L'histoire d'amour de Kakashi Hatake
Je me retourne lentement pour faire face à Sasuke. Il n’a pas l’air en colère ni affolé, juste d’attendre patiemment. Il reprend :
- J’ai mis un peu de temps je vous l’accorde mais j’ai fini par comprendre.
- Ils sont au courant ? demande-je.
- Non, mais Sakura se pose les bonnes questions. Elle ne va pas tarder à comprendre, demain matin au plus tard, si elle ne se réveille pas d’ici là en sursaut pour venir vous en empêcher de partir.
- Comment as-tu su ?
- J’avais déjà pratiquement deviné avant qu’elle n’arrive, et j’avoue que vous avez été malin, votre démonstration d’affection a suffisamment détourné mon attention. Mais votre meilleur argument est devenu votre pire traitre. Lorsque nous sommes rentrés je n’ai pas pu m’endormir, je savais que quelque chose clochait, étant maintenant conscient du lien qui vous unit j’ai rapidement tiré les conclusions qui s’imposaient avec la guerre contre Kumo. Elle est bien trop gentille et altruiste, jamais elle ne laisserait une guerre éclater pour elle. C’est elle qui s’en va et vous la suivez.
Je reste silencieux, nous nous toisons dans la nuit. Il reprend :
- Je ne suis pas venu vous en empêcher, je comprends, j’ai moi-même déserté, et pour Sakura je déserterais sans doute encore. Je suis simplement venu vous remercier et vous dire au revoir. Vous dire que je prendrai soin des deux autres et que je leur donnerai suffisamment d’informations pour qu’ils ne se lancent pas à votre poursuite.
Le soulagement et la gratitude se répandent dans mes veines.
- Merci Sasuke. Ce fût un immense honneur d’être votre senseï, je serai toujours là quelque part si vous avez besoin d’aide. Je ne vous oublierai jamais.
- Nous non plus.
Je m’avance vers lui et je pose une main sur son épaule. Nous nous regardons quelques instants, et nous partons chacun de notre côté sans un mot de plus.
*
Tandis que j’approche de ma destination, j’ai les jambes qui se mettent à trembler légèrement et mon souffle devient plus court. Je n’en reviens pas de faire une chose pareille, il y a un risque je foute tout notre plan en l’air, mais je ne peux pas partir si je ne le fais pas.
Lorsque je toque chez Minato, chaque son que je produis résonne comme un glas dans mes oreilles.
Il m’ouvre la porte quelques instants plus tard l’air complétement affolé.
- Kakashi ?! Est-ce que tout va bien ?
Je m’installe sur un genou devant lui, la tête baissée, comme bien souvent lorsque je lui fais mes rapports, j’y mets tout mon respect pour lui.
- Maitre Hokage je suis venu vous reporter un déserteur.
- Qui donc ?
- Moi-même.
Un énorme blanc accueille mes paroles et il ferme la porte derrière lui pour s’enfermer dehors avec moi. Tête baissée, je ne bouge pas. Comme un nombre incalculable de fois depuis que je suis genin, je fais le pari risqué de poser ma vie entière dans les mains de mon senseï. C’est lui qui décidera pour moi, il est ma meilleure référence, il ne se trompe jamais.
Le silence dure encore et encore, et je sais qu’il assemble avec la vitesse qui le caractérise toutes les pièces du puzzle dans sa tête. Au bout de ce qui me semble être une éternité il demande :
- Qu’est-ce que vous allez faire ?
- Libérer Orochimaru.
Je sens tout son corps se tendre mais il ne répond pas. Son devoir d’Hokage est de m’arrêter immédiatement, mais il ne fait rien, il dit :
- Je suis touché que tu sois venu m’en parler Kakashi.
- Je ne pouvais pas partir sans vous le dire, ni vous mentir.
- Relève-toi.
Je me relève et le regarde dans les yeux. J’y lit une tristesse infinie et je pense qu’il lit la même dans les miens. Son émotion est si intense que je me sens obligé de me justifier :
- Nous éviterons une guerre senseï.
