Les Train Twins

Chapitre 17 : Home, sweet home...

10752 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 20/10/2021 11:14

Chapitre 17

 

Home sweet home.

 

L’attaque de Lucario n’avait laissé que ruines et désolation derrière elle. De tous les instruments de musique des Train Twins, la seule miraculée fut la guitare acoustique de Jessy, comme une maigre récompense du destin pour avoir vaincu la terrible bête. Pendant l’incendie qui avait ravagé le campement, braségali et lockpin réussirent à sauver le sac-à-dos de voyage de Fry, les petits sacs en bandoulière des filles et une valisette de vêtements, celle contenant les robes offertes par madame Marlyn.

Jessy et Jenny avaient été examinées par les pompiers et soignées pour leurs blessures comme tous les autres rescapés du festival de l’angoisse à l’hôpital de campagne de Verchamps, les rares blessés graves avaient été transférés à Voilaroc en ambulance ou en hélicoptère. Pendant ce temps, Fry avait emmené tous leurs pokémon au centre de l’infirmière Joëlle. Les partenaires de Jessy étaient dans un sale état, ils n’avaient pas connu de combat aussi épuisant depuis leur affrontement contre le Conseil des Quatre. Heureusement, Pit n’avait aucune séquelle liée à la chute du projecteur.

Les Irish Japanese avaient perdu pas mal d’affaires eux aussi, ils avaient donc plié bagages (enfin ce qu’il en restait) en direction d’Unionpolis, où vivait la famille de Shoko, en attendant de pouvoir rentrer à Galar. Rem et Fry avaient juste eu le temps d’échanger leurs numéros de téléphone avant de partir. Sans argent et sans instrument, les Train Twins n’avaient plus d’autre choix que de rentrer à Kanto… Jenny n’avait pas eu besoin d’énoncer cette vérité à voix haute, Jessy l’avait compris d’elle-même. Du matin au soir, la rouquine gardait la même mine sombre, son regard était aussi noir que celui d’un léviator, mais un léviator muet : elle n’avait quasiment pas prononcé un seul mot depuis la catastrophe. Fry avait pris le tauros par les cornes et avait vérifié directement auprès de Jenny qu’ils retournaient bien à Kanto et pas dans l’Archipel Orange. Jenny s’était contentée de lui répondre dans un soupir qu’une promesse était une promesse. Presqu’aussitôt sortis de l’hôpital, ils étaient remontés sur le dos de wailord et naviguaient vers l’ouest, mais le trajet durait plusieurs jours, ils furent obligés de repasser par l’Archipel Arc-en-Ciel, ce qui mit de nouveau Jenny mal à l’aise. La musique avait disparu du dos de wailord et de leur vie : personne ne parlait, personne ne chantait et Jessy n’avait pas retouché une seule fois à sa guitare. Seul Fry gardait le moral malgré l’ennui, au fond de lui il bénissait Lucario et sa rage destructrice, il était heureux, il était même fou de joie : il allait enfin voir Kanto ! C’était son rêve de petit garçon qui se réalisait enfin.

La dernière étape de leur voyage de retour vers Kanto était l’île numéro un de l’archipel des Sévii. L’été, tout comme la compétition des pokémon feu du Mont Braise, étaient terminés et les plages de sable fin de l’île rouge étaient totalement désertées. Après avoir accosté sur la plus petite plage à l’est du village dans une ambiance morose, le trio marcha dans le soleil couchant à travers les ruelles vides pour rejoindre le centre pokémon. Ils passèrent devant une jolie maison traditionnelle de taille modeste avec un panneau à vendre accroché à la fenêtre. Jenny posa son regard dessus tout en continuant sa route sur les talons de sa sœur. Les autres n’y prêtèrent pas attention, il n’y avait aucune raison pour qu’ils le fassent, seule Jenny savait à qui elle avait appartenu autrefois… Timidement, Fry demanda si Scott était dans les parages et l’infirmière Joëlle lui expliqua qu’il avait définitivement quitté l’archipel pour rejoindre ses parents. Le cœur lourd, Jenny préféra aller se coucher de bonne heure en rasant les murs. Elle ne voulait pas risquer de croiser l’infirmière Joëlle dans les couloirs et d’être reconnue, elle, la garce qui avait brisé le cœur de son précieux technicien de la maintenance. Le potin avait dû faire dix fois le tour de l’archipel. Jessy de son côté était trop perturbée pour trouver le sommeil alors elle s’en alla seule jusqu’à la plage.

La nuit était claire, assise près d’un rocher, Jessy fixait l’océan d’un noir brillant. Elle resta installée là, figée, pendant plus de deux heures. La lune et les étoiles éclairaient suffisamment le sable pour qu’elle voit une ombre devenue familière s’approcher d’elle.

« T’es là, dit le visiteur. Jenny m’a envoyé te chercher, elle s’inquiétait.

- J’ai pas bougé… Répondit Jessy sur un ton morne. Fry s’assit à côté d’elle.

- Je suis excité à l’idée d’aller à Kanto. Toi par contre ça n’a pas l’air de t’emballer et je crois que ça n’a rien à voir avec l’incident de Verchamps.

- Franchement, je préfèrerais retourner fissa sur l’île d’Hamlin, mais on t’a fait une promesse alors on va aller au Bourg Palette…

Jessy poussa un profond soupir dépité et Fry reprit.

- Je suppose que ma lubie te dépasse, mais tu sais moi non plus je ne comprends pas ton affection pour l’Archipel Orange… Ok, comme paradis tropical c’est sympa mais t’as tellement voyagé, dans des coins cent fois plus beaux, alors pourquoi…

- Mes grands-pères se sont rencontrés sur l’île Gélatine, le coupa Jessy.

- Ah ? Et ?

- Tout le monde fait tout un foin du Bourg Palette, le village d’origine de Sacha Ketchum, le plus grand maître pokémon de la planète et du célèbre professeur Chen… Sauf que Jenny et moi, on ne serait jamais venues au monde si Jacky Léon et Sacha Ketchum n’avaient pas sauvé un lokhlass maltraité au cours d’une après-midi ensoleillée sur l’île Gélatine. Ils sont devenus amis ce jour-là… Et quelques années plus tard, leurs enfants sont tombés amoureux.

Jessy dessinait négligemment une pokéball dans le sable.

- Je ne connaissais pas cette histoire… Fit doucement Fry.

- Et moi c’est l’une des seules que je connaisse... »

Il y eut un blanc dans la conversation puis Jessy reprit.

« Plus tard, quitte à avoir un pied à terre, j’aimerais que ce soit une maison près de l’île Gélatine.

- Je comprends mieux maintenant, mais… Qui t’attendrait là-bas ? Toute ta famille vit à Kanto désormais. »

Elle se tourna brusquement vers son partenaire. Pour la première fois depuis leur rencontre, Fry vit de la tristesse et même de la mélancolie dans son regard comme dans sa voix, et la lueur fébrile de ses yeux bleu électrique avait disparu.

« Personne n’attend personne Fry… Jamais. Une maison vide fera l’affaire.

- Hein ? »

Jessy détourna le regard et se leva brusquement. Fry n’avait pas compris la signification de cette dernière phrase mais elle allait lui tourner dans la tête pendant des jours et des jours, il le savait.

