Le temps d'un mariage

Chapitre 8 : Septième chapitre

Catégorie: M

Dernière mise à jour 10/11/2016 05:50

Septième chapitre

 

 

 

 

 

 

 

 

 

- Ma chérie, surtout ne le prends pas mal, mais je crois qu'aujourd'hui vous allez devoir vous occuper seuls, avec Sasuke, parce que j'ai le fleuriste qui vient me voir ce matin et après je dois encore régler les derniers détails du banquet avec le chef...

- Ne vous inquiétez pas pour nous, Youra, répondit Sasuke avant que Sakura puisse dire quoi que ce soit. Math, je voulais vous prévenir : je me suis permis de demander à Thomas, le garçon qui veille sur votre flotte de véhicules, si nous pouvions vous emprunter l'un des 4x4 pour aller à Lavilla *. Nous sommes partis un peu vite de Londres et il nous reste quelques courses importantes à faire pour Noël. Thomas m'a dit que ça ne posait pas de problème, du moment que vous étiez d'accord.

- Bien sûr, qu'il est d'accord, n'est-ce pas mon chéri ? répondit Youra avec un sourire soulagé. Tu en as de la chance, Sakura, d'avoir un fiancé pareil. Math déteste faire les magasins.

- Et ça vous étonne ? intervint Karin. A mon avis, la seule raison pour laquelle ça ne dérange pas Sasuke, c'est que sa fiancée à lui ne se croit pas autorisée à lui vider son compte en banque sous prétexte qu'il a de l'argent.

Le silence se fit sur ces paroles pleines de venin. Sakura, furieuse, voulut riposter, mais ce fut Sasuke qui prit le premier la défense de Youra.

- Je ne m'inquiète pas pour Math. Je suis sûr qu'il en a appris assez, en élevant deux filles, pour reconnaître une prédatrice au premier coup d'oeil.

L'insulte avait été lancée sur un ton tellement détaché qu'elle agit avec la subtilité d'une aiguille, infligeant une blessure douloureuse, mais si discrète qu'on ne pouvait ni en préciser l'origine, ni contre-attaquer. Le coup, néanmoins, avait porté, et ses effets se manifestèrent instantanément sur le visage de la victime, qui rougit de colère.

Quand Sakura s'était réveillée seule dans la chambre ce matin-là, elle s'était sentie tiraillée entre l'envie de prendre une douche, de s'habiller et de descendre avant que Sasuke ne revienne, et celle tout aussi forte de rester cachée sous la couette, parce qu'elle se demandait si elle oserait même le regarder en face. Mais en fin de compte, il s'était comporté de façon tellement naturelle avec elle lorsqu'il était entré dans la salle à manger, qu'elle n'avait eu aucun mal, à sa surprise, à lui rendre son baiser. Il sentait l'air frais et il avait expliqué, pour justifier son léger retard à table, qu'il était sorti.

A présent, elle savait pourquoi. Et elle connaissait la nature très particulière des courses qu'il leur restait à faire. Pour un acteur plus ou moins au chômage, Sasuke ne manquait pas de confiance en soi. A vrai dire, sa simplicité, et son air dégagé lui rappelaient davantage les clients les plus distingués de sa banque : des hommes riches, sûrs d'eux, qui n'avaient rien à prouver à personne et qui commandaient le respect.

- J'ai dit à Thomas que nous serions prêts à partir vers 11 heures, l'informa-t-il.

Il consulta sa montre, un modèle d'apparence simple et robuste, mais dans lequel Sakura, devenue connaisseuse en matière grâce aux garçons de son équipe, reconnut une très belle Rolex.

- Ça nous donne un peu plus d'une demi-heure pour nous préparer. Ça te suffit, ou est-ce qu'il vaut mieux que...

- C'est très bien, une demi-heure, lui assura Sakura.

Elle allait se lever pour monter dans sa chambre quand Ino annonça soudain :

- Moi aussi, j'avais prévu d'emmener les enfants à Lavilla aujourd'hui. Ils s'ennuient, enfermés ici. Vous pourriez nous emmener, Sasuke ? Comme ça, si papa a envie d'aller se promener, il aura encore l'autre 4x4.

