Noriko
Noriko fut réveillée par des bruits de pas. Suivant son instinct, elle sauta hors de son lit et se précipita vers la fenêtre, l'ouvrit en grand, puis se jeta dans le vide au moment même où deux soldats pénétraient dans la chambre qu'elle occupait.
- Elle s'enfuit !
Bien qu'elle fut au deuxième étage, Noriko atterrit sans problème dans le jardin. Elle enjamba une clôture et se mit à courir vers la forêt qui bordait l'auberge dans laquelle elle avait choisi de passer la nuit. Ce satané propriétaire l'avait bel et bien reconnue et l'avait vendue à la Marine, espérant certainement empocher la récompense. Une fois de plus, elle avait été trahie.
Vêtue d'un short court et d'un débardeur, Noriko se frayait un chemin parmi les arbustes et les broussailles, se faisant griffer les cuisses et les mollets. Ses pieds nus la faisait également souffrir. Elle n'avait pas eu le temps d'emporter quoique ce soit. Ni affaires, ni vivres, ni argent. Elle avait baissé sa garde et cette erreur lui avait coûté cher. Le froid de la nuit lui mordait le visage et malgré l'adrénaline qui lui permettait de moins sentir les branches et les cailloux sur lesquels elle marchait, elle n'avançait pas assez vite. Elle trébucha sur une racine d'arbre et s'étala au sol, s'arrachant un morceau d'ongle d'orteil au passage. Elle poussa un cri de douleur et constata qu'elle saignait. Se relevant aussi vite que possible, elle se remit à courir. Au loin derrière elle, des voix se firent entendre, indiquant qu'elle était poursuivie. S'enfonçant parmi les arbres, la forêt se faisait de plus en plus profonde, lui causant une très mauvaise visibilité, malgré la pleine lune. Elle dégringola soudainement au fond d'un fossé et se tordit violemment la cheville. Elle rampa hors des ronces dans lesquelles elle était tombée, mais les épines se plantèrent dans sa peau et s'y enfoncèrent. Plus elle essayait de se sortir de là, plus cela lui faisait mal. Serrant les dents, elle arracha d'un coup sec la branche de son bras et se traîna derrière un arbre afin de reprendre son souffle.
Elle constata les dégâts causés par sa course nocturne : ses genoux étaient écorchés, ses bras et ses jambes couverts de coupures, ses pieds étaient gelés et sa cheville commençait déjà à gonfler. Elle calma sa respiration et tendit l'oreille afin de localiser ses poursuivants. Rien. À part le vent qui sifflait dans les arbres, il n'y avait pas un bruit. Ses yeux s'étant enfin habitués à la pénombre de la nuit, le clair de lune lui permettait maintenant de reprendre sa route. Elle boitilla quelques mètres, puis pris appui sur un rocher. Soudain, elle entendit des branches craquer et sursauta : ses poursuivants l'avaient finalement rattrapée. Elle tenta de s'enfuir, mais ils furent plus rapides. Un des deux soldats l'avait contournée afin de se placer devant elle et lui barrait désormais la route. Noriko se retourna et fit face au deuxième soldat, se retrouvant encerclée. Ils faisaient plus d'une tête qu'elle, et leurs larges épaules faisaient deviner qu'ils avaient suivi un entraînement rigoureux. La panique commença à envahir la jeune fille.
- Tu nous auras vraiment fait courir, dit l'un des Marine d'un ton menaçant.
Ils étaient tous les deux essoufflés et des perles de sueur coulaient le long de leurs tempes. Les deux soldats avaient dégainé leurs sabres et après avoir échanger un regard, constatèrent que la fille qu'ils poursuivaient était apeurée et ne représentait aucun danger. Ils rangèrent leurs armes avec un rire moqueur.
Noriko attrapa une branche d'arbre au sol et tenta de frapper celui qui lui faisait face. Son adversaire lui saisit l'avant-bras sans aucune difficulté et le tordit violemment, obligeant la jeune fille à lâcher son arme de fortune dans un cri de douleur. Lorsqu'elle se redressa, il lui asséna une gifle qui l'envoya au sol. Les larmes aux yeux, Noriko essuya le sang sur sa lèvre. Son cœur battait très vite et elle n'arrivait plus à réfléchir. Suivant son instinct de survie et surmontant la douleur de sa cheville, elle se redressa et tenta de s'enfuir. Le deuxième soldat l'attrapa par la taille et l'empêcha de partir.
- Où tu vas comme ça, hein ?
- Lâchez-moi ! hurla-t-elle.
Noriko eut l'impression que son bras allait s'arracher. Son ennemi était derrière elle, la tenant fermement en lui remontant son poignet au niveau de ses omoplates. De son autre main, il lui empoigna les cheveux et l'obligea à faire face au deuxième soldat.