« Attends Jess, pourquoi est-ce que tu crois ça ? Jessy ! »

La jeune fille remontait la plage d’un pas raide en ignorant les questions de Fry. Résigné, il se leva à son tour et ils rentrèrent ensemble mais en silence jusqu’au centre pokémon. Demain, la route serait longue.

Ils remontèrent la mer Sévii jusqu’au chenal vingt. Pour la première fois, Fry vit le volcan de Cramois’île et les ruines de l’ancienne cité détruite lors de la dernière éruption. Seul un centre pokémon, visible au loin et reconnaissable par son toit rouge, avait été reconstruit à côté d’un centre d’études sismiques. Alors que wailord contournait Cramois’île pour rejoindre le chenal vingt-et-un qui remontait vers le nord, Jessy, assise en tailleur, fixait l’hyperball de lucario qu’elle tournait lentement entre ses doigts, de droite à gauche, puis de gauche à droite, comme une lourde pendule. La rage en elle lui hurlait de jeter la balle verrouillée au fond de l’océan, mais son respect pour la vie et en particulier la vie pokémon lui permettait de garder à peu près son sang-froid.

« Tu vas lui donner un surnom ? Demanda Fry.

- Il ne le mérite pas ! Cette saleté de pokémon… Il a tout broyé, absolument tout !

- Je sais… Pas la peine de te le ressasser encore une fois, tu t’fais du mal pour rien. »

La rouquine grommela quelque chose d’inaudible et reprit sa bouderie. Avec un sourire blasé, Fry soupira. Jessy avait un sale caractère mais il devait reconnaître que le choc avait été rude. Sans argent et sans instrument, plus de concours et sans concours pas d’argent… C’était un cercle vicieux. Pour les jumelles, c’était retour à la case départ, il leur fallait un nouveau plan pour partir à Kalos.

« Non seulement on n’a plus un rond, se lamenta Jessy, mais en plus à cause de ce connard de Lucario on doit retourner au Bourg Palette…

- Il fallait bien qu’on y revienne un jour ou l’autre, soupira Jenny. Maman sera contente de nous voir.

- Tu parles ! Elle va aboyer comme un grandbull comme d’habitude et nous ressortir sa rengaine sur les maîtres pokémon !

- Ca me rappelle quelqu’un… Marmonna Fry le sourire aux lèvres.

- Je l’entends d’ici : pourquoi vous n’êtes pas revenues plus tôt ? Pourquoi vous n’appelez jamais ? Vous êtes trop maigres, vous ne mangez pas assez ! Jessy sois polie, Jessy tiens-toi correctement, Jenny habille toi décemment…

- Maman ne m’a jamais dit ça.

- Elle devrait, grogna Jessy. En plus elle va nous passer un savon lorsqu’elle saura qu’on n’a plus d’argent…

- Tu n’auras qu’à sortir Lucario, ironisa Jenny, elle comprendra.

- Pas une mauvaise idée…

- C’était du cynisme Jess.

- Pas une mauvaise idée quand même. »

Fry compatissait à leur douleur, du moins il essayait car intérieurement il jubilait. Il regarda l’horizon par-dessus la tête de wailord, une mince ligne verdâtre commençait à se dessiner : Kanto était déjà à portée de vue, bientôt la région serait sous ses pieds. Il se voyait déjà déposer un baiser sur les galets de la plage. Si les filles avaient été de meilleure humeur il les aurait sans doute embrassées toutes les deux tellement il était heureux.

Il fut le premier à terre lorsque wailord vint accoster sur l’embouchure de la rivière au sud du Bourg Palette. Pendant que Jenny renvoyait son pokémon dans sa ball, Fry suivit des yeux une nuée de papillusions de Kanto s’envoler de la prairie devant eux en direction des collines, leurs cris aigus résonnaient autour d’eux comme des rires de fées malicieuses. Il était émerveillé. Au loin, il remarqua une volée de roucoups et de roucarnages, ils avaient débuté leur migration.

« Ah ah ! Eux ils y retournent dans l’Archipel Orange ! C’est ça d’être trop frileux ! » Dit Fry à voix haute et pour lui-même. Parler de l’Archipel Orange lui rappela de humer l’air : ça sentait l’étang de bord de rivière, l’eau fraiche, les jeunes mystherbes et les crocus, il y avait même une odeur qu’il n’avait jamais connue en dehors de noël : une odeur de sapin. Des sapins ! De vrais sapins avec leurs racines encore enfouies dans le sol, il n’en revenait pas.

« Et pas de pamplemousse ! Yah-ah ! » Jubila Fry en levant les bras en l’air sous le regard médusé des raichus et des jumelles.

« Rairaichu…

- Ça y est, il a craqué. » Commenta platement Jenny.

Jessy mit un certain temps à réagir, son humeur s’était dégradée en quelques secondes en voyant les mêmes choses que Fry.

« Ce type a cinq ans dans sa tête… » Soupira Jessy avec dépit.

Fry était à la limite de se mettre à courir sur le sentier qui remontait la vallée vers le nord mais les filles trainaient les pieds. Il fut obligé de canaliser ses émotions pour s’adapter au rythme de marche des jumelles. Jenny ne s’attendait pas à le voir dans un tel état d’euphorie, surtout après l’incident de lucario. Il ne s’était pas comporté comme ça lorsqu’ils étaient arrivés à Sinnoh. Jenny repensa alors aux posters dans sa chambre sur l’île Pomelo, celui en évidence au-dessus de la tête de lit représentait le laboratoire du professeur Chen. Jenny hocha lentement la tête négativement : certains rêvent de voir Illumis, d’autres le Bourg Palette…

Jenny et Fry marchaient devant en longeant la rivière, suivis par Pit et Chu. Les raichy piaillaient joyeusement en reconnaissant la terre de leur enfance. Jessy, loin derrière la petite troupe, rampait presque et donnait des coups de pieds dans tous les cailloux à sa portée. Fry finit par se retourner pour lui jeter un coup d’œil rapide. Plus ils s’approchaient du Bourg Palette et plus la rouquine se transformaient en une espèce de pokémon spectre sinistre, Fry finit par se dire qu’ils seraient suivis d’un darkrai au moment de passer les portes du laboratoire. Comme son excitation était un peu retombée, il réalisa qu’ils marchaient dans un silence monacal et pesant depuis un moment. Il se tourna vers Jenny.

« Ça faisait longtemps que vous n’étiez pas revenues ici ?

- La dernière fois c’était il y a deux ans et ça ne s’est pas très bien passé… Expliqua Jenny sans parler trop fort pour ne pas importuner sa sœur au bord de l’implosion.

- Jessy et votre mère… Elles ne s’entendent vraiment pas du tout ? Demanda Fry, après un instant d’hésitation.

- Ca dépend des moments, répondit lentement Jenny. On devait rentrer chez nous après avoir affronté le Conseil des Quatre au plateau indigo l’an dernier, mais après notre défaite, nous n’étions vraiment pas d’humeur à se prendre un nouveau sermon… Pareil qu’aujourd’hui en fait, c’est pour ça que j’appréhende ces retrouvailles.

- Oui j’imagine… Perdre face au Conseil des Quatre, il n’y pas de honte à ça mais ça reste en travers de la gorge quand même. J’en sais quelque chose.

- Quand nous sommes retournées vivre dans l’Archipel Orange au lieu de rentrer au Bourg Palette, Maman l’a mal vécu.

