Le Voeu d'une Veuve
- Qu'est-ce que tu en penses ?
Le gorille émit un soupir en réajustant ses lunettes.
- Difficile à dire, avoua-t-il. D'un côté, c'est indéniablement une bonne nouvelle pour nous, mais de l'autre... Il ne faut pas se leurrer : les contrôles politiques dont il est question risquent de fortement réduire notre champ d'action...
Buvant pensivement son café, le nain à barbe blonde eut une mimique d'approbation.
- Je n'aime pas vraiment ça non plus. Devoir leur rendre des comptes, c'est potentiellement être leurs pantins, et ce n'est pas ce pour quoi nous nous sommes battus. Je préférerai presque encore rester dans l'ombre.
- WINSTOOOON !!!
Une courte série de flashs bleus fut visible dans le complexe délabré de Gibraltar, avant qu'une jeune femme aux cheveux courts en bataille et à l'allure sportive n'apparaisse dans le cadre de la porte, visiblement très enthousiaste :
- Winston ! Tu as vu les infos ?!
Elle faisait face au gorille en combinaison et à l'ingénieur suédois, tout deux en conversation devant un grand écran relayant les dernières nouvelles concernant l'abrogation de la résolution Petras. Les deux la regardèrent d'un air presque désapprobateur.
- Hé bien quoi ? S'étonna Tracer devant la mine sérieuse de ses deux compagnons. Overwatch va être de retour !
- Du calme, Lena, du calme... Rien n'est encore fait, et surtout, nous ne savons pas vraiment sous quelle forme et avec quelles contraintes nous pourrons opérer à nouveau officiellement...
Torbjörn vida son mug avant d'enchaîner :
- Il ne faut pas oublier que nous devons la perte d'Overwatch à la volonté des politicards de se mêler de nos affaires... Plus ce qu'avait fait Reyes, bien sûr. Mais comme il est question de mettre la nouvelle organisation sous le contrôle de ces oiseaux là, je ne suis pas sûr que ça soit une bonne chose...
- En parlant d'oiseau...
Tracer fit rapidement le tour de la pièce du regard, avant de demander, un peu inquiète :
- Le Bastion n'est pas avec vous ?
- Oh lui, il se promène sur la petite plage en contrebas d'après sa balise.
* * *
Cette unité Bastion contemplait paisiblement la mer.
Ou plutôt l'océan et la mer luttant pour la suprématie des eaux, le détroit de Gibraltar étant régulièrement soumis à de puissants courants dont le sens variait en fonction des marrées. Tantôt l'océan atlantique se déversait dans la mer méditerranée, tantôt la mer se déversait à son tour dans l'océan.
Ce n'était pas la première fois que cette unité Bastion contemplait une mer. Mais ce phénomène de courants était une nouveauté. Les remous causés par ceux-ci étaient bien visibles.
De son pas calme et mécanique, l'unité Bastion E54 se déplaça pour tenter de donner à ses capteurs optiques un meilleur angle de vue, afin de ne rien rater du phénomène. Ce faisant, l'antique robot de combat captura brièvement le petit oiseau jaune qui lui servait de compagnon. Ce dernier, chantant joyeusement, était perché sur une petite excroissance pierreuse sortant de la falaise au bas de laquelle se trouvait la plage.
Le Bastion s'arrêta après que ses puces de traitement optique aient détecté la présente d'une autre entité jaune dans son champ de vision. Une qui normalement ne devrait pas se trouver là, au milieu de l'eau.
Quelque chose approchait de la plage, porté par les vagues. La curiosité de cette unité Bastion se concentra intégralement sur l'objet, difficilement identifiable.
La machine le classa d'abord comme une bouée à la dérive, avant de réviser son évaluation. L'objet était partiellement immergé, et avait une protubérance sombre sur le devant. Cette dernière semblait couverte d'une matière filandreuse qui se dispersait au contact de l'eau.
Une bouée avec une forme de vie marine accrochée dessus ?
A la faveur d'un bref changement d'angle de l'objet, ses algorithmes de reconnaissance purent émettre une hypothèse plus probable. Un être humain portant un gilet de sauvetage. La protubérance correspondait à une tête humaine maintenue hors de l'eau par le gilet jaune, qui faisait flotter l'humain sur le dos.
