Fantômes du passé
Les balles sifflèrent au-dessus de Morrison avant d’aller s’écraser sur le mur, à l’exact emplacement où se trouvait sa tête une seconde plus tôt. Agissant à une vitesse surhumaine, le commandant se jeta sous une table, puis, dans le même mouvement se releva et brandit son arme de poing. Deux balles allèrent se loger dans le torse de son assaillant, le projetant à terre.
Jack Morrison était un homme de grande taille, ayant le corps d’un robuste soldat. Ses cheveux étaient faits d’un mélange de gris et de blanc. Quant à ses yeux, ils étaient d’un beau bleu clair. Il était vêtu de l’uniforme d’Overwatch, de la même couleur que ses yeux. On pouvait voir dessus son insigne de commandant en chef de l’organisation.
Sa journée avait commencé tout à fait normalement : il avait fait ses exercices matinaux puis pris son petit déjeuner, avant de se mettre à lire les premiers rapports journaliers.
Puis quelqu’un avait tiré un missile sur son bureau.
La fenêtre blindée et les réflexes surhumains de Morrison, dus à des améliorations génétiques, lui sauvèrent la vie. Il put ainsi constater que le bâtiment était attaqué et que toute communication avait été coupée.
Comment cela était-il possible ? Jack se trouvait au quartier général d’Overwatch, en Suisse. C’était une des bâtiments les mieux défendus du monde, situé dans une des régions les plus sûres de la planète.
Mais Morrison avait vu trop de choses extraordinaires dans sa vie pour se laisser affecter par la surprise. Il avait dégainé son arme de poing et commencé à se diriger prudemment vers l’armurerie. Juste avant d’être attaqué par ce mystérieux assaillant.
Jack avait l’expérience de plusieurs dizaines d’années de combat. Après avoir tiré, il s’était immédiatement mis à couvert. Cela lui permit d’éviter le tir de riposte, envoyé par le binôme de l’individu qu’il avait abattu.
Ou plutôt pensait avoir abattu, rectifia-t-il en voyant l’inconnu se relever. Sous sa tunique noire, derrière les trous fait par l’arme de Morrison, était désormais visible une armure pare-balle.
- Bon sang ! jura Morrison.
Son arme de poing n’était pas assez puissante pour transpercer cette protection. Et ses deux adversaires portaient des casques à visières. S’il avait eu son équipement habituel, Jack aurait pu se débarrasser de ses deux ennemis en quelques secondes. Mais il ne pouvait porter en permanence un fusil d’assaut sur lui.
Jack plongea à terre, esquivant de peu une nouvelle volée de balles tirée dans sa direction. Ses adversaires étaient doués, il devait le leur accorder. Sans ses réflexes surhumains, Morrison serait déjà mort.
Il se releva et fonça vers les deux assaillants. Jack esquiva un coup de crosse dans sa direction avant d’attaquer de son poing, visant la tête d’un de ses adversaires. Il toucha, faisant chanceler l’assaillant.
Morrison entendit un bruit dans son dos. Il réagit une demi-seconde trop tard et se prit un violent coup d’épaule qui l’envoya rouler quelques mètres plus loin. Le binôme de son adversaire l’avait contourné et attaqué par derrière.
- Commandant ! Attrapez ça ! cria quelqu’un.
Cette voix était familière. C’était celle de la lieutenante Anong Konda, actuellement affectée aux forces de sécurité du bâtiment. Morrison tourna l’œil dans la direction du son et vit un fusil d’assaut qui était lancé vers lui.
Il attrapa l’arme en plein vol, se décala tandis que ses deux adversaires se remettaient à lui tirer dessus, puis répliqua à son tour. Jack tira deux rafales. Chacune d’elle atteignit un assaillant au torse, les tuant sur le coup.
La lieutenante Anong, arriva juste après. Originaire de Thaïlande, c’était une grande femme, ayant un visage sympathique, avec des yeux marrons et des cheveux noirs mi- longs. Elle portait l’équipement standard d’une agente d’Overwatch : uniforme bleu, armure pare-balle légère, arme de poing et le fusil automatique qu’elle avait lancé à Morrison.