- Pourquoi votre mère vous fait-elle des sermons ? Elle devrait être fière de vous avec toutes les ligues que vous avez gagnées.

- Elle a peur que Jessy finisse comme mon père et moi elle me pousse au cul pour les études.

- Ca veut dire quoi finir comme votre père ? »

Jenny ne répondit pas immédiatement. Après un long moment de réflexion, elle poussa un très profond soupir.

« Tu comprendras bien assez vite… On est arrivé. »

Devant eux se dressaient les premiers pavillons du Bourg Palette. Ce village semblait figé dans le temps. Les maisons construites pour certaines il y a vingt, trente, cinquante ou même cent ans se ressemblaient toutes, il était difficile de différencier les récentes des anciennes. Les murs étaient tous blanc cassé à de rares exceptions près, les toitures étaient rouges ou orange. Il y avait de vastes espaces verts : des champs, des potagers, des jardins, des bosquets, des étangs, des pâtures où broutaient des tauros, des wattouat ou encore des ponyta. Des fleurs sauvages parsemaient les talus et des fleurs en pots ornaient les clôtures et les rebords de fenêtres. Tout était incroyablement paisible dans ce hameau bucolique aux confins de Kanto.

Le laboratoire pokémon à l’extrême est du village était bien visible de loin car il était installé sur un petit plateau verdoyant, il n’y avait qu’une seule maison dans son voisinage immédiat. Fry put prendre la bonne direction sans se tromper. Ils étaient sur la mauvaise rive du ruisseau traversant le village, mais une fois parvenu au niveau de la colline du laboratoire, un petit pont de bois permettait de relier les deux berges. Fry se figea devant la grille ouverte en bas du long escalier de ciment bordé de buissons qui menait jusqu’au laboratoire. Il regardait la mythique éolienne, presque hypnotisé par ses pales. En plus de quatre-vingt ans, des dizaines de milliers d’enfants étaient passés par cette grille pour venir chercher leur premier pokémon…

Jenny passa devant lui d’un pas solennel, elle avait compris que si elle ne rentrait pas la première, personne ne rentrerait. Pit et Chu la doublèrent par le talus et commencèrent une course effrénée dans l’escalier, eux au moins étaient heureux de rentrer chez eux. Jenny leur emboita le pas, puis Jessy arriva à son tour à la grille. Elle passa le portail et après avoir monté les trois premières marches elle se tourna vers Fry et lui adressa la parole pour la première fois depuis plusieurs heures.

« Eh ! Alors tu viens ? » Demanda la rouquine d’une voix éteinte. Fry avait l’impression de se réveiller d’un long rêve, il se dépêcha de la suivre et ensemble ils escaladèrent le grand escalier. Une fois arrivé au sommet, Fry découvrit une immense pâture, quasiment un parc. Elle s’étendait autour du laboratoire avec une vaste mare en son centre. Des centaines de pokémon de toutes les espèces gambadaient joyeusement dans la zone délimitée par une clôture en bois rustique mais entretenue. A nouveau, l’émerveillement envahit Fry et il écarquilla les yeux. Il n’avait jamais vu autant de pokémon originaires de régions différentes réunis en un seul et même endroit. Les deux raichus étaient déjà entourés de vieux camarades, dont Tutur le tortank de Jenny. Fry l’ignorait encore mais il avait pour la première fois sous les yeux le lamantine et le ronflex des jumelles.

Un grincement de porte le détourna de sa contemplation, il vit Jenny rentrer dans la bâtisse. Jessy, la mine renfrognée, emprunta le même chemin, alors Fry suivit le mouvement. La porte donnait sur un petit hall d’entrée et l’angle d’un couloir étroit. Trois portes étaient visibles, dont deux étaient ouvertes, il identifia ainsi le salon à l’entrée du couloir et la cuisine sur sa droite.

« Pose ton sac dans le salon et attends-nous ici ! » Lui ordonna-t-elle. Fry sursauta presque. Un peu surpris par ce ton très autoritaire, il obéit, après tout il n’était pas chez lui. Il entendit Jenny pester un petit peu mais elle ne formula aucune objection claire. Les filles disparurent dans l’angle du couloir, Fry s’avança vers la porte du salon et il put ainsi apercevoir les jumelles en train de grimper les marches d’un escalier en bois menant aux chambres. Le salon était de petite taille mais disposait d’une large fenêtre donnant sur le parc du laboratoire. Après avoir regardé rapidement la pièce, sa table à diner de six places, ses deux canapés en vis-à-vis et son grand écran de télévision encadré de rayonnages débordant de livres, il déposa son sac contre la petite table basse. Fry regarda par la fenêtre, il aperçut les deux professeurs Léon au loin, ils étaient reconnaissables par leurs blouses blanches, les cheveux roux flamboyants de la professeure Florine Léon et ceux désormais gris du professeur Jacky Léon. Le père et la fille étaient en plein examen d’un petit groupe de laporeilles et de lockpins. La vue de l’immense pâturage, peuplé de pokémon de toutes les espèces et de tous les types jouant et se prélassant dans la bonne humeur, combla Fry de sérénité. Il trouvait le décor magnifique.

Le jeune champion remarqua une porte entrouverte au fond de la pièce. Irrésistiblement poussé par sa curiosité, il passa la tête par l’interstice. Une forte odeur de javel et de désinfectant lui agressa les narines, au moins ce n’était pas un parfum synthétique de pamplemousse. Devant lui, le carrelage gris brillait en reflétant la lumière pénétrant dans la pièce par la porte vitrée de l’éolienne. Sur sa gauche, un porte manteau soutenait des blouses de laborantins entre deux machines étranges. La pièce était basse de plafond et un escalier menait à ce qui ressemblait à un demi-étage. Fry gravit les quelques marches et se retrouva dans la salle proprement dite du laboratoire.

Fry explorait non sans une certaine excitation l’intérieur du laboratoire des professeurs Léon, oubliant complètement les directives de Jessy. Des machines complexes s’étalaient sur les murs et quelques caisses remplies à ras-bord de pokéballs étaient posées au sol. Par la grande baie vitrée au fond de la salle, il y avait une vue imprenable sur tout le village. Fry s’éloigna des fenêtres pour se rapprocher de l’ordinateur high-tech près de l’escalier en métal raccordant le plateau technique à une mezzanine. Sur l’écran tactile, un tableau aux multiples colonnes noircies et une liste de Pokémon. Un plus petit ordinateur, portable celui-là, de modèle récent était posé en veille à côté. Fry leva les yeux sur le mur au-dessus des ordinateurs. A côté de quelques posters scientifiques et de l’horloge indiquant 17h45, il y avait des cadres photos qui s’étalaient vers l’escalier, rythmant la montée des marches. Fry se contenta de regarder les deux premiers clichés accrochés au-dessus des premières marches de l’escalier, il ne devait déjà pas être dans le laboratoire, il ne pouvait se permettre de monter. Il y avait tout d’abord le portrait d’un vieil homme en blouse qu’il avait déjà vu dans ses manuels de sciences à l’école, c’était le célèbre professeur Samuel Chen. En voyant cette figure sage, Fry se rappela que ce laboratoire avait été fondé par lui dans les années 1970. En arrivant au Bourg Palette, il avait aperçu sa statue sur la grande place du village, il ne l’avait pas reconnu même au milieu de trois sculptures de carapuce, salamèche et bulbizarre, mais sur cette image c’était flagrant. La photo de droite était un peu moins ancienne. Il reconnut immédiatement Florine Léon adolescente, devant un paysage vallonné et verdoyant typique de Kanto. Elle restait reconnaissable, mais son visage enfantin déstabilisait un peu Fry, elle était beaucoup moins imposante avec sa chemise d’écolière, sa jupe plissée à carreaux et ses tâches de rousseurs. Elle était entourée de quatre garçons, visiblement un peu plus âgés qu’elle à l’époque. Hormis celui à sa droite, tous les autres la dépassaient d’une voire deux têtes. Il lui semblait reconnaitre sur le plus petit d’entre eux les traits de Sacha Ketchum mais avec les yeux bleu électrique des jumelles.

