Miyuki ( d'Après le manga de Mitsuru Adachi, 1980)
Chapitre 24 : Entretien d'un grand frère avec sa petite soeur
1949 mots, Catégorie: M
Dernière mise à jour 12/04/2015 19:50
Les jours suivants, ma sœur ne parla à personne de ce baiser. Elle le gardait comme un secret, mais elle se mettait à sortir de plus en plus souvent. Elle s’absentait de longues heures pour rejoindre Yuichi au stade Kasai où d’après elle, elle pourrait voir comment se déroulait son entraînement sous ce soleil de plomb.
Ni moi ni mon père ne pouvions lui reprocher ses absences prolongées ; elle était d’une ponctualité irréprochable et rentrait toujours à l’heure fixée. Rien n’avait changé chez elle, si ce n’est qu’elle était encore plus gaie que d’habitude. Je pouvais l’entendre chantonner de ma fenêtre lorsqu’elle étendait le linge dehors au jardin, ce qui m’arrachait à chaque fois un profond soupir. Un peu plus tard, Yuichi passa nous saluer ; il refit de même la semaine d’après. C’est à partir de ses visites, de plus en plus nombreuses et cordiales que mon père devina la nature de leur relation.
« Je suis tellement heureux que tu te sois enfin décidé à faire le premier pas ! s’est exclamé mon père en étreignant chaleureusement Yuichi. Vraiment vous auriez pu me le dire avant que je ne m’en rende compte ! Miyuki, je suis si heureux pour toi ! Ma chérie, tu ne pouvais pas trouver de meilleur compagnon, je t’assure ! »
Je réalisais que depuis le retour de Yuichi au Japon, papa avait toujours rêvé de le voir comme son petit ami. Il ne se faisait pas prier pour le dire. Sur le visage de Yuichi, je pouvais lire le bonheur qu’il éprouvait mais aussi la reconnaissance qu’il avait à mon égard et dont il me fit part après un dîner :
-Je te dois beaucoup.
Bien sûr, j’étais heureux pour lui car il méritait sa chance. Personne ne pouvait nier qu’ils formaient à eux deux une paire de parfaits jeunes gens.
C’est à partir de là que tout est allé très vite… Un début de soirée qui aura eu le don de me marquer.
Miyuki quittait ses sandales pour enfiler ses pantoufles à l’entrée. Elle revenait de chez Yuichi qui avait finalement décidé de lui présenter sa mère au cours d’un déjeuner. Nous étions seuls à la maison à ce moment là.
-Ou est papa ? me demanda t-elle.
-Il est allé au bar. Anna ne va pas tarder à rentrer des courses, ais-je répondu en baillant.
J’étais particulièrement fatigué ce soir là. Je somnolais à moitié sur le canapé, usé par la dure journée que je venais de passer. Les cours avaient été éprouvants et le sort voulait que je sois de corvée de ménage. Avant d’espérer pouvoir rentrer, il me fallait nettoyer le tableau et passer le balai partout dans la salle. Avec deux autres élèves, Dieu merci ! Sans parler du contrôle surprise que j’ai bien évidemment râté…
-çà s’est bien passé chez Yuichi ? ais-je demandé pour combler le silence.
-Oui assez. Sa mère est vraiment gentille, je suis étonnée que Yuu-chan ne nous l’ait pas présenté plus tôt.
Je ne dirais pas que son ton joyeux sonnait faux, mais je sentais une certaine inquiétude dans sa voix. Son regard même indiquait qu’elle était pensive et que pour çà, quelque chose de grave où en tout cas de sérieux avait du se produire. Curieusement, je n’osais pas lui poser la question. Une prudence à la source inconnue freinait mes envies de savoir. Le sommeil aussi peut-être…
-Tu m’as l’air vraiment fatigué...Je vais te faire un bon café.
Aussitôt elle se dirigea vers la cuisine où je l’entendais ouvrir le placard à tasse. Le bruit de l’eau qui coulait et celui de la cafetière a presque agi sur moi comme une berceuse. Au moment où j’étais à deux doigts de m’endormir, Miyuki m’avoua :
-Nous avons beaucoup discuté pendant le repas. Mais Yuu-chan voulait me parler de quelque chose en particulier.
-Laisse-moi deviner. il t’a demandé en mariage ?