- Merci lieutenante, dit le commandant. Votre rapport sur la situation ?
- Il y a quelques minutes, débuta Anong, tous les systèmes de détection et de communication ont cessé de fonctionner. Puis ces types nous sont tombés dessus de tous les côtés à la fois. Ils n’étaient pas très nombreux mais leur entraînement est très poussé et leur attaque est incroyablement bien organisée. Ils savaient exactement où frapper.
- Votre binôme ?
- Ils l’ont eu, commandant, dit-elle avec une pointe de rage dans la voix.
- Couvrez moi pendant que j’examine ces corps.
- Bien commandant.
Morrison se retourna vers les deux assaillants tandis que l’agente surveillait les alentours.
- Leur tenue n’est pas celle des troupes de Talon, commenta-t-il pour Anong tout en observant le fusil d’un des morts. Et ils sont trop bien armés pour être des radicaux anti-omnic. Peut- être des forces spéciales d’un gouvernement anti-Overwatch ou des mercenaires d’une firme que nous avons déjà fait condamner, rajouta-t-il en soulevant la tunique noire, pour observer l’armure en dessous.
Il retira le casque d’un assaillant et ne put se retenir de pousser une exclamation de surprise.
- Qui y a-t-il, commandant ? demanda Anong.
- Je connais cet homme. C’est un des meilleurs agents de Reyes. Un membre de BlackWatch.
Il retira le casque de l’autre assaillant, révélant un visage féminin.
- Celle-là aussi est une membre de BlackWatch, l’identifia-t-il.
- Qu’est-ce que ça veut dire, commandant ?
- Je n’en suis pas encore sûr.
Ou plutôt il refusait de l’admettre. Reyes, le trahir, lui ? Après tout ce qu’ils avaient vécu : la crise omnium et vingt ans à défendre la paix dans le monde ? Il y avait eu des tensions dans leurs relations récemment, des différences sur la façon de réagir à la crise que traversait Overwatch. Mais de là à prendre les armes… C’était inimaginable.
Et pourtant deux membres de BlackWatch venaient de tenter de le tuer.
- Il faut atteindre l’armurerie, dit-il à Anong.
Tout en parlant, il rendit son fusil à la lieutenante et s’équipa de l’arme d’un des morts. Puis il se mit immédiatement à marcher. La situation était urgente, chaque seconde comptait.
- Est-ce que ça ne risque pas d’être une cible prioritaire de nos assaillants ? demanda la lieutenante en le suivant.
- Oui, mais nous n’avons pas le choix. La plupart des agents présent dans le bâtiment ne sont pas armés. Et je pense que nous aurons besoin de tout le monde pour repousser cette attaque.
- Compris, commandant.
Ils avancèrent prudemment vers leur destination. Des coups de feu et des cris de douleur se faisaient entendre en écho à travers tout le bâtiment. Mais rien ne vint interrompre leur marche.
Une fois sur place, Jack eu la bonne surprise de voir un de ses agent surveiller la porte de l’armurerie, à couvert derrière des tables qu’il avait dû placer là.
- Content de vous voir commandant, dit l’agent, un très jeune homme à la peau cuivrée, aux yeux marrons et aux courts cheveux noirs. J’ai sécurisé l’armurerie comme les protocoles demandent de le faire.
Lorsque Morrison l’avait aperçu, il était nerveux et stressé. Mais maintenant que le jeune homme voyait le commandant d’Overwatch, il semblait avoir repris confiance.
- Agent Chucho, c’est ça ? Vous avez bien fait. Couvrez-moi pendant que je m’équipe.
Morrison ouvrit la porte de l’armurerie, fis un pas en avant… et se prit un coup de crosse en plein sur le visage. Il tomba au sol.
- Bonjour Jack, lui dit Gabriel.
Morrison vit pointer sur lui un des fusils à pompe qu’utilisait le chef de BlackWatch. C’était une arme puissante et massive, qui demandait normalement les deux mains pour être utilisée correctement. Mais Reyes avait été, comme Jack, génétiquement modifié, ce qui lui donnait la force nécessaire pour manier un de ces fusils à une seule main.
