L'Ombre de la Guerre
Faisant tomber un à un ses gantelets, l’homme titubais lentement jusqu’à tomber de tout son poids sur une meule de foin. Avec le peu de force qui lui restait, il se retourna malgré la lourdeur du restant de son armure pour se mettre sur le dos. En gémissant de douleur, à la force de ses mains, il attrapa le haut de son plastron, qu’il réussit à tordre jusqu’à complètement le jeter non loin devant pour laisser son torse ensanglanté prendre l’air.
Expirant difficilement, le chevalier regardait le plafond de l’établi où il était allongé, levant sa main au-dessus de son visage, pour examiner l’état de sa sombre chevalière qui portait le sceau d’une patte de chat s’éclairant d’un vert lumineux.
Sa vision commençait à être flou, la main tremblante d’épuisement, sentant son corps devenir glacial.
L’OMBRE DE LA GUERRE
Chapitre 1 : Les mots sont des armes
Riant en chœur, un groupe de jeunes garçons bousculèrent un semblable dans la boue.
Malgré l’épaisse terre qui recouvrait l’enfant, ses cheveux blonds gardaient tout autant leur clarté. Se relevant difficilement, il ne savait pas où poser son regard entre le sol ou sur un des autres qui l’avait poussé.
- Hé bien alors Hamelot, dit l’un des enfants en cramponnant son ventre, tu veux devenir un cochon maintenant ?
- Ecuyer c’est beaucoup trop dur pour toi, dit un autre en rigolant tout autant.
- Ne t’inquiète pas, tu garderas la même odeur ! Répliqua un autre qui donna un nouvel élan de rire que l’on pouvait entendre jusqu’à la sortie du village.
Le groupe d’enfant se tordait de rire face à l’impuissance de leur victime qui se tenait à peine debout. Jusqu’au moment où des bruits de plusieurs chevaux se fessait entendre non au loin.
Tel un signal, le groupe se mit en rang, épaule contre épaule, le visage pointant vers le haut, calmant automatiquement leurs crises de fou rire.
Hamelot lui, essayait d’enlever les boues qui coulait le long de ses vêtements sans émettre une seule expression de désarroi.
Le bruit sourd des sabots tapant contre le sol se rapprochait jusqu’à l’entrée de la cour.
C’était un groupe de chevalier, tous en armure, l’air enjoué. Sauf le dernier. Celui-ci ne portait qu’un simple plastron marqué de bosse, tenant les rênes de son cheval à une main. Son bras gauche étant dissimulé sous une grande cape noire.
Les cavaliers arrivèrent au pas. Alors que les enfants rejoignaient chacun des adultes pour leurs venir en aides à descendre de leur monture en prenant leurs quelques affaires, l’étrange chevalier lui s’arrêta au niveau du garçon encore salis.
Le garçon, prit d’un grand étonnement en l’apercevant, s’inclina pour s’excuser avant de s’avancer pour l’aider comme les autres.
- Ah non ! S’écria un des chevaliers encore assis sur son cheval blanc. Hamelot, nous n’avons pas besoin de ton aide, et encore moins que tu salis notre hôte ! Rends-toi vraiment utile en donnant à manger aux chevaux.
Hamelot ne pouvait qu’acquiescer de l’ordre qu’il venait de recevoir. Sous le regard du chevalier en cape, l’enfant se mit à courir en direction d’un cabanon. Alors qu’un des enfants se rua pour aider l’hôte, celui-ci, le visage toujours ferme, décrocha le fourreau qui pendait à son cheval pour le lancer au petit serviteur qui tomba à la renverse.
Le chevalier descendit de sa monture d’une seule main, remettant correctement la cape qui tombait le long de son épaule avant de se diriger vers un autre de ses compères, le regard toujours attiré vers l’enfant sale qui revenait avec deux sceaux d’eaux.
- Qui est donc cette enfant, dit l’homme en avec une voix roc, c’est un écuyer ?