« Ce serait lui alors Sylvain Ketchum… Murmura pour lui-même Fry.

- Salut ! » Cria une petite voix fluette au dessus de Fry. Le jeune batteur sursauta puis leva les yeux vers la mezzanine. Il vit accroché aux barreaux comme un ouisticram un petit garçon blond tout sourire.

« Euh, salut, répondit Fry, surpris mais avec un sourire naissant.

- T’es qui ?

- Je m’appelle Fry et toi ?

- Moi c’est Robin, comme Robin des bois.

- Ah je vois, toi aussi tu es un héros alors ?

- Ouaip, je suis le héros du Bourg Palette ! »

"Un de plus…" songea Fry. Le champion agrandit son sourire en regardant le gamin qui lui rappelait un peu lui au même âge, c’est alors que son esprit lui donna un coup de pied mental : que faisait cet enfant dans le laboratoire des professeurs Léon ? Il avait l’air trop jeune pour venir chercher son premier pokémon.

« Robin… Qu’est-ce que tu fais là au fait ?

- Bah j’suis chez moi ! Répondit le blondinet, visiblement amusé par la question.

- Chez toi ? Répéta Fry. Mais c’est un laboratoire ici.

- Non, ça c’est derrière toi, là où moi je suis c’est la maison. Maman me l’a bien fait répéter, j’ai compris. Je ne dois pas descendre l’escalier sans son autorisation.

- Maman ?

- T’es un peu bizarre tu sais. » Dit Robin en riant à moitié. Malgré son jeune âge et sa bonne humeur il avait l’air de vouloir rester poli. Fry cligna des yeux en dévisageant le petit garçon. La porte à côté de Robin coulissa, Jenny apparut alors derrière lui, suivie de près par Jessy. Fry en conclut donc qu’il y avait un autre escalier menant à l’étage.

« Jenny ! »

Le petit garçon se jeta sur la première jumelle et l’enlaça aussi fort qu’il le pouvait. Jenny avec un sourire un peu forcé posa une main douce sur la tête de Robin et lui caressa les cheveux. Jessy lui jeta un regard perçant. Fry regardait la scène d’en bas, sans comprendre le moindre élément.

« Jessy ! » Robin se détacha de Jenny et voulut aller vers Jessy mais la rouquine eut un mouvement de recul et dressa son bras face à Robin.

« Ah ne m’approche pas toi ! »

La rousse contourna le gamin et descendit rapidement l’escalier en métal pour rejoindre Fry. Le petit garçon s’accrocha aux barreaux à nouveau et regarda les deux ados en contrebas avec des yeux de remoraid frits.

« Mais Jess…

- Pst ! Aller va-t’en ! Laisse nous tranquilles ! » Lança Jessy au petit comme si elle parlait à un pokémon sauvage. Le regard rempli de larmes, Robin fila par la même porte par laquelle Jessy et Jenny étaient arrivées, vers le couloir du premier étage. Jenny ferma les yeux et soupira, à la fois fatiguée et peinée, pourtant elle ne fit aucun commentaire. Elle descendit lentement l’escalier alors que Fry, profondément choqué, commençait déjà à crier sur Jessy.

« Mais enfin ça ne va pas de lui parler comme ça ?!? C’est un gosse ! Pas un vieux zigzaton errant !

- Je lui parle comme je veux, ronchonna Jessy devant un Fry de plus en plus perturbé.

- Mais… Mais enfin qu’est ce qui te prend ?!? Et toi Jenny tu ne dis rien ? Et puis c’est qui ce gamin à la fin ? »

Jessy trouva brusquement très intéressant le poster anatomique d’un magicarpe accroché sur le mur du labo. Jenny jeta un bref regard à sa sœur, sans doute pour anticiper sa réaction mais elle n’avait plus vraiment le choix maintenant que Fry avait vu Robin, il fallait bien lui raconter.

« C’est notre demi-frère, Robin, murmura Jenny d’une voix presque honteuse.

- Vous avez un frère et vous ne me l'avez jamais dit ?!? Cria Fry les yeux exorbités par la surprise.

- Roh c’est bon, toi t’es le fils de Reese Morgan et t’as rien dit ! Objecta Jessy, saoulée.

- Je vous l’ai dit au bout de deux jours, là on se connait depuis six mois et pas une seule fois vous n’avez mentionné Robin !

- Ce n'est qu'un demi-frère, cracha Jessy.

- Quand même !

- Il n'est pas important ! Râla à nouveau la rouquine.

- Pas important ?!? Merde, tu parles d’un être humain là Jessy ! »

Fry était sidéré, il regarda alternativement les deux jumelles, baigné dans un océan d'incompréhension.

« Même toi tu ne me l'as pas dit… Envoya-t-il à l'adresse de Jenny.

- Jessy m'aurait tué sinon ! Tenta de se justifier Jane.

- Vous êtes... Vous êtes dingues toutes les deux, vraiment dingues. »

Fry agita ses bras avant de les laisser tomber lourdement en prononçant cette dernière phrase. Consterné, il préféra s'éloigner des jumelles. Jenny hésita un instant, elle voulait le rattraper, trouver une nouvelle excuse mais rien ne lui venait à l'esprit. Pour couper court à toutes ses envies de justification, Jessy retint sa soeur par le bras. Elle avait les sourcils froncés et le regard très dur.

« Non laisse-le. Il ne peut pas nous comprendre de toute façon. »

Fry traversa la petite pièce carrelée du rez-de-jardin. Il prit une profonde inspiration et ouvrit la porte vitrée sous l’éolienne. Il n’accorda pas d’importance à l’escalier en colimaçon et sortit du bâtiment lorsque la porte automatique s’ouvrit. D’un pas rapide, il contourna le bâtiment pour rejoindre le grand escalier aménagé donnant accès au laboratoire depuis la route. Il ne savait pas trop où aller ni ce qu’il faisait, alors instinctivement il empruntait en sens inverse le chemin qu’il avait pris pour venir. Alors qu'il avait atteint la barrière délimitant le jardin des professeurs, il tomba sur un quadragénaire blond et barbu avec les bras chargés de grands sacs de commissions. Un kangourex, chargé comme un bourrinos lui aussi, le suivait. L'homme avait beau être sacrément costaud, il paraissait très encombré par autant d'aliments et de fournitures.

« Oh, salut lança-t-il à Fry. Euh... Je ne sais pas qui tu es mais tu ne pourrais pas m'aider s'il te plaît ? »

Fry semblait émergé : « Hein ? Ah oui pardon ! Donnez-moi ce sac !