- Tu sais que s'ils avaient envie d'être tranquilles, tu es en train de leur gâcher la journée, remarqua son mari avec un gloussement.

- Voyons, ne sois pas bête : je suis sûre que Sasuke s'en moque. Ce n'est pas comme s'il faisait encore la cour à Sakura. Je veux dire, ils vivent pratiquement ensemble. Même s'ils ne sont pas encore mariés.

Les filles de Math étaient décidément de sacrées garces ( ** Désolé pour le langages ), songea Sakura tandis que Sasuke s'approchait pour lui reculer sa chaise. Elle essaya d'imaginer ce qu'elle aurait ressenti si Sasuke et elle avaient vraiment été fiancés, fous amoureux, et avides de passer un peu de temps en tête à tête. A vrai dire, ce n'était pas très différent de ce qu'elle ressentait en ce moment... Et qu'est-ce que cela signifiait, exactement ? Parce qu'en réalité, n'est-ce pas, ils n'étaient ni fiancés, ni amoureux... Mais il se passait quelque chose entre eux, quelque chose qui s'était précisé la nuit dernière... Au souvenir de ces heures de passion, le feu étouffé de son désir, un feu dont les braises étaient restées si vives au fond d'elle-même, repartit de plus belle.

En montant l'escalier côte à côte avec Sasuke, Sakura tenta de maîtriser son trouble. Elle n'arrivait pas à comprendre comment un homme qu'elle connaissait si peu pouvait l'exciter autant. Son être semblait être le théatre d'un affrontement sans merci entre son coeur et la raison. Elle savait que si elle n'éprouvait pas des sentiments très fort pour un homme, elle était incapable de ressentir de véritable plaisir physique, si puissant que fût son désir. Le sexe sans amour ne l'intéressait pas, et c'est pourquoi elle n'avait jamais eu d'aventure avec qui que ce soit. Jusqu'à hier.

Qu'est-ce qui avait fait changer les choses ? La réponse tenait en un seul mot : Sasuke. Sasuke, un acteur au chômage qui vendait ses services aux femmes esseulées. Elle était en train de tomber amoureuse d'un homme qui ne voudrait jamais d'une relation durable. Est-ce qu'elle était sérieuse ? Non, impossible. Elle se testait, voilà tout, elle repoussait, par défi, les limites qu'elle s'était imposées... Elle ne pouvait pas vraiment être amoureuse d'un homme qu'elle venait de rencontrer.

Ils étaient arrivés devant la porte de leur chambre. Sasuke la lui ouvrit.

- Merci d'avoir remis Karin à sa place, tout à l'heure, dit-elle en passant devant lui. Je l'aurais bien fait moi-même, mais je n'aurais jamais réussi à lui clouer le bec de cette manière.

Sasuke haussa les épaules.

- Dès qu'elle s'en est pris à ta mère au sujet de l'argent, j'ai su que c'était la seule chose qui la motivait, elle. Ça n'a rien d'exceptionnel pour une fille de millionnaire : plus on a des parents riches, moins on aime partager. C'est triste. Cela dit, quand on a été élevé dans un monde ou tout s'achète, même l'amour, l'idée qu'une étrangère puisse faire main basse sur la fortune familiale doit être angoissante. C'est le genre de pensée qui me rend heureux d'avoir grandi dans une famille ou l'on avait juste assez d'argent pour vivre confortablement.

Oui, elle l'imaginait bien dans ce genre de famille, il avait dû aller dans une bonne école, une bonne université aussi, sans doute...

- Et alors, comment se fait-il que tu sois devenu acteur ? demanda-t-elle par curiosité.

- Pourquoi, ça t'étonne ?

- Un peu. Ce n'est pas trop ton genre.

- Vraiment ? Et qu'est-ce qui serait mon genre, d'après toi ?

Il s'aventurait sur un terrain glissant, mais il avait envie de savoir.

- Je ne sais pas, travailler dans la finance, peut-être, à un bon poste, proche de la direction.

Dans le mille, songea Sasuke. Décidément, Sakura ne manquait pas de perspicacité. Il allait devoir agir avec prudence s'il ne voulait pas qu'elle découvre ses véritables intentions et compromette son plan. Il avait été stupide de laisser se créer entre eux la moindre intimité, mais il était trop tard à présent, et les promesses qu'il lui avait faites, en paroles et plus encore en gestes, étaient susceptibles de lui causer bien des problèmes.

