Derkomai's Mask

Chapitre 38 : La menace du Dahlia pourpre

7007 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 15/09/2024 12:18

L’endoscopie digestive, une forme de torture moderne méconnue que Sacha découvrait pour la première fois. Un bâillon en métal dans la bouche où l’on faisait passer un tuyau qu’on vous demandait d’avaler pendant qu’on titillait votre réflexe nauséeux. Les larmes aux yeux, Sacha suppliait de cris étouffés qu’on le relâche alors que la flamme au bout de sa queue flambait plus fort à cause de tout le gaz qu’on lui injectait dans l’estomac.

Désagréable, mais pas douloureux, l’avait prévenu l’infirmière. Sauf qu’elle ne lui avait pas dit que désagréable signifiait des sensations mille fois pires que la douleur !

- RAAaaa, gémit-il.

En même temps, il aurait dû s’en douter à partir du moment où l’infirmière avait mis la combinaison intégrale ignifugée. Et quand on lui avait sanglé les membres, le cou, la queue puis que Leveinard avait fait peser tout son poids sur lui au moment où on introduisait le tube.

- Tiens le coup, c’est bientôt fini, le rassurait Serena du mieux qu’elle pouvait.

Elle n’en avait aucune idée en vérité, tout ce qu’elle voyait sur l’écran était ce long couloir noir avec quelques interstices de chair blanche dans lequel l’infirmière s’attardait particulièrement.

- Dis-moi Serena, interpella la soignante de sa voix déformée par le scaphandre, ton pokémon est un jeune dracaufeu ?

- Il a évolué récemment, oui, confirma la dresseuse. Vous savez ce qu’il a ?

- Euh… les interrompit Brice. Le fermoir de mon côté est en train de lachAïe !

Un bruit de claquement, l’ombre d’un bonnet blanc qui disparaissait sous la table, Leveinard qui se jetait sur la queue et l’enroulait dans une nouvelle lanière pendant que le pokémon grondait.

- ‘est bon, ‘est réparé, gémit Brice encore au sol.

Serena eut un sourire crispé. Elle ne pensait pas que Dracaufeu lui ferait subir le même sort, mais elle vérifia quand même si toutes les contentions de son côté étaient opérationnelles.

- Un peu moins de bruit s’il vous plait, dit l’infirmière sans lâcher l’écran du regard.

Leveinard traina par les pieds le garçon jusqu’à un coin de la pièce. Il gémissait encore quand le pokémon œuf fit un salut militaire en hommage au courage du garçon. Mais… Il était toujours en vie, n’est-ce pas ?

- Une belle œsophagite, rouspéta la soignante en faisant un dernier aller-retour vers l’estomac.

- Une oesopha…

- Serena, il va falloir qu’on revoie certaines choses.

Joëlle venait de remonter une bonne fois pour toute l’endoscope au grand soulagement du dragon. La jeune dresseuse, par contre, sentait l’anxiété monter au fur et à mesure que l’infirmière retirait casque, gants, manteau doublé et vareuse. Elle avait l'impression d'avoir fait une bêtise, une très grosse bêtise, alors que la seule chose qu'on pouvait lui reprocher était… Serena effleura son ruban, se souvenant de ce visage beaucoup trop près du sien, de son erreur quand elle avait cru… Non, non, non et NON !

- Leveinard, tu peux aller me chercher Gavisflamme et l’équivalent de quatre semaines d’IPPy, ordonna Joëlle qui venait de finir de se laver les mains. Quant à toi Serena, il serait bon que tu me dises combien d’attaques feu tu as fait cracher à ton pokémon.

- Une dizaine, répondit-elle d’une petite voix, beaucoup de dresseurs nous ont défiés aujourd’hui et…

- Seulement ? s’étonna l’infirmière en regardant ses images. Et les jours précédents ?

- Deux ou trois… d’accord, peut-être cinq.

Joëlle tapotait sa lèvre du bout de son stylo, détaillant la jeune fille de la tête au pied.

- Tu confirmes Brice ?

- Serena n’est pas du genre à pousser ses pokémons à bout si c’est ce qui vous inquiète, répondit-il en se massant l’arrière du crâne.

Le regard de la soignante envers la jeune fille s’était un peu adouci, mais à présent elle observait le dragon avec curiosité.

- La gorge des jeunes dracaufeus s’épaissit au fur et à mesure qu’ils utilisent leurs flammes. C’est pour ça que quand ils viennent d’évoluer, même si ça passe le plus souvent inaperçu, ils ont tendance à avoir une légère inflammation de l’œsophage.

Elle sortit un album photo d’un des tiroirs et le tendit à la jeune fille.

- Ce sont des dracaufeus à un stade moins avancé que le tien, je pense que tu comprends vite la différence.

Serena acquiesça, l’intérieur de la gorge des pokémons étaient légèrement rougi, mais pas noir charbon comme elle l’avait constaté pendant l’examen.