- Merci, répondit avec reconnaissance le grand bonhomme. Je suis Sébastien Lavandson, l'assistant des professeurs Léon, et accessoirement le mari de la plus jeune.

- Vous m'auriez dit que vous étiez le mari de Jacky Léon je ne vous aurais pas cru, répondit Fry.

- Eh eh ! T'as de l'humour mais pas l'esprit ouvert ! » Rétorqua Sébastien qui se retenait de rire pour ne pas faire tomber ses lourds paquets.

Alors qu'il rebroussait chemin en marchant à côté de Sébastien dans le long escalier, Fry se mit à réfléchir et il tiqua : le mari de Florine, donc le père de Robin et le beau-père des jumelles... Jamais Jessy ou Jenny n'avaient mentionné le divorce et le remariage de leur mère. Encore une chose qu'elles lui avaient cachée. Fry fronça les sourcils sans s'en rendre compte en pensant à tout cela. Les deux hommes se dirigèrent vers la porte de l’autre façade. Fry ouvrit la porte pour Sébastien et le laissa entrer en premier dans la partie résidentielle du bâtiment. Kangourex était trop grand et trop large pour rentrer dans la maison, alors il posa une partie de ses paquets sur le seuil et confia les autres à Fry.

« C’est moi ! » Cria le grand blond avec bonne humeur. Alors que Seb entrait dans la cuisine, suivi de près par Fry son porteur de sac intérimaire, une tornade blonde traversa la maison pour venir se jeter dans les bras de son père. Le petit Robin déboula dans la pièce tel un gravalanch en roulade et sauta sur son père qui venait à peine de poser les sacs de courses sur la table.

« Papa ! » Hurla le gamin joyeux.

Sébastien souleva le garçonnet d’un mètre trente avec facilité, comme s’il cueillait une simple fleur. Le sourire du père était presque plus rayonnant que celui du fils.

« Salut fiston ! Alors t’as été sage ?

- Voui ! »

Fry regarda la scène du coin de l’œil avec un petit sourire. Il remarqua les yeux rougis de Robin, le petit avait dû pleurer après l’agression de Jessy. Son père n’avait apparemment rien remarqué, mais vu comment il dévorait son fils des yeux, Fry le soupçonnait surtout de ne rien dire pour ne pas mettre son fils dans l’embarras, après tout les garçons ne pleurent pas, c’est bien connu. Fry poussa un petit soupir attendri et nostalgique et continua de regarder la scène familiale en essayant de se faire le plus discret possible.

« Ah, alors si tu as été sage… »

Sébastien farfouilla dans un des sacs de courses et en sortit une sucette en forme de floravol.

« Cadeau !

- Ouais !!! C’est au citron vert hein ?

- Ouaip, ton préféré.

- Géant ! Merci papa ! »

Le gamin engouffra la sucette et offrit un autre grand sourire à son père.

« Ne cours pas avec dans la bouche.

- Ok !

- Et ne va pas la montrer à ta mère sinon je vais me faire engue… Euh gronder.

- Ok papa, t’inquiète ! T’en aurais pas une deuxième pour Fry ? »

Le jeune champion fut surpris d’entendre son nom. Il remua un peu les épaules puis sourit au gamin.

« C’est gentil Robin mais je suis plutôt porté sur les glaces moi.

- D’ac d’ac. »

Le petit garçon sourit une dernière fois à son père et au jeune dresseur avant de sortir de la pièce. Sébastien, une lueur de fierté dans le regard, ne quitta pas son fils des yeux avant qu’il soit totalement sorti de la cuisine. Il se tourna alors vers Fry et lui tendit le bras pour une poignée de mains.

« Au fait Fry, qu’est-ce qui t’amène au labo ? Tu as l’air un peu âgé pour venir chercher ton premier pokémon.

- Un peu oui, répondit Fry avec un sourire amusé. J’accompagne Jessy et Jenny.

- Jenny et… Elles sont revenues ? Demanda le grand gaillard, ses yeux bruns remplis d’étonnement.

- Oui sinon je ne serais pas là, je vous le jure.

- Florine m’avait prévenu mais je n’y croyais pas… Je suppose que c’est pour ça que Robin a pleuré. »

Fry préféra se taire, gêné. Sébastien ne le remarqua pas, mais il avait remarqué les yeux rouges de son fiston adoré.

« Tu veux boire ou manger quelque chose ? Il reste pas mal de temps avant le dîner.

- Une bière si vous avez, ça fait longtemps.

- Tu as quel âge exactement ? Demanda le père de famille en haussant un sourcil. Ok tu as eu ton premier pokémon il y a quelques temps mais…

- Oubliez ce que j’ai dit, une limonade ce sera très bien. »

Sébastien éclata de rire en criant : « Bien essayé ! »

Les deux hommes rangèrent le plus gros des commissions puis s’installèrent dans le salon autour d’une bière pour Sébastien et d’un panaché pour Fry, son hôte avait cédé. C’était vraiment quelqu’un de cool, trop sans doute, songea Fry qui s’imaginait très bien Sébastien se faire mener à la baguette par la professeure Florine Léon.

« Quel âge à votre fils ? Finit par demander Fry.

- Huit ans.

- Je vois, il me semblait bien qu’il était déjà grand.

- Un vrai petit homme ! Répondit joyeusement Sébastien, fier de son garçon.

- Je dois vous avouer que je pensais que la professeure Léon était toujours mariée à Sylvain Ketchum.

- Non, ils sont divorcés depuis neuf ans et… Enfin Flo et moi on s’est marié dans la foulée. » Confia l’homme, un peu mal à l’aise de parler de ça avec un inconnu. Il fronça légèrement les sourcils.

« Les jumelles ne t’ont pas parlé de moi ?

- Oh, elles ne parlent jamais de leur vie au Bourg Palette, je ne savais presque rien de votre femme non plus… » Répondit Fry, gêné à son tour. Sébastien avait l’air contrarié, Fry ne voulait pas être à l’origine d’un drame familial alors il ajouta :

« Je les ai déjà enguirlandées pour m’avoir caché tout ça. D’une part ce n’était pas cool pour vous et Robin, et moi j’aurais pu faire de grosses gaffes face à la professeure qui n’a pas toujours un caractère facile. Je vous dis ça parce que je ne veux pas que vous en remettiez une louche…

- Ne t’inquiète pas pour ça. J’ai la carrure d’un ursaring mais je ne griffe pas, je ne mords pas et en fait je ne hurle même pas. C’est ma femme qui fait tout ça à ma place.

- Eh eh… »

Fry ne put s’empêcher de rire, Sébastien avait un don pour détendre l’atmosphère apparemment.

« Au fait, arrête de me vouvoyer et appelle moi Seb, comme tout le monde.

- Ca marche pour moi Seb ! »

Et Seb leva son verre.                          

« Aux femmes.

- Je dirais même aux rousses ! Renchérit Fry.

- Ma mère l’est aussi, dit Seb sur un ton sans réplique.

- Ah, désol…

- Elle aussi elle a un sacré caractère. »

Fry comprit que Seb le faisait marcher, alors tous deux rirent encore et levèrent leur verre encore plus haut.

« Alors disons aux furies de la lignée des Léon.

- Et à toutes les femmes tyranniques ! » Ajouta joyeusement Seb avant de descendre son verre de bière.

