Panne de chauffage

Chapitre 1

3768 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour il y a plus de 8 ans

En ce dimanche 12 décembre, la neige tombait en gros flocons, s'accumulant sur les routes ce qui rendait toute circulation impossible. L'hiver s'était présenté sur le pays avec dix jours d'avance . Personne n'allait dehors par ce froid, il faudrait être fou pour déambuler au milieu de ce déchaînement de mère nature. Et quand ce n'était pas la neige, c'était le gèle qui paralysait tout. Il semblerait que ce soit l'hiver le plus glacial depuis un siècle d'après les services météos. Personne ne les contredirait.

John regardait par la fenêtre en buvant son thé, observant les quelques badauds qui tentaient tant bien que mal de dégager leur véhicule. Sherlock était dans la cuisine sur une expérience quelconque. Il y avait longtemps qu'il ne faisait plus attention à ce qui ce passait dans cette pièce, du moment qu'il lui restait un coin de table assez propre pour manger. En général, leurs week-ends ensembles se passaient bien. Mais en cet instant, il était contrarié. Sherlock lui avait dit qu'il se plaignait pour un rien mais là, franchement, il n'en pouvait plus et sa patience avait atteint ses limites. Le fait est, qu'il était dans le salon à porter au moins cinq couches de vêtement, sans compter son bonnet, ses gants et son écharpe.

ooOOoo

Tout cela s'est passé tôt ce matin, il devait être trois heures trente et John dormait à poings fermés lorsqu'il entendit une énorme explosion. Il se réveilla en sursaut.

– Quoi ?! Qu'est-ce qui se passe ? ! lança-t-il à la cantonade. Pas le temps de s'habiller, il resta en boxer et passa une robe de chambre. Il enclencha l'interrupteur, mais aucune lumière ne s'alluma. Il prit sa lampe torche et son revolver, mieux valait être prudent. Il descendit les escaliers et entra dans le salon. Personne. Un cri provenant du rez-de-chaussée l'alarma.

– Mme Hudson ! Son cœur palpitait. Il descendit les marches d'un pas précipité et il vit leur logeuse en train de se disputer avec Sherlock devant le tableau du compteur d'électricité. Il souffla. En s'approchant, il sentit une odeur de brûlé et se rendit compte de la gravité de la situation.

– Vous pouvez m'expliquer ce qu'il se passe ?

– Oh, John ! Je n'en peux plus ! Sherlock a tiré dans le compteur d'électricité et ça a explosé ! Résultat : vous n'avez plus d'électricité dans votre logement. Heureusement, celui de mon logement est intact, n'ayant pas le même compteur. Je vais retenir les frais de réparation sur votre loyer Sherlock.

Il regarda Sherlock en fronçant les sourcils.

– Bon Dieu, mais qu'est-ce qu'il t'a prit ? Tu te rends compte qu'on n'a plus de lumière, plus d'eau chaude et surtout plus de chauffage ?

– De quoi te plains-tu ? J'ai résolu ton problème de facture d'électricité. En plus, tu as tendance à abuser du chauffage, on se croirait dans un four et ça m'empêche de réfléchir.

– J'en crois pas mes oreilles ! Il fait moins dix dehors, dans quelques heures, tout l'appartement sera gelé !

– Tu as des pulls et un manteau, tu as tout ce qu'il faut pour résister au froid.

Sur ce, Sherlock remonta au salon. Quant à lui, il resta un moment les bras ballants, complètement déconcerté face à tant de désinvolture, avant de se décider à retourner dans sa chambre.

ooOOoo

John, qui était assis dans son fauteuil, en eut marre d'écouter Sherlock faire ses expériences dans la cuisine et descendit dans la loge de Mme Hudson.

– Mme Hudson, peut-on savoir quand le courant sera remis ?

– Vu que nous sommes dimanche, je ne suis pas sûre de trouver quelqu'un de disponible et étant donné les dégâts, il faudra certainement plusieurs jours avant que tout soit réparé.

– Peut-on au moins avoir du bois pour la cheminée ? demanda-t-il avec espoir.

– Malheureusement non, je n'ai pas fait ramoner la cheminée faute de frais non payés pour la réparation des trous dans le mur de votre salon. Et il est hors de question que vous fassiez plus de dégâts avec un feu de cheminée. Prenez votre mal en patience, John. Après cette tirade un peu sèche, elle retourna dans sa loge.

Il grimaça. C'était Sherlock qui devait payer les frais mais, en manque d'argent, il ne pouvait pas se le permettre et lui encore moins. Si au moins il se faisait payer pour ses enquêtes, ça résoudrait une bonne partie de leurs problèmes. Il soupira tout en remontant. Sans lumière, ça pouvait encore passer, mais sans chauffage, c'était tout bonnement impossible.