- Non, un bâtard qu’on a recueilli de l’église parce qu’il nous manquait de main. Mais eux, oui ! Si tu le souhaites, nous pouvons t’en officialiser un qui pourra t’aider à porter des pacotilles ou tes armes mon ami ! Regarde notre Gaultier, dit l’homme en pointant du doigt un des garçons qui se tenait droit, les cheveux brun bouclé, tenant un casque de chevalier qu’il essayer de faire polir à l’aide de la manche de son haut.
Mais le chevalier n’écoutait son camarade. Il était juste intrigué par la présence de l’enfant et de son état.
-∞-
Les rires des hommes autour de la grande table résonnaient dans tout le château et même en extérieur. La table était parsemée de miette de pain entre des assiettes remplis de nourriture colorant de clarté.
- Notre bon roi Charles V, n’étais que le meilleur des souverains ! Son fils ? N’est que folie ! Dit l’un en levant son verre de vin.
- Que notre guerre s’achève en renvoyant les anglais chez eux, une flèche dans leur derrière ! Dit un autre en se levant de la table. Trinquons à notre future victoire. Mais aussi à notre hôte, Emmeric ! Chevalier de grande guerre, et, malgré ses péripéties, toujours debout pour aider notre cher pays ! Vive la France ! Vive Emmeric !
- Vive la France ! Hurlèrent en cœur les chevaliers tout autour de la table. Vive Emmeric ! Répondit à nouveau le groupe en regardant l’homme assis, un léger sourire, portant toujours la cape sur son épaule.
La joie des hommes résonna jusqu’aux cuisines, là où se trouvait Hamelot, fixant la porte en bois en se demandant ce que pouvait bien se passer du côté des adultes.
L’ambiance à table n’était que dérangeante pour le jeune garçon, alors que tous les autres écuyers mangeaient avec le sourire, leur morceau de pain, dégustant leur part de viande baignant dans une soupe de citrouille, Hamelot, n’avait que de la soupe, qui ressemblait plus à de l’eau chaude.
Le cuisinier de la salle, s’approcha de la table des enfants, posant devant Hamelot, un panier de pain chaud.
- Apporte-leur ça, et n’oublie pas que ce n’est pas pour toi. Dit l’adulte alors que le garçon s’empressait déjà de sortir de table.
- Si vous voulez, vous n’avez qu’à y glisser un morceau empoisonner, au moins, on saurait que Hamelot serait un voleur en plus d’un incapable ! Dit l’un, le bol de soupe au bord des lèvres.
- Surveille ton langage toi. Reprit le cuisinier en jetant un regard sombre sur l’enfant. Allez Hamelot, traine pas.
Le petit blond prit le panier en se précipitant jusqu’à sortir de la cuisine.
Arrivant dans la grande salle, Hamelot essaya de garder bonne figure en apportant le panier de pain à table. Le chevalier Emmeric se redressa au venu du garçon qu’il reconnut à sa chevelure. D’un geste, il attrapa son gobelet en métal pour le secouer en signe d’une réclamation de service pour l’enfant.
Attrapant l’autre panier de pain vide, Hamelot acquiesça en se retournant jusqu’à une table derrière lui.
- Vous avez entendu parler du fameux Chevalier Noir qui menace les anglais ? Dit soudainement un des hommes, attirant au passage tous les regards sur lui.
- Tu veux dire, les fameux chevaliers noirs de campagne ? C’est que des histoires pour donner aux enfants de rejoindre nos rangs et que quelqu’un protège leurs toits pendant que leur père est à la taverne, et la mère entrain de récolter les patates d’à côté. Dit l’un en rigolant le nez dans sa tasse.
Le jeune Hamelot attrapa un pichet de vin avant de rejoindre le chevalier qui attendait avec son verre mit sur le côté de son assiette.
- Non, non, non. Je parle du vrai Chevalier Noir. Celui qu’on dit invincible, et magique.
