John au pays des merveilles

Chapitre 3

3824 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 09/11/2016 15:16

John vit au loin de la lumière ce qui signifiait qu’il atteignait la limite de la forêt. Une maison apparut et devant celle-ci, une longue table s’étendait dans la cour pouvant réunir une quinzaine de convives. À la table étaient installés trois personnes qui semblaient prendre le thé.

Quand John s’approcha d’eux, ses yeux s’agrandirent et il lança avec étonnement et joie :

— Sherlock !

xxx

 

Aucun des occupants de la table ne semblaient se préoccuper de la présence de John. Ils continuaient de bavarder entre eux comme si de rien n’était.

— Sherlock ? Tenta-t-il à nouveau.

— Auriez-vous reconnu quelqu’un, John ? S’enquit le chat, qui flottait à côté de lui.

— Mais…

Ses yeux se fixèrent sur le drôle d’animal suspendu dans les airs. Il passa ses bras au-dessous et au-dessus du chat, cherchant les fils invisibles.

— … Vous n’êtes pas normal. Par quoi êtes-vous tenu dans les airs ? Questionna John, particulièrement dérouté.

— John, répondit sérieusement Microsoft bien que son sourire n’aidait pas. Si vous voulez découvrir le pays des merveilles, faites-vous une raison que rien est normal. J’aimerais vous éviter de vous faire plus de cheveux blancs que vous en ayez. Si jeune et pourtant déjà si vieux.

— Je ne suis plus un gamin pour imaginer des trucs pareils. J’ai les pieds sur terre. Comment voulez-vous que j’accepte ça ?

— Il me semble que quelqu’un vous a dit que votre manière d’écrire vos aventures, était résolument bien plus romanesque que la réalité des faits.

— Comment pouvez-vous le savoir ? C’est Sherlock qui m’a tenu ces propos, s’étonna John.

— Parce qu’ici, nous vous connaissons depuis longtemps, John, répondit mystérieusement le chat.

Puis il disparut, le laissant dans un flou monumental.

Tout était si mystérieux dans ce monde. John se sentait perdu, aussi bien dans ce lieu étrange que dans sa tête.

Il se secoua vivement et décida d’agir en fonction des événements.

« Les pierres parlent : OK ; les fleurs parlent et chantent : OK ; les animaux parlent, fument et volent : OK. J’ignore encore ce que je vais découvrir d’autres, mais je dois absolument garder l’esprit ouvert. Le chat a raison, je suis écrivain, je dois faire preuve d’imagination. Je ne suis pas Sherlock, je dois faire mes propres expériences, aussi impossibles soient-elles. »

 

Reprenant conscience de son environnement, il observait le trio. Celui pour qui John avait reconnu Sherlock, après mûrs réflexions, constata quelques différences. Physiquement, il ressemblait à son colocataire, avec son teint pâle, son visage anguleux, ses yeux gris, ses boucles bien qu’un peu plus longues, sauf qu’il était roux et portait un costume bariolé et élimé avec un gros nœud papillon et un chapeau haut de forme orné d’un ruban – loin de la tenue sophistiquée et impeccable de Sherlock. À côté de lui, il reconnut celui qui devait être le Lièvre de Mars, tout de gris et deux grandes oreilles tombantes et plus fin que le lapin blanc et sa touffe de cheveux gris sur la tête. Il sourit. Il lui faisait penser à son autre ami inspecteur de Scotland Yard. Enfin le dernier, un loir, petit et maigre qui semblait en train de dormir.

Il s’approcha de la table pour essayer d’engager la discussion avec les trois individus qui paraissaient bien excités par il ne savait quoi.

— Bonjour ! Lança-t-il.

— Buvons du thé encore du thé en nous souhaitant, mon cher, un joyeux non anniversaire, mon cher !

— Oh merci mon cher, cela me touche tellement, répondit le chapelier avec de grands gestes théâtrales.

— (Grand moment de solitude) Hem ! Excusez-moi ! Puis-je m’asseoir à votre table ?

« À quoi bon, ils ne m’écoutent même pas », maugréa-t-il.

John tira une chaise et s’assit au bout de la table. Généralement, il n’était pas aussi malpoli, mais vu qu’il n’était plus dans son monde, il se disait qu’il pouvait bien faire ce qu’il voulait.

Il remarqua qu’à chaque place, il y avait une tasse vide. Faisant preuve d’un peu de culot alors qu’il n’avait pas été invité à la conversation, il demanda :

— Puis-je savoir ce qu’est un non-anniversaire ?

