Woes Chapter

Chapitre 19 : La colère de Planitaíos.

4700 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 02/12/2022 06:28

Chapitre 19 : La colère de Planitaíos

Ékrixi des Éruptions Volcaniques, Kýma des Séismes, Chióni des Glaciations, Asthéneia des Épidémies, Xirasía des Sécheresses, Výthisi des Inondations et Kataigída des Cyclones étaient agenouillés face à leur chef, Planitaíos des Chutes Météoritiques. Ils ne pouvaient s’empêcher de trembler. L’aura qui se dégageait de Planitaíos était terrifiante et aucun d’entre eux n’osait prononcer un mot. Chaque parole prononcée pouvait déclencher l’explosion qui allait inévitablement avoir lieu et le plus tard serait le mieux. La tête baissée, le regard fixé vers le sol, ils n’osaient même pas s’observer les uns les autres. Chacun d’eux était responsable de cette ire d’une profondeur sans limite. 

— Dix-sept Aléas majeurs… murmura Planitaíos.

Ça commençait. Les Calamités se tendirent, dans l’expectative.

— Sans compter les dizaines d’Aléas mineurs perdus… Et pour quel résultat ? Quatorze chevaliers morts seulement !

La Calamité astronomique ouvrit tout doucement les yeux, jusque-là fermés. La pression enfla démesurément et les sept Calamités terrestres en furent plaquées au sol.

— Deux possibilités : soit vous avez réveillé des Aléas trop faibles, soit vous êtes vous-mêmes pitoyables. 

— Maître, intervint Kýma. Les chevaliers du Sanctuaire sont plus résilients que nous ne le pensions. Surtout les chevaliers d’or. Leur volonté de préservation est des plus puissantes et…

— Plus puissante que notre volonté d’extinction, insinues-tu ?

Kýma se sentit comme percutée au ralenti par un bolide céleste.

— Non, maître… gémit-elle.

— Il est indéniable que leur force provient de leur motivation, seigneur, poursuivit Kataigída. Mais, mis à part Upsala de l’armée de Chióni, tous les Aléas majeurs tombés sont parmi les plus faibles. Ce n’est pas comme si nous ne pouvions nous y attendre.

Chióni s’enhardit :

— Ces chevaliers d’or sont différents de ceux des générations précédentes. Ils n’ont pas subi d’entraînement spécifique pour atteindre ce statut. Ils portent des Clothes authentiques, marques de leur évolution via de nombreux combats et une forte expérience des situations de vie ou de mort. 

— Cela en fait probablement les guerriers les plus puissants que le Sanctuaire ait connu depuis l’ère mythologique, tout du moins les plus capables, précisa Xirasía.

— Il n’est donc pas étonnant qu’ils résistent mieux que prévu à nos Aléas, ajouta Asthéneia.

— Et pourtant, ils ont été mis à mal, échappant in extremis à la mort pour certains. Que pourront-ils espérer face à nos Aléas majeurs restants ? Leur puissance est sans commune mesure avec ceux qu’ils ont vaincus, assura Výthisi.

— Nous avons ainsi pu tester leurs capacités, maître. La prochaine vague provoquera leur perte, promit Ékrixi.

Chacun y alla ainsi de ses arguments. Ils ne voulaient pas minimiser leur défaite. Ils ne s’y attendaient pas et assumaient leur responsabilité. Mais ils ne pouvaient laisser croire à leur supérieur qu’il s’agissait d’une erreur de jugement. Ils avaient eu conscience de la puissance des chevaliers d’or, c’est pour cela que les Aléas majeurs avaient été envoyés, mais ils n’avaient pas pris la pleine mesure de leurs pouvoirs. Les forces adverses ainsi sondées, ils pouvaient maintenant adapter leur réponse et passer à la vitesse supérieure.

— Assez ! tonna Planitaíos en écrasant ses subalternes d’une simple émanation. 

Le Temple des Extinctions trembla sur ses fondations.