« Qui est tyrannique ?

- Et qui traites-tu de furie exactement Fry ? »

Les deux garçons déglutirent avec difficulté et se tournèrent vers la porte donnant sur le laboratoire. Florine se tenait dans l’encadrement, les bras croisés, avec derrière elle les deux jumelles, elles avaient les yeux vissés sur Fry.

« Ma Florine… Murmura Seb d’une voix mielleuse.

- Alors comme ça c’est toi Fry ? » Dit Florine sans faire attention à son mari. Elle s’approcha du garçon qui se recroquevilla sur lui-même comme un pokémon apeuré. Il fut le premier surpris par sa réaction, il était plus grand que Florine mais déjà à travers le vidéophone cette bonne femme l’avait toujours impressionné, alors en vrai… Florine tendit la main vers Fry, le garçon leva timidement les yeux vers ceux vert foncé de Florine. La professeure sourit avec sympathie.

« Ravie de te voir enfin en chair et en os. »

Soulagé, Fry se redressa et serra vigoureusement la main de Florine. Elle avait de la poigne en plus la mère Léon. Florine se tourna ensuite vers Seb.

« Pour ce soir, je pense qu’on peut déroger à la tradition et déplacer notre soirée pizza. Ce sera plus simple.

- Cool… » Répondit Seb, soulagé de ne pas devoir faire à manger pour six sans avoir été prévenu à l’avance. Jessy s’avança à côté de Fry et grogna à son oreille.

« Ne crois pas que je vais oublier aussi vite la furie de la lignée Léon, Fry Morgan...

- Et alors ? Je ne suis pas prêt d’oublier que tu ne m’as ni parler de ton frère ni de Seb… » Murmura Fry à son tour de façon à ce que les adultes n’entendent pas.

« D’ailleurs, la prochaine fois que tu parles comme ça à Robin devant moi je te colle mon pied dans le derrière. Et ce n’est pas qu’une expression. »

Les deux ados se toisèrent, leurs yeux lançaient des éclairs. Derrière eux, Jenny soupira, désolée.

A table, l’ambiance était assez tendue. Ce fut Florine qui, à la fin de sa première part de pizza, finit par poser la question fâcheuse.

« Alors, on peut savoir pourquoi vous êtes revenues si brusquement en tirant des têtes d’enterrement ?

- On était à un festival de musique à Sinnoh, commença Jenny après un bref silence. Un pokémon sauvage a attaqué le site et a tout ravagé… On n’a pas pu sauver grand-chose de nos affaires.

- Je suis vraiment désolé, dit poliment Seb avec une compassion sincère.

La professeure Florine Léon resta de marbre en revanche.

- Qu’est-ce que c’était comme pokémon ? Demanda-t-elle.

- Un lucario, Jessy l’a capturé. »

A cet instant, Fry aperçut sur le visage de la professeure un sourire furtif qui ressemblait à s’y méprendre à de la fierté maternelle, mais très vite ce sourire disparut pour laisser la place à l’autorité de la marâtre acariâtre.

« De toute façon cette idée de groupe de musique était absurde. Maintenant que vous êtes revenues et coincées ici pour un moment, vous feriez mieux de vous concentrer sur vos études… Et toi sur ta ligue ! Ajouta-t-elle en fusillant Fry du regard, le jeune homme ne s’y attendait pas et se tassa sur son siège.

- Un champion de la Ligue Orange qui n’est même pas maître pokémon, on aura tout vu. Maintenant que tu es là, profites-en pour faire le tour des arènes de la région, je ne veux pas de fainéant chez moi.

- Oui m’dame, euh oui professeure ! » Répondit Fry intimidé, c’était la première fois de sa vie qu’une personne lui faisait aussi peur. Jessy, elle, était en train de monter en pression comme un électrode avant son explosion.

- Man, si on fait ces concours de musique c’est pour avoir assez d’argent pour partir à Kalos.

- C’est stupide : si vous voulez aller à Kalos, vous travaillez, vous passez votre bac et vous obtenez une bourse d’étude pour partir à l’étranger.

- Rah c’est pas vrai ! Pesta Jessy en prenant sa tête entre ses mains. On est à peine rentrées et tu commences déjà ! »

Elle se leva brusquement et quitta la cuisine.

« Tu restes à table !

- T’as pas d’ordre à me donner, c’est moi le maître pokémon dans cette maison ! »

Les pas rapides et lourds de Jessy résonnaient au-dessus de leur tête alors qu’elle montait les escaliers du couloir quatre à quatre. Une porte claqua à l’étage. Florine soupira, agacée.

« Papa, pourquoi elle est toujours énervée Jessy ? Demanda Robin avec sa petite voix enfantine.

- C’est pas de sa faute, répondit doucement Seb. Un méchant pokémon a cassé toutes ses affaires. »

Florine reporta son attention sur Jenny qui se concentrait sur son assiette. D’une voix beaucoup moins agressive mais toujours très ferme, elle lança :

« Toi, tu sais que j’ai raison n’est-ce pas ? »

Jenny, le regard insondable fixé sur sa part de quatre fromages, pinça les lèvres.

« J’ai plus faim non plus… » Murmura-t-elle avant de quitter la table en évitant soigneusement les regards de Seb et de Florine. Elle bouscula légèrement Fry en passant derrière lui et s’en alla rejoindre Jessy.

"Eh ben c’est la folle ambiance par ici, you-ouh !" Songea Fry, il rêvait de quitter la pièce lui aussi.

« Il y avait plus simple si tu voulais garder tous les hommes de la maison pour toi toute seule Flo, tenta Seb avec humour.

- Elles ne donnent pas de nouvelle pendant des mois, débarquent sans prévenir, en ramenant un de leur pote en plus, elles nous annoncent qu’elles ont arrêté les compétitions pokémon pour faire de la musique et, baie ceriz sur le gâteau, elles ont perdu toutes leurs affaires. Tu crois vraiment que je suis d’humeur à plaisanter là ?

- Flo, elles sont fatiguées, laisse-les respirer un jour ou deux avant de les assommer avec tes reproches.

- Elles font n’importe quoi… » Râla Florine en se levant de table à son tour. Robin sauta de sa chaise aussitôt et courut vers sa mère. Il la serra fort contre lui, visiblement le petit garçon était éprouvé par la mauvaise ambiance générale. Enfin, pour la première fois depuis qu’il la connaissait, Fry vit la professeure Léon s’adoucir. Elle poussa un soupir fatigué, posa une main entre les épaules de son fils et lui caressa la tête de l’autre. Elle s’attendait à ce qu’il lui réclame un câlin mais visiblement la présence de Fry l’intimidait, il ne voulait sans doute pas avoir trop l’air d’un gamin. Elle l’emmena dans le salon et laissa Fry seul avec Sébastien. Le grand bonhomme sourit avec beaucoup de gêne.

« Je te prie de nous excuser pour cet accueil abominable.

- C’est pas grave et c’est pas de ta faute.

- Je sais, enfin si probablement que c’est aussi un peu de ma faute. Je suppose que si c’était leur vrai père qui attendait leur retour plutôt que moi ça se passerait différemment… »

C’est alors que Fry se rappela une phrase qu’avait prononcée Jessy la veille au soir :

"Personne n’attend personne Fry… Jamais."