Sherlock s'était allongé sur le canapé, il s'ennuyait, évidemment. Cela faisait presque deux semaines qu'il n'avait pas eu d'affaires, même ses expériences n'arrivaient plus à l'occuper bien longtemps. Il harcelait le pauvre inspecteur Lestrade tous les jours pour qu'il lui confie une enquête, mais à chaque fois, il se fait rabrouer. Alors pendant ce temps, il détruisait un peu tout ce qui lui passait par la main. Mais son dernier coup avec l'électricité ne l'avait nullement fait rire. Il entra dans la cuisine pour se préparer un nouveau thé, histoire de se réchauffer un peu, il en prépara également pour son ami par automatisme bien qu'aujourd'hui, il ne le méritait probablement pas. Il regarda le thermomètre qui affichait quatre degrés, il soufflait, faisait les cent pas, il n'arrivait pas à se réchauffer. Sherlock grogna.

– Arrête de gesticuler, tu me fatigues.

– J'ai froid ! Comment fais-tu pour supporter cette température, habillé si légèrement ?

– Contrairement aux apparences, le froid ne me dérange pas. Et puis c'est une question de mental, c'est ton cerveau qui te dit qu'il fait froid mais dis-toi que tu es en juillet et qu'il fait une chaleur estivale. Tu verras, tu te sentiras mieux.

John marmonna : « il fait chaud, il fait chaud ! » Tout en s'asseyant dans son fauteuil. Il bût une autre gorgée de son thé mais au bout de quelques minutes, il se releva.

– Ça ne marche pas, j'ai toujours aussi froid, s'impatienta-t-il.

Sherlock leva les yeux au ciel et soupira. Il se leva pour prendre la couverture qui était sur une chaise et la passa sur les épaules.

– Viens-là John, dit-il, en se rasseyant sur le canapé et en lui montrant la place à côté de lui.

– Pourquoi ? demanda-t-il simplement.

– Tu ne cesses de me dire que tu as froid alors je me propose de te réchauffer.

John leva un sourcil puis accepta sa demande. Il s'assit à côté de lui et ce dernier rabattit la couverture sur ses épaules puis enroulant l'autre pan devant. John hésita un peu, ne se sentant pas très à l'aise. Il n'avait pas pour habitude de se faire dorloter par un homme, mais finalement, poussé par le froid, il se colla à son ami.

– C'est incroyable ! J'ai l'impression d'être à côté d'une bouillotte. Je comprends pourquoi tu n'as pas froid, constata-t-il, avec un regard appréciateur.

– Mmm, répondit son ami, alors qu'il était concentré sur son portable.

John retira son écharpe, ses gants, son bonnet ainsi que ses chaussons et remonta ses pieds sur le canapé pour les mettre sous la couverture en se calant davantage contre Sherlock. Il se sentait beaucoup mieux. Il regarda un moment ce qu'il faisait sur son téléphone puis commença doucement à s'assoupir. Quand son souffle ralentit, Sherlock releva les yeux et les tourna du côté du docteur. Il sourit. Il appréciait sa proximité. Il continua à pianoter sur les touches de son téléphone d'une main tout en passant l'autre bras autour des épaules de John. Son attention diminua au bout d'une demi-heure, il lâcha son portable, posa sa tête contre celle de John et s'endormit presque aussitôt.

Sur les coups de onze heures, quelqu'un sonna à la porte du bas. Sherlock émergea lentement de son sommeil. Quelques instants plus tard Mme Hudson entra dans le salon pour annoncer leur visiteur.

– Sherlock, l'inspecteur Lestrade souhaite vous parler et... Oh ! Elle venait de remarquer la position de ses deux locataires. Que vous êtes mignons tous les deux !

Sherlock secoua John pour le réveiller et se dirigea vers la fenêtre. Dehors, la neige s'était arrêtée. Quand Lestrade entra dans la pièce, laissant redescendre Mme Hudson, John baillait largement.

– Bonjour John, Sherlock. Ah, il fait froid ici, vous avez un problème de chauffage ? demanda-t-il tout en rejetant de la buée en parlant.

– Venez-en au fait Inspecteur.

– J'ai une affaire qui vient de me tomber dessus ce matin de bonne heure... Un vol de toute évidence, seulement, il s'agit d'un homme de la haute société, et on m'a demandé de mener cette enquête en toute discrétion. D'ailleurs, un homme du gouvernement est sur place et vous attend.

– Très bien, amenez-nous sur place.

ooOOoo

Trois policiers se maintenaient aux abords de la maison. En voyant la limousine noire, Sherlock savait parfaitement à qui il aurait affaire. Ils montèrent à l'étage et trouvèrent Mycroft Holmes ainsi qu'un autre homme à ses côtés dans le salon.