— Les Aléas majeurs étaient destinés à la défense des Ceintures, pas à vos tentatives personnelles de tester les forces protectrices du Sanctuaire. Nous ne craignons réellement que les Pics qui s’imprègnent encore des Quiddités à l’heure actuelle. Les autres guerriers ne sont que des obstacles agaçants. Nous ne devions nous en charger que s’ils étaient sur notre chemin, pas les attaquer nous-mêmes. Nous sommes des Calamités ! Les humains ne sont rien de plus qu’une espèce à notre merci. Depuis quand en visons-nous une en particulier ? Quelle que soit sa toxicité pour la Nature, aucune n’est digne d’être une proie privilégiée. Notre objectif n’est autre que la biodiversité elle-même.

Asthéneia se redressa.

— Seigneur Planitaíos, notre incarnation actuelle est particulière, et tu le sais parfaitement. Nos corps, fit-il en se désignant lui-même et les autres, sont sous forme humaine. Je crois que cette fois, nous devons le prendre en compte. Les Quiddités elles-mêmes ont décidé d’imprégner des êtres humains. Nous ne pouvons ignorer ce fait. Je pense que cela signifie que cette espèce peut autant détruire la biodiversité que la préserver. Et le Sanctuaire est dirigé par un Pic. Ça non plus, nous ne pouvons l’ignorer. S’ils ne sont pas imprégnés des Quiddités, les chevaliers d’Athéna s’avèrent en être inspirés. Cela se ressent dans leur résilience. Ils sont convaincus de la positivité de l’être humain et de son rôle dans la défense de la Terre et de tous ses habitants, pas seulement de leur propre espèce.

Planitaíos se calma et toutes les incarnations se relevèrent.

— Tu as toujours été le plus réfléchi, Asthéneia, admit le chef des Calamités. 

Il parcourut ses sbires du regard. Tous semblaient en pleine réflexion suite à l’annonce de leur pair. Pour la première fois peut-être, ils s’observèrent vraiment. Des catastrophes naturelles dans des corps à forme humaine. Voilà ce qu’ils étaient. Cela n’altérait en rien leur capacité de nuire à l’échelle de la planète, mais cela les concrétisait en tant qu’existences à part entière. Planitaíos reprit :

— Bien, je vous pardonne ces échecs. S’il est vrai que les Saints du Sanctuaire sont une protection manifeste de cette planète, alors je me dois de leur accorder une certaine importance.

Kýma tressaillit.

— Est-ce à dire que tu vas intervenir en personne ? Tu n’as pas réveillé d’Aléa ?!

— Nul besoin. Je ne suis pas les petites pluies de météorites sans conséquence. Je suis la Chute Météoritique exterminatrice. Mes émanations sont à elles seules plus puissantes que vos Aléas car chacune de mes manifestations a déclenché une crise majeure, là où vous avez dû vous y prendre à plusieurs.

Il se rassit sur son trône.

— J’agirai d’ici même. Utilisez votre perception planétaire pour assister au spectacle. Je vais vous montrer ce qu’est une vraie extermination.

**

Paco de l’Aigle, Hêrê du Paon, Eurydice de la Lyre, Céléos du Lézard, Abell de la Grue, Zashchita de l’Ecu de Sobieski, Mimosa de la Croix du Sud, Pakkaus des Chiens de Chasse, Saïla de l’Horloge, Juan de la Girafe, Arkon de la Boussole et Alraï de Céphée étaient réunis dans l’Amphithéâtre, le lieu de rassemblement des chevaliers d’argent lorsqu’ils n’étaient pas en mission ou à l’entraînement. Les chevaliers d’or revenus pour la plupart, les Saints d’argent n’étaient plus tenus de veiller sur les quatorze maisons. Les rumeurs allaient bon train parmi les chevaliers du Sanctuaire. Les blessures qu’accusaient leurs camarades d’or, d’argent ou de bronze à l’infirmerie et la mort des Saintias de l’Académie Sacrée impressionnaient et agitaient les Saints rescapés. Beaucoup se disaient que ça aurait pu être eux ou se demandaient s’ils auraient survécu aux assauts des Aléas, eussent-ils été concernés. 