— Quelle question idiote ! Ce sont les 364 jours qui ne sont pas un anniversaire, répondit le chapelier.

— C’est une façon de voir les choses. Au fait, je m’appelle John et vous ? Dit-il tout sourire.

— Je suis le grand, l’illustre, le sublime, le merveilleux, le grandiose, le fantastique, l’inoubliable, l’immense, le majestueux…

— Moi, je suis le Lièvre de Mars, Gory et lui c’est Wiggins, indiqua-t-il du pouce le loir qui lança un bref « Salut » avant de se rendormir. Et l’autre là-bas, c’est le chapelier fou Locky.

— … le magnifique, l’admirable…

— C’est bon, les présentations sont finies.

— … l’impressio – Pardon ? Ah ! Mais vous m’avez coupé dans ma tirade, s’indigna le chapelier.

— Oui, et demain on n’y serait encore, les jours d’après aussi d’ailleurs.

— Pour ma peine, changeons de place !

Et tous se décalèrent d’une chaise. John ne comprit pas trop leur délire, mais il les trouvait amusant.

Le lièvre se mit à servir le thé, mais semblait oublier John.

— Puis-je vous demander un peu de thé ?

— Et pourquoi donc, Monsieur ? Il ne me semble pas vous avoir invité à ma table.

— J’ai demandé votre permission, mais vous m’avez ignoré.

— Non, vous n’avez rien demandé.

— Si, je l’ai fait, insista John.

— Faux, je m’en souviendrais, contra le chapelier.

— Si, il l’a demandé, murmura le loir d’une voix endormie.

Tous tournèrent la tête vers lui.

— D’accord, approchez-vous que je puisse vous servir, lança Gory.

Tout heureux, John alla s’asseoir à côté du lièvre et celui-ci lui servit un Earl Grey.

Il trempa ses lèvres, hésitant : « Et si je grandissais ou rapetissais ? »

Semblant comprendre l’hésitation de John, le chapelier lui dit :

— Ce n’est pas une de ces boissons qui changent la taille des gens. Vous pouvez boire sans risque.

John but plusieurs gorgées du thé chaud. Le liquide ambré descendit dans sa gorge et John émit un soupir de contentement. Il était parfaitement infusé, comme il l’aimait.

— Locky, pourquoi vous appelle-t-on le chapelier fou ?

— Tout simplement parce que c’est mon métier, répondit celui-ci.

— Et fou parce qu’il faut l’être pour travailler pour la Reine, reprit le Lièvre.

— Nous sommes dans un royaume avec un roi, une reine et un prince ou une princesse ? S’enthousiasma John.

— Un Valet, pas un prince. Il s’agit de la famille de Cœur. Mais ne vous y trompez pas, ils ne sont pas comme vous vous l’imaginez. Surtout la Reine qui n’hésite pas à couper la tête de ses sujets quand ils ne lui plaisent pas.

— C’est horrible ! Comment peut-elle faire une chose pareille ? S’alarma John

— Là est toute la question. Une autre tasse, John ?

— Volontiers !

— Changeons de place ! Exigea joyeusement le chapelier et tout le monde se déplaça.

John se fit verser son thé dans une nouvelle tasse propre.

— John, pourquoi un corbeau ressemble-t-il à un bureau ? Questionna Locky.

Le docteur était un peu déconcerté. Ils passaient du coq à l’âne sans aucune cohérence. Il fit de son mieux pour suivre cette conversation décousue.

— Euh… parce que le bureau est noir, essaya-t-il.

— Allons John, cherchez plus loin.

John joignit les mains à la manière de Sherlock et réfléchit.

Après un moment, il répondit :

— Désolé, je ne vois pas. Je donne ma langue au chat.

— Pour tout vous dire, moi non plus. Ah ! Ah !

— Pourquoi me poser la question s’il n’y a pas de réponse ?

— Il y en a une sauf que je n’y ai pas réfléchi.

John secoua la tête tout en soupirant.

— Suis-je fou ? Dit le chapelier

— Oui, je pense, Chapelier. Mais je vais vous dire un secret : la plupart des gens bien le sont, répondit John avec un petit sourire.

Cela sembla le satisfaire, car il se dandinait sur sa chaise.

Finalement, il revint toujours au même sujet.

— Sauriez-vous où habite le lapin blanc ? Questionna John.

— Pourquoi voulez-vous le savoir ?

