Chevalier, mais pas trop ...

Chapitre 16 : UNE NOUVELLE RECRUE?

4091 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 14/02/2024 13:52

Disclaimer : cf. chapitre 1

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CHAPITRE 16

UNE NOUVELLE RECRUE ?

 

—  NOOOOOOOOOOON !


         Iris sortit de sa cachette à toute vitesse en voyant que Polydeukès allait très probablement achever Saga. Mais qu’attendait-il dans cette posture ? La fin du monde ? Ce n’était pas de cette manière qu’il pourrait esquiver l’attaque de son maître ! Mais l’adolescent ne semblait plus en mesure d’opposer la moindre résistance tant il était éreinté et décontenancé. Iris vit très nettement le jet de lumière se diriger tout droit sur Saga. Il était d’une telle lenteur qu’un misérable gastéropode aurait eu le temps de traverser le chemin du rayon sans perdre sa coquille. Saga était résolu à se faire tuer mais par Iris à le perdre. Et cette dernière ne sachant comment contenir ou renvoyer l’attaque d’un chevalier d’or, préféra bondir sur l’apprenti pour lui éviter un long séjour à l’hôpital voire un aller simple au royaume d’Hadès.


         Les deux enfants roulèrent sur le côté, dans un nuage de poussière. Tout en culbutant, Iris tourna la tête pour distinguer sans peine le rayon lumineux passer à côté d’eux à une allure déplorable. Soulagée d’avoir sauvé la vie à son compagnon, la petite se redressa sur son arrière-train, puis se tint enfin debout, dans une attitude de défi face à Polydeukès. Saga se releva lui aussi, sonné par ce qui venait de se passer et complètement hébété. Il ne dit mot. Le chevalier d’or avait rompu sa pose.


         Soudain, Iris se précipita sur ce dernier et lui sauta dessus. Elle s’agrippa au plastron qui lui couvrait le torse et lui décocha un magistral coup de poing avant de retomber à terre, sur le derrière, les yeux toujours rivés sur la personne qu’elle commençait à détester. Lui la regardait sans broncher, comme s’il n’était pas conscient du mal qu’il aurait pu provoquer si Iris n’était pas intervenue à temps.


—  Mais qu’est-ce qui vous a pris de faire ça ? Si vous tenez absolument à tuer votre élève, il faudra d’abord vous débarrasser de moi ! Et je suis plutôt coriace !


Iris se redressa, prête à subir les foudres du chevalier, quand ce dernier réagit enfin, mais pas du tout comme elle s’y serait attendue. Car après tout, elle avait assisté à un entraînement auquel sa présence n’était absolument pas tolérée. Mais l’attitude du maître fit plus peur à Iris que s’il s’était réellement mis en colère.


—  Je m’en serais douté, fit-il sur un ton assuré et sans aucune marque d’hostilité. Mais j’avoue que j’ai encore beaucoup de mal à comprendre pourquoi de tels phénomènes apparaissent aussi tardivement.

—  Mais quels phénomènes ? De quoi vous parlez ?

—  Ta rapidité ! Tu ne t’en es pas rendue compte mais tu t’es déplacée à la vitesse de la lumière afin de sauver Saga.

—  Alors ça, ça dépasse tout ! Il lit dans mes pensées maintenant et il me répond !

—  Non, jeune fille ; je n’ai pas cette capacité, continua tranquillement Polydeukès. C’est toi qui, en réalité, projettes tes pensées à ton interlocuteur par le biais de ta cosmo-énergie.


A ce mot, Saga, qui s’était relevé et rapproché pendant qu’Iris et son maître conversaient, roula des yeux exorbités et s’exclama :


—  Je n’ai donc pas rêvé ! C’est bien toi que j’ai entendu hurler tout à l’heure ! Ce que tu as fait est prodigieux !

—  Prodigieux, certes, mais il faut tenir cela secret vis-à-vis de la population pour le moment. J’en parlerai au Grand Pope le plus rapidement possible.


Effrayée par ce qu’elle venait d’entendre, Iris leva les mains à la hauteur de son visage. « Vitesse de la lumière », « cosmo-énergie ». Ces deux seuls mots suffirent à lui faire prendre conscience de la nouvelle route qui allait peut-être se dérouler devant elle. Elle découvrit, non sans frémissement, sa nouvelle identité, et surtout, les pouvoirs qui résidaient de manière latente entre ses mains. Cependant, une question la taraudait tandis qu’elle regardait Polydeukès d’un air suppliant :


—  Mais pourquoi je n’ai pas … ?


