Sanctuary's songs
Je te regarde dormir paisiblement à mes cotés. Ton souffle régulier soulève doucement le drap que tu tiens relevé sur ta poitrine. Je souris tendrement devant ce spectacle. Qui aurait pu croire que ce qui n'aurait dû être qu'une aventure d'un soir allait durer des années.
En cette belle soirée de mai, j'avais accompagné les autres chevaliers d'or, encore célibataires, pour une virée au nouveau bar à la mode de la capitale grecque.
A vrai dire passer la moitié de la nuit à boire en compagnie de Masque de Mort et Aphrodite ne m'enchantait guère mais c'était ça ou rester avec Mü et Shaka à débattre des bienfaits de la méditation. Heureusement Aldébaran et Dokho avaient décidé de se joindre à nous.
Notre escapade nocturne semblait donc moins désagréable que prévu. Peu de temps après notre arrivée au « Sacred owl », alors que je passais commande auprès du barman, je t'ai aperçue sirotant un jus de fruit.
A ce moment précis, tu as levé les yeux et tu m'as souri. J'ai eu alors l'impression que mon cœur manquait un battement. Après avoir remis leurs consommations à mes compagnons d'arme, je suis allé te rejoindre et nous avons longuement discuté.
J'ai ainsi appris que tu habitais Rodorio mais que tu te rendais à Athènes tous les vendredis soirs pour passer la soirée avec ta meilleure amie. Ce soir-là malheureusement elle avait dû te faire faux bond pour une raison familiale. Tu me fis remarquer que pour un chevalier d'or venir dans un bar nommé la chouette sacrée était ironique et nous rîmes de bon cœur à cette remarque. De fil en aiguille nous finîmes la soirée dans ta chambre.
Je pensais seulement assouvir un désir personnel et au matin nous nous quittâmes sans rien promettre, reprenant notre vie chacun de notre côté.
Néanmoins, au fil des jours qui s'écoulaient j'eus l'impression qu'un vide s'emparait de plus en plus de mon cœur, si bien que je finis par débarquer sur ton lieu de travail pour te proposer un véritable rendez-vous.
Je n'aurais jamais cru aimer ainsi
Être surpris par ton sourire
Ni jamais cru sentir, le froid, le vide
Lorsque ton rire
Ne résonne plus.
Perdu dans mes souvenirs, je prends soudain conscience du temps qui passe.
Trente années se sont écoulées depuis notre première nuit d'amour mais j'ai l'impression que c'était hier. Tu remues dans ton sommeil. Quelques mèches de cheveux blancs strient ta chevelure aile de corbeau et tu as maintenant de petites rides aux coins des yeux pourtant tu me sembles toujours aussi belle. J'ai moi aussi vieilli, cependant avec toi à mes côtés j'ai toujours l'impression d'être ce jeune homme, un peu trop sûr de lui, qui te faisait la cour.
Aujourd'hui comme hier nous imaginons l'avenir, créant des projets à plus ou moins long terme. Bâtissant notre futur main dans la main. Qui aurait cru que je puisse connaître une telle complicité avec quelqu'un ? Moi qui, avant de te rencontrer, avais tendance à cacher mon sombre passé derrière mon statut de chevalier. L'armure du Capricorne servait de rempart entre moi et le monde extérieur.
Dans le vent des années
Je t'aime
Dans les mots du passé
Je t'aime
Et regarder le futur
Comme on écrirait un poème
Derrière l'armure
Où je cache mes peines
Derrière ce mur je t'écrirais
Je t'aime
Vraiment je n'aurais jamais imaginé qu'après autant d'années passées côte à côte, notre amour puisse être toujours aussi intense.
J'ai souvent entendu dire qu'avec le temps, la passion s'étiole et se trouve remplacée par un train-train quotidien qui à force de gestes et de mots répétés donne l'illusion d'être toujours là. Oh bien sûr il nous arrive parfois d'avoir des différends. Nos avis, notre façon de voir les choses ne sont pas toujours identiques. Mais même quand le doute essaye de s'insinuer entre nous, notre amour prend le dessus. Nous prenons le temps de discuter, de mettre nos points-de-vue en commun et nous trouvons une solution qui nous convient à tous les deux.
Repenser à nos disputes passées me mine un peu le moral alors je décide de me lever pour remettre de l'ordre dans mes idées. J’erre quelques instants dans le salon puis mes pas me conduisent à la cuisine. Je fouine dans le frigo et me sers un verre de jus de pommes. Sentant une présence derrière moi, je me retourne et tu es là. Je ne t'ai pas entendue arriver. Tu poses ta main sur mon visage, caresse ma joue et me souris. Ton regard plonge dans le mien et ma morosité passagère s'enfuit définitivement.
Et puis jamais penser qu'un tel amour
Pouvait durer jour après jour
Les souvenirs figés n'existent pas
Les gestes usés c'est pas pour toi
Dans les matins brumeux
Je t'aime
Quand tu ouvres les yeux
Je t'aime
Et dans les instants de doutes
Quand nos routes ne sont plus les mêmes
Je prends le temps, je cherche où ça nous mène
Je prends le temps de te dire
Je t'aime
Je t'embrasse debout au milieu de la cuisine plongée dans la pénombre. Si l'habitude tue le désir, nous avons réussi à passer entre les mailles du filet. Certes certains de nos gestes sont devenus quotidiens néanmoins nous avons su entretenir la flamme des premiers jours et continuons de réinventer à chaque instant notre intimité. D'ailleurs cela fait déjà un moment que la cuisine n'a plus été témoin de nos ébats.
Le souffle court, je reste blotti dans tes bras. J'aime sentir la chaleur de ton corps contre le mien. Je me sens si bien avec toi que j'aimerais stopper le cours du temps, rester en ta compagnie indéfiniment, te chérir pour l'éternité.
Je n'aurais jamais cru aimer ainsi
Sans l'habitude qui tue l'envie
Avec toi j'ai compris qu'une seule vie
Ne suffit pas
Quand on aime comme ça.
Je caresse ta peau nue, savoure les frissons qui te parcourent à mon contact. Je me redresse à regret et t'observe à nouveau.
J'aime tout en toi : ton corps gracieux, ton esprit vif, ta façon de plisser le nez quand tu es contrariée et mille autres petits détails qui te rendent irrésistible.
Le monde peut bien arrêter de tourner demain, les ténèbres s'abattre une nouvelle fois sur nous, je ne crains plus rien. Tant que tu te tiendras à mes côtés plus rien ne pourra m'atteindre.
Je me penche pour t'embrasser mais avant que me lèvres ne touchent les tiennes, je t'entends me murmurer les mots qui me comblent de bonheur.
« Je t'aime Shura »
Dans les fleurs de l'été
Je t'aime
Ta façon de marcher
Je l'aime
Et parler de la tendresse
Avec les mots d'une maîtresse
Rien ne me blesse
Quand tu me dis
Je t'aime.