- Je sais bien, dit-il paternaliste comme pour me soutenir dans mon choix.
J’ai l’impression qu’une larme pourrait rouler à tout instant de l’un de mes yeux. Je regrette de ne pas avoir mon bandeau pour me cacher derrière.
- Il ne faudra pas vous faire voir Kakashi, personne ne doit savoir que c’est vous qui libèrerez Orochimaru. C’est le plus important, je vais essayer de voir ce que je peux faire pour vous.
- Nous n’attendons rien de tel de votre part, nous sommes prêts à partir sans retour en arrière.
- Et moi je ne suis pas prêt, il faudra que vous me reveniez d’une façon ou d’une autre. Les petits vont avoir le cœur brisé.
Mon cœur à moi se brise en entendant cette phrase, et je baisse les yeux pour me couper de mes émotions.
- Sasuke a déjà compris.
- C’est bien alors, il aidera les deux autres à comprendre juste ce qu’il faut sans les impliquer.
Dans un geste qui me surprend plus qu’il ne le devrait sans doute, il me prend dans ses bras quelques instants. Puis il se recule :
- Partez tant que j’arrive à vous laisser partir et bonne chance, souffle-t-il.
Je repars aussi vite que je suis venu et lorsque j’arrive chez elle, elle dort toujours. Je prépare nos affaires à coté de sa porte d’entrée, passant tous nos biens les plus lourds dans mon sac pour qu’elle n’ait à porter que nos affaires les plus légères.
Je plie consciencieusement son plaid sur le canapé pour le reposer dans le petit panier à côté. J’avais pris mon masque avec moi mais je ne trouve pas le sien dans le sac d’Hanako, alors je le cherche dans son placard pour pouvoir l’y ajouter. Je n’oublie pas la dernière directive de Minato, ne pas se faire reconnaitre. Je m’y accroche précieusement, c’est son dernier conseil.
Hanako finit par sortir de la chambre :
- Je ne t’ai pas entendu te lever, dit-elle.
- Ne t’inquiète pas je finissais nos affaires. On devrait partir tout de suite pendant que le village dort encore.
Elle me regarde intelligemment, elle me connait suffisamment pour voir que je suis troublé, mais elle met visiblement ça sur le compte de notre départ car elle ne dit rien.
Lorsque nous fermons sa porte derrière nous pour la dernière fois, elle tremble un peu. Nous enfilons nos masques et nos longues capes noires en silence. Je saisis sa main pour lui donner du courage et nous filons dans la nuit sans nous retourner.
*
Nous survolons les arbres en silence depuis des heures, perdus dans nos pensées, nous commençons maintenant à connaitre la route de Kumo par cœur et n’avons pas besoin de nous consulter. Je pense que nous sommes trop meurtris de quitter notre village pour partager nos émotions, ce qui ne changerait rien et nous rendrait sans doute encore plus tristes. Nous décidons visiblement tous les deux de ne pas nous arrêter lorsque la nuit suivante tombe dans les bois. Je retire mon bandeau et elle vient simplement saisir ma main pour que je la guide efficacement à travers les bois noirs d’encre. Si nous ne dormons pas cette nuit, nous arriverons aux abords du village avant midi, et le plus intelligent serait que nous trouvions un endroit où dormir jusqu’au soir pour libérer Orochimaru de nuit et en pleine forme. Il faudra impérativement que je dorme à mon aise, n’ayant déjà pas dormi la nuit dernière. Ce n’était pas très malin de ma part avant une mission aussi capitale et compliquée.
Je me demande comment je vais faire pour libérer ce serpent. Ma seule coéquipière n’ayant jamais fait partie des forces spéciales, elle ne connait rien de nos techniques d’infiltration et d’exfiltration. Il faut que je réfléchisse à un plan et ça tombe bien j’ai encore quelques heures devant moi. Je serais curieux de savoir comment elle aurait fait toute seule.
Nous atteignons effectivement avant midi la grotte juste à côté du village où nous avions déjà dormis lors de notre précédente mission. Nous nous installons tout au fond, dans un recoin, il n’y a normalement aucun risque qu’on nous trouve ici surtout sans feu.