- Est-ce que c'est une impression, ou est-ce qu'il fait un peu plus chaud que tout à l'heure ? demanda Sakura.

Elle était heureuse de changer de sujet, non pas qu'elle ne veuille en apprendre davantage sur la vie de Sasuke, au contraire : elle en avait beaucoup trop envie, et cela suffisait à la convaincre qu'elle devait mettre autant de distance que possible entre elle et lui.

- J'ai discuté avec le concierge, dit Sasuke. Il m'a dit que le châtelain avait donné comme instruction très stricte que toutes les pièces du château devaient être chauffées à la même température, pour éviter les dégâts liés au froid et à l'humidité. Apparemment, c'est l'une des conditions pour que l'assurance fonctionne, et je doute que même Math, avec tous ses millions, ait envie de devoir rstaurer le château à ses frais en cas de dommage.

- Les filles de Math ne vont pas apprécier de devoir nous céder un peu de chaleur.

- Non, sûrement pas, mais si elles veulent, elles peuvent toujours en discuter directement avec le concierge.

Il se tut un instant.

- Je sais que ce ne sont pas mes affaires, reprit-il, mais est-ce que ta mère se rend compte de ce que va être sa vie quand elle fera partie de cette famille ?

- Ma mère est une rêveuse, et pour l'instant, elle veut croire que Math est un homme merveilleux, et que ses filles l'aimeront comme une mère quand ils seront mariés. Je m'inquiète pour elle parce que je me mets à sa place, et que je trouverais atrocement déprimant d'aimer comme elle à la folie, et puis cesser d'aimer : personnellement, ça m'ôterait tout espoir de trouver un jour mon prince charmant. Mais j'ai l'impression que ma mère, elle, s'en relève toujours très bien. Je m'en fais sûrement pour rien...

Sasuke ne doutait plus, à présent, que la note d'anxiété qu'il percevait dans la voix de Sakura fût sincère. Et si Youra lui faisait toujours l'effet d'une femme très superficielle, il ne la soupçonnait plus d'être la manipulatrice avide qu'il avait vue en elle au départ.

- Quel âge avais-tu quand ta mère a cessé d'aimer ton père ?

La question avait jailli de ses lèvres sans que lui-même s'y attende. Sakura le regarda avec surprise, mais répondit :

- J'avais six ans quand ils ont divorcé, mais, d'après ce qu'ils m'ont dit, cela faisait un certain temps que ça n'allait plus entre eux. Je crois que mon père voulait essayer d'arranger les choses, pour moi, mais maman en avait assez.

Elle ouvrit le placard de leur chambre et en sortit son manteau et ses bottes.

- Tu devrais mettre des chaussures un peu plus solides, l'avertit Sasuke. Thomas m'a dit qu'on attendait de la neige en début d'après-midi.

- Je n'en ai pas d'autres, avoua Sakura. Je verrai ce que je peux acheter en ville. Je ne sais pas pourquoi, je n'avais pas pensé qu'il ferait ce temps-là.

- Ce serait le temps idéal si nous étions vraiment fiancés. L'excuse parfaite pour passer la journée au lit.

Sakura se sentit rougir violemment et fut prise d'un élan de désir si puissant qu'elle ne put retenir un soupir révélateur. Elle posa la main sur son ventre pour tenter d'étouffer la pulsation de désir pur qui venait d'y naître.

A l'expression de Sasuke, elle comprit qu'il savait exactement ce qu'elle éprouvait. Quand il s'avança vers elle, elle protesta d'une voix tremblante.

- Non...

Mais elle ne tenta pas de se dégager quand il posa la main sur son épaule et fit glisser son autre main dans le creux de ses reins, l'attirant contre lui avec détermination.

- Ce regard me dit que tu me désires autant que je te désire...

La caresse de son souffle chaud à son oreille la fit frissonner de plaisir. Elle poussa un infime soupir, torturée par l'envie de tourner la tête vers lui, sachant qu'alors leurs bouches se toucheraient presque.