Les douze chevaliers d’argent s’étaient rassemblés dans l’Amphithéâtre afin de partager leurs informations mais aussi leurs inquiétudes. En ces temps où les catastrophes naturelles s’enchaînaient dans le monde, ils trouvaient anormal que le Sanctuaire ne soit pas mobilisé pour protéger les populations. Ils avaient été rappelés de leurs missions pour déclarer la guerre aux Calamités mais, depuis, aucun ordre n’avait été donné, aucune offensive n’avait été proclamée. Au contraire, ils avaient même été les proies des Aléas. Beaucoup de chevaliers regrettaient également l’absence du Grand Pope, retiré à Lushan depuis trop longtemps à leurs yeux, injoignable. La figure de proue de la chevalerie aurait dû les accompagner, les inspirer. Mais Shiryu n’était pas là. Et cela inquiétait. Était-il toujours digne de sa position ? Jamais ils n’auraient douté d’Athéna, mais le Grand Pope n’était pas un dieu et ça n’aurait pas été la première fois qu’un Pope aurait trahi ses chevaliers. 

Un autre groupe de chevaliers d’argent les rejoignit, mené par Shôko du Centaure. Lexa de l’Autel, Matahi de la Carène, Roland de la Coupe, Meherio de la Poupe, Kira du Triangle et Corra des Voiles se rapprochèrent. Les dix-neuf Saints d’argent s’assirent sur les marches de l’amphithéâtre.

— Comment vont Geki, Nachi, Ichi et Ban ? demanda Paco, s’enquérant de l’état de santé de ses pairs.

— Ils sont sur pieds, répondit Shôko. Shun et Shaïna leur font passer les derniers tests mais ils sont opérationnels.

Paco hocha la tête et la Saintia du Centaure perçut une vague de soulagement animer ses amis.

— Des nouvelles de la hiérarchie ? hasarda Mimosa.

La femme chevalier portait fièrement son masque, marquant ainsi son respect des traditions. Elle ne s’embarrassait pas de diplomatie et posait souvent les questions que tout le monde se posait. Un certain malaise s’installa. Shôko secoua la tête, contrite.

— Aucune. Les chevaliers d’or sont étonnamment avares d’informations. Même Seiya ne cherche pas à remotiver tout le monde. On ne peut pas leur en vouloir d’avoir une confiance aveugle en Shiryu, mais j’entends les rumeurs et les inquiétudes comme chacun d’entre vous et j’essaye de ne pas les laisser m’atteindre. 

Les autres la regardèrent, certains gênés car visiblement emprunts de perplexité. Céléos prit la parole :

— Mes disciples chevaliers de bronze me parlent de discussions beaucoup plus animées dans leurs rangs. Vous connaissez l’impulsivité des plus jeunes. Ils veulent en découdre, ils veulent porter secours aux victimes, ils veulent empêcher de futures morts… mais ce droit de chevalier leur est dénié.

— Certains commencent à tenir des discours frisant l’insurrection ou la trahison, prévint Zashchita. L’inaction pèse après le discours enflammé du Grand Pope.

— Je ne suis pas loin de partager leur point de vue, intervint Juan. Rendez-vous compte ! Des centaines de millions de victimes déjà, si l’on compte les morts, les blessés et les impliqués ! Qu’attendent-ils pour nous donner l’ordre de nous opposer aux Calamités sur leur terrain ?

La discussion s’anima soudainement parmi les chevaliers. Qui confiant, qui frustré, qui indécis, qui méfiant… mais le débat tourna court lorsqu’une déflagration remua ciel et terre qui s’assombrirent. Ils levèrent la tête et seuls leurs réflexes leur permirent de se mettre en position d’attaque. Au dernier moment, chacun d’eux entendit une voix à leur côté leur dire :

— Permets-moi de mourir ou de survivre avec toi.