- Je t’avoue que d’habitude, cela se voit chez le dracaufeu dont le dresseur était un peu trop enthousiaste par cette évolution et qui a voulu tester sa puissance en enchainant les Lance-Flammes.

- Je ne savais pas…

- Sauf que ce que tu me décris n’est pas suffisant pour qu’il se retrouve dans cet état, donc je n’arrive pas à comprendre comment notre ami s’est débrouillé.

- Et une stagnation de flammes ? proposa le garçon définitivement remis.

- Hum… réfléchit l’infirmière pas vraiment convaincue. Ce serait possible, effectivement, mais c’est plutôt rare que les dracaufeus se retiennent.

Brice soupira longuement tout en lançant un regard exaspéré contre le faux pokémon.

- Serena lui a demandé de ne pas cracher ses flammes sur moi et c’est quelque chose qu’il a plutôt bien respecté, du moins on croyait qu’il le respectait.

Il s’était approché de la dresseuse tout en parlant et Sacha ne manqua pas d’illustrer les dires du garçon dans une quinte de toux et de fumée. La démonstration fut suffisante pour l’infirmière.

- Ça ne va pas faciliter le traitement, soupira-t-elle.

Leveinard était de retour avec les médicaments et l’infirmière donna immédiatement une des pilules au reptile.

- L’important sera d’éviter les attaques feu pendant au moins une semaine.

- Dra ?

- Oui, Dracaufeu, une semaine. Et crois-moi, tu t’en sors bien.

- Dr-Dra caudra d-dra…

Joëlle ne comprenait pas pourquoi le pokémon semblait si catastrophé. Ne pas cracher ses flammes était gênant, mais pas insurmontable. Surtout qu’elle ne pensait pas qu’il serait contrarié de devoir paresser dans sa pokéball sur ordre médical.

- C’est le concours qui t’inquiète ? s’enquit Serena.

L’infirmière n’y crut pas au début jusqu’à ce que le pokémon s’agite et fasse de grands gestes dans tous les sens. La jeune fille soupira, comme si elle en avait l’habitude.

- Mieux vaut louper une compétition maintenant plutôt que de ne plus jamais pouvoir en faire.

- Dra ! Dracau ! refusa le pokémon.

Qui aurait cru qu’un dracaufeu puisse se mettre dans un tel état à l’idée de ne pas pourvoir participer à un concours. Mais s’il commençait à se disputer avec sa dresseuse à ce sujet, son état n’allait pas s’arranger.

- S’il n’utilise pas d’attaques feu, je n’ai pas de raison de lui interdire de combattre.

Sauf qu’avec juste Draco-Griffe ou Poing-Eclair, Sacha ne se voyait pas aller très loin dans la compétition. C’était déjà suffisamment compliqué en temps normal pour qu’on ne vienne pas lui ajouter un handicap !

- C’est ma seule condition et elle doit être scrupuleusement respectée, appuya l’infirmière.

- Dracau ?

- Je t’ai déjà dit que ce n’était pas l’important, lui rappela Serena, je vais essayer de trouver un autre concours et…

- Dracau ? répéta le pokémon en étendant ses ailes.

La jeune fille lança un regard désespéré à l’infirmière, la suppliant de ne pas lui donner raison.

- Oui, tu peux aussi voler, avoua Joëlle.

- Caufeu, cau ?

- J’interdis juste que tu craches tes flammes, pour le reste tu peux faire comme d’habitude.

Il eut un grand sourire satisfait qui rassura Joëlle, mais Serena fronçait les sourcils, pas vraiment convaincue.

- Si c’était moi qui avais la gorge en feu, tu serais le premier à vouloir que je me repose, grommela-t-elle.

- Dra ! confirma-t-il les bras croisés.

- Alors pourquoi tu n’appliques pas tes propres conseils ? soupira Serena.

Sacha jeta un coup d’œil à Brice. Il avait dit au garçon qu’il était là pour aider la coordinatrice dans ses concours, mais si en définitive il l’empêchait de participer…

- Dracau, dracaudra, caufeu, promit-il.

S’il croyait la convaincre ainsi, il se mettait la griffe dans l’œil. Aux dernières nouvelles, elle était la dresseuse ici, donc c’était à elle de décider si oui ou non ils participeraient à ce concours. Et, surprise, il était hors de question que....

- N’oublie pas qu’il n’y a pas que le concours qui l’intéresse à Refville.

Ces quelques mots que Brice venait de glisser firent rougir la fameuse dresseuse du bout des oreilles jusqu’à la racine des cheveux.

- HuuuuAAAH ! D’accord ! s’avoua-t-elle vaincue.

- Est-ce que tu es sûre que tout va bien ? s’inquiéta Joëlle face à l’étrange réaction de la jeune fille.

- Oui, tout va bien, parfaitement bien ! Je me demandais juste… Ses repas ! Est-ce qu’il y a quelque chose de particulier à faire pour ses repas ?

- Dans un premier temps régime glace et yaourt ou tout autre aliment frais et mou.

