Qu’est-ce que vous faites là, vous ? s’écria-t-il, incapable de penser à une réplique plus intelligente, et regrettant presque de ne pas porter un phaseur à la ceinture.

Le jeune homme tourna la tête vers lui et le regarda avec un air de stupéfaction mêlé de ravissement qui ne contribua pas à lui donner l’air intelligent. Il avait tout simplement l’air d’un fanatique qui vient d’apercevoir l’objet de son adoration. Bones n’hésita pas : il sortit son communicateur.

– Ici McCoy. Je demande deux membres de la sécurité dans le couloir B-76, au pont numéro neuf. Nous avons un intrus à bord. Je ne sais absolument pas comment il est arrivé là, mais il n’a rien à faire sur le vaisseau. Il n’a pas l’air dangereux, ajouta-t-il devant le sourire béat qu’arborait le nouveau venu, mais sa présence a peut-être quelque chose à voir avec notre situation actuelle.

– Ici Giotto. Bien reçu. Je viens immédiatement avec Garrovick.

McCoy remit l’appareil à sa ceinture et observa plus attentivement l’intrus. Il semblait ne pas avoir plus de vingt-cinq ans, et avait l’air, pour être honnête, un peu dérangé.

– Vous êtes le docteur Leonard Horatio McCoy ? demanda le jeune homme, la voix tremblante d’une excitation inexplicable.

Bones recula prudemment d’un pas.

– Oui, répondit-il, sans quitter l’autre du regard. Qui êtes-vous et comment me connaissez-vous ?

Le regard d’adoration sans mélange qu’arborait l’intrus était non seulement incompréhensible, mais également inquiétant. McCoy se demanda s’il n’allait pas soudainement lui sauter au cou, pour quelque obscure raison connue de lui seule, mais soudain, le jeune homme avisa quelque chose qui devait se situer derrière le praticien, et, avec un cri de joie, fit un petit bond en l’air. Pendant que Leonard se retournait malgré lui, il commença à courir (un peu comme les enfants, les mains le long du corps, par à-coups, maladroitement), dépassa le médecin en chef qui, abasourdi, ne chercha même pas à le rattraper, et se précipita vers… la porte de l’ascenseur.

Une fois devant, il sembla désespérément chercher quelque chose, une commande manuelle, n’importe quoi qui lui permette de s’engouffrer à l’intérieur, mais bien évidemment, la porte demeura résolument close. Un désespoir intense se peignit sur les traits du nouveau venu, qui frappa le métal de la main en criant d’une voix stridente « Ouvre-toi, ouvre-toi ! ». Bien évidemment, encore une fois, rien ne s’ouvrit. L’ascenseur ne réagissait que sur commande vocale de l’un des membres de l’équipage. Or, ce type-là ne faisait pas partie de l’équipage. Son attitude laissait cependant entendre qu’il n’était pas membre d’une organisation ennemie, quelle qu’elle soit (d’ailleurs, une organisation ennemie n’enverrait pas des dingues envahir l’Enterprise, et fournirait certainement à ses agents les renseignements de base sur la façon dont s’ouvraient les portes d’un vaisseau de la Fédération), malgré l’étrange symbole stylisé qu’il arborait sur sa seconde tunique : un éclair jaune sur fond rouge.

Giotto et Garrovick arrivèrent en courant sur ces entrefaites, pendant que le jeune inconnu s’excitait sur la porte de l’ascenseur. A dire vrai, il faisait un peu peine à voir.

– Docteur McCoy ? demanda le chef de la sécurité en ouvrant de grands yeux face au spectacle incongru qui se déroulait dans le couloir.

Bones haussa les épaules. Ils étaient au beau milieu d’une crise, ils n’avaient pas le temps pour les excentricités d’un taré qui était monté à bord de l’Enterprise Dieu seul savait comment (et pourquoi) !

– Je n’en sais pas plus que vous, déclara-t-il. Je suis sorti de l’ascenseur et il était là, bouche bée au milieu du couloir, comme s’il venait tout juste de sortir de la salle des données. Il avait l’air assez sonné.

– Un passager clandestin ? suggéra Garrovick, aussi interloqué que les deux autres.

Giotto secoua la tête d’un air de doute.

– Depuis Sigma Iota II ? Cela me semble plus qu’improbable.

– S’il n’a pas embarqué lors de notre dernière mission, comment est-il arrivé à bord ? demanda McCoy en se mordant l’intérieur de la joue.

– Je n’en sais rien. Hé, vous, là-bas ! s’écria Giotto à l’intention de l’intrus. Vous êtes monté illégalement dans un vaisseau de la Fédération des Planètes, ce qui vous place en infraction avec la loi galactique. Pour cette raison, je vais vous demander de me suivre sans protester.