- Bon sang Gabriel, qu’est-ce qui t’arrive ?! As-tu perdu l’esprit ?!
- Puisque tu es incapable de gérer les problèmes actuels d’Overwatch, j’ai décidé de prendre le commandement.
Gabriel était plus âgé que Morrison. Cela se voyait à ses nombreuses rides sur son visage ainsi qu’à ces cheveux blancs, coupés courts, à la militaire. Il était vêtu d’une tunique d’infiltration noir nuit sur lequel on pouvait voir le logo de BlackWatch ainsi que celui d'Overwatch. Il ne transportait sur lui qu'une ceinture de munition.
- Et tu penses vraiment que nous arriverons à regagner la confiance du public si nous nous entre-tuons ?! Tu es juste en train de précipiter notre perte !
- Mais bien sûr, répondit Reyes. Nous les avons protégés pendant vingt ans, mais c’est à nous de « regagner la confiance » de ces égoïstes. Tu vois c’est exactement ce genre de raisonnement qui nous a mené dans cette situation.
Du coin de l’œil, Morrison vit qu’Anong et Chucho faisaient face à quatre agents de BlackWatch, qui étaient arrivés lorsqu’il avait ouvert l’armurerie. Les deux camps pointant leurs armes les uns sur les autres et restant immobiles. Malgré ça, Chucho s’approchait très doucement de lui et de Reyes.
- Gabriel, je sais que c’est une période difficile, reprit Jack. Et les fuites qui ont révélé l’existence de ta division n’arrangent rien. Mais crois-moi, dès qu’il sera clair que les accusations lancées contre BlackWatch sont sans fondement, nos adversaires n’auront plus qu’à reculer.
Un rictus amusé apparut sur le visage de Gabriel. Morrison écarquilla les yeux pendant une bonne seconde, regardant son ancien ami avec stupéfaction.
- Tout…tout ce dont ils t’accusent est vrai ? Chantage, enlèvement, torture ?
Reyes arma son fusil.
- Talon t’a tué, Jack, dit-il. Ils ont tué tous les agents de notre quartier général. Mais ne t’inquiète pas. Vous serez vengés. Par moi.
Il pressa la détente et au même moment, Chucho se jeta entre eux deux. Le tir l’atteignit de plein fouet.
En hurlant, Morrison se releva, saisit Reyes par les épaules et le jeta hors de l’armurerie. Profitant de l’ouverture ainsi crée, Anong se précipita dans la pièce tandis que les membres de BlackWatch ouvraient le feu.
Jack claqua la porte derrière elle. Puis il se précipita près de la commande d’ouverture.
- Verrouillage d’urgence ! cria-t-il à l’interphone. Autorisation : D-3-B-Q-1-8 !
- Autorisation acceptée, répondit la voix morne et artificielle de la commande automatisée.
Un claquement sec confirma au commandant que les portes étaient désormais bien fermées. Leur blindage était imperméable aux armes légères. Sachant cela, Morrison se mit alors à genoux près de Chucho. Le jeune homme respirait encore.
- Vous…direz...à ma…famille…ce que…j’ai…fait ? demanda-t-il, sa voix rendue haletante par la douleur.
- Tu leur diras toi-même, fils, dit doucement Jack tout en soulevant le corps de Chucho. Ouvrez ça rapidement ! poursuivit-il en montrant à Anong une boite métallique, qui se trouvait un peu plus loin.
- Nous…n’avons…jamais…douté…de vous…commandant, murmura Chucho tandis qu’Anong se précipitait vers le casier pour l’ouvrir.
- Je sais, fils. Et je vous en suis reconnaissant.
La lieutenante retira du casier un objet métallique de forme cylindrique, avec une croix rouge gravée sur sa partie supérieure. Elle ne savait visiblement pas en quoi en faire, aussi l’apporta-t-elle à Morrison.
Ce dernier posa le corps de Chucho sur un banc, saisit le cylindre et d’un geste maîtrisé, le posa à côté du blessé tout en activant un mécanisme dessus. Le cylindre s’éleva légèrement tout en s’ouvrant, révélant un cœur dégageant une douce lumière dorée. Il semblait diffuser quelque chose dans les environs immédiats. Chucho soupira de soulagement.