Les dents de plus en plus visibles du dragon ne disaient rien qui vaille à la jeune fille et elle s’empressa de préciser :

- Cela ne veut pas dire que tu dois t’empiffrer.

- Cau ! se tourna-t-il vers l’infirmière.

- Je ne veux pas qu’une de mes collègues m’appelle pour me demander pourquoi j’ai conseillé à un dracaufeu de faire une indigestion aux glaces.

Serena n’était toutefois pas encore satisfaite sur le menu.

- Il remange presque normalement depuis peu alors devoir diminuer à nouveau ses rations c’est un peu…

- Compléments alimentaires mélangés aux yaourts, cela passe plutôt bien.

On y revient, soupira intérieurement le faux-pokémon. Dommage, ne plus manger cette crème épaisse lui allait bien, mais il ne voulait pas non plus donner d’autres raisons à Serena de s’inquiéter pour lui.

Les derniers détails réglés, Joëlle invita les dresseurs à patienter dans le hall le temps qu’elle fasse les examens de routine à dracaufeu et aux autres pokémons. Bien sûr, l’idée que Serena se retrouve seule avec Brice n’enchantait guère le métamorphosé, pas du tout en fait vu la nouvelle vague de flamme qui déchira sa gorge. Pas de quoi motiver les dresseurs à quitter le dragon, mais l’infirmière insista quand même en murmurant :

- Leveinard et moi on va s’occuper de le calmer. Profitez de ce temps pour vous mettre d’accord sur la suite.

Serena avait parfaitement compris ce que Joëlle sous-entendait et effectivement, elle préférait en discuter sans le type feu.

- J’espère qu’elle va réussir à le calmer, soupira-t-elle une fois dans le couloir.

Il n’y avait pas de vitre pour voir l’intérieur de la salle et la jeune fille mourrait d’envie d’y retourner pour vérifier que tout se passait bien pour son pokémon.

- Ils devraient s’en sortir avec Berceuse ou Vibra Soin.

A moins qu’ils n’optent pour Dégommage avec le chariot : rapide et efficace, mais cela il préférait ne pas en parler à Serena. Celle-ci d’ailleurs n’en menait pas bien large. Recroquevillée sur la banquette, presque hagarde pendant qu’elle répétait :

- Comment il a pu se mettre dans un tel état, vraiment, il est impossible.

Elle frottait ses yeux pour prévenir les larmes d’éclore tandis que Brice grimaçait d’embarras. Il ignorait quoi faire ou dire, et malgré lui il se mit à penser à l’imposteur, à celui qui se serait déjà assis à côté de la dresseuse, grognant son charabia incompréhensible. Risible, vraiment risible tandis que Brice ne pouvait empêcher cette remarque au relent goguenard :

- Il s’en remettra vite.

Quel spectacle étrange : le visage de Serena se figeant avant d’éclater en morceau pour se reformer en une expression de pure fureur alors qu’elle bondissait hors de son siège. Nouvelle gifle en perspective ? Peut-être, peut-être bien, tant mieux, ce serait une juste punition pour avoir servi, encore une fois, ce genre d’encouragements réchauffés.

- Avoue que ça t’arrangerait bien que ce ne soit pas le cas, convulsèrent les lèvres de la dresseuse.

Un sourire volage lui échappa pendant que sur son visage ondoyaient les traits de l’hilarité.

- Ce n’est pas de ma faute s’il est jaloux à s’en rendre malade.

- Tu n’as rien fait non plus pour calmer les choses, assena-t-elle sans la moindre pitié.

Brice leva les mains en l’air, un signe de reddition à moins que ce ne soit un moyen de vite se dédouaner de l’affaire, et Serena penchait plutôt pour la deuxième option.

- Je veux savoir ce que tu lui as fait.

Le garçon ramena son sac devant lui et l’ouvrit en grand.

- Je plaide innocent et comme tu peux le voir : pas un seul bidon de javel ni le moindre reste de la soupe de Dracaufeu.

- Sa soupe est très bien… bougonna-t-elle.

- Tu l’as goûtée ?! s’étonna Brice les yeux ronds d’horreur.

- La sirène du centre s’est déclenchée avant…

- C’était donc ça l’alerte attentat chimique, se souvint le garçon en claquant des doigts.

Brice, Brice, Brice ! Toujours capable d’amener la discussion où il le désirait et d’éviter par d’habiles pirouettes toutes remontrances. Sauf que ça ne se passerait pas comme il l’espérait, ça non, pas avec Dracaufeu crachant sa gorge sous forme de suie.

- Ecoute, on va laisser la cuisine de Dracaufeu…

- Je n’emploierais pas forcément le terme « cuisine », plutôt projet d’arme de destruction massive. Et, Serena, je suis au regret de t’annoncer qu’il n’y a que toi qui puisse l’arrêter.

Respire Serena, respire. Brice ne veut rien te dire, très bien, tu n’as qu’à lui soutirer les informations, mais pour réussir la première règle est de rester calme.