- Qu'est-ce que tu attends pour l'attacher ? dit celui qui tenait Noriko.
- Attends un peu, je veux voir ce qu'elle a dans le ventre, répondit-il en attrapant sa victime par le menton. Tu crois t'en sortir si facilement après nous avoir fait courir comme ça ?
Noriko ne répondit pas et lui mordit les doigts de toutes ses forces, ce qui lui valut une nouvelle gifle. L'homme grimaça de douleur.
- Sale peste ! Tu es sûr que c'est bien elle ? Pourquoi elle n'utilise pas ses pouvoirs ? dit-il en se massant la main.
- Tu entends quand on te parle ? répondit le deuxième homme en resserrant son emprise.
Instinctivement, la jeune fille mit sa main libre sur ses cheveux pour soulager la pression et serra les dents, elle avait mal mais ne devait pas flancher. Malgré la peur qui lui prenait les tripes, il fallait qu'elle tienne encore un peu afin de choisir le moment propice pour agir. Elle attendrait qu'ils relâchent leur attention et en profiterait ainsi pour s'enfuir.
- Attendez, je ne suis pas... Je ne suis pas celle que vous croyez !
- Pourquoi tu t'es enfuie alors ? Ça t'amuse de nous faire tourner en rond !?
- Je... Non, je... s'il vous plaît...
- Fais voir ton bras.
Noriko sentit son sang se glacer dans ses veines.
- Celle qu'on cherche à une croix tatouée sur le bras. Et pour tes pouvoirs, il nous suffira de te balancer à l'eau pour voir si tu coules ou non.
En prononçant ses mots, le Marine lui attrapa le bras gauche et lui arracha son bandage. Il passa avec satisfaction ses doigts sur le dessin qui ornait la peau de Noriko. Une croix. Une croix très fine qui était encrée là depuis très longtemps. L'homme eut un rictus.
- Tu sais quoi ? interpella celui qui tenait la jeune fille. L'avis de recherche précise qu'il faut la ramener vivante, mais rien ne précise dans quel état.
- On va s'amuser un peu, alors.
- L'abîme pas trop, il faut qu'on puisse la reconnaître.
- Tiens-la bien.
Sur ces mots, le Marine mit un coup de poing à Noriko qui l'envoya à terre. Il regarda ses phalanges et secoua son poignet.
- Tu ne vaux même pas la prime pour laquelle tu es recherchée. On te dit dangereuse et puissante, mais tu ne peux même pas nous faire face.
Il la regarda tenter de se redresser péniblement. Tous ses membres tremblaient.
- Tss... Et ça se prétend être la nièce de Mihawk ?
Le cœur de Noriko rata un battement, et, sentant monter la colère, elle crispa ses poings qui se refermèrent sur la terre.
- Ferme-la...
- Qu'est-ce... qu'est-ce que tu as dit ?
- Je t'ai dit de la fermer ! cria-t-elle en se relevant.
Noriko se tenait droite face ses ennemis, folle de rage. Du sang coulait de sa lèvre et de son nez qu'elle essuya négligemment avec le revers de sa main, puis cracha au sol.
- Vous vous prétendez soldats ? Laissez-moi rire. Vous n'êtes rien, vous n'avez aucune valeur et aucun honneur, vous n'êtes que de sales...
- Vas-tu te taire !?
Noriko reçut un coup de pied dans les côtes. Cette fois-ci, elle avait paré le coup grâce à son avant-bras, mais se retrouva malgré tout à terre. Elle tomba sur le côté et eut le souffle coupé lorsqu'un autre coup de pied se logea dans son ventre. Son sang bouillonnait en elle, elle n'entendait plus les menaces et les insultes de ses assaillants, seul lui importait de rester consciente et éveillée.
Son adversaire la poussa du pied afin qu'elle soit sur le dos et se plaça à genoux au dessus d'elle. Il lui attrapa le cou et serra avec force.
- Je vais t'apprendre à nous manquer de respect.
Noriko saisit les deux poignets qui l'étranglaient et essaya de repousser son ennemi. Elle luttait avec forces en lui enfonçant ses ongles dans les mains et essayait de se dégager à l'aide de ses jambes. Son souffle était de plus en plus court et même s'ils ne pouvaient pas la tuer, elle ne pouvait pas prendre le risque de perdre connaissance.
Tout à coup, alors que sa vision se troublait de plus en plus, le soldat penché au dessus d'elle fut projeté en arrière et alla s'écraser sur un rocher. Celui qui l'avait attrapée par les cheveux décolla lui aussi et alla se fracasser contre un arbre avant de tomber au sol. Un vent violent s'était abattu sur eux trois, obligeant Noriko à se recroqueviller sur elle-même et à se protéger le visage. Soudain, tout devint noir.