- Qu’est-ce que c’est ? demanda Anong.
- Un générateur de champ biotique, lui répondit Morrison. Cela diffuse à courte portée des nanites médicales. J’avais demandé au département de recherche de mettre au point un appareil de premier secours pouvant être utilisé par tous les soldats et ils ont créé ces prototypes. Les tests sur le terrain devaient avoir lieu la semaine prochaine.
Jack tourna son regard vers Chucho :
- Il survivra, dit-il avec soulagement.
- Quel est le plan maintenant, commandant ? demanda la lieutenante.
- Vous restez ici pour organiser et informer les agents qui vont venir. De mon côté, je vais faire diversion pour vous donner le temps d'organiser une contre-attaque.
Tout en parlant il saisit un des gilets pare-balle accroché au mur et commença à le revêtir.
- Vous…vous êtes sûr, commandant ? demanda Anong.
- Ne m’obligez pas à me répéter, lieutenante, dit Morrison en saisissant un fusil d’assaut.
- Nous ne pouvons pas prendre le risque de vous perdre.
Jack se retourna pour regarder Anong dans les yeux.
- Je ne laisserai pas quelqu’un d’autre prendre encore un tir à ma place.
Morrison s’équipa des autres générateurs de champs biotique avant de se retourner vers la sortie.
- Rassemblez autant de monde que possible, dit-il puis venez me rejoindre au hall ouest dans dix minutes.
- À vos ordres, commandant.
Morrison arriva devant une autre porte que celle devant laquelle devait se trouver Reyes et ses sbires. Il désactiva le verrouillage, se cala contre le mur et ouvrit prudemment. Personne.
- Gabriel ! hurla-t-il. Viens donc m’affronter en face si tu l’oses !
Jack avança de quelques pas et se cala contre une colonne. Il ne tarda pas à entendre des bruits de pas. Il sortit de son couvert et aperçut deux agents de BlackWatch qui avançaient dans sa direction. Morrison tira et en atteignit un en plein ventre. L’autre s'abrita promptement.
- Venez donc me chercher ! cria le commandant.
Puis il se mit à courir vers le hall ouest. Ses modifications génétiques lui donnaient une vitesse surhumaine, qui lui permit d’atteindre sa destination en moins d’une minute. Il fallut bien plus de temps à ses poursuivants, qui avançaient lentement et prudemment, pour arriver au même endroit.
Le hall ouest était un grand espace qui servait de carrefour entre les différentes sections d’Overwatch. Comme pour le reste du bâtiment, son sol et ses murs étaient fait d’un mélange de couleur blanche et noirs. Mais à la différence du reste, il avait un plafond de verre, laissant la lumière du soleil illuminé les lieux. Le hall était parsemé de colonnes, bancs, distributeurs d’eaux et autres machines à café.
Morrison entendit un cliquetis. Il se jeta à terre tandis qu’apparaissaient des dizaines de petits trous dans le mur derrière lui. L’impact d’un tir de l’arme de Reyes.
- Nous étions des exemples Gabriel ! hurla-t-il tout en se remettant à couvert. Des modèles pour les futures générations ! Et toi tu détruis tout cela en piétinant les principes que nous avons juré de respecter !
- Qu’est-ce que tu es hypocrite Jack ! Tu pensais vraiment qu’il était possible de rendre le monde sûr sans se salir les mains ? Que lorsque tu me demandais de « régler un problème », je respectais à la lettre les chartres éthiques ?
Du coin de l’œil, Jack vit un des agents de BlackWatch qui était en train de le contourner. Il envoya une rafale de balles dans cette direction, forçant l’assaillant à reculer. Par prudence, Morrison se repositionna. A raison : sa précédente position ne tarda pas à être criblée de balles.
- J’ai fait le sale boulot pour toi pendant vingt ans, continua au loin la voix de Reyes. Et en remerciement, tu sacrifies ma division à cette foutue commission d’enquête ! Si j’étais resté la tête d’Overwatch, jamais cela ne serait arrivé !