- Ce que j’essaye de te dire…

- Pense à tous ces pauvres petits caninos. Serena, ils vont devenir orphelins, or-phe-lins !

- Ça suffit !

Son cri avait coupé net le garçon dans son élan, et le pauvre n’osait plus bouger le moindre muscle de peur de finir d’énerver la jeune fille.

- Tu ne l’as pas juste vu mué hier. Il s’est passé autre chose, il s’est forcément passé autre chose et… Serena serra les poings, la langue pâteuse alors qu’elle demandait : Qu’est-ce que tu lui as fait ?

Brice roula des yeux et sa langue claqua contre son palais en même temps qu’il répondait :

- Oui, oui bien sûr, le pauvre petit. Il se moque de toi mais c’est toujours lui la victime dans l’histoire.

- Que…

- Tu es gentille Serena, trop gentille avec lui et il en profite.

- Ah oui ? Alors qu’est-ce que je devrais dire à ton sujet Brice.

- Je n’ai pas reçu la moindre caresse de ta part à ce que je sache.

La voix de Serena s’enraya dans un crissement strident, son cœur accélérant à nouveau au souvenir des écailles sous ses doigts.

- Q-Quoi ? Toi et lui ce n’est pas…

- Franchement, qu’est-ce que tu peux bien lui trouver ?

- Rien ! Absolument rien ! s’écria-t-elle les joues rouges.

- Je suis pourtant bien plus mignon et charmant que lui. A moins que tu n’aies une préférence pour les écailles, ou bien c’est les crocs et les griffes qui t’attirent.

- P-Pourquoi tu te compares à Dracaufeu ? Et ce n’est pas les écailles qui… Ah ! C’est différent, totalement et complètement différent !

Elle s’était à nouveau assise, les yeux rivés sur le siège pendant qu’elle murmurait d’une petite voix :

- Ça ne m’amuse pas. Tu sais bien que c’est compliqué en ce moment et t’en servir pour… ce n’est pas du jeu.

- C’est vrai que ce n’était pas très fair-play, pouffa-t-il. Mais c’est peut-être le bon moment pour régler ce petit problème, tu ne crois pas ? dit-il en même temps qu’il mimait un appel téléphonique.

Serena sentait son cœur cogner dans sa poitrine, se demandant comment quelques allusions idiotes avaient pu la faire réagir autant. Elle secoua la tête, Brice avait raison : ce n’était qu’un petit problème et il y en avait un bien plus gros en attente.

- Si vraiment tu ne veux pas comprendre, je ne vois pas d’autres solutions que de se séparer ici et maintenant.

Il lui fit un autre de ses sourires, mais cette fois ses contours semblaient plus âpres.

- Je le sais bien, mais j’ai encore besoin d’y réfléchir.

- Y réfléchir ? C'est la santé de Dracaufeu qui est en jeu !

Cette fois pas le moindre sourire, le garçon fixait l’épaule, s’approchant de la dresseuse.

- Tu ne m’as toujours pas expliqué.

- Ce n’est pas important, se crispa-t-elle.

Il avait plongé son regard dans celui de la jeune fille, leur nez à quelque centimètre l’un de l’autre pendant qu’il lui prenait la main. Mais Serena ne sentait aucune chaleur contre ses doigts désormais trop serrés.

- Etrangement, j’ai du mal à te croire, provoqua-t-il.

Serena se leva pour s’éloigner du garçon, ne supportant pas la proximité qu’il essayait d’imposer.

- Je vais vraiment finir par être jaloux, murmura-t-il. Ou bien est-ce que je dois me déguiser en pokémon pour que tu me fasses un peu confiance ?

La jeune fille gonfla les joues, peut-être Brice devrait réfléchir à ce qui faisait vraiment la différence entre eux deux.

- D’accord, d’accord, tu veux savoir ? s’agaça-t-elle. Eh bien, on a rencontré la Team Aqua et Ta-Dam ! Reptincel qui évolue, mon épaule… Voilà, tu es content maintenant ?

Il écarquilla à peine les yeux, comme s’il savait déjà ce qu’il s’était passé là-haut au Mont Chimnée et se forçait à être surpris pour ne pas qu’elle le sache, cela mit encore plus mal à l’aise la jeune fille.

- Ils te poursuivent ?

- Non ! s’écria-t-elle.

- Tu en es vraiment sûre, insista-t-il.

Elle resta la bouche entrouverte avant de déglutir :

- Pourquoi ça t’intéresse ?

Il gratta sa joue et expliqua :

- Je te considère comme une amie Serena. Et je ne veux pas que mon amie soit en danger, c’est tout.

Elle crispa ses mains sur sa robe, le garçon semblait pour une fois plus que sincère, mais il n’avait pas à s’inquiéter puisque de toute façon :

- Il s’est trompé. Il s’est juste trompé, c’est pour ça qu’il croyait… Elle s’arrêta juste à temps avant de se retourner vers le garçon et dire : Je te promets que ça va aller.