Qu'y avait-il de si particulier chez cette femme, se demanda sombrement Sasuke, pour qu'il agisse ainsi, en oubliant toutes ses priorités ? Ce désir brûlant, lancinant, qui étreignait tout son corps ne faisait pas partie de ses plans. C'était sans doute le léger frissonnement du corps de Sakura qui, en trahissant son désir, suscitait chez lui l'impulsion presque irrépressible de presser ses lèvres contre les siennes, au fond, il ne la désirait que parce qu'elle flattait son orgueil. Mais cela allait trop loin. Il fallait qu'il reprenne le contrôle de lui-même.

- Nous ferions bien de descendre avant que Thomas ne pense que nous avons changé d'avis.

Il relâcha son étreinte et fit un pas en arrière. Mais brusquement, il l'attira de nouveau contre lui.

- Arrête ! s'écria-t-il.

- De quoi ? protesta Sakura.

- De me regarder comme si tu mourais d'envie de sentir mes lèvres sur les tiennes, lui dit-il d'une voix dure.

- Je ne te...

Il était trop tard. Sasuke avait emprisonné son visage entre ses mains et se penchait vers elle, la réduisant au silence par un baiser.

La veille, après qu'il l'eut embrassée, elle était restée éveillée jusque tard dans la nuit à essayer de se convaincre que ses baisers ne pouvaient pas être aussi merveilleux que ce qu'il lui avait semblé. Elle s'était moqué de son trouble, s'était convaincue qu'elle avait été ensorcelée par l'alliance magique de son désir, des rayons de lune qui tombaient sur la neige au-dehors et de Noël. Elle s'était répétée que si Sasuke l'avait embrasséé à Londres, dans son appartement, son baiser ne lui aurait jamais fait autant d'effet.

Mais voilà que de nouveau, elle s'était inondé de ce plaisir surnaturel...

S'il décidait, maintenant, de la prendre dans ses bras et de la porter jusqu'au lit, elle savait qu'elle ne résisterait pas. Une intense langueur courait ses veines, se concentrant peu à peu au coeur de son intimité. Elle se sentait presque droguée. Prise de panique, elle repoussa Sasuke. Non, elle ne voulait pas éprouver ce genre de sentiments pour un homme, et surtout pas pour un homme comme lui.

Elle se détourna, décidée à quitter la chambre le plus vite possible. Comme elle se dirigeait vers la porte, Sasuke la devança. Elle retint son souffle, s'attendant, avec un mélange de crainte et d'excitation, à ce qu'il lui barre le passage. Mais il se contenta d'ouvrir la porte en disant :

- N'oublie pas ton manteau.

 

 

- Bon les enfants, vous allez derrière avec Sakura. Ça ne vous dérange pas si je monte devant avec vous, Sasuke ? Je suis malade en voiture.

"" Pas un mot d'excuse pour moi "", songea Sakura en fulminant intérieurement, tandis qu'Ino s'appropriait le siège avant du 4x4.

- Je veux être assis près de la fenêtre.

- Moi aussi.

Les deux petis garçons grimpaient déjà sur la banquette arrière.

- Donc vous allez vous asseoir au milieu, Sakura, ordonna Ino comme si elle parlait à une domestique.

Sakura n'en croyait pas ses oreilles.

- Non, c'est un des garçons qui va s'asseoir au milieu, pas Sakura, intervint Sasuke d'une voix qui n'admettait pas la contradiction. Ils n'ont qu'à alterner à l'aller et au retour.

- Lessie, elle s'asseoit toujours au milieu.

- Lessie peut-être, mais pas Sakura.

- Bonté divine, Sakura, vous êtes obligés de faire autant d'histoires ? s'écria Ino, de façon si injustifiée que Sakura, abasourdie, ne songea même pas à répliquer.

- Ils appellent ça un 4x4 ? lâcha avec mépris l'un des deux garçons. C'est pas un 4x4, ce truc.

- Attache-moi ma ceinture, commanda l'autre à Sakura d'une voix désagréable.

Elle se penchait pour l'aider, mais Sasuke l'arrêta.

- S'il te plaît, est-ce que tu veux bien m'attacher ma ceinture, Sakura ? C'est ce que tu voulais dire, n'est-ce pas ?