– Merci Inspecteur, vous pouvez nous laisser, lâcha froidement Mycroft.

Lestrade grommela tout en sortant de la maison.

– Bonjour Sherlock, John. Voici sir Henry Wilson. Il est l'un de nos meilleurs biologistes et botanistes. Mr Wilson, voici le docteur Watson et mon frère Sherlock.

– Bonjour messieurs, Mr Holmes m'a dit beaucoup de bien concernant votre aptitude à mener vos enquêtes en toute discrétion. Je travaillais à la mise au point d'un composé chimique pour le compte d'une société privée, mais la formule m'a été volée cette nuit pendant que toute le monde dormait. Il serait désastreux que ce gaz soit mis au point et répandu sur la population.

– Quel genre d'effet a ce gaz ? demanda John.

Tous se tournèrent vers lui.

– C'est confidentiel. Je vous demande juste de retrouver mes documents.

– Si je ne m'abuse, commença Sherlock, vous travaillez pour le compte d'une société dont le cofondateur est mon frère. Je présume qu'il s'agit du club Diogène.

Mycroft toussota mal à l'aise.

– Tu présumes bien, c'est pour ça que je suis persuadé que le voleur est au courant de nos... activités.

– Une affaire plutôt simple aux premiers abords. J'aimerais parler à tous les membres du club.

– Le club est fermé, passe demain matin. Je ferais en sorte qu'ils soient tous présents.

– Bien ! Voyons l'endroit où étaient gardés les documents.

Sherlock examina le coffre qui avait contenu les documents. Ne trouvant rien de probant, il commença à examiner le plancher et il sembla s'intéresser à quelque chose sur le sol.

– Êtes-vous fumeur Mr Wilson ?

– Occasionnellement, je fume le cigare.

– Des fumeurs de cigarettes dans votre maison ?

– Non et de toute façon je n'autorise personne à fumer à l'intérieur.

– Parmi tous les membres du club, combien sont fumeurs ?

– Un grand nombre, je te ferais parvenir la liste dans la soirée, répondit Mycroft.

– Très bien, j'en ai fini ici.

Sherlock et John prirent un taxi pour rentrer.

– Je me demande ce qu'il peut y avoir dans ce document. Ce n'est pas secret défense. Un brevet non déposé peut-être ? s'interrogea John.

– A ton avis, quelle est l'activité du club Diogène ?

– Eh bien il me semble que c'est un lieu réservé aux hommes qui cherchent la tranquillité. Un espace de lecture silencieuse peu conventionnel vu que personne ne communique entre eux.

– C'est une bonne définition de ce lieu mais incomplète. Comme tu l'as noté, seuls les hommes qui souhaitent s'extirper de la société ont accès à ce lieu, donc très sélectif. Seulement, la lecture n'est qu'une façade à leur activité. Le bâtiment est bien trop grand pour n'utiliser que le grand salon commun et la salle pour les étrangers. Sache qu'il y a aussi une cuisine et des chambres.

– Une sorte d'hôtel pour qui veut s'éloigner de chez lui et se changer les idées quelque temps j'imagine ou quelque chose d'autres ? Réunions secrètes ?

– Tu ne crois pas si bien dire même s'ils ont beaucoup d'influences sur l'État et les sociétés… un véritable service secret. Mais concernant cette affaire, il s'agit de quelque chose de plus terre à terre. À ton avis, que crois-tu qu'ils font quand ils ne lisent pas ?

John fronça les sourcils dans une intense concentration. Que veut dire Sherlock ? Que peuvent faire ces hommes pour s'occuper s'ils ne discutent pas entre eux... Tout à coup, la lumière vint et il regarda Sherlock intensément.

– Non, tu ne veux pas dire... enfin... je veux dire... Il faisait de grand geste nerveusement. Est-ce qu'ils... enfin tu vois ce que je veux dire ?

– Oui, tu es arrivé à la même conclusion que moi, dit-il, avec un sourire en coin.

– Et euh hem... tu crois que ton frère...

– Non, ce n'est pas le genre de Mycroft, tout comme je crois que ce n'est pas le cas de tous les membres du club. C'est pour cela que l'enquête va se cibler sur qu'un petit nombre de personne.

John réfléchit un moment avant de lâcher :

- Mais quel rapport y a-t-il entre ça et le gaz ?

Sherlock lui fit un clin d'œil mais ne répondit pas à la question.

ooOOoo

Le taxi arriva enfin au 221B Baker Street.

En entrant, ils virent Mme Hudson et un homme qui regardaient le compteur d'électricité. Mme Hudson vint serrer Sherlock dans ses bras.