- Et si justement ça n’allait pas ? répliqua-t-il.

- Dracaufeu est avec moi, répondit-elle machinalement.

Bien sûr l’imposteur, toujours l’imposteur ! Comment pouvait-elle se confier à lui si simplement, (Comment a-t-il fait pour t’empêcher de tomber ?), faire autant d’efforts (te donner l’envie de t’accrocher ?), en quoi il le méritait !

- Bien sûr, un dracaufeu contre l’organisation qui a failli détruire toute une région, tu sais rassurer les gens toi.

- Je n’ai jamais dit que j’allais les affronter, se recroquevilla-t-elle sur elle-même. J’ai juste dit… qu’il était avec moi, finit-elle en rougissant.

- Serena, grinça le garçon, tu lui fais trop confiance et lui il… Il veut avant tout se protéger lui-même.

- Je sais qu’il a tendance à agir sans penser aux conséquences, grimaça la jeune fille, mais ce n’est pas pour autant… Brice, il n’y a rien de drôle !

Et pourtant, comment ne pas éclater de rire ? On parlait quand même d’un gars qui mentait sur le fait qu’il était humain, H-U-M-A-I-N. Imaginez votre tasse vous dire un matin « ah au fait, j’étais trop occupée à ne pas faire tomber le thé pour te le dire jusque-là, mais je suis vivante ! » Ah ça, le faux pokémon se portait là quand il s’agissait de « ne pas penser aux conséquences ».

- Tu ne veux pas comprendre, pas vrai ? ricana le garçon. Tout ce qu’il fait, tout ce que tu penses qu’il fait pour toi c’est par…

- Justement Brice, justement. Tu le dis très bien toi-même : ce qu’il fait, tout ce qu’il fait. Ce qui le motive, ses raisons, ce qu’il pense tout ça finalement ne change rien au fait qu’il… M’encourager, s’énerver quand j’acceptais de me blesser, pleurer quand je l’ai rejeté, me défendre, m’aider à cuisiner, recoudre mes vêtements. Et toi Brice, toi qu’est-ce que tu as fait ?

Le garçon se leva, le poing serré et le coin des lèvres tressautant d’irritation. Il respirait bruyamment, les traits tirés et la peau blanchie, tout son corps pris dans une sorte de syncope grotesque. J’ai regardé. J’ai regardé, regardé, encore et toujours regardé.

- Mais à la fin… articula-t-il péniblement. A la fin si c’est toi qui dois payer alors…

- Ça me va.

Serena caressait du bout des doigts les coutures mal faites, un léger sourire sur les lèvres.

- Il pourrait rester dans les gradins et m’encourager de loin. Après tout, ce serait le moyen le plus sûr pour ne commettre aucune erreur. Mais, tu vois, je préfère qu’il vienne sur scène avec moi, quitte à ce que ce soit un désastre ou la pire honte de ma vie parce que ce n’est que comme ça qu’on peut…

- Changer.

Chaud. Brice avait si chaud. Dans sa tête, dans sa poitrine, dans son ventre. Une chaleur dans laquelle sa conscience se vaporisait en une brume opaque. Si Serena savait la vérité, si elle l’apprenait… Le délire prit la forme d’un rêve aux bords ténus et pourtant bien visibles : elle répugnerait le métamorphosé, le relâcherait et se ficherait bien que Brice capture à son tour le faux pokémon. Et puis il partirait, laisserait Serena pour poursuivre son… Sourire, envie de vomir, sourire, sourire, sourire !

- Brice ? s’inquiéta la jeune fille de ne pas le voir bouger.

Il s’accroupit, murmura tout bas pour ne pas qu’elle l’entende :

- C’était pour ça, bien sûr que c’était pour ça.

Le dresseur sortit de son sac un petit appareil au jaune usé. Il en caressa la surface du pouce, hésitant encore avant de finalement se décider.

- Qu’est-ce que c’est ? demanda la coordinatrice.

- Mon numéro de Pokénav, je te le laisse, dit-il d’une voix rauque. Si tu as le moindre problème, n’hésite pas à m’appeler.

Elle acquiesça timidement, surprise que Brice accepte finalement que leurs routes se séparent.

- J’aurais quand même un petit service à te demander, admit-il au bout de quelques minutes.

- Pourquoi ça ne m’étonne pas, lui sourit-elle.

Son masque de bonne humeur remis en place, le garçon se permit d’emprunter la tablette de la jeune fille tout en disant :

- Il y a une exposition auquel je voulais aller avec toi. Et je pense que Dracaufeu pourra supporter qu’on se voie brièvement après ta victoire au concours.

- Brice, si c’est pour un rendez-vous… Et tu sais que ça porte malheur de faire des déclarations de victoire ? lui rappela-t-elle.

Elle se souvenait trop bien de celle de Sacha et de la défaite à la ligue qui avait suivi pour savoir que ce n’était peut-être pas qu’une superstition.

- Oups, désolé. Mais tu es sûre que tu ne veux vraiment pas être ma petite amie ?