Sakura ne pouvait s'empêcher d'avoir un peu de peine pour les deux garçons. Ils étaient jeunes, et leur mère était de toute évidence le genre de femme à se servir de ses enfants : elle se souciait de leur bien-être tant que cela lui était profitable, et les oubliait ensuite. Pendant toute la durée du trajet, par exemple, elle n'eut d'yeux que pour Sasuke.

Les fils d'Ino, quand ils eurent compris qu'ils ne pouvaient pas rabrouer ou commander Sakura à leur guise comme ils avaient l'habitude de le faire avec Lessie, leur jeune fille au pair, se mirent à respecter son autorité calme et même, semblait-il, à l'apprécier. Et Sakura, qui aimait les enfants, prit plaisir à les distraire en leur apprenant des jeux simples et en les faisant parler de leurs activités préférées.

Forcé d'endurer les les attouchements répétés d'Ino qui s'arrangeait pour lui presser sans cesse le bras, voire la cuisse, Sasuke trouvait que les éclats de rire des garçons avaient la fraîcheur de grandes goulées d'eau pure sur un mauvais vin bouchonné. Il s'émeveillait de la façon dont Sakura faisait s'épanouir les deux jeunes fils d'Ino. Quelque chose dans sa façon d'être, dans son calme et sa simplicité, remuait des souvenirs enfouis au plus profond de lui. La voix de sa mère résonnait dans son esprit, puis l'écho de son propre rire...

Aucun enfant ne devrait avoir à grandir sans mère. Lui-même avait eu de la chance dans son malheur : il aimait sa belle-mère et son demi-frère. Mais entendre Sakura jouer avec les garçons revivait une vieille douleur. Il augmenta le son de la radio pour couvrir les voix et les rires. Ino approuva d'un hochement de tête souriant et, du bout de la langue, humidifia ses lèvres. Devant l'absence de réaction de Sasuke, elle se pencha vers lui et posa délibérément sa main manicurée très haut sur sa cuisse.

- Je suis vraiment contente que vous ayez fait ça, lui chuchota-t-elle. La voix de Sakura a quelque chose de strident, n'est-ce pas ? Je commençais à avoir mal à la tête. Vous m'avez dit que vous vous connaissiez depuis combien de temps, déjà ?

- Je ne vous ai rien dit.

- Elle a beaucoup de chance d'avoir réussi à séduire un homme comme vous.

- C'est moi qui ai de la chance.

Ino ne cachait pas ses intentions, et Sasuke songea que s'il entrait dans son jeu, il obtiendrait peut-être plus vite les informations qui l'intéressaient. Mais il rejeta aussitôt cette idée. L'idée d'un contact intime avec quelqu'un d'autre que Sakura lui répugnait, physiquement et émotionnellement.

Emotionnellement ? De quoi parlait-il ? S'il continuait comme ça, il allait finir par se sentir coupable de faire ce qu'il faisait, et il ne pouvait pas s'offrir le luxe d'un cas de conscience.

Lorsqu'ils arrivèrent enfin à Lavilla, ce fut Sakura qui aida les deux petits garçons à descendre de voiture et s'assura qu'ils étaient bien emmitouflés dans leurs manteaux, parés pour affronter le vent qui s'engouffrait en rafales glacées dans les rues étroites de la ville. Le sol était couvert de neige et de verglas et, comme Sakura s'y attendait, Ino agrippa le bras de Sasuke. Ses fils, de leur côté, se positionnèrent à sa gauche et à sa droite et lui prirent chacun une main, la serrant dans la leur avec tant de confiance qu'elle n'eut pas le coeur de protester.

Sasuke jeta un coup d'oeil à Sakura, qui avait la tête baissée vers les enfants, et se demanda pourquoi, n'ayant jamais été d'un tempérament jaloux, il se sentait si possessif à son égard. En ce moment même, il avait du mal à supporter la présence des deux garçons et de leur mère : il aurait voulu avoir Sakura pour lui tout seul.

- Nous avons beaucoup de chose à faire, Sakura et moi, annonça-t-il à Ino. Je pense qu'il vaut mieux nous séparer. Comme ça, vous n'aurez pas à courir derrière nous avec les garçons. A quelle heure voulez-vous qu'on se retrouve ?