Mais il y avait une anomalie. La peau du supposé humain n'était pas d'une couleur normale. A la connaissance du robot, il n'existait pas d'humain à la peau bleue.
L'unité Bastion E54 pondéra les possibilités de réaction face à cette découverte. L'humain n'avait pas l'air d'être animé par autre chose que les remous de l'eau salée. Etait-il mort ? Inconscient ? Blessé ?Et comment réagir à ces situations si l'une d'elle venait à être confirmée ?
Cette unité Bastion savait très bien quelle était sa programmation originale au sujet des humains. Mais celle-ci ne lui imposait plus d'agir de la sorte depuis son réveil dans cette forêt, sauf sur stimuli de danger très intense. Ses routines formées depuis lui dictaient d'éviter les humains autant que possible, mais une exception avait été faite pour le petit barbu qui le guidait depuis quelques temps déjà. L'unité savait également que ce dernier humain cherchait à ne pas attirer l'attention des autres en se dissimulant dans la vielle base surplombant la plage.
Le robot se refusait à faire autre chose que d'observer l'humain dériver petit à petit vers le sable, analysant les possibles actions à entreprendre. Son oiseau, le petit Ganymède, sauta de son perchoir pour faire quelques cercles en piaillant au dessus du corps inanimé que la machine pouvait maintenant clairement identifier comme celui d'une femme.
Le petit humain barbu ne voulait pas de la compagnie d'autres humains, du moins pas tous. Il y avait d'autres exceptions que cette unité Bastion avait également acceptées. Il fallait en référer à lui pour savoir que faire vis à vis de cette nouvelle arrivante.
- Ah, te voilà, Bastion ! Ne reste pas là tu risques de...
L'unité Bastion se tourna vers une Tracer stoppée brutalement dans sa course par la vision de la naufragée s'échouant sur la plage, presque aux pieds du robot de combat.
- Mais qu'est-ce que... Elle a besoin d'aide ! S'exclama l'ancienne agente d'Overwatch.
Son expression changea cependant du tout au tout dès qu'elle reconnu la victime inconsciente.
- TOI !!!
Le douloureux souvenir de cette nuit à King's Row lui revint. Mondatta. Et cette agente de Talon qui l'avait tué de sang froid.
Une colère contenue se manifesta sur le visage de la jeune femme tandis que ses poings se serraient. A contrecœur, elle saisi Fatale par son gilet et la traîna hors de l'eau.
- Je ne sais pas comment tu as bien pu échouer ici, mais si jamais tu es morte, je ne vais pas pleurer, pour sûr !
Tracer s'agenouilla pour vérifier le pouls de la femme bleue. Et eut un bref soupir de dépit.
- A peine vivante, bien entendu. Hé bien, je suppose que je me consolerai avec le fait que tu risques de nous apprendre des choses TRES intéressantes sur Talon...
* * *
Fatale, toujours inconsciente, gisait sur un lit médical. Les trois comparses l'avaient transportée à l'infirmerie et l'observaient à présent, se demandant que faire.
- Aucun d'entre nous n'a d'expertise suffisante en médecine pour la ranimer ou même savoir quoi faire dans cette situation, constata Winston. Je suppose que nous allons devoir nous contenter d'Athéna en guise de docteur dans un premier temps.
A l’évocation de son nom, l'intelligence artificielle d'Overwatch se manifesta sur un écran intégré au dessus du lit.
- Il faut d'abord que j'établisse un premier diagnostic. Veuillez retirer le gilet de sauvetage de la patiente ainsi que son équipement de combat, puis lui mettre un brassard d'analyse et relier ce dernier au réseau.
- On devrait pouvoir faire ça, marmonna Tracer en s'attaquant au gilet.
Torbjörn, perché sur un petit escabeau pour être à la hauteur du lit, regardait la femme bleue d'un air pensif.
- Je me trompe peut-être... Mais j'ai l'impression de l'avoir déjà vue quelque part...
Le gorille et la jeune pilote se regardèrent brièvement, cherchant dans le regard de l'autre une réponse à l'interrogation soudaine de l'ingénieur suédois. Le primate ajouta :
- En ce qui nous concerne, nous avons déjà eu affaire à elle avant votre retour, monsieur Lindholm. Au moins une fois pour la contrer lors d'une tentative de vol de l'équipement de Doomfist...
- Et une autre dans mon pays où j'ai tenté de l'empêcher de s'en prendre à Mondatta... en vain, termina Tracer avec amertume.