— En fait, je le cherche depuis que je suis arrivé au pays des merveilles. Le chat m’a amené ici, mais de toute évidence, il ne s’y trouve pas.

Le chapelier consulta sa montre.

— À cette heure-ci, il doit être au château.

— Ah oui ? Qu’y fait-il ?

— Il est le laquais de la famille royale. Il fait les annonces officielles et doit se plier à leur quatre volontés. C’est le chien-chien de la Reine. C’est pour ça qu’il court tout le temps, il a peur d’arriver en retard et se faire COUIC !, fit le chapelier en mimant la décapitation.

— C’est une situation dangereuse, s’inquiéta John. Pourquoi ne démissionne-t-il pas ?

— Parce que le résultat serait le même, surtout que c’est la Reine, elle-même qui l’a recruté et dire non n’est pas envisageable. Moi-même, j’ai fui pour échapper à la décapitation pour m’être moqué ouvertement d’elle. Maintenant, je suis devenu l’indésirable, expliqua Locky.

John fronça les sourcils, pendant que les deux compères reprirent leur conversation là où elle était restée. Finalement, ce monde était régi de la même manière que le sien à la différence qu’ici, la fin était plus expéditive.

— Quel chemin prendre pour m’y rendre ? Je dois le voir ! S’écria John, faisant sursauter les trois autres.

— Vous n’y pensez pas ? Je crois que vous êtes fou aussi. C’est devenu dangereux depuis que le Valet est en chasse.

— Mais si le lapin est là-bas, il faut le sauver !

— Le sauver de quoi ? Il va très bien et la Reine en est satisfaite. Par contre, vous seriez en danger.

— Pourquoi le serais-je ? Je n’ai rien fait.

— Non, pas pour le moment. Croyez-moi, n’allez pas au château. Il est encore trop tôt. Vous aurez tout le temps de vous y rendre plus tard.

— Expliquez-moi, je peux comprendre, insista John.

— C’est pas l’heure, John ! Termina le chapelier avec un regard qui le traversa comme un poignard.

Ils restèrent à se fixer un instant avant que John baisse la tête le premier. Il sentit sa détermination l’abandonner et préféra ne pas insister.

Le moment était venu de reprendre son chemin, mais avant de s’en aller, Locky l’interpella alors qu’il sortait de table :

— Je suis en toi mais tu ne m’entends pas car si tu m’entends tu me vois. Qui suis-je ?

— …

— Quand tu auras la réponse alors tu pourras aller au château, conclut le chapelier avec un clin d’œil qui fit rosir légèrement les joues de John.

Cette énigme lui faisait vaguement penser à quelque chose qu’il refusait de reconnaître. Jamais. Plus tard. Un jour, peut-être. Non, certainement pas !

 

Il prit le chemin qui longeait la forêt. L’euphorie qu’il avait ressentie un peu plus tôt s’en était allé. La menace que représentait la Reine le fit douter. Pourtant, il voulait absolument retrouver le lapin, comme si sa vie en dépendait, son ancre dans ce monde de fous.

Il marchait depuis quelques minutes lorsque le brouillard tomba brusquement, lui cachant le chemin. De plus, il n’entendit plus un bruit. Les oiseaux s’étaient tus. Même la rivière qu’il entendait un plus tôt s'écouler dans la forêt semblait avoir disparu. Au bout d’un moment de tâtonnement pour ne pas perdre le chemin, il aperçut une maison qui se découpait à travers le voile. Il voyait de la lumière aux fenêtres.

« C’est peut-être sa maison. », espéra-t-il.

Il accéléra le pas. Arrivé devant la porte, il frappa.

La porte s’ouvrit sur une femme Valet de pied.

— Que puis-je pour vous, Monsieur ? Demanda-t-elle.

Il fut un moment interdit. La jeune femme habillée d’une tunique bleue ressemblait à son ex-petite amie, Sarah. Il se reprit rapidement.

— Bonjour, sommes-nous bien chez le lapin blanc ? Se renseigna John.

— Non, Monsieur. Ici est la demeure de la Duchesse Natricia.

— Oh ! Puis-je la rencontrer ?

— Entrez !

— John suivit le Valet de pied dans un couloir sombre.

« Pourquoi depuis que je suis arrivé ici, je rencontre des gens qui ressemblent à des personnes que je connais de près ou de loin ? Je ne suis pourtant pas en train de rêver. Il faudra que je tire cette énigme au clair. »

Il entendit au loin des éclats de voix provenant de l’endroit où ils se rendaient.