"Merde !" Songea Fry, il venait de comprendre : elle parlait de sa mère et de son père.

Jessy et Jenny restèrent cloitrées dans leur chambre et Fry ne les revit pas de la soirée. La professeure Léon se chargea de coucher Robin dans sa petite chambre ouverte sur la mezzanine du laboratoire. De temps en temps, il dormait dans la chambre inoccupée des filles pour que sa mère et son grand-père puissent travailler tard au laboratoire sans le déranger, mais pour l’instant c’était impossible. Après avoir dit bonne nuit à son fils, Florine prit son ordinateur portable sous le bras et s’installa sur son lit dans la chambre parentale.

Le soir tombé, Seb, après avoir terminé la vaisselle et le ménage, retrouva Fry accoudé à la clôture qui parquait les Pokémon du laboratoire, les empêchant théoriquement de s’aventurer sur la route en terre battue. Le professeur Jacky Léon s’était chargé de rappeler les pokémon diurnes dans leurs pokéballs avant de rentrer chez lui, dans la maison voisine. Elle appartenait autrefois aux parents de sa femme, native du Bourg Palette tout comme Sacha. Fry était plongé dans ses pensées mais il contemplait avec un véritable plaisir le paysage de ce continent qu’il n’avait jamais vu. Il connaissait bien sûr toutes les espèces de pokémon qui vivaient ici mais la composition de la faune sauvage restait radicalement différente de celle de l’Archipel Orange. Il avait vu passer au crépuscule des sabelettes et des noarfangs, ce fut une vision fantastique. C’était assez symbolique de commencer son voyage à Kanto par le même point de départ de tous les jeunes dresseurs de la région. Fry était au septième ciel, même si son plaisir avait été quelque peu gâché par toutes ces révélations et l’attitude des jumelles et de leur mère.

« Alors, tu n’es pas fatigué par ce long voyage ? Demanda Seb toujours aussi souriant.

- Si mais je profite de la nature… Ça doit vraiment être génial de vivre ici.

- Pour ceux qui aiment les pokémon et le calme oui c’est le paradis, répondit Seb en s’appuyant à son tour sur la clôture. Cet endroit me rappelle beaucoup là où j’ai grandi, je m’y sens bien aussi.

- Ah ouais ? T’as grandi où ?

- Dans une villa à la campagne, au nord-est de Kanto. Mes ancêtres sont originaires de Lavanville comme mon nom l’indique.

- C’est dans le même coin que la villa du célèbre Léo ? L’inventeur du système de stockage des pokémon ?

- Non pas tout à fait. Je croyais que tu n’étais jamais venu ici avant, pourtant tu connais Léo et le Cap d’Azuria.

- J’ai beaucoup lu à propos de Kanto et Johto, dans les livres et sur internet. Je rêvais de quitter l’Archipel Orange depuis des années. Mon voyage initiatique s’est limité au tour des îles Orange.

- C’est vrai que de nos jours les dresseurs qui ne quittent pas leur région d’origine se font rares, sauf pour les plus pauvres d’entre eux…

Seb se demanda s’il n’avait pas gaffé, vu le sourire de Fry ce n’était pas le cas.

- Oui, c’est un peu le cas de ma famille et j’étais coincé par le titre de champion de la Ligue Orange. J’ai fini par péter un plomb, j’ai supplié mes parents de me laisser partir un an ou deux, histoire de changer d’air. Mon père a repris son titre pour un temps. »

Seb le regardait avec un sourire bienveillant. Il y avait une réelle alchimie entre ces deux hommes, ils n’étaient pourtant pas de la même génération. Un silence paisible s’installa, uniquement perturbé par les cris discrets des pokémon nocturnes en train de s’éveiller. Fry repensa à la journée qui s’était écoulée, à ce qu’il avait vu et entendu… Les mots jaillirent tous seuls de sa bouche.

« Je sais que ça ne me regarde pas mais tu peux m’expliquer ce qui est arrivé il y a neuf ans ? Les filles ne m’ont rien dit et je ne comprends pas bien ce qui se passe dans ce laboratoire entre les jumelles et leur mère. Où vit Sylvain Ketchum maintenant ? Et Sacha ? J’espérais les rencontrer un jour… »

Seb réprima un petit rire.

« Je peux compter les fois où j’ai vu Sacha Ketchum sur les doigts d’une main tu sais… Pourtant je connais Sylvain et Florine depuis presque trente ans maintenant. Quand il rentre à Kanto il va surtout à Azuria, ils ont une maison là-bas avec Ondine. Quant à Sylvain, en théorie il habite toujours ici, on reçoit même son courrier.

- Sérieux ? S’exclama Fry, les yeux écarquillés.

- Sylvain n’est pas revenu au pays depuis huit ans, Robin ne sait même pas à quoi il ressemble en vrai. Il n’a aucun pied à terre hormis chez ses parents et chez Florine.

- J’ai vu la photo dans le laboratoire. Je t’ai reconnu et j’ai reconnu la professeure. Je suppose que Sylvain est aussi sur la photo, non ?

- Exact, au centre, entre moi et Florine. A gauche c’est Greg et à droite c’est Alex. J’avais quinze ans quand cette photo a été prise, Sylvain et Flo étaient un peu plus jeunes. On a voyagé tous ensemble jusqu’à ma majorité et puis on s’est séparé. Sylvain et Flo d’un côté, Alex et moi de l’autre. Greg était déjà reparti à Hoenn depuis un moment.

- Qu’est-ce qui s’est passé ?

- Oh rien d’extraordinaire, Sylvain voulait devenir explorateur, il est parti pour Unys pour se préparer, on a tous dû prendre une décision : le suivre ou pas. Florine a décidé de l’accompagner pour préparer ses études de Pokémonologie. Déjà à l’époque elle voulait prendre la succession de son père, ce voyage était dangereux mais c’était une vraie opportunité pour elle. Moi je suis resté ici. Je n’ai pas eu la force de les suivre…

- Il y avait déjà quelque chose entre eux ?

- C’était… Compliqué. »

Avec un peu de mélancolie, Sébastien plongeait dans ses souvenirs…

[Seb errait comme une âme en peine dans les couloirs du centre pokémon après l’annonce du départ de Sylvain et l’emballement de Florine pour partir avec lui. Il devait lui parler avant qu’il soit trop tard, mais que dire ? Il finit par trouver le courage d’entrer dans leur chambre collective. Alex et Florine étaient là, Florine faisait ses bagages, Alex était assis sur son lit, silencieux et immobile. Lui aussi était en train de faire le deuil de sa vie passée à leurs côtés. Il était clair qu’il ne resterait pas avec Seb très longtemps après le départ des deux autres. Ils ne s’entendaient pas assez bien pour ça. Alex jeta un bref coup d’œil à Seb qui venait de rentrer, Florine ne lui accorda pas un seul regard, elle avait reconnu son pas de toute façon. Seb la fixait de dos. Plus elle grandissait et plus elle était belle, Seb en était fou, littéralement fou. Sa gorge était nouée mais il prit une profonde inspiration.

« Florine… Je t’aime.

- Je sais. » Répondit Florine sur un ton sans réplique. Elle ne se tourna pas vers lui et continua de remplir son sac comme si de rien était. Alex, que les paroles de Seb avaient transformé en écrapince regarda le visage de Florine qu’il ne voyait que de profil. Elle gardait les yeux fermés et prenait ses affaires à tâtons. Il était persuadé qu’elle se retenait de ne pas craquer.