Le jeune homme se retourna vers eux, les yeux brillants d’excitation.

– Allez-vous m’emmener devant le capitaine ? demanda-t-il.

McCoy ne put s’empêcher de se dire qu’il avait l’air d’un très jeune chiot qui vient de comprendre que sa famille va partir en balade, ou d’un enfant de cinq ans pour qui le Père Noël est passé en avance. Ce qui n’était absolument pas normal. Si vous êtes un passager clandestin, et que vous avez une intelligence ne serait-ce que moyenne, vous ne devriez pas être spécialement ravi que l’on vous repère et que l’on vous traîne devant le capitaine. Garrovick regarda son supérieur d’un air incertain, et Giotto lui-même semblait hésiter sur la conduite à tenir.

– Venez avec moi, finit-il par dire, sans quitter l’individu des yeux et sans lâcher son phaseur. Je vous emmène aux cellules. Le capitaine Kirk vous interrogera plus tard.

– Oh, je vous en prie, appelez-le maintenant ! supplia-t-il en trépignant sur place. Je ne sais pas pour combien de temps je suis ici et je voudrais tant aller sur la passerelle !

Cette fois, c’était officiel : le type était complètement timbré. McCoy tira son tricordeur médical de sa poche et l’actionna, sous le regard ébahi et jubilatoire de l’intrus.

Espèce : humaine. C’était déjà ça.

– Je vais prévenir le capitaine, déclara le médecin en chef.

Giotto acquiesça. L’inconnu acquiesça. Bones se demanda s’ils n’étaient pas tombés dans un univers parallèle en arrivant dans la zone dangereuse où sévissait l’amibe. Après tout, ce genre de transfert leur était déjà arrivé – et s’était avéré particulièrement déplaisant pour lui, d’ailleurs.

Pendant que Garrovick et le chef de la sécurité s’occupaient du doux dingue, McCoy se replia prudemment vers la passerelle.

*****

Un passager clandestin ?

Jim regarda Bones de façon peu amène. Il avait suffisamment à faire avec cette espèce d’amibe géante qui venait déjà d’engloutir un système solaire entier, et s’apprêtait à grignoter son vaisseau en guise de dessert. Il n’avait pas besoin d’un second problème, qu’il soit ou non lié au premier. Peu impressionné par le regard de la mort qui tue de son capitaine (Kirk devait avouer, à son grand regret, qu’il le pratiquait beaucoup moins bien que Spock, et qu’il ne savait pas, comme le Vulcain, terroriser un enseigne rien qu’en le fixant sans rien dire), McCoy haussa les épaules.

– Et vous pensez que sa présence à bord a quelque chose à voir avec l’amibe ?

– Je n’en ai aucune idée, répondit le médecin. Giotto et Garrovick l’ont emmené aux cellules. Peut-être pourriez-vous aller y jeter un coup d’œil.

– Bones, le temps presse !

– Je le sais bien. Et je voulais vous demander si vous aviez pris une décision concernant la navette-sonde.

Jim se raidit. Depuis une dizaine de minutes, il se faisait des nœuds au cerveau pour déterminer lequel de ses deux plus proches amis il allait devoir envoyer à une mort quasi certaine. Il savait bien que s’ils ne faisaient rien, ils risquaient tous d’y passer, mais porter le poids d’une telle condamnation lui semblait impossible.

– Je vais aller voir votre fou, biaisa-t-il, et ensuite je vous convoquerai pour vous dire ce que j’ai décidé.

McCoy acquiesça d’un bref signe de tête et le capitaine laissa les commandes à Kyle pour se rendre aux cellules. L’Enterprise s’était rarement retrouvée dans une situation aussi critique que celle-ci. Il arrivait souvent que les équipes au sol rencontrent des problèmes et soient menacées, mais que tout le vaisseau se retrouve ainsi sous une épée de Damoclès était heureusement bien moins fréquent. Kirk commençait à ressentir lui-même les effets de l’étrange maladie qui s’était répandue à bord avec une rapidité surnaturelle : sa tête était légère, ses membres plus lourds qu’à l’ordinaire, et sans les stimulants dont il s’était gavé, il aurait eu beaucoup de mal à surmonter une irrépressible envie de dormir. La dernière chose dont il avait besoin maintenant était bien un passager clandestin apparu comme par miracle dans la salle des données.

En arrivant à la porte des cellules, il entendit un murmure de conversation inhabituel, et reconnut presque immédiatement la voix de Garrovick, qui conversait selon toute probabilité avec le prisonnier, en dépit du règlement.

– Mais comment savez-vous tout cela ? demandait le jeune lieutenant, la stupéfaction parfaitement audible dans sa voix.