Torbjörn ferma son seul œil valide, de nouveau pensif. Non, ce n'était pas lors d'une opération qu'il l'avait peut-être vue. Il n'en était même pas sûr à vrai dire, mais il y avait un petit sentiment persistant au fond de son crâne qui lui disait que si, il l'avait déjà aperçue au moins une fois. Mais où ?
- Je suppose que vous avez dû obtenir des renseignements sur elle lors de vos confrontations ? Demanda-t-il après une petite minute de silence.
Athéna répondit en affichant un résumé du profil de la femme bleue, sobrement nommée « Agent non-identifié de Talon N°2 ». Tandis que l'IA citait les points importants du profil, l'ingénieur nain faisait la moue. Cela n'avait pas l'air de l'avancer plus.
Winston avait pendant ce temps retiré, aussi délicatement que le permettaient ses grosses mains, le casque de vision et le grappin de Fatale. Il se retournait à présent pour agripper le brassard demandé par Athéna. Tracer parvint enfin à extirper la tête de la tireuse d'élite de son gilet trempé. Ce faisant, elle entendit quelque chose tomber au sol.
- Non, murmura Torbjörn, tout cela ne me dit rien, j'ai l'impression que l'ai vue ailleurs... enfin, peut-être que...
Pris d'un doute, il demanda :
- Athéna ? Tu as encore en mémoire le profil de tous les anciens employés d'Overwatch, non ?
- Affirmatif.
- Cela incluait également leur proche entourage si je ne me trompe pas ?
- Affirmatif.
- Dans ce cas, essaye de voir si les caractéristiques physiques de notre « invitée » ne correspondrait pas à l'un d'eux... Il y a peu de chances que ça soit le cas mais...
- Correspondance trouvée.
Les trois anciens agents furent choqués par la réponse de l'IA, stoppant brusquement ce qu'ils étaient en train de faire. Ils virent s'afficher sur l'écran le profil d'une femme dont le visage était trait pour trait celui de leur prisonnière, à ceci près qu'il était d'une couleur normale.
Athéna en résuma les informations principales :
- Amélie Lacroix, épouse de Gérard Lacroix, ancien officier aux renseignements d'Overwatch. Le couple a disparu dans des circonstances non-élucidées à ce jour quelques années avant la dissolution d'Overwatch. Mme Lacroix était une civile, et n’exerçait pas de fonctions au sein de l'organisation. Mais elle a eut l'occasion de fréquenter quelques bases d'Overwatch à la faveur d’événements ouverts aux familles des agents.
- Ah ! Fit triomphalement Torbjörn. Ça me revient ! Je l'ai croisée au bras de Gérard lors d'une soirée du nouvel an ! Ça devait être peu avant ton enrôlement, gamine !
Il avait désigné Tracer de sa prothèse rouge lui tenant lieu de bras. La jeune pilote était, pour sa part, incrédule.
- Une civile ?! Fit elle en se relevant après avoir ramassé ce qui était tombé du gilet sans y prêter plus attention.
- Vu les compétences qu'elle a affiché lors de nos confrontations, cela me semble un peu gros en effet, affirma Winston. Être une tireuse d'élite aussi douée et mobile demande bien des dizaines d'années d’entraînement ; vu son âge, il aurait fallu qu'elle s'y entraîne intensément dès sa majorité acquise...
- C'est même carrément impossible, oui ! S'exclama Tracer. Elle faisait quoi dans la vie cette Mme. Lacroix ?
- Danseuse Ballet au sein de la Nouvelle Société des Danseurs de Paris, répondit Athéna.
- Ah ! Ça ne risque pas de l'aider à manier un fusil de précision, ça ! Et est-ce qu'il y a autre chose sur cette femme qui n'est aaaaabsolument pas notre invitée ?
La moquerie était distinctement palpable dans la voix de Tracer. Il lui était inconcevable qu'une civile sans histoire, même si indirectement reliée à Overwatch, puisse être l'assassin sans cœur qu'ils avaient repêché.
- Mme Lacroix avait disparu durant quelques mois, ajouta Athéna. Elle fût retrouvée dans un état mental exténué et parlant à peine. Quelques jours après que son époux l'ai retrouvée, leur domicile fut attaqué. Il ne restait de l'époux qu'un bras et beaucoup de sang. Aucune trace de l'épouse, mais elle fût présumée morte également.