Lorsqu’ils atteignirent la porte, le Valet de pied se baissa brusquement et John, derrière elle, se reçut un poêle en plein visage.

— AïïïE ! Grogna-t-il, en massant son nez qui saignait.

— Eh voilà ! Avec vos colères, notre invité est blessé, s’emporta la duchesse contre la cuisinière. Venez mon cher Monsieur que je vous soigne.

John releva les yeux tout en se pinçant le nez pour limiter le saignement. Ses yeux s’agrandirent à sa vue.

— Mary !

— Je suis navré, mon cher, mais mon nom est Duchesse Natricia.

— Pardonnez-moi. Depuis quelques heures, je ne cesse de croiser des personnes qui ressemblent beaucoup à certains de mes amis.

— Et qui est cette Mary ?

— C’est ma fiancée.

— Oh ! J’imagine qu’elle doit être aussi belle que moi, Hi ! Hi ! Hi !

— Oui, j’ai eu beaucoup de chance de la rencontrer.

Il s’essuya le nez avec un linge humide. Finalement, le traumatisme était légé et il ne saignait déjà plus. Son ventre se mit à crier famine. Il devait être près de dix-huit heures, et John qui était un bon mangeur pouvait difficilement sauter plus d'un repas.

— Puis-je vous inviter à dîner ? Cela me fera de la compagnie. Ma cuisinière a préparé une bonne soupe.

Il observa un court instant la cuisinière qui était le portrait craché de Mme Hudson et espérant qu’elle avait le même talent culinaire, répondit :

— Volontiers ! Je meurs de faim.

À la table, la Duchesse avait installé un bébé dans sa poussette entre John et elle.

— C’est votre fils ? Il est si mignon.

— Oui, il me donne bien du mal d’ailleurs.

— Si c’est votre premier, c’est un peu normal, il faut du temps pour s’y habituer.

— C’est vrai. Mon époux, le Duc et moi-même en sommes ravis.

— Où se trouve votre mari ?

— Il travaille au château comme officier dans la garde de la famille royale.

— Je suppose que vous ne le voyez pas souvent.

— Non, malheureusement. Il s’occupe de la sécurité pendant les préparatifs du bal.

— Un bal ?

Au même instant, le Valet de pied arriva avec une lettre.

— Madame, la Reine vous envoie une invitation pour le bal en l’honneur de son fils demain soir.

— Allons bon ! Déjà que demain matin je dois aller au château pour un tournoi de croquet. Quand aurais-je du temps pour moi !

— Vous pourriez tout simplement refuser, lui suggéra John.

— Vous n’y pensez pas ! Elle me couperait la tête si je refuse. Très bien, veuillez lui indiquer que je serais ravie d’y être.

— Bien, Madame.

— Bon, il se fait tard et je dois continuer mon chemin. Je vous remercie pour cet excellent repas.

— Il va faire nuit. Je vous suggère d’aller dormir chez le lapin blanc. Il est connu pour être très hospitalier.

John fit un bond à cette suggestion.

— Je comptais m’y rendre, mais j’ignore où il habite.

— C’est très simple. Continuez sur la route puis prenez à droite et vous finirez par arriver devant sa maison.

Le visage de John s’éclaira. Il allait enfin le rencontrer pour de bon. Il avait tant de choses à lui demander – en plus d’essayer de le ramener avec lui à Baker Street.

— J’imagine que je vous retrouverai demain au château ?

— Au château… Je ne sais pas encore. Je n’ai pas été invité.

— Ça ne serait tardé. Tous les habitants du pays des merveilles y seront obligatoirement.

— Mais je ne suis pas d’ici, donc ils ne me connaissent pas.

— Si vous croisez le Valet pendant sa partie de chasse, croyez-moi, il vous invitera. À bientôt, John.

Il reprit la route, le ventre plein. Il se demandait comment était le Valet et que chassait-il dans ce monde où les animaux étaient eux-mêmes citoyens de ce pays.

John sifflotait un petit air. Savoir qu’il allait retrouver le lapin, extasia John bien plus qu’il ne le pensait – en espérant qu’il n’y aura pas d’autres contre-temps.

 

La nuit tombait lorsqu’il arriva devant la jolie petite maison – et non un terrier – entourée d’une barrière blanche.

« Elle est magnifique ! C’est exactement comme ça que j’imaginais ma future maison. » S’émerveilla John.

 

À SUIVRE…

On y est ! La véritable rencontre de John et du lapin blanc est dans le prochain chapitre qui sera un eu plus court. (désolé !)

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