**

Dans le Colisée, tous les chevaliers de bronze survivants qui n’étaient pas alités à l’infirmerie s’étaient regroupés. Les discussions allaient bon train et l’impatience se faisait sentir. Certains d’entre eux bouillaient d’agir. Les habitants de Rodorio les tenaient informés de ce qu’il se passait dans le monde et leur instinct de chevalier leur disait de venir en aide aux populations menacées. Pourtant, aucun ordre n’émanait du Grand Pope. Trois groupes s’étaient constitués. Ceux qui avaient entièrement foi en leur dirigeant et attendaient patiemment : Alcée d’Andromède, Leoni de l’Éridan, Brann du Fourneau, Timio du Télescope, Toma du Phénix, Kôga de Pégase, Zach du Microscope et Euchira du Peintre. Ceux qui s’apprêtaient à désobéir, au risque de leur vie, afin de porter secours aux habitants de la Terre : Johann du Caméléon, Tsih de Cassiopée, Qilalugaq de la Licorne, Cyllare du Petit Cheval, Alrisha du Poisson Austral, Kullat du Poisson Volant, Nuutui de la Petite Ourse et Soma du Petit Lion. Enfin, les indécis qui comprenaient les motivations des deux camps, voulaient agir mais ne se résolvaient pas à désobéir au représentant d’Athéna sur Terre : Circée du Compas, Rotanev du Dauphin, les jumeaux Alphard de l’Hydre Femelle et Raphael de l’Hydre Mâle, Éden de l’Indien, Haruto du loup, Noé du Petit Renard, Briac du Réticule, Canaan du Toucan et Atria du Triangle Austral.

— Si Ryuho était là, il pourrait au moins nous dire ce que compte faire son père ! s’exclama Cyllare. 

— Parce que tu crois que Shiryu le tient au courant de tout ? renchérit Kôga. Je ne sais même pas tout ce que pense mon propre père et il n’est pas à la tête de la chevalerie. Le Grand Pope a forcément ses raisons ! Nous devons attendre !

— Tu dis ça car tu as peur d’être de nouveau blessé ! accusa Nuutui. Moi, je ne redoute pas ces Calamités, après tout je suis l’héritière de l’armure d’or du Taureau, comme mon maître ! 

— Tu n’es l’héritière de rien du tout pour le moment, la calma Haruto. Sois d’abord digne de ton armure actuelle. Au moins, Kôga a déjà combattu une fois les Calamités et il n’a pas fait preuve de lâcheté, tu l’accuses injustement. Il a même failli y rester.

Nuutui baissa la tête, désolée.

— Excuse-moi, Kôga. Mais je suis tellement en colère ! J’ai l’impression d’être inutile ici !

— Moi aussi ! s’écria Johann. Le Grand Pope ne nous interdit pas seulement d’agir, il ne donne plus aucune nouvelle ! Je commence à me poser des questions ! Est-il vraiment apte à nous guider ! Ou alors, il est passé à l’…

— Je t’arrête tout de suite ! rugit Timio. Tu as le droit d’être frustré ou de te poser des questions, mais je ne te laisserai pas ternir son honneur de chevalier ou son dévouement de Grand Pope ! N’oublie pas que même les autres chevaliers d’or n’ont plus de nouvelles. Et pour autant, leur confiance en lui ne s’effritent pas. Si les piliers de la chevalerie tiennent bon, qui sommes-nous pour les remettre en question ?

Depuis le départ, Timio était un fervent défenseur de Shiryu. Après tout, hormis ses contemporains de la dernière Guerre Sainte, le jeune chevalier de bronze était l’un des Saints les plus proches du Grand Pope de par sa mission d’aide à l’observation à Star Hill.

— Pour autant que je sois prêt à l’action, renchérit Soma, je suis d’accord avec Timio. Je suis persuadé que le Grand Pope n’a pas trahi le Sanctuaire, ni même Athéna ou la Terre. Mais je n’en peux plus de notre inaction. Ceux que nous sommes censés protéger sont décimés, nous ne pouvons pas nous permettre d’attendre plus longtemps. Si les chevaliers d’or et d’argent ne se mettent pas rapidement à l’action, ce sera à nous de prendre l’initiative !