- AH.
L'exclamation était sortie toute seule de la bouche de l'anglaise. Une exclamation qui était le témoin de sa réalisation brutale au mystère et au drame qui entourait le couple Lacroix, ainsi que la possibilité non-négligeable que cette femme de Talon puisse correspondre à l'épouse disparue.
- Mais alors, reprit une Tracer soudainement mal à l'aise, ça voudrait dire qu'elle aurait tué son...
- Examinons-la avant de tirer des conclusions hâtives, interrompit Winston.
Le gorille savant joignit le geste à la parole en passant enfin le brassard d'examen à Fatale.
- Si ses données physiologiques correspondent à celle de Mme Lacroix, nous pourrons nous poser sérieusement la question ; d'ici là, ce n'est qu'une coïncidence troublante.
- Heu, Winston ?
Le scientifique leva la tête à l'intonation de Tracer, qui semblait subitement gênée.
- Je ne l'ai pas remarqué tout de suite, mais elle portait ça autour de son cou...
La jeune femme tenait en évidence un petit bloc de plastique auquel était attaché une cordelette en nylon. Un bloc de plastique ressemblant fortement à une clé de données.
- Oh, voilà qui est intéressant. Nous allons peut-être...
- CHUT !
Le signe géant s'interrompit sur l'injonction de Torbjörn.
- Vous entendez ? Demanda ce dernier à voix basse.
Le silence tomba entre les anciens agents d'Overwatch. Des bruits de pas. Quelqu'un d'autre se trouvait dans le complexe abandonné.
Ce n'était pas Bastion, que Torbjörn savait encore sur la plage grâce à un traceur qu'il lui avait installé. De plus, les pas était clairement humains et distincts de la marche mécanique propre à ce vieux robot.
C'était donc nécessairement un intrus.
- Athéna, ordonna Winston à voix basse, éteint tout ce qui n'est pas nécessaire, et essaye d'acquérir une image.
L'IA fit disparaître le profil d'Amélie sur l'écran au profit d'une image noire avec des lignes de commandes à peine visibles. L'éclairage se coupa, ne laissant que la lumière du jour au travers de la porte ouverte.
D'un bref geste de la tête, Tracer signala son intention de partir en reconnaissance à ses compagnons, qui approuvèrent d'une manière similaire, tout en se mettant des oreillettes de communication.
La jeune femme sportive se téléporta hors de la pièce, sur ses gardes, tout en plaçant elle aussi son oreillette.
Après quelques bonds temporels, elle se retrouva sur la coursive menant à l'infirmerie du complexe. Cachée derrière le muret en béton qui formait les rampes de la coursive, elle pouvait entendre distinctement les pas.
Puis, un soupir. A peine perceptible.
L'intrus était au rez-de-chaussée alors que Tracer se trouvait au deuxième étage. Cette dernière se risqua à jeter un bref coup d’œil par dessus la rambarde pour tenter d’apercevoir l'intruse.
Blonde. Gros sac à dos. Haut blanc sans manches. Lourdes bottes. Un bâton de marche.
… Une randonneuse ?
Intriguée mais toujours en alerte, Tracer se déplaça à couvert pour tenter d'avoir un aperçu de l'intruse d'un autre angle ; de préférence un qui ne révélera pas sa présence. Chose aisée ; il lui fallait juste longer la rambarde sur la coursive circulaire de son étage, et ainsi pouvoir observer sa cible de dos.
La distance ne lui permis cependant pas de noter d'autres détails. L'intruse s'était arrêtée, semblant chercher son chemin.
Tracer se remit à couvert, avant d'activer son oreillette et de parler à voix basse :
- Intrus localisé. Une femme seule, non armée à priori. Rez-de-chaussée du hall.
- Reçu, fit la voix atténuée de Winston en retour. Athéna n'a rien perçu d'autre, elle est donc bien seule. Tu peux l'engager.
- Reçu.
Tracer se jeta par dessus la coursive dans le vide, avant de se téléporter à peine sa chute entamée. Après quelques sauts temporels, que l'intruse remarqua, elle se retrouva derrière sa cibla, s'appuyant nonchalamment sur un mur.
- Dites donc, vous ! Vous ne savez pas que vous vous trouvez dans une zone interdite au public ? Lança-t-elle d'un ton inquisiteur.