J’installe nos couchages et nous nous allongeons face à face. Elle caresse ma joue de son pouce et quelques larmes roulent de ses yeux, nous ne nous parlons toujours pas, je la prends simplement contre moi pour dormir.
*
Lorsque nous émergeons, le soleil se couche et on ne voit plus grand-chose au fond de notre cavité. J’ai bien dormi et je me sens en pleine forme, c’est une bonne chose vu ce qui nous attend.
- Comment tu te sens ? demande-je lorsqu’elle me rejoint à l’entrée de la grotte.
- Mieux, je me suis laissé le temps de pleurer Konoha, maintenant je ne veux plus me laisser y penser, nous devons être concentrés. Et puis, tu es là. C’est tout ce qui compte à mes yeux.
Elle prend ma main et je la serre.
- Une idée de comment on procède ? demande-je.
Elle mordille sa joue :
- Pas la moindre, je n’y connais rien.
Je ris doucement :
- Et tu ne voulais pas de moi avec toi…
Elle rougit et relève le menton par fierté :
- Je me serais débrouillée, je ne sais pas exactement comment…
- Tu es petite et rapide, c’est un très bon point de départ, la coupe-je.
Elle me regarde avec ses grands yeux, me laissant continuer :
- Je ne trouve pas véritablement de stratégie car nous n’avons aucune information, ni sur son lieu de détention ni sur la sécurité qui l’entoure. Ça va vraiment être compliqué. Il faut absolument que nous trouvions un moyen de nous glisser dans le village incognito pour faires des repérages dans un premier temps. On s’organisera après. Et Hanako, avant d’y aller j’aimerais que tu me promettes deux choses.
Elle plisse les yeux, immédiatement suspicieuse.
- Si nous nous faisons attraper ou que tu risques d’être gravement blessée, tu enlèves tout de suite ton masque et tu te présentes. Ils ne te feront jamais de mal si ils savent qui tu es. Tu n’auras qu’à leur dire que tu voulais rejoindre le Raikage, il est tellement imbu de lui-même qu’il te croira sur le champ.
- Je te le promets.
- Si je te dis de partir et de te sauver, tu te sauves et tu me laisses à mon sort quel qu’il soit.
- Non tu sais très bien que…
- Hanako ce n’est pas négociable. Sinon je te dénonce immédiatement au Raikage qui se fera une joie de te placer en toute sécurité dans sa tour dorée et qui me tuera pour une raison de son choix.
Elle sait que j’ai raison, elle penche la tête sur le côté l’air suppliante mais j’attends.
- Je te le promets mais je ne nous laisserai pas en arriver là, finit-elle par dire.
Je la soulève légèrement en la prenant dans mes bras et je l’embrasse tandis que les derniers rayons de lumières se cachent derrière la montagne au loin. Je l’embrasse avec toute ma tendresse, tous mes sentiments, tout mon amour pour elle. Comme si c’était la dernière fois, avant de la reposer délicatement :
- La seule option que nous ayons, c’est d’avancer doucement, discrètement, et ensemble. Tu es en soutien, n’hésite pas à les inonder de petits flash, plus faible encore que ce que tu m’as déjà fait, je veux qu’ils se sentent suffisamment mal pour être perturbés mais pas assez pour qu’ils imaginent qu’il se passe quelque chose. Rends les nauséeux, fébriles, à deux doigts du malaise, ils imagineront une intoxication alimentaire ou quelque chose comme ça, il n’y a aucune chance qu’ils me détectent s’ils ne sont pas au top fais-moi confiance. Et bien sûr en cas de vrai problème tu m’en cloues un max au sol, je me débrouillerai avec ceux qui restent debout. Tu ne quittes pas ton masque, sous aucun prétexte sauf si c’est pour te rendre.
- Pourquoi ? Ils verraient que je ne suis plus à Konoha…
- Non. Aucun prétexte fais-moi confiance.
- D’accord…dit-elle peu convaincue.
- Alors c’est parti, dis-je.
Nous partons en direction de Kumo.