Nouvelle tentative de débordement. Morrison tenta d’abattre l’adversaire qui menaçait ses flancs. Mais dès qu’il sortit de son couvert, il fut mis en joue par un autre membre de BlackWatch. Les réflexes surhumains du commandant lui permirent d’esquiver le tir. Mais il dut encore une fois reculer.
- Mais j’ai été forcé de démissionner pour qu’on puisse te donner ma place. Tu étais plus photogénique, tu plaisais davantage aux politiciens et aux journalistes. Car vois-tu, Jack…
Sa voix était maintenant toute proche. Morrison se tourna dans la direction du son et aperçut Gabriel, qui se tenait juste à côté de lui. Son ancien ami avait anticipé tous ces déplacements pour lui tendre un piège.
- …j’ai toujours été meilleur que toi.
Le tir toucha Morrison de plein fouet. Le gilet fut transpercé avec facilité par les balles du puissant fusil à pompe et Jack sentit la douleur le vriller.
Mais il fallait plus que ça pour le tuer. Il tendit les bras et envoya un coup avec son arme en plein dans le ventre de Gabriel. Puis il se releva et s’élança vers l’arrière. Des tirs se firent entendre et une balle lui effleura l’épaule.
Pire encore, une nouvelle escouade de BlackWatch venait d’arriver d’un autre côté et avait ouvert le feu à sa vue. Un tir l’atteignit à la jambe et un autre au torse.
Morrison ne put s’empêcher de crier. Péniblement, il se cala contre une colonne. Juste en face de lui se trouvait un banc, qui le masquait à la vue de la seconde escouade.
- C’est la fin Jack, dit Gabriel.
Des bruits de pas se faisaient entendre, lents et réguliers. Les sbires de Reyes approchaient pour l’achever.
Utilisant ses dernières forces, Morrison activa un de ses générateurs de champ biotique. Le soulagement qu’il ressentît le déconcerta une demi-seconde. Il en passa deux de plus à laisser les nanites agir et lui rendre tous ses moyens.
Puis il sortit de son couvert et tira. Une première rafale atteignit un agent de BlackWatch à la tête, le faisant instantanément tomber au sol. Agissant à vitesse surhumaine, Morrison pointa son arme sur un autre de ses adversaires. Une rafale au ventre toucha un des sbires de Reyes avant que ces derniers aient pu se mettre à couvert.
- Je ne suis pas encore mort, Gabriel ! hurla le commandant d’Overwatch.
Comme pour confirmer ses dires, une série d’autres coups de feu se firent entendre, tandis qu’une douzaine de silhouettes en bleu pénétraient dans le hall, forçant le groupe de Reyes au repli.
- Sécurisez l’espace autour du commandant, hurla Anong aux agents qui l’accompagnaient.
Ce fut le début d’une intense fusillade. Les renforts et le coup d’éclat de Morrison avaient fait pencher la balance du côté des membres d’Overwatch. Mais Reyes ne s’avouait pas vaincu pour autant. Lui et ses agents profitaient de leur prise en tenaille pour empêcher les forces de Morrison de s’organiser efficacement. Ces derniers utilisaient leur supériorité numérique pour tenter de déborder leurs adversaires par les flancs. Jack était à la tête de cette attaque, se battant avec toute la fougue qui avait fait sa réputation. Il voulait abattre l’homme qui l’avait trahi et qui lui avait menti pendant tant d’années. Il voulait abattre Gabriel Reyes.
Le commandant de BlackWatch arborait un visage encore plus concentré, totalement absorbé par la bataille en cours et ses défis tactiques. Morrison savait d’expérience que Reyes réfléchissait à toutes les possibilités pour adapter son plan.
Il abattit un membre de BlackWatch après l’avoir attaqué par le côté. La route vers Gabriel était dégagée. Mais un autre des sbires de Reyes se mit à lui tirer dessus et Morrison dut se mettre à couvert. Son regard croisa alors celui d’Anong et il lui fit un signe de main indiquant la direction de l’agent de BlackWatch. La lieutenante hocha la tête.
Elle se releva subitement et envoya une rafale vers le tireur qui bloquait Morrison. Cela força le sbire de Reyes à se mettre à couvert. Jack se releva et fonça vers Gabriel. Le commandant d’Overwatch eut le plaisir de voir apparaître une lueur de surprise dans les yeux de son ennemi, juste avant que son tir n’atteigne Reyes au torse.