— Le rôle des chevaliers n’est pas de défendre les humains, fit remarquer Éden, mais Athéna avant tout, et la Terre par extension, de la convoitise des dieux. La situation est différente et nécessite réflexion. 

— Mais Athéna aime les humains ! s’insurgea Tsih. Nous nous inscrivons dans sa volonté en désirant agir ! Que ce soit des dieux ou des Calamités…

— N’est pas du tout pareil, interrompit Circée. Si j’ai bien compris, les Calamités doivent être combattues par les Pics. Le Sanctuaire n’est impliqué que parce que notre dirigeant s’avère être l’un d’entre eux. Il faut faire preuve de discernement. Il s’agit d’un conflit entre les forces de la Nature, pas un conflit divin. Je souffre de voir autant de morts parmi mes semblables, mais nous ne pouvons utiliser nos pouvoirs que lors d’affrontements contre des dieux, sinon cela revient à agir en tant qu’humains et donc pour des raisons personnelles. Je n’entreprendrai rien sur un coup de tête si j’étais vous. Si l’ordre vient d’en haut, je serai parmi les premières à foncer, mais en attendant, je préfère encore patienter.

— Gardez confiance en les chevaliers d’or et en notre Grand Pope, assura Alcée. La chevalerie repose sur cette confiance.

— Justement, réagit Qilalugaq. Il y a déjà eu des traîtres parmi les chevaliers d’or : Saga des Gémeaux, Shura du Capricorne ou Masque-de-Mort du Cancer par exemple pour la dernière génération. Et aussi parmi les Popes comme Itia de la Balance ! Qui nous dit que nous ne sommes pas en train de revivre d’aussi sombres événements ?

Un brouhaha remplaça la conversation déjà vive, chacun voulant exprimer son opinion, sa confusion, son insurrection. Mais ils furent interrompus brusquement par l’explosion qui déchira les cieux. Leurs yeux s’écarquillèrent et ils s’apprêtèrent à frapper par pur instinct de survie. L’instant précédant le choc, chacun d’eux put distinctement entendre murmurer dans leur dos :

— Permets-moi de mourir ou de survivre avec toi.

**

Jabu, Seiya, Erda, Ikki et June étaient dans leurs maisons respectives lorsqu’ils ressentirent l’impact. Blessés, Xiaoling, Katya, Hyoga, Marine et Mii étaient en soin à l’infirmerie auprès de Shun et de Shaïna, tout comme les chevaliers de bronze victimes des attaques des Aléas à la maison de la Balance ou à l’Académie Sacrée. Nachi, Géki, Ichi et Ban étaient là eux aussi. Cette fois, aucun d’eux ne sentit la menace arriver, pas même une fraction de seconde avant la catastrophe. La détonation et les tremblements se produisirent en même temps. Le choc fut terrible. Jamais, dans l’histoire du Sanctuaire, il n’y avait eu pareil événement. Tous les chevaliers d’or furent dehors en un clin d’œil. Ce qu’ils virent leur fit penser à l’apocalypse.

À la place du Colisée, un énorme cratère d’impact était apparu. Le bâtiment mythique d’entraînement des chevaliers et d’épreuve à l’accession au rang de Saint était détruit. Un nuage de poussières et de fumée s’élevait. 

— Qu’est-ce que…

Difficilement, les autres chevaliers convalescents sortirent de l’infirmerie. La vision de leurs frères et sœurs d’armes tétanisés leur glaça les sangs. Seuls, sur le perron de leurs temples, Jabu, Ikki, June, Seiya et Erda étaient paralysés devant l’impossibilité d’une telle situation. Une sueur froide s’écoulait le long de leur peau. Dans un même élan, ils s’élancèrent vers les ruines fumantes du Colisée. Ils n’osaient croire aux conséquences d’un tel désastre. Qu’étaient devenus les chevaliers de bronze qui s’y trouvaient ? 