Le chevalier lui coupa « la parole » d’un geste de la main.


—  Il vaut mieux éviter d’ébruiter l’affaire en ces lieux. Rentrons directement chez Daphné. J’ai quelques questions à lui poser ainsi qu’à toi. En ce qui te concerne Saga, l’entraînement est terminé pour aujourd’hui mais tu peux assister à la conversation.


Sur le trajet qui les ramenait chez le médecin, Iris n’osait plus penser à quoi que ce soit de peur d’être entendue par inadvertance. Saga marchait à côté d’elle tandis que Polydeukès les précédait. La petite ne regardait que ses pieds : le moindre caillou ou brin d’herbe qu’elle rencontrait devait lui permettre de ne pas « penser trop fort » mais la main de Saga dans la sienne (il fallait profiter de cette situation !) suffit à lui faire perdre sa concentration.


—  Merci encore pour tout à l’heure ! Sans ton intervention, j’étais très mal parti.


Elle le regarda, incrédule, car elle-même ne comprenait pas comment elle avait pu soudainement réaliser un tel prodige. Avait-elle, bien caché au plus profond de son être, ce potentiel, dès la naissance ? Était-ce une situation d’urgence absolue qui avait révélé ce pouvoir ? Tout cela finissait par effrayer la petite mais aussi la griser. Disposer des mêmes pouvoirs que les chevaliers ! C’était démesuré ! Ce serait un fardeau trop brutal à porter. Non, Saga ne devait son salut qu’à un extraordinaire coup de chance. Mais comment expliquer qu’on l’entendait parler alors qu’elle ne remuait pas les lèvres ?


—  Et alors ? Tu n’arrives plus à parler ? Ne me dis pas que tu as déjà perdu tes pouvoirs ?


Saga ne l’avait pas entendu analyser la situation ce qui signifiait qu’elle pouvait choisir d’être entendue ou non. Il fallait diriger ses pensées vers son interlocuteur comme si on le hélait au loin. Il fallait vérifier cette théorie :


—  Et comme ça ? C’est mieux ?

—  Voilà ! Je préfère !


Rassuré, Saga lui lâcha la main. Iris fut ravie de constater que son hypothèse était vérifiée. Au final, c’était encore plus simple que d’apprendre à parler. Iris esquissa un petit sourire qui, malgré sa discrétion, fut aussitôt saisi par Saga comme prétexte pour continuer la conversation :


—  Pourquoi ris-tu ?

—  Pour rien !

—  Dites, vous deux ! Vous devriez être un peu plus discrets. Nous ne sommes pas encore arrivés chez Daphné. D’une part, il est inhabituellement tôt pour une fin d’entraînement, et d’autre part, les gens que nous croiserons trouveront étrange de te voir parler tout seul, Saga, sans qu’Iris ait besoin de recourir aux gestes. Tâchez de moins bavarder. Nous ne sommes plus très loin maintenant.


Cet homme était redoutable de logique et de bon sens. Parmi les chevaliers d’or, il devait certainement être le préféré du Grand Pope et susciter bien des jalousies. Cela n’étonnait pas Saga qu’un jour il succédât à son supérieur hiérarchique.


Le trio arriva enfin à destination. Les fenêtres étaient grandes ouvertes mais ils ne purent distinguer Daphné qui se trouvait dans son cabinet de consultation. Iris se permit d’entrer et invita ses hôtes à en faire autant. Chacun prit une chaise autour de la grande table en attendant que Daphné quitte son patient. Dix minutes au moins passèrent sans que le moindre échange de paroles ne se produisit : l’atmosphère était lourde. Polydeukès demeurait la tête basse, les yeux fermés, les bras croisés sur la poitrine. Il était d’un calme olympien. A sa gauche, Saga scrutait la pièce comme s’il la découvrait pour la première fois. Il souriait, malgré ses blessures, mais n’adressa plus la parole à Iris, attendant le feu vert de son maître. Iris, quant à elle, n’osait pas non plus entrer en contact télépathique avec lui.