-Oui.
Je n’ais pas réfléchi. Je me sentais complètement à l’ouest. Dans cet état là, je pouvais tout prendre à la légère. En fait, je prenais çà comme une blague. J’ai ri bêtement.
-Ah ! Et tu as répondu oui j’imagine ?
- Je n’ais trouvé aucune raison pour refuser.
-Haha ! Mes félicitations ! Si plus tard tu fais une aussi bonne épouse que tu es bonne comédienne, il y aura de quoi l’envier !
-Tu crois que je plaisante ?
Jusqu’à présent, je lui tournais le dos. Mais lorsque j’ai fait volte-face vers elle et que je l’ai regardé droit dans les yeux, je me suis rendu compte de mon erreur et j’ai compris qu’elle n’avait pas le cœur à traiter le sujet sur le ton de la plaisanterie. Je me suis senti couler comme une ancre…
-…Il t’a vraiment demandé de l’épouser ?
-Oui…
-…Je…Je ne sais pas trop quoi te dire.
En fait, je ne réalise toujours pas.
Elle a mis les deux tasses sur un plateau puis s’est agenouillée à la petite table non loin de moi.
-Voilà ton café.
-Merci…Alors…Que lui as-tu dit ?
-Au début, je n’ais pas su quoi dire. Ce n’est pas si simple…
-Mais tu as accepté, non ? Alors tu sais à quoi tu t’engages.
-Je n’ais pas dit oui comme çà sans réfléchir ! Je lui ais demandé de me laisser du temps et…
-Tu as oublié le sucre.
Elle s’en retourna chercher le sucrier. J’ai versé deux morceaux dans ma tasse. J’en ais profité pour sortir de ma torpeur et reprendre la parole :
-Tu sais, si tu es amoureuse de quelqu’un et que tu te sens prête à l’épouser, je n’ais pas à m’y opposer. C’est ta décision et personne n’a le droit de t’en empêcher.
Je me suis tut un moment pour observer sa réaction. Comme elle m’écoutait attentivement, j’ai continué :
-En tant que frère aîné, je respecte ton choix. Surtout parce que je sais que Yuichi est un type bien. Mais c’est aussi pour çà que je te demande d’y réfléchir. S’il t’a demandé en mariage, c’est qu’il est sérieux.
-Je le sais bien. Je peux le dire, je l’aime et çà j’en suis sûre. Il est l’image de l’homme idéal que je me suis longtemps imaginée. Il est serviable, gentil et beau. Il a beaucoup de qualités mais…
-Mais ?
-Je ne sais plus.
-C’est normal que tu doutes. Tu es troublée par sa demande et c’est bien compréhensible. Réfléchis bien avant de lui donner ta réponse définitive. Je te conseille de ne pas en parler à papa avant d’être sûre de ce que tu lui répondras.
-Onii-chan, tu crois que c’est normal d’hésiter à épouser quelqu’un si on l’aime ?
-Oui. L’idée de mariage peut facilement faire peur et même rebuter. Après tout, c’est un engagement grave.
Tu ne t’imagines pas à quel point j’ai moi-même les jetons à l’idée de me marier…
-J’aime bien quand tu parles comme une grande personne, s’est-elle moquée.
-Je suis une grande personne !
Elle a ri comme elle ne l’avait pas fait depuis un bon moment. Puis elle a bu silencieusement son café quand son regard s’est attardé sur la pendule.
Elle a prit un air confus tout en me disant :
-Onii-chan, tu n’aurais pas du te trouver au café du coin avec Miyuki-chan depuis un quart d’heure ?
???!!!
-Merde !
En effet, je devais retrouver Miyuki-chan à une table du café Minami. J’étais en retard et elle allait certainement m’en vouloir. Peut-être même qu’elle était déjà partie ! Misère !
Sans prendre la peine de me changer, je me suis élancé comme un éclair sur mon lieu de rendez-vous où j’espérais trouver les mots justes pour m’excuser.
Tout çà m’était complètement sorti de la tête à cause de tous ces évènements, de cette annonce que je croyais être une belle supercherie. J’aurais aimé que ce fusse un autre jour que celui-là. Comment allais-je cacher mon inquiétude ?
Je croyais que c’était une blague. Juste une blague !