— Que les blessés restent à l’infirmerie ! ordonna Shun aux chevaliers de bronze et d’argent trop mal en point.

Aucun d’eux n’obéit. Malgré leurs blessures, ils voulaient porter secours à leurs camarades. Ils n’eurent même pas le temps de se mettre en route qu’un deuxième météore frappa cette fois l’Amphithéâtre. L’onde de choc les propulsa durement en arrière. Les chevaliers d’or furent les premiers debout, mieux protégés par leurs armures, mais un troisième impacteur assombrit leur vision. Le choc fut sans pitié. Shun eut l’impression que tous ses os se brisaient. Il n’eut que le temps d’invoquer ses chaînes d’or mais cela n’atténua qu’à peine l’impact sur son corps. Il entendit ses compagnons hurler leur douleur et maudit son impuissance à agir. Il pensa à ses filles, prises dans la même tourmente que lui, il pensa à June qui devait assister de là où elle était à la destruction de l’infirmerie, il pensa… 

— Durandal !

Jabu découpa le météore, ce qui eut pour effet d’annuler la pression de l’impact. Shun se releva aussitôt et regarda autour de lui. Aldéramine, Sirrah… June atterrit à ses côtés, son masque à moitié cassé. Elle pleurait. Leurs filles… Les larmes lui montèrent aux yeux.

— Marine, Xiaoling !

La voix de Mii les alerta. Elle était agenouillée au-dessus de ses paires… qui ne bougeaient pas. Shun continua d’évaluer la situation. Nachi, Ban, Geki, Ichi, les Saintias de l’Académie… tous à terre, immobiles, ensanglantés. Hyoga se releva, aidé de Katya.

— Yakoff ! s’inquiéta-t-il immédiatement avant de réaliser que son disciple ne lui répondrait plus.

Katya voulut le réconforter mais Shaïna les interrompit.

— Je m’occupe des blessés, fit-elle en faisant apparaître le bâton d’Asclépios. Chevaliers, nous sommes attaqués, défendez-vous !

Les ondes que dégagèrent le bâton calmèrent tout le monde et tous retrouvèrent leurs esprits.

— Ikki, Erda et Seiya ont pris les devants pendant que June et moi venions vous aider, annonça Jabu. Nous devons les rejoindre.

— Shaïna, sauve celles et ceux que tu peux ! implora Shun en partant au pas de course, accompagné des chevaliers d’or survivants.

Ils se séparèrent, une partie d’entre eux se dirigeant vers le Colisée, l’autre vers l’Amphithéâtre. 

Seiya et Ikki arrivèrent sur le cratère d’impact qui remplaçait le Colisée. Ce qu’ils découvrirent les fit vaciller malgré leur expérience. Sur les vingt-six chevaliers de bronze, une dizaine seulement donnait encore signe de vie.

— Kôga… murmura Seiya en apercevant les vestiges de l’armure de Pégase.

— Toma ! Leoni ! hurla Ikki.

Seiya vit Ikki pleurer pour la première fois depuis très longtemps. Leurs enfants… ce n’était pas possible ! Aveuglés par la haine et la détresse, ils aidèrent les survivants à se sortir des décombres. Brann, Timio, Alcée, Circée, Alrisha, Zach, Euricha, Nuutui, Éden et Atria étaient les seuls encore vivants… mais dans quel état ! 

— Amenons-les à Shaïna, articula Seiya. Elle saura quoi faire.

Ils relevaient les plus mal en point lorsqu’une multitude de détonations attirèrent de nouveau leur attention. Dans le ciel, quatorze traînées météoritiques déchiraient le ciel. Dans l’Amphithéâtre, Erda leva des yeux horrifiés vers la nouvelle menace. Sur les dix-neuf Saints d’argent présents au moment de l’impact, sept avaient survécu. Eurydice, Zashchita, Paco, Arkon, Abell, Céléos et Mimosa. C’était une catastrophe ! Et ça n’était pas fini. La Saintia du Cancer faillit perdre pied devant un tel acharnement. Elle regarda les quatorze impacteurs se diriger chacun vers l’une des maisons du zodiaque.