Il leva l'avant-bras pour regarder sa montre, la forçant ainsi à le lâcher.

- Oh, mais je pensais que nous allions rester tous ensemble ! s'écria-t-elle. Ce serait tellement plus drôle ! Nous pourrions faire les boutiques entre filles avec Sakura pendant que vous buvez un soda tous les trois dans un café, puis vous retrouver pour le déjeuner...

Comme elle était amicale, tout à coup, s'étonna Sakura. Ses fils eux-même déconcertés et la regardaient d'un air incrédule, attendant la suite.

- Ça vous dit, les enfants, ou est-ce que vous préférez rester avec Sakura ?

"" Quelle sorcière ! "" songea Sakura avec un ressentiment inhabituel.

- On veut rester avec elle ! s'exclamèrent en choeur les deux garçons.

Mais Sasuke secoua la tête.

- Je suis désolé, les enfants, mais ça ne va pas être possible.

Son ton inflexible, qui disait toute sa détermination à préserver leur intimité, emplit Sakura d'admiration et de reconnaissance.

- Nous avons des courses de Noël à faire, et Sakura est ma fiancée.

La façon dont il la regarda en disant cela lui mit le feu aux joues, et elle vit Ino perdre son air doucereux et lancer à Sasuke un regard plein de venin. Il venait de se faire une ennemie, songea-t-elle. Une ennemie impitoyable.

Mais il semblait pas trop inquiet. Sans prêter attention à la réaction d'Ino, il continua :

- Je ne veux pas m'éterniser ici. On a annoncé du mauvais temps pour l'après-midi.

- Oh, je vois, dit Ino. Parfait.

De toute évidence, ce "" parfait "" ne pouvait être plus éloigné de ce qu'elle pensait vraiment, songea Sakura, mal à l'aise face à son regard furibond.

- Je propose qu'on se retrouve ici dans deux heures, dit Sasuke. Voici une clé de la voiture : si vous arrivez avant nous, vous n'aurez pas à attendre dans le froid. Et je vais vous donner mon numéro de portable au cas ou. Tu es prête, Sakura ?

Celle-ci se détacha des petits garçons, rejoignit Sasuke et se haït d'être aussi heureuse quand, avec son sourire chaleureux, il lui passa le bras autour des épaules.

 

 

- C'est bon, tu peux me lâcher maintenant, lui dit-elle cinq minutes plus tard, d'une voix légèrement tremblante. Ino ne peut plus nous voir.

- Tu es ma fiancée, nous nous aimons à la folie. Nous n'allons pas marcher à deux mètres l'un de l'autre, n'est-ce pas ? C'est une petite ville, nous pourrions très bien tomber sur Ino. Et de toute façon, je n'ai aucune envie de te lâcher.

Etait-ce vraiment la peine d'aller jusque-là ? se demanda Sasuke. Tout le monde croyait déjà qu'il était le fiancé de Sakura, et, après ce qui s'était passé entre eux la nuit dernière... Il n'avait pas besoin d'entretenir leur intimité : au contraire, il aurait dû chercher à la limiter au maximum. Mais il était trop tard...

Sakura se demanda à quoi pensait Sasuke. Qu'est-ce qui lui donnait cet air distant et si plein de désir à la fois ?

Quand il lui saisit le bras, elle n'essaya même pas de résister. Il lui fit faire volte-face, l'attira dans l'ombre d'une ruelle ou personne ne pouvait les voir et la plaqua contre un mur, pressant son corps chaud contre le sien.

- Je sais que je ne devrais pas faire ça, murmura-t-il contre ses lèvres entrouvertes, mais ça m'est égal. Tout ce qui m'importe, tout ce que je veux, c'est toi, Sakura.

Oubliant ses scrupules, Sasuke cédait à la fièvre qui n'avait cessé de le tourmenter depuis la veille.

Ce n'est pas raisonnable, songea Sakura. Mais soudain, elle n'avait plus envie d'être raisonnable. Elle avait envie de... de Sasuke. Alors, arrêtant de réfléchir, elle s'abandonna à son étreinte et ils s'embrassèrent comme deux adolescents ivres de désir, indifférents à tout ce qui se passait autour d'eux.