Alors que les deux hommes de l’assemblée étaient sereins, Iris ne pouvait s’empêcher de balancer ses pieds contre ceux de la chaise dans un tempo régulier. Au bout d’un moment, Polydeukès fronça les sourcils, probablement pour signaler son agacement, et la fillette s’arrêta net. La pièce fut à nouveau baignée de ce silence monacal. Mais Iris devait s’occuper. Pour tenter de mettre ses invités à l’aise, elle leur proposa un rafraîchissement. Non seulement cela lui permettait de bouger, mais en plus, elle respectait les règles de l’hospitalité grecque. Elle tenta alors de s’adresser simultanément aux deux personnes. Le résultat fut éloquent : Polydeukès acquiesça sans pour autant ouvrir les yeux et Saga, prenant toujours exemple sur son mentor, fit de même mais en secouant plusieurs fois la tête frénétiquement. Fantastique ! Et la cerise sur le gâteau, c’est qu’Iris ne fournissait absolument aucun effort pour arriver à un tel résultat.


Elle se leva donc de table pour s’exécuter. Elle prit trois verres dans le placard et les disposa devant chacun d’eux. Puis, elle s’éloigna à nouveau de la table pour sortir une cruche et la remplir d’eau bien fraîche. La porte du cabinet qui jouxtait la demeure s’ouvrit enfin et Daphné apparut, surprise de cette visite inattendue et du comité qui la composait. Pendant ce laps de temps, la petite s’affairait auprès des invités puis s’installa sur sa chaise.


—  Tiens ! Vous tous ici ! Je ne vous ai même pas entendu entrer.

—  Nous tenions à être les plus discrets possibles, répondit Polydeukès qui semblait sorti de sa méditation. Est-ce que nous pouvons fermer les fenêtres ? L’affaire est trop importante pour tomber dans une oreille indiscrète.

—  Bien sûr … mais …


Daphné bredouilla et ne put finir sa phrase. Saga, sur un coup d’œil de son professeur, comprit qu’il lui fallut isoler l’endroit. Il se leva, ferma les fenêtres et vérifia que plus personne ne se trouvait dans le cabinet. Il passa même les autres pièces en revue. Daphné sourit nerveusement en voyant tant de précautions.

—  Ne t’inquiète pas. J’ai fermé derrière le dernier patient et il n’y a personne d’autre que nous ici. Mais pourquoi tant de mystères ?

—  Installe-toi et écoute-moi bien, dit doucement Polydeukès en invitant le médecin à s’assoir sur la dernière chaise vacante qui était à sa droite.

—  Il s’est passé quelque chose de grave ? C’est Iris, n’est-ce pas ? Qu’est-ce qu’elle a fait ? Tu l’as surprise en train de se battre, une fois de plus ?

—  Il s’agit bien d’Iris mais pour un tout autre sujet.


Daphné n’était qu’à demi soulagée mais elle regardait Polydeukès avec un grand intérêt.


—  As-tu remarqué, depuis quelques temps, des phénomènes … disons … inexplicables chez Iris ?


Daphné posa ses yeux sur la petite qui buvait tranquillement son verre d’eau puis regarda à nouveau le chevalier.


—  « Phénomènes inexplicables » ? Non … pas que je sache … Physiquement, elle est normale. Excepté l’accroissement « explicable » du nombre de bleus, je n’ai rien remarqué de suspect.

—  Est-ce qu’elle t’a déjà parlé ?

—  Bien sûr ! Quelle question ! Avec les mains ou par écrit !

—  Oui, c’est vrai ! C’est stupide, sourit Polydeukès. Je reformule ma question : as-tu déjà entendu sa voix d’une manière ou d’une autre bien qu’elle soit muette ?


Daphné considérait maintenant Polydeukès avec méfiance et une bonne dose d’inquiétude. Elle perdit patience :


—  Mais que veut dire tout cet interrogatoire ? Viens-en au fait ! Que se passe-t-il avec Iris ? A-t-elle retrouvé l’usage de la parole ?

—  On peut envisager la situation sous cet angle-là, lança le chevalier de manière énigmatique.


Daphné, à bout de nerfs, tapa du poing sur la table et se leva. Iris elle-même sursauta. La praticienne se mit à vociférer :


—  Mais bon sang ! Va-t-on enfin m’expliquer ce qui se passe dans cette maison ?


Elle regardait le chevalier fiévreusement. Quant à Saga, il ne disait plus un mot mais suivait la scène avec beaucoup d’attention.


—  Calme-toi et ne parle pas aussi fort. Rassieds-toi et surtout accroche-toi bien : ce que je vais t’annoncer risque de te choquer mais aussi de te faire plaisir, lui dit-il sur un ton affable tout en enveloppant les mains de Daphné dans les siennes.

—  Tu crois que je peux me calmer quand tu me dis des choses pareilles ? Au contraire, ça m’in…

—  Je crois qu’Iris possède une cosmo-énergie et que cette dernière est semblable à celle des chevaliers d’or même si je ne l’ai ressentie que fugacement.