- Brice…

- C’est vrai, il faut que je te le demande en grognant.

- Brice !

- Je plaisantais, je plaisantais ! se dépêcha-t-il de défendre sa vie. Et ça m’ira très bien aussi que tu m’accompagnes simplement en tant qu’amie à...

- Atellanes ? lut la jeune fille.

- Qu’est-ce que tu en penses ? C’est un site de fouille pas mal réputé. Comme on risque d’être dans les parages à ce moment, autant en profiter pour y jeter un œil.

Serena fit défiler les photos de maisons détruites, de vaisselles et d’autres objets du quotidien. Elle avait du mal à croire que Brice s’intéressait à ce genre de chose, et elle-même ne se sentait pas particulièrement attirée par le site archéologique.

- Ils sont étranges, remarqua-t-elle.

- Tu trouves aussi ? Je t’avoue que c’est plus pour eux que je tiens à y aller, pour comprendre pourquoi je me sens aussi bizarre quand je les vois.

Serena détailla avec attention les masques. Des bouches grimaçantes qui la faisaient frissonner et en même temps, il y avait ce masque au milieu des autres, celui semblant être fait d’une manière différente, d’une sorte de cristal noir. Ses yeux glissèrent sur la description juste en dessous de la photo.

Derkomaï.


***


La pokéball, charmante capsule bicolore, symbole universel retrouvé sur tous les écrans, les affiches, vêtements, boutiques et bien sûr, dans les mains de tous dresseurs, y compris de celui qui ne l’était plus tout à fait.

La mâchoire douloureuse, la nausée qui ne voulait plus le quitter, Sacha titubait au milieu des couloirs comme si la sphère dans sa main le déséquilibrait et l’empêchait d’avancer droit. Il fit une pause pour reprendre son souffle, tourner l’objet entre ses griffes et observer la lumière se refléter sur sa surface polie. Sa pokéball, celle où il refusait d’être enfermé.

Il frissonna et vérifia qu’aucune boule rose souriante ne le suivait, prête à lui casser le crâne d’un bon coup d’œuf. Pourtant il n’avait rien fait de mal : il était un dresseur, en arrêt forcé certes, mais un dresseur quand même. Voilà pourquoi il ne comprenait pas que Joëlle se soit montrée si réticente à lui confier la sphère.

Le métamorphosé se hâta de reprendre sa marche, croyant entendre au loin le rebond des pas de Leveinard. D’accord, en vérité Joëlle ne s’était pas juste montrée réticente mais avait tout bonnement refusé. Et quelque part, quoi de plus normal : on ne confiait pas son principal moyen de contenir un monstre au monstre lui-même. Mais bon, si l’infirmière ne voulait vraiment pas qu’il la prenne, elle ne l’aurait pas posée aussi en évidence sur la paillasse.

Tu n’es pas en train de te chercher des excuses par hasard ?

Super, maintenant la plante en pot lui parlait. En plus avec ses feuilles qui s’hérissaient comme des cheveux en pointe… Oui, bien sûr, Régis la plante verte ! Sacha ne rit pas longtemps à sa blague, son regard irrésistiblement attiré par la pokéball, cet objet qui en quelques secondes liait humains et pokémons. Et si cela fonctionnait aussi entre une humaine et un faux-pokémon ? Il secoua la tête, essayant de se remettre les idées en place : il avait appris dès le début que cette technologie n’était qu’un petit coup de pouce grâce aux multiples décharges de Pikachu lors de leur première rencontre.

Mais au moins elle l’empêchait de partir. Tes pokémons sont obligés de rester avec toi tant que tu n’as pas décidé le contraire, c’est quand même bien pratique.

Ses yeux s’écarquillèrent alors qu’il s’imaginait à nouveau libre, la pokéball brisée, Pikachu à ses côtés, Serena… Pourquoi Serena disparaissait à chaque fois qu’il s’imaginait à nouveau lui-même ?

Il cligna plusieurs fois des yeux, se rendant compte qu’il avait déjà atteint le hall et que, à sa grande déception, seul Brice était présent pour l’accueillir. Et il était difficile d’ignorer les grands gestes qu’il lui faisait, le pressant de le rejoindre et de s’assoir à sa table.

- Tiens, j’espère que tu aimes le soda cool, proposa-t-il en poussant une bouteille vers le métamorphosé.

Sacha força un sourire malgré l’impression que ses lèvres se déchiraient sous l’effort. Il avala une gorgée, où est-elle ? Les bulles contre son palais, où est-elle ? Leur rondeur, leur forme sphérique, l’étrange sensation quand elles éclataient contre sa langue. Où est-elle ? Leur fraîcheur dans un été éternel… Ses griffes se serrèrent sur la pokéball.

- Tu t’inquiètes de ne pas voir ma petite amie ? demanda nonchalamment Brice.

Sacha faillit bien s’étouffer alors que sa tête se remplissait de mille questions : comment Serena avait pu accepter en si peu de temps, était-ce vrai d’abord ? Si c’était vrai qu’Arceus lui explique ce qu’il s’était passé pendant son absence, par pitié !