 

 

 

Ils se promenèrent bras dessus bras dessous dans la superbe petite ville, les maisons de pierre ocre étaient couvertes de neiges immaculée, mais les rues, par bonheur, avaient été balayées. Tout à coup, Sasuke s'arrêta et regarda Sakura. Elle se sentit rougir.

- Ne fais pas ça, protesta-t-elle.

- Quoi donc ?

- Ne me regarde pas comme ça.

- Tu veux dire, comme si j'avais encore, très, très envie de t'embrasser ?

- C'est de la folie..., dit Sakura en secouant la tête.

- Est-ce que ce n'est pas ce qu'on dit quand on commence à tomber amoureux ?

Soudain, Sasuke vit quelque vaciller dans les yeux de Sakura et sentit le même choc secouer tout son être. Qu'est-ce qui lui prenait de parler d'amour, bon Dieu ? Il eut soudain l'impression d'être en guerre avec lui-même, habité par deux ennemis dont l'un se faisait une règle de ne jamais jouer avec les sentiments des femmes, tandis que l'autre niait jouer, affirmant au contraire être très sérieux. Et cet affrontement le déchirait !

- Tiens, il y a un café, juste là. Ça te dit qu'on entre boire quelque chose ?

Cela l'aiderait peut-être à recouvrer ses esprits.

Sakura opina du chef, soulagée. L'ivresse de leur baiser était peu à peu retombée, et elle se sentait plus vulnérable que jamais. Tout allait beaucoup trop vite. Elle n'avait pas l'habitude de ce genre de situation. Et elle avait toujours du mal à croire à la sincérité de Sasuke.

En buvant son café, elle s'efforça de s'intéresser aux gens qui passaient dans la rue, de l'autre côté de la vitre, plutôt qu'à Sasuke, assis en face d'elle. Pourtant, elle aurait voulu laisser son regard se promener sur son visage, tandis qu'elle essayait de faire le point sur ses sentiments. Mais elle savait que si elle croisait son regard, elle ne pourrait plus réfléchir.

Pendant ce temps, Sasuke l'observait. Il pouvait presque lire dans ses pensées. Elle avait envie de lui, cela, il en était sûr. Mais elle restait méfiante et ne voulait pas précipiter les choses.

Quand ils eurent tous deux fini leur café, Sasuke se leva.

- Je reviens dans deux minutes, dit-il en désignant un magasin de l'autre côté de la rue.

Sakura ne comprit pas tout de suite ou il voulait aller, mais lorsqu'elle se retourna et vit l'enseigne en forme de croix verte fixée au mur du petit immeuble, elle rougit d'embarras. Elle profita de son absence pour aller se recoiffer et vérifier si son rouge à lèvres avait résisté à leur baiser. Lorsqu'elle sortit des toilettes, elle vit que Sasuke l'attendait dehors, devant le café.

- J'aimerais acheter quelque chose à ta mère pour Noël, mais j'ai besoin de tes conseils, dit-il quand elle le rejoignit.

Sans faire, Dieu merci, la moindre allusion à la course qu'il venait de faire, il l'entraîna vers une petite boutique à la vitrine alléchante, qui se révéla une vraie malle au trésor, pleine d'objets originaux et amusants. Elle y trouva des cadeaux pour tous les enfants. Finalement, tandis que Sasuke faisait empaqueter la petite boîte à bijoux ravissante qu'il avait achetée pour Youra, Sakura regarda sa montre et se rendit compte que deux heures s'étaient presque écoulées depuis leur arrivée en ville.

- Nous ferions bien d'y aller, dit-elle.

- Oui, je sais. Même si je ne peux pas dire que je me réjouisse à la perspective de retrouver Ino... Cette fois-ci, malade ou pas, elle monte à l'arrière.

- Oh, il neige ! s'exclama Sakura avec ravissement en sortant du magasin.

- Comme prévu...

Cette fois-ci, ce fut Sakura qui glissa spontanément son bras sous celui de Sasuke tandis qu'ils retournaient vers le parc de stationnement.

Le carillon d'une horloge sonnait au moment ou ils l'atteignirent. Mais à l'endroit ou Sasuke avait laissé le 4x4, il n'y avait qu'une place libre que la neige commençait tout juste à recouvrir.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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