« Fl… Flo… » Reprit Sébastien d’une voix tremblante. Cette fois Florine avait les larmes aux yeux.

« Désolée Seb…

- Ça ne sert à rien que je me fatigue c’est ça ? Tu l’aimeras toujours plus que moi ?

- Je… C’est… C’est à peu près ça oui… Oui je crois, répondit Florine d’une voix faible.

- Tu crois ? » Répéta Seb la voix brisée.

Avant que Florine ait pu ajouter un mot la porte claqua : Alex était parti en quatrième vitesse, trop effrayé à l’idée d’entendre la suite et de faire tâche avec le décor. Florine, après une grande inspiration ressemblant beaucoup à un soupir, se décida à se retourner vers Sébastien, il était au bord de la crise de nerfs. Elle-même était prête à éclater en sanglots.

« C’est… C’est assez dur pour moi Seb…

- Ça l’est pas pour moi peut-être ?!? Hurla Seb

- J’ai pas dit ça ! Tu sais que je tiens à toi, tu le sais que je… Que je t…

- Que tu me quoi hein ? Tu quoi ???

- Que… Mais bon sang tu es le deuxième ! Brailla Florine qui laissait exploser sa peine et sa rage. Tu es trop con pour comprendre ça ?!? Pourquoi est-ce que je t’ai repoussé jusqu’à aujourd’hui à ton avis ? Parce que je savais qu’un jour Sylvain serait assez grand pour comprendre ce qu’on était vraiment l’un pour l’autre et que ce jour-là je t’aurais quitté pour lui ! Mais je ne voulais pas, je ne voulais pas que tu souffres parce que je tiens à toi ! Alors maintenant tu comprends ? Tu as enfin compris ?!? »

Seb ne dit rien, absolument rien car il n’y avait plus rien à dire. Florine venait de lui donner la raison pour laquelle elle le repoussait sans cesse depuis cinq ans, elle venait de tout étaler sur la table avant de tout mettre dans un sac pour le jeter à la mer. Seb comprit alors que c’était la fin.

« Mais je… Je ne veux pas te dire adieu… Susurra-t-il la voix cassée.

- Je le sais bien… »

Tous les deux semblaient calmés mais aussi effondrés. L’un avait le cœur brisé et l’autre se sentait perdue, faire un choix aussi lourd à son âge était une chose très difficile et perturbante. Rester sur le continent ou partir à l’aventure loin de tout ? Seb ou Sylvain ? Pourquoi un choix en imposait obligatoirement un deuxième ? Elle aimait Sylvain depuis l’école primaire, mais en réalité elle ne voulait pas partir, elle voulait rester à Kanto, faire ses études à Safrania, rendre visite à ses parents, à ses amis… Laisser ses deux meilleurs amis l’attristait énormément mais peut être le fallait-il finalement, Seb et Sylvain lui avaient tous les deux déclaré leur flamme, en choisir un s’était imposer à l’autre d’être malheureux. Dans ce cas, la séparation de l’équipe était un mal pour un bien.

Florine regarda Seb pleurer puis détourna le regard, ça lui faisait trop bizarre de voir un jeune homme aussi costaud que Seb fondre en larmes. Elle vit par la fenêtre le paysage mélancolique d’un bateau quittant le port et pensa au sien qui quitterait Joliberges le lendemain, à l’aube, c'est-à-dire dans quelques heures désormais…

« Il y a quelque chose que je veux faire avant de partir… » Souffla Florine. Elle s’approcha de Sébastien, prit son visage entre ses mains, ferma ses yeux où les larmes perlaient encore et colla sa bouche contre celle de Sébastien. Elle se mit à l’embrasser langoureusement, avec la passion et la possessivité que l’on peut avoir lorsqu’on sait que l’on fait une chose pour la toute dernière fois de sa vie… Seb la serra fort contre lui, il ne voulait pas qu’elle s’échappe. Il la serrait si fort qu’elle en avait mal aux côtes mais elle ne dit rien, elle se contenta de l’embrasser ou plutôt de se laisser embrasser car Seb montrait encore plus de passion et de remords qu’elle. Elle finit par détacher ses mains du visage de son ami et elle exerça une pression contre son torse pour le forcer à la lâcher. Elle rouvrit les yeux, doucement.

« Je ne sais pas de quoi notre avenir est fait mais je sais que demain nos routes vont se séparer pour un moment, peut-être même pour toujours… »

Seb la regardait avec des yeux plus abattus et tristes que jamais.

« Mais peut-être que nos chemins se recroiseront. Nous sommes amis, nous nous aimons, rien ne pourra changer ça, pas même la distance.

- Tu m’oublieras…

- Toi tu m’oublieras ? Rétorqua Florine, limite vexée.

- Impossible !

- Alors pourquoi crois-tu que ce sera différent pour moi ? »

Elle lui caressa la joue une dernière fois, lui jeta un regard triste et un peu rancunier puis s’éloigna. En passant la porte pour aller dans la salle de bain elle lui adressa un dernier conseil.

« Va te coucher maintenant, demain on se lève tôt… Bonne nuit, Sébastien. »

Elle claqua la porte derrière elle, Seb tomba à genoux, désespéré face à la porte close et murmura encore un « Je t’aime… »]

« Euh… Seb ? »

Seb secoua la tête et regarda Fry, il ne savait pas depuis combien de temps le jeune homme essayait d’attirer son attention.

« Hein ? Pardon, tu disais ?

- Euh… C’est toi qui disais que c’était compliqué, et après t’as marmonné des trucs un peu bizarres. Franchement c’était flippant… Commenta lentement Fry.

- Oui, pardon. Florine était amoureuse de Sylvain depuis l’enfance, depuis qu’il l’avait défendu contre Kévin Chen, mais lui il s’en fichait. A vrai dire, à part les pokémon et les combats, le reste n’avait pas d’intérêt pour lui. »

En l’écoutant, Fry avait l’impression qu’il parlait de Jessy.

« En voyageant avec moi, il s’est passé… Enfin, entre Flo et moi il y avait un truc, un non-dit permanent. On était que des enfants, on ne savait pas bien ce que c’était, une sorte d’attirance très puissante, mais il était clair qu’on était amoureux l’un de l’autre. Et puis quand Sylvain a eu quinze ans, il est tombé amoureux de Florine à son tour et il lui a avoué avant de partir pour Unys. Florine a décidé de le suivre. Il faut se mettre à sa place : c’était son rêve de petite fille qui devenait enfin réalité, elle était pas mal frustrée par l’indifférence de Sylvain pendant toutes ces années. Alors quand il a fallu choisir entre lui et moi…

- En gros elle t’a planté pour un dresseur plus jeune.

- Je ne l’aurais pas dit comme ça… Grimaça Seb.

- Mais visiblement elle a changé d’avis, sinon tu ne serais pas là donc c’est plutôt une happy-end pour toi.

- Mouais… Ouais…

- Bah quoi ? S’étonna Fry.

- C’est une longue histoire… Et je te préviens le début est très triste.

- Je crois qu’on a toute la nuit devant nous non ? Lança Fry avec un sourire. Seb sourit à son tour, amusé.

- Ok, mais encore une fois le début n’est pas fun. »

 

A suivre…

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