- Dra ! Dracau ! Dracaudrafeudradradra…

- Je plaisantais tu sais.

- … Cau.

- Je me demande comment fait Serena pour ne rien remarquer, pouffa-t-il.

- Dracau ?

Les glaçons tintèrent et quelques gouttes volèrent vers le dragon.

- Au final, on n’en a pas encore discuté mais j’aimerais savoir : qu’est-ce qu’elle est pour toi ?

- Dr-Dr-Draaaa ?

Il voulait dire quel genre d’amie elle était, pas vrai ?! Eh bien, c’était une artiste formidable qui prenait toujours bien soin de ses pokémons. Elle était géniale, vraiment géniale, c’est ce que j’ai toujours pensé. La pokéball tomba et roula au pied du dresseur de l’autre côté de la table, ce dernier la ramassa, étonnée de la soudaine immobilité du monstre.

Sacha l’avait toujours pensé, mais Dracaufeu… Il scruta ses griffes, l’orange des écailles, comme s’il n’était plus tout à fait sûr d’être bien lui. Une vérification stupide puisque, justement, il ne l’était plus, du moins en apparence. Peut-être pas juste en apparence, entendit-il souffler à travers les roulis de la balle revenant vers lui.

Brice accorda quelques secondes au dragon, juste le temps de mordre sa paille et de se rendre compte que son verre était déjà vide.

- Je vais le regretter, murmura-t-il entre ses dents avant de reprendre d’une voix plus forte : Oh là là, comme c’est ennuyeux. Je m’en voudrais que Serena n’arrive pas à temps à son concours et loupe le Grand Festival. Et puis même moi, ça me fait un détour alors que je ne suis pas en avance sur mes badges. Donc, voilà, dit-il en se resservant, il vaudrait mieux qu’on se sépare ici.

Sacha dévisagea le garçon un long moment, n’osant pas y croire jusqu’au moment où sa flamme caudale crépita de bonheur. Mais Brice allait-il vraiment le laisser partir comme ça ? N’avait-il pas promis de tout révéler à Serena ? Et d’ailleurs, Sacha ne savait toujours pas ce qui avait retenu le garçon de le faire. Il se dandina sur le banc comme s’il savait qu’il s’apprêtait à dire une bêtise sans pouvoir pour autant s’en empêcher :

- Dra… cau ?

Brice fit glisser son doigt sur les rebords du verre, réussissant de temps à autre à en faire sortir un fin sifflement.

- Ne te méprends pas, je meurs toujours d’envie de lui dire et de pouvoir… Mais disons simplement que je ne veux pas avoir un monstre dans ma poche.

Et de toute façon, la jeune fille avait déjà fait son choix, préférant l’imposteur à celui qui ne voulait que son bien. Brice eut un petit sourire moqueur contre lui-même qu’il s’empressa de noyer dans l’eau pétillante.

- Cependant, qu’on soit bien au clair toi et moi : si vous êtes à nouveau en contact avec la Team Aqua, je veux être prévenu.

Un grondement sourd enfla dans l’air. Que Brice lui explique d’abord pourquoi il portait l’odeur du Mont Chimnée lorsqu’il les avait rejoints. Et si la Team Aqua réattaquait, bien qu’elle n’ait absolument aucune raison de le faire, il serait là, il serait toujours là… Son regard coula vers la pokéball. Même sans ça, je serai là.

- Tu n’es pas mauvais Dracaufeu, je dois bien l’admettre.

Oui, il… Sacha n’était pas assez mauvais pour laisser Serena quand elle avait besoin de lui. Sacha ne s’enfuirait plus par peur de souffrir, de faire souffrir, d’être comme lui. Parce que Serena était importante, très importante, parce que… Elle t’a capturé.

- Du moins, tu es un peu meilleur en combat que la plupart des pokémons de concours, reprit Brice dans un sourire narquois. Mais je ne pense pas que ça suffise face à des gens capables de retenir en hottage toute une ville. Une ville sous la responsabilité d’un champion d’arène qui plus est.

Sacha se mordit profondément la joue. Il savait bien que si la Team Aqua décidait de vraiment s’en prendre à Serena, il ne suffirait pas d’un ou deux bons dresseurs et de quelques officiers de polices. Il faudrait au moins, comme à Kalos, la réunion de tous les champions d’arènes et si possible de quelques membres du Conseil 4 voir du maître en personne. Des gens impossibles à réunir sur la base du : mon amie pourrait être possiblement attaquée mais je ne sais pas quand ni où. Mais Brice avait beau dire, de toute façon :

"Je ne pense pas que tu suffises non plus," grogne le faux-pokémon.

Le garçon plissa les yeux tout en s’enfonçant un peu plus dans son siège, son verre toujours à la main.

- Après tout, je n’ai pas besoin de toi. Je le saurai bien assez tôt si elle est impliquée.