Quatorze cosmos flambèrent et il lui sembla apercevoir une silhouette sombre sur le toit de chacun des temples des chevaliers d’or. Un rayon noir fonça vers chacune des météorites qui explosèrent en plein vol. Elle se dit un instant que les maisons étaient sauvées mais les débris s’écrasèrent en une pluie rocheuse implacable. Qui que fussent ces êtres de l’ombre, leur action avait au moins permis de préserver les maisons. Mais leurs cosmos avaient disparu.

— Erda ! entendit-elle dans le lointain.

Elle se reprit.

— Tes feux follets du Yomotsu Hirasaka ! fit June en la tenant par les épaules.

Erda n’avait pas remarqué que ses camarades l’avaient rejointe et aidaient les chevaliers d’argent à s’échapper. Elle mit du temps à réaliser ce que lui demandait la femme chevalier du Scorpion et elle identifia les tiraillements qu’elle ressentait. Ses alarmes l’appelaient sur la colline des morts et elle prit conscience qu’elle pouvait en sauver quelques-uns si elle agissait vite. Elle se transporta au puits des âmes.

Shun s’occupa des premiers soins qui suffiraient jusqu’à ce que les capacités du bâton d’Asclépios prennent le relais. 

— Ikki, murmura-t-il soudainement en ressentant la souffrance de son frère.

Ce dernier avait perçu l’extinction de ses chevaliers d’ébène qui s’étaient rassemblés au Sanctuaire. Après la guérison de Kuraion et le retour triomphal de Mavry, il les avait convoqués au Sanctuaire, dans le secret de la maison du Lion. Mavry devait leur présenter ce qu’ils avaient trouvé, Kiki et elle, lorsque l’attaque était survenue. Chacun d’eux avait choisi de défendre la maison de son alter ego et avait brillamment réussi… donnant anonymement leur vie pour empêcher la destruction des quatorze maisons. Il enragea d’autant plus en distinguant des traces d’armures noires ici et là mais sa colère se mua en terreur lorsqu’il leva les yeux vers les nuages. Un vrombissement sourdait et la couche nuageuse s’écarta vivement sous l’effet d’un météore de plusieurs centaines de mètres de diamètre. S’il touchait le sol, le cratère d’impact anéantirait tout le Sanctuaire. Chaque chevalier encore vivant trouva la force de se remettre sur ses jambes, tremblantes pour la plupart. Les cosmos s’élevèrent timidement. L’espoir était mince et la détresse trop forte. Même les chevaliers d’or n’arrivaient plus à se concentrer suffisamment pour puiser la quintessence de leur pouvoir. Jamais le Sanctuaire n’avait connu une telle tragédie. Certains abandonnèrent, tombant à genoux. La Nature était plus impitoyable que les dieux.

— Planitaíos, tu ne détruiras pas plus le Sanctuaire ! tonna une voix.

Les chevaliers survivants n’en crurent pas leurs oreilles. Sept silhouettes apparurent au sommet de l’Horloge du Zodiaque. Sept silhouettes nimbées d’une aura fabuleuse, imprégnées d’une puissance qui n’était pas du cosmos. Le pouvoir de ces guerriers salvateurs se mêla à cette énergie inconnue et la force qui s’en dégagea fut colossale.

— Rozan Sho Ryu Ha ! rugirent Shiryu, Shunreï, Shoryu, Ryuho et Ryufeng.

— Rozan Reppū Shiden Ken ! [Vent déchirant et arc électriques de Lushan] hurla Okko.

— Rozan Shinbu Ken ! [Attaque de la véritable arme de Lushan] clama Genbu.

Les sept techniques, imprégnées du cosmos des disciples de Lushan et de l’essence des Quiddités, volèrent vers l’impacteur géant et le pulvérisèrent. Les sept Pics de Lushan se réceptionnèrent sur l’Horloge du Zodiaque. La pluie de météorites cessa alors, laissant le Sanctuaire dévasté.


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