Cette fois se fut Gabriel qui fut contraint de fuir devant Morrison. Ce dernier put entendre le commandant de BlackWatch parler dans son oreillette, alors qu’ils étaient proches :
- Escouade 5, engagez l’ennemi !
Des bruits de verre brisé se firent entendre au-dessus de Jack, forçant celui-ci à lever la tête. À travers le plafond de verre du hall, désormais ouvert, il aperçut un appareil de transport aérien. Et de celui-ci, descendaient en rappel des membres de BlackWatch. Ces derniers mitraillaient les agents d’Overwatch, profitant à fond de l’avantage conféré par leur position surélevée.
Si Reyes avait attendu un peu plus longtemps, ces renforts auraient pu lui permettre de balayer toutes les forces d’Overwatch présentes dans le hall. Mais la charge de Morrison l’avait contraint à jouer cette carte alors que ses ennemis n’étaient pas dans la position idéale pour cette attaque. Aussi le coup porté ne fut-il pas décisif.
Mais il suffit pour donner à Gabriel l’opportunité de contre-attaquer. Un tir suffit à faire reculer Morrison. Il se repositionna à la place de son ancien adversaire et en profita pour abattre un agent d’Overwatch d’une salve au torse.
C’était désormais Morrison qui réfléchissait à toute les options possibles. Rien n’était perdu. Une fois la surprise passée, ses agents s’étaient vite ressaisis et avaient formé une nouvelle ligne de défense. Déjà un membre de BlackWatch trop peu prudent venait de se faire blesser par Anong. Il allait être possible de lancer une nouvelle attaque, de les déborder et de là…
Puis Morrison se sentit projeté en l’air tandis qu’une sensation de chaleur recouvrait tout son corps. Il lui fallut une seconde pour comprendre qu’il venait d’être projeté par le souffle d’une explosion.
Pendant un court instant, il put contempler le ciel, d’un bleu d’une pureté parfaite. C’était vraiment une très belle journée.
Une brusque douleur au dos l’informa qu’il venait de finir sa chute. Elle cessa rapidement pour laisser de la place à une souffrance moins forte mais présente dans l’ensemble de son corps. Tout, autour de lui, n’était plus que feu et fumée, masquant la beauté du ciel qu’il avait pu apercevoir.
Morrison approcha sa main de la ceinture où il rangeait son équipement et ses munitions. Il tremblait. Cela le força à se reprendre à deux fois. Si la douleur ne l’avait pas empêché de se rendre compte du passage du temps, il aurait remarqué la lenteur de son mouvement.
Finalement il parvint à saisir un de ses générateurs de champs biotique. Mais il était trop endommagé pour être utilisé. Il lui fallut en prendre un autre et encore un autre avant d’en trouver un fonctionnel. L’activer fut étrangement facile. Son corps donnait-il le meilleur de lui-même, conscient que cet acte pourrait le sauver ?
L’énergie porteuse des nanites soignantes commença à se répandre et Jack sut qu’il survivrait.
*Quelques semaines plus tard*
Morrison parcourait un cimetière.
Des tombes blanches étaient alignées à perte de vue. Sur chacune d’entre elle était gravé l’écusson d’Overwatch.
C’était les plus récentes que Jack parcourait actuellement. Il passait lentement devant chacune d’elle, les examinant avec une grande attention.
Une unique larme apparut dans son œil lorsqu’il vit le nom de Chucho. Il fit un signe de tête respectueux en face de la tombe d’Anong. Mais il resta de marbre quand vint le nom de Gabriel Reyes.
Et il ne réagit pas plus quand il se trouva face à une tombe portant le nom de Jack Morrison.
Malgré l’absence d’un corps, il n’avait pas fallu longtemps avant qu’on le déclare mort. Sans doute cela les arrangeaient-ils. Mais peu importe. Cela l’arrangeait aussi.
Sans un regard en arrière, le commandant d’Overwatch tourna le dos au cimetière et s’en éloigna. Son ancienne vie était terminée.