– Je ne peux pas vous l’expliquer, mais je suis au courant de tout ce qui s’est passé et va se passer sur ce vaisseau, répondit une voix à la fois masculine et juvénile, que Kirk aurait sans hésitation qualifiée d’hystérique si elle n’avait été en mesure de produire un discours parfaitement construit et maîtrisé. Je sais que votre père était le capitaine de l’USS Farragut et qu’il a été tué avec tout son équipage par une créature gazeuse composée essentiellement de dikironium. Je sais que vous avez rencontré cette même créature récemment, sur Argus X, qu’elle a dans ces circonstances coûté la vie à votre ami, l’enseigne Rizzo, qu’elle a failli vous tuer également – mais le commandant Spock vous a sauvé la vie – et que vous avez finalement réussi à la piéger et à l’anéantir grâce à une bombe matière/antimatière.

– Cela suffira pour aujourd’hui, intervint Kirk sévèrement en apparaissant à la vue de l’intrus.

Que Spock ait sauvé Garrovick en l’expulsant de sa cabine était connu d’un très petit nombre de personnes, à savoir lui-même, Garrovick évidemment, et Bones. Il avait passé sous silence l’épisode dans son journal officiel, essentiellement pour éviter de mettre Spock mal à l’aise (il avait agi particulièrement illogiquement dans ces circonstances, et si, pour Kirk, cela ne faisait que prouver l’humanité flagrante de son premier officier, leurs supérieurs auraient probablement donné à cette tentative le nom de « complexe de martyre » dont Spock lui-même avait gratifié McCoy une demi-heure auparavant). Comment ce type, qu’il ne reconnaissait absolument pas, pouvait-il être au courant de tout cela, voilà qui demeurait un mystère.

– Capitaine, je… commença Garrovick en rougissant.

– Laissez-moi seul avec le prisonnier, intima Jim.

Pendant ce court échange, l’intrus avait fixé son regard sur le capitaine, comme s’il n’en revenait pas de le voir à travers le champ de force qui fermait la cellule. La porte se referma sur le lieutenant.

– Maintenant, expliquez-moi ce que vous faites ici et comment vous en savez autant sur nous.

– Devinez, répondit de façon assez incongrue le jeune homme, le visage tendu dans une expectative presque douloureuse.

– Quoi ? demanda Kirk (il avait probablement mal entendu).

– Si vous êtes vraiment le capitaine James Tiberius Kirk, reprit l’autre, dont les yeux brillants le fixaient avec une intensité dérangeante, vous devez pouvoir deviner pour quelle raison je sais déjà tout sur vous. Votre intuition est légendaire et vous trouvez toujours la solution à tout. Je vous écoute.

Un fou, pensa Jim avec lassitude. Je suis tombé sur un fou.

– Je n’ai pas le temps de jouer aux devinettes, répondit-il sèchement. Notre vaisseau est dans une situation critique et je n’ai pas le temps de m’occuper de vous. Appelez-moi lorsque vous serez prêt à me fournir des explications.

Il tourna les talons, l’esprit déjà focalisé sur la mission suicide qui allait peut-être coûter la vie à l’un de ses plus proches amis, lorsque la voix juvénile retentit, vibrante, fervente, dans son dos, martelant les mots à une vitesse proche de la distorsion 8 :

– Vous avez prévu d’envoyer une navette d’exploration au cœur de l’amibe géante qui a déjà fait disparaître le système Gamma-7-A, mais vous hésitez sur la personne à qui confier cette mission. Les connaissances exobiologiques du docteur McCoy sont capitales, mais vous craignez qu’il ne tienne pas le coup dans la navette. Le commandant Spock serait plus indiqué, en raison de sa morphologie vulcaine plus résistante, mais vous aimeriez le garder près de vous pour gérer la situation de crise sur le vaisseau. Vous allez finir par choisir votre premier officier, et ce sera le bon choix, car le docteur McCoy n’aurait pas survécu à sa place. Pour finir, Spock réussira à sonder la créature et à vous faire parvenir un message qui vous permettra de la détruire et de sauver tout votre équipage, sans parler des systèmes proches, et probablement la galaxie tout entière. Et je ne me sens pas très bien, conclut le jeune homme, la voix soudainement tremblante.

Le capitaine, abasourdi par le petit discours que venait de lui servir le nouveau venu, sur un ton de certitude absolue, se retourna pour se rendre compte que le jeune homme était devenu très vert. Probablement la créature commençait-elle à l’affecter également.

– Je vais envoyer une infirmière vous donner un stimulant, promit-il en scrutant attentivement le visage rond de l’intrus.