Le sol semblait se dérober sous les pieds de Daphné. Elle s’attendait à tout sauf à ça. Le choc fut tel qu’elle resta silencieuse une bonne minute. Polydeukès tenait toujours ses mains dans les siennes. Il continua en essayant de ménager d’autres frayeurs.


—  Je voulais t’épargner ce genre d’émotions mais tu ne m’as pas vraiment laissé le choix. Je vais te raconter ce qui s’est passé.


Il évoqua ainsi l’incident qui lui permit de confirmer ses hypothèses puis céda la parole à Saga qui, tout heureux d’endosser une telle responsabilité, se fit le parfait écho de son maître :


—  Il dit vrai ! conclut-il. Si elle n’était pas intervenue, je ne serais probablement plus là pour te le dire !


Polydeukès ne desserrait pas son étreinte. La jeune femme tremblait et devenait blême. Mais Saga ne s’arrêta pas en si bon chemin maintenant qu’il remplissait parfaitement le rôle du héraut.


—  Au début, je ne faisais pas attention à son brusque changement de personnalité. Mais suite à cet incident, il m’est revenu autre chose en tête. Quand elle s’est battue contre Milo et que je voulais les séparer, je n’avais pas pu parce qu’une force étrange qui émanait d’elle m’avait cloué sur place et m’empêchait de bouger. C’était bien une cosmo-énergie.


Un cri étouffé ramena toute l’attention de l’auditoire sur Daphné. Polydeukès s’inquiéta :


—  Que se passe-t-il ? Tu ne te sens pas bien ?


Daphné mit quelques instants avant de répondre. Tout le monde pensait qu’elle avait supporté le plus pénible mais visiblement, ils étaient dans l’erreur. Elle revint à elle. Polydeukès l’enveloppa de son bras droit ce qui lui donna un regain de courage.

—  Ce que vient de dire Saga me rappelle ce que j’ai vécu moi aussi. J’avais complètement oublié cet épisode. Immédiatement après son agression, Iris est allée se nettoyer à la brosse et à l’eau bouillante. En voulant l’approcher pour l’empêcher de se mutiler davantage, j’ai senti cette même force me paralyser.


Quelques instants passèrent pendant lesquels ni Saga, ni Iris n’osèrent bouger et encore moins parler. Daphné tentait de reprendre un peu de consistance suite aux différents aveux. Elle regardait cependant difficilement dans la direction de sa fille qui ne savait si elle la craignait dorénavant ou la plaignait. Polydeukès lui offrit son verre qu’elle prit pour n’en boire qu’une gorgée. Il lui aurait fallu un breuvage plus fort et revigorant pour lui faire passer cette amère pilule : sa petite fille disposait à présent d’une puissance, encore balbutiante, mais équivalente à celle des défenseurs du Sanctuaire. Pire encore, cette énergie était identique à celle des plus hauts gradés parmi les chevaliers d’Athéna. Polydeukès posa alors sa main sur l’avant-bras gauche de Daphné ce qui ne manqua pas de la faire tressaillir.


—  Mais au fait, tu m’as demandé tout à l’heure si elle m’avait déjà parlé. Que voulais-tu dire exactement ?


Iris sentait que c’était à son tour d’entrer en scène mais elle attendit un signe de son père d’adoption.


—  Demande-le lui, dit le chevalier en désignant la petite du menton.


Lentement, Daphné pivota sur sa chaise vers la droite, comme si elle se préparait psychologiquement à une annonce encore plus terrible que les précédentes. Elle regarda Iris anxieusement.


—  Il … il paraît que tu peux … parler, fit-elle avec hésitation en mettant toutes les précautions nécessaires dans le ton de sa voix.

—  Je ne peux toujours pas parler mais je peux communiquer.


Iris s’attendait à ce que Daphné défaillît mais elle n’observa aucune réaction de sa part. La praticienne demeurait aussi raide qu’une statue de marbre. Ce fut pour la petite une invitation à poursuivre la conversation.


—  Polydeukès m’a dit que c’était à cause de cette cosmo-énergie que tu peux m’entendre. Mais tu ne dois pas avoir peur : je ne suis pas devenue un monstre. Tu peux même te réjouir puisque on va économiser du papier maintenant ! risqua la petite pour dédramatiser la situation.