– Oh Sherlock, je suis vraiment désolée et je vous remercie du fond du cœur. Vous nous avez sauvé la vie !

Sherlock leva les sourcils et regarda John avec incrédulité. Lui non plus ne comprenait pas ce qu'il se passait. L'électricien se tourna vers eux et leur expliqua.

– Vous avez de la chance que le compteur ait grillé sinon personne ne s'en serait rendu compte. Vous avez échappé à une catastrophe. Votre installation est défectueuse et avant la fin de l'hiver, vous auriez pu avoir un incendie.

– Tu le savais ? chuchota le blond au brun.

– C'est un pur hasard.

– Donnez-moi deux jours et votre installation sera entièrement refaite. Je commencerai par le rez-de-chaussée puis les étages.

– Faites donc ! Certaines personnes sont frileuses ici, dit-il ironiquement.

Mme Hudson et John lui lancèrent un regard noir, mais il se contenta de hausser les épaules et monta à l'étage. John le suivit après avoir remercié Mme Hudson. Il ferma la porte et posa son manteau. Il remarqua que Sherlock était allongé sur le canapé, le dos tourné. Il boudait. Il se demandait bien pourquoi. Il entra dans la cuisine pour préparer le déjeuner.

L'après-midi se passa très lentement, Sherlock s'affairait à découvrir de quel type de tabac étaient composées les cendres trouvées sur le lieu du vol. John avait les extrémités gelées et il avait hâte de remettre le chauffage, mais en attendant, il se posait la question concernant la nuit précédente. Dès le réveil le matin, il était frigorifié et après une journée au froid, sa chambre ressemblait à un congélateur. Et le comble de tout, il se rappela qu'il n'y avait pas d'eau chaude depuis la coupure de courant, donc pas de douche aujourd'hui. Il soupira.

La sonnette de la porte d'entrée retentit. Cela devait sûrement être les informations qu'attendait Sherlock sur l'affaire. En effet, quelques secondes plus tard, Mme Hudson leur apporta un dossier bleu contenant l'identité des membres du club Diogène. Sherlock consulta les documents et un sourire apparu.

– Tu as trouvé quelque chose d'intéressant ?

– Oui, Mycroft a eu la bonne idée de rajouter les différents tabacs qu'utilise chaque membre. Il ne reste que quatre suspects. Je pense que l'affaire sera vite résolue.

Il était plus de vingt-deux heures, John ferma le livre qu'il était en train de lire. Il faisait presque zéro degré, un froid polaire. Il a fait l'effort de ne pas se plaindre une seule fois mais tout son corps était figé, il n'arrivait même plus à se lever de son fauteuil. Il regarda Sherlock qui jouait une mélodie avec son violon. Il n'osa pas lui demander de l'aide. Il se massa les jambes pour les réchauffer et permettre au sang de mieux circuler. Sherlock tourna la tête vers lui, se rendant compte de son manège.

– Tu as froid.

Ce n'était pas une question. John le regardait à peine, préférant éviter toute remarque cinglante de sa part. Sherlock rangea son instrument, se préparant à aller se coucher aussi. Alors que John commençait à se sentir mieux, il se leva enfin et se dirigea vers la porte pour monter dans sa chambre. Il n'était vraiment pas pressé de se retrouver là-haut alors qu'il faisait encore plus froid que dans le salon. Il posa à peine sa main sur la poignée lorsque Sherlock l'intercepta en posant la sienne sur son bras.

– Je te déconseille d'aller te coucher dans ta chambre, je n'aimerais pas que tu tombes malade.

– Bon ben je pourrais dormir sur le canapé, avec quelques vêtements chauds et une bonne couverture...

– Ce n'est pas une bonne idée, le canapé est dur et tu pourrais te faire mal.

– Donc tu suggères que j'aille à l'hôtel, dis-je avec irritation.

– Tu dormiras dans ma chambre.

– Pardon ?! Et tu dormiras où ?

– Mais comme toujours, dans mon lit.

John le regarda avec incrédulité.

– Tu proposes que je dorme avec toi ?

– Il fait aussi froid dans ma chambre, mais on pourra au moins se réchauffer mutuellement.

John rougit légèrement. D'un côté, dormir avec Sherlock était gênant, ça dépassait le cadre de l'intimité qu'ils s'étaient promis de respecter, mais d'un autre côté, c'était un cas de force majeur. Il faisait tellement froid que sa proposition était tentante, se souvenant combien il était bien au chaud ce matin au côté du brun. Il accepta donc sa proposition et se dirigea vers sa chambre, suivi de ce dernier qui l'observait, l'œil brillant. Quelque chose lui disait que la nuit ne serait pas de tout repos vu sa tendance à ne pas beaucoup dormir...

A SUIVRE...

Laisser un commentaire ?