Ce dernier s’était laissé glisser au sol avec un gémissement et s’était pris la tête dans les mains. Kirk, lui-même peu assuré sur ses deux pieds, s’approcha du panneau de contrôle mural.

– Capitaine Kirk à l’infirmerie. J’ai besoin d’un stimulant pour le prisonnier.

– Le prisonnier ? répondit la voix de Chapel.

– Je vous expliquerai plus tard. Kirk, terminé.

En proie à une confusion qu’il avait rarement éprouvée auparavant, Jim passa devant Garrovick, lui intima de reprendre son poste en silence, et se dirigea vers ses quartiers. Il avait besoin de faire le tri entre ses pensées qui s’entrechoquaient. Qui était ce type, d’où venait-il, quand était-il monté à bord, et comment pouvait-il connaître les pensées personnelles du capitaine de l’Enterprise ? Il avait affirmé avec tellement d’aplomb ce qui allait se produire… Kirk se mordit les lèvres. Bon sang, il avait dit qu’il devait choisir Spock. Or, jusqu’à présent, il penchait plutôt pour Bones.

Le docteur McCoy n’aurait pas survécu à sa place.

C’était ridicule, totalement ridicule. Comment ce jeune homme pouvait-il le savoir ? L’hypothèse la moins absurde, qui semblait tout de même relativement improbable, était qu’il venait du futur, et avait eu connaissance, dans l’avenir, des journaux de bord de l’Enterprise. Mais pourquoi cette sorte de fascination enfantine pour le vaisseau, ses occupants, et jusqu’au champ de force qui le retenait prisonnier ?

Le docteur McCoy n’aurait pas survécu à sa place.

Jim soupira. Il devait prendre une décision. Et pour cela, il allait se fier aux paroles douteuses d’un allumé qui prétendait connaître le destin de son équipage.

*****

Leonard Nimoy n’était pas Spock. Ce fait étant parfaitement établi, il poussa un juron, absolument pas vulcain, et donna un violent coup de pied dans le secrétaire qui recelait son plus important secret. Pourquoi avait-il fait confiance à ce petit fourbe, qui ne s’était introduit chez lui que dans le but de le voler, et qui lui avait dérobé, probablement par hasard, la seule chose dont il ne devait à aucun prix se séparer ? Pourquoi, mais pourquoi avait-il été aussi naïf, aussi crédule, aussi stupide ?

Réfléchis, s’admonesta-t-il en respirant profondément.

Il se souvenait du jour où il avait reçu l’objet, et du discours qui l’avait accompagné. Il avait d’abord cru à une blague. Mais Gene ne plaisantait absolument pas. Alors, il l’avait cru fou. Qui aurait pu imaginer qu’un type persuadé d’être chargé d’une mission cruciale par des extra-terrestres avait en réalité toute sa tête ? Leonard avait souri poliment. Il ne demandait pas mieux que de travailler, évidemment, et tourner un rôle majeur dans une série de SF lui convenait parfaitement, mais si le réalisateur était complètement taré et s’imaginait être en contact avec une intelligence supérieure vivant à des milliers d’années-lumière de la terre, il valait peut-être mieux décliner.

Alors, Gene avait sorti le PADD, l’avait allumé et le lui avait tendu.

Leonard secoua la tête. Les souvenirs ne lui étaient, en l’occurrence, d’aucune utilité dans les circonstances présentes. Ce qu’il devait faire, c’était récupérer l’objet en question le plus vite possible, avant que son voleur ne comprenne de quoi il retourne et ne décide de l’utiliser. Bon sang, ce type était un physicien, probablement brillant, il allait comprendre en moins de deux secondes comment fonctionnait l’écran.

Arrête l’anticipation négative et réfléchis, répéta-t-il en s’asseyant sur le canapé, à la place qu’avait occupée, une demi-heure auparavant, le jeune homme. Sois logique. (Il entretenait avec ce mot une relation particulière, faite d’exaspération et de tendresse. Mais dans ce genre de circonstances, Spock avait raison : les émotions étaient inutiles, voire néfastes. Seul comptait le raisonnement.)

Le premier réflexe du voleur avait été de parler physique quantique, ce qui était assez inhabituel. Donc, il devait travailler dans le domaine des sciences. Très probablement dans une université. Il avait dit qu’il n’habitait « pas très loin ». Peut-être que s’il faisait le tour des sites des facs du coin, il tomberait sur sa photo, avec son nom (il le lui avait dit, mais Leonard ne l’avait malheureusement pas retenu, car jugé peu important – et lui n’avait pas, comme Spock, une mémoire eidétique) et, s’il était vraiment très chanceux, son adresse ?

Avec un soupir, Leonard Nimoy se leva et jeta un coup d’œil à sa montre. 19h35. La nuit promettait d’être longue.










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