Sacha s’était relevé, l’ombre de ses ailes couvrant le garçon sans qu’il ne paraisse le moins du monde effrayé. Il ne se gêna pas d’ailleurs pour se resservir une lichette d’eau.

- J’aime bien Serena, expliqua-t-il. Voir quelqu’un qui a réussi à remonter la pente c’est, avala-t-il une gorgée, rafraichissant. Et c’est peut-être parce que je l’aime bien que je me dis qu’au moins elle, contrairement à certains, ne ment pas quand elle dit ne pas les connaître.

- Dra ! se vexa le faux-pokémon.

- Pardon, c’est vrai que toi non plus tu ne t’abaisses pas à mentir, tu ne fais qu’omettre. C’est comme Adriane qui a oublié de me parler de la blessure de Serena.

Sacha frappa le sol de sa queue, les flammes qui remontaient blessaient à nouveau sa gorge, mais il n’y pensait plus alors qu’enfin Brice avouait qu’il s’était rendu à Vermilava. Plus qu’à savoir pourquoi il leur avait omis ce détail.

- Deux fois.

Brice n’avait pas élevé la voix, ses lèvres pressées contre le verre, ses mouvements souples et détendus, pas de quoi faire trembler les écailles du dragon. Oui, trembler, pas vibrer. Les glaçons s’entrechoquèrent dans le verre quand Brice le posa, amusé de l’inquiétude qu’il provoquait alors que, voyons, il n’y avait rien à craindre.

- Deux fois, répéta-t-il dans un sourire. D’abord Lavandia, ensuite le Mont Chimnée, ça pourrait déjà être trop pour une coïncidence… D’autant plus quand il y a un humain transformé en pokémon qui s’ajoute à tout ce bazar.

Brice ne jouait plus. Le métamorphosé le comprit à travers le sourire, le calme et cette jambe qui tressautait sous la table. Sacha le comprit quand il se remémorera ses propres liens avec les Teams Aqua et Magma, comment il les avait arrêtés et comment leur vengeance devrait se diriger vers lui. Vers lui, mais c’était à Serena qu’ils s’en étaient pris, c’était Serena qu’Arthur avait cru reconnaître.

- Mais bon, je vais quand même lui accorder le bénéfice du doute, et c’est bien pour ça que je la laisse partir.

Tous les muscles du métamorphosé se tendirent. Comment ça « la laisser partir » ? Et qu’est-ce que serait « ne pas la laisser partir » exactement ? La suie et les flammes tâchaient le bord de ses lèvres, les babines vibrant sous les grognements.

- Oui, exactement, je la laisse partir, reprit-il plus fort. Malgré cette épaule qui ressemble à une vengeance, malgré les coïncidences, malgré ton existence, pour l’instant je la laisse partir.

C’était une menace. Une menace dans sa forme la plus claire et simple, Brice n’avait même pas pris la peine de l’enrober dans une de ses plaisanteries habituelles.

- Et c’est à ce moment-là que tu me remercies, ajouta-t-il.

Plutôt le moment où le métamorphosé s’essayait à une nouvelle recette avec le garçon en ingrédient principal, à moins que deux yeux jaune vif ne l’en dissuadent. Tiens, tiens, Massko se révélait bien plus rapide et précis pour lui mettre la Lame Feuille sous la gorge que lors de leurs précédents combats.

- Au final, tu ne m’as toujours pas répondu : qu’est- ce qu’elle est… Ou plutôt, qu’est-ce que tu lui diras une fois redevenu humain ?

"Je n’ai pas la tablette."

- Comme c’est pratique, soupira Brice en même temps qu’il rappelait Massko dans sa pokéball. J’espère que le fameux ami de Serena sera plus dégourdi que toi.

- Cau-Caufeu ? articula péniblement le dragon.

- Elle est en train de l’appeler en ce moment même et vu comment elle parle de lui…

Voir du soda renverser sur ses vêtements n’était déjà pas agréable, mais se retrouver à moitié écrasé sous une table l’était encore moins. Sacha ne se préoccupait pas des cris étouffés du garçon, se précipitant vers les visiophones. Le métamorphosé allait le lui payer, quand Serena saurait… Brice souffla bruyamment pendant qu’il repoussait la table, observant au loin les mouvements erratiques du reptile.

- Tu sais que plus tu attendras pour le lui dire, plus elle en souffrira.

Et il restait assis à regarder l’endroit où il n’était plus.

- Oui, c’est ça. Tu n’es qu’un minable, un trouillard, un sale égoïste qui veut l’approcher mais qui ne supporte pas d’être touché en retour parce que tu sais très bien ce que t’es dans le fond. Et pourtant, malgré tout ça, je ne peux m’empêcher de comprendre Serena.

Sur la capsule à sa ceinture, il essuya le sang qui coulait le long de sa paume.

- De comprendre pourquoi elle a plus besoin de toi que de quelqu’un qui l’encouragera au loin, persuadé qu’ainsi il ne commettra pas d’erreurs.

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