- Oh, je le sais très bien, Tracer. Mais j'ai une très bonne raison d'être ici.
La jeune femme fut choquée. Cette voix. Elle la connaissait.
L'intruse se retourna, tout sourire :
- Et c'est probablement pour une raison identique que tu t'y trouves également.
- Docteur Ziegler !
Ange était en sueur. Elle était probablement venue à pied depuis la ville, à en croire son accoutrement.
- Vous avez aussi répondu à l'appel de Winston ? Demanda Tracer, excitée et joyeuse.
Le médecin suisse eut l'air gêné.
- On pourrait dire cela... Mais il y a d'autres facteurs en jeu dont il faut que je vous parle.
* * *
- Navré de vous faire travailler dès votre arrivée, Angela.
- Pas besoin de t'excuser Winston ; je suis là pour faire mon métier après tout.
Ange était au chevet de Fatale. Les trois autres agents lui avaient rapidement expliqué la situation, et elle était à présent en train d'examiner la femme bleue.
- Et ce n'est pas vraiment une patiente banale que nous avons là. Avec un rythme cardiaque aussi faible, elle devrait déjà être morte.
- J'avais remarqué ça en la repêchant tout à l'heure, fit Tracer. Est-ce que c'est pas pour ça qu'elle est bleue d'ailleurs ? Elle est presque de la même couleur que les gens qui étouffent et manquent d'oxygène...
Petit rire amusé du médecin.
- Cela pourrait faire une bonne légende urbaine, mais ce n'est pas le cas. Je penche plus pour un empoisonnement au cuivre. Absorber du cuivre en grande quantité et régulièrement fini par donner cette teinte bleue à la peau ; cela n'a probablement rien à voir avec son métabolisme lent. Ce qui est certain par contre, c'est qu'elle utilise des moyens artificiels pour rester en vie. Il va falloir faire des examens plus approfondis pour savoir de quels moyens il s'agit exactement... J'espère que le matériel médical de la base est toujours opérationnel ?
- Si ce n'est pas le cas, je me charge de le réparer, affirma Torbjörn.
- Sinon... Doc ?
Tracer avait sollicité l'attention de Ange d'un ton inquiet.
- Est-il vraiment possible que cette femme soit Amélie Lacroix ? Je n'arrive toujours pas à croire qu'elle puisse être passée de simple civile sans histoire à un agent d'élite de Talon en aussi peu de temps...
Anglea soupira.
- Il faut nous rendre à l'évidence, Lena. Son visage, son physique et son groupe sanguin, tout colle. Il faudrait faire un test d’empreintes digitales pour être vraiment sûrs, mais je n'ai guère de doutes quant aux résultats. De plus, si elle a bel et bien fait du ballet...
Le médecin examina les bottes métalliques que portait encore la patiente. Elle tâtonna l'une des bottes à la recherche du mécanisme de fermeture, qu'elle trouva rapidement avant de l'activer et de tirer les bottes.
Un mince filet d'eau salée sortit des chaussants alors qu'ils étaient jetés au sol, tandis qu'Ange retirait les chaussettes de Fatale pour découvrir ses pieds.
Des pieds qui, malgré un certain soin apparent, étaient marqués de multiples traumatismes sur et autour des orteils.
- C'est exactement le genre de vieilles blessures propres aux danseurs, constata Ange.
- Ce n'est pas possible...
Tracer n'arrivait pas à y croire. Elle n'avait jamais connu cette Amélie personnellement, mais elle ne pouvait se résoudre au fait que cet assassin sans cœur avait été un jour une femme mariée à priori sans histoire...
...Sauf à imaginer qu'il se soit produit le pire lors de son enlèvement par Talon.
- Mais pourquoi un empoisonnement au cuivre ? Demanda-t-elle, inquiète.
Anglea afficha un air grave.
- Des nanites au cuivre sont souvent utilisés dans le traitement de certaines blessures ou maladies internes. On peut très bien imaginer qu'elles aient été utilisées à haute dose sur notre captive, mais dans quel but exactement... Comme je l'ai dit, tout cela requiert des examens plus approfondis. Peut-être nous permettront-ils d'en apprendre plus. Pour le moment, je vais faire en sorte de la maintenir en sommeil le temps que je m'installe et... Que je vous expose les raisons de ma présence.