Les mots calmèrent l’ambiance pour montrer un grand intérêt à l’histoire que racontait le chevalier. Le garçon s’approcha de la table pour servir l’adulte, tout en gardant une ouïe attentive sur la conversation qui était en cours.
- Le chevalier noir est une histoire oui, mais il existe le vrai Chevalier Noir. On raconte que ce serait lui qui aurait motivé ces autres à noircir leurs armures. Mais il n’en existe qu’un seul. Un homme, une femme, on ne sait. Mais ce chevalier parcourt le monde pour défendre chaque bataille.
- Que demande-t ’il en déchange ?
- Rien. Personne ne sait à quoi il ressemble et dans quel intérêt. On dit que ses pièces d’armures sont faites d’un métal tellement résistant, qu’il aspire les coups de lame, et que son touché pourrait détruire un vivant tel le diable qui déchaine ses flammes en un claquement de doigt.
L’enfant était captivé par la conversation qu’il avait oublié le vin qu’il fessait déborder du verre. Pris au dépourvu, Hamelot déposa aussitôt le pichet en terre cuite pour essuyer ce qu’il avait renversé.
- En tout cas ce gamin ne risque pas de devenir un chevalier noir. Ni un chevalier tout court d’ailleurs ! Dit un autre se penchant sur le côté pour taper dans le dos du pauvre enfant.
- Et pourquoi donc ? Dit Emmeric en haussant le ton d’un air sérieux.
La voix de l’homme avait tranché l’ambiance tel un coup de lame pour fendre l’air en deux. Hamelot était tout aussi surpris qu’un inconnu s’impose de la sorte.
- Emmeric, ne le prend pas mal, mais Hamelot n’est pas fait pour tenir une arme. Nous avons essayé, tous les autres arrivent à tenir bon même avec des coups de bâtons dans le ventre.
- Alors vous estimez qu’un enfant ne peut pas soulever une épée est dans l’incapacité de se battre ? C’est comme ça que vous formez vos écuyers à devenir l’un des nôtres ? Et les paroles dans l’histoire ? De l’histoire même. Quel mot avions-nous appris quand on était comme eux ?
- Loyauté ? Dit l’un dans un ton de gène.
- Le courage, reprit Emmeric. Ce n’est pas forcément se battre qui importe le plus. C’est de servir. D’aider.
Les paroles du chevalier n’était qu’une source d’inspiration pour l’enfant qui le regarder avec émerveillement. L’homme se mit à regarder l’enfant avec un léger sourire.
- Convoquer les autres écuyers. Il est temps qu’on s’amuse vraiment avec un peu d’exercice nocturne. Dit-il en se levant de table, verre à la main.
Les autres chevaliers de la table, s’exclamèrent de joie en se levant à leurs tours de table, certains finissant le contenu de leurs assiettes pressement pour mieux apprécier le spectacle avant de vite partir.
On entendait dans le couloir les hommes rires et frappant des mains en rythme comme pour prévenir le début d’une fête.
Hamelot rattrapa son pichet de vin pour le remettre à sa place. Alors qu’il commençait à rassembler les assiettes et morceau de nourriture qui trainait de partout. Il s’arrêta brusquement quand il remarqua que le chevalier Emmeric n’avait pas encore quitter la table.
- Puis-je savoir ce que tu fais ? Dit l’homme avait un air d’incompréhension.
- Je nettoie la table, mon seigneur. Dit l’enfant en s’écartant de celle-ci pour se tenir plus formellement à l’adulte qui était en train de lui parler.
- Est-il vrai que tu es un bâtard ?
- Je ne sais pas, mon seigneur. Si ce que dis les autres chevaliers, alors je pense que c’est vrai. Je ne suis qu’orphelin, abandonné aux portes de l’église de notre village.
- Et tu n’as jamais voulu montrer un signe d’opposition de leurs traitements ? Ils n’y vont pas de main morte. Pourquoi les laisses tu donner ta faiblesse pour qu’il s’amuse avec