Daphné sourit imperceptiblement à ce trait d’humour, se leva de sa chaise et prit sa fille dans une étreinte d’ours. Iris observa Saga : des larmes coulaient sur ses joues. Il était vraiment trop sentimental pour un futur chevalier d’or ! Mais comme il calquait tous ses gestes sur ceux de son maître …


—  Mon cœur ! Je crois que tu n’as pas fini de m’étonner. En tout cas, je ne peux pas dire que je m’ennuie avec toi ! Promets-moi quand même une chose : maintenant que te voilà dotée de certains pouvoirs que je n’ose même pas imaginer, n’en profite pas pour faire le mal autour de toi. Prends exemple sur Saga et Polydeukès. Même s’ils blessent ou tuent quelqu’un, ce n’est pas par envie. Tu me comprends ?

—  Bien sûr, maman ! Je te promets de ne pas abuser.

 

Un toussotement du chevalier d’or interrompit leur conversation.

 

—  A ce propos, maintenant que nous en savons un peu plus sur le potentiel d’Iris, je voudrais te parler de son avenir.

—  De quel avenir ? s’inquiéta Daphné qui relâcha son étreinte.

—  Oui … n’oublie pas qu’elle n’est plus tout à fait la même, et de ce fait, le Grand Pope doit être averti de la situation. On ne peut pas laisser un … « ersatz » de chevalier se promener dans les rues en toute liberté. Il lui faut une sorte de couverture.

—  Tu veux faire d’elle un chevalier ? demanda Daphné en fronçant les sourcils.


A ces mots, Iris se manifesta et se cramponna à Daphné.


—  Je ne veux pas devenir chevalier et me battre comme Saga ! Je n’ai pas envie de porter un masque ! Je veux rester auprès de maman et l’aider dans son travail. Je veux devenir comme elle plus tard !


Tout le monde put entendre ce cri du cœur. Daphné sourit et Polydeukès se leva de sa chaise, calmement, et se dirigea vers le binôme féminin. Il s’accroupit et mit sa large et impressionnante main sur l’épaule de la fillette. Ce geste ne soulagea pas les craintes de la mère ni de la fille. Au contraire, Iris se réfugia toujours plus dans les plis de la robe de Daphné qui elle, la serrait toujours plus, telle une louve protégeant sa progéniture.


—  Ne t’en fais pas. Je n’ai absolument pas l’intention de t’enrôler de force. Mais il faut que je parle de ton cas au Pope. C’est quand même peu courant et surtout, comme je l’ai dit précédemment, en cas de problème, la justice t’en voudra de ne pas avoir signalé tes capacités. En gros, tu dois être « déclarée » et « archivée ».

—  Mais si tu tiens à me rassurer, poursuivit Daphné, dis-moi qu’il n’est pas en droit de me l’arracher de force pour la mettre en camp d’entraînement.

—  Théoriquement, non. De toute façon, notre chef sacré n’est pas là pour aller à l’encontre de la volonté des étoiles. Il se contente simplement de lire le destin tracé pour chacun d’entre nous. Et si celui d’Iris est d’être effectivement appelée à devenir chevalier, elle suivra cette voie. Iris, es-tu d’accord pour que j’en informe le Pope ?


L’intéressée demeura immobile, à demi cachée dans cette robe qu’elle aurait souhaitée plus grande. Puis elle se désolidarisa tout doucement de Daphné qui s’était mise à lui caresser les cheveux. Elle ne répondit toujours pas mais leva la tête pour observer la réaction de sa mère : elle lui souriait. Elle avait confiance en cet homme. Elle ne serait pas chevalier si elle ne le souhaitait pas, d’autant plus qu’il était un peu tard pour commencer un entraînement. Elle risqua un œil sur Saga pour voir s’il allait l’épauler ou se liguer contre elle. Il hocha la tête tout en souriant.


—  Tu peux être sûre qu’il ne t’arrivera rien mais laisse mon maître régulariser ta situation.

—  D’accord. Je veux bien que tu lui parles seulement si je suis certaine de ne pas voir des soldats débarquer pour m’emmener de force.


Le chevalier d’or sourit, heureux de voir que tout le monde était parvenu à un consensus. Il se releva et fit signe à Saga de le suivre. Juste avant qu’il n’ouvrît la porte, Iris eut droit à une ultime recommandation:


—  Une dernière chose : veille à être discrète. Tout ceci doit rester entre nous quatre. Même si ta situation sera connue de la chevalerie, je ne voudrais pas attiser davantage de curiosité chez les villageois.

—  Sois tranquille ! Je garderai un œil affûté sur elle, répondit maternellement Daphné.

Polydeukès ouvrit la porte, adressa un clin d’œil de connivence à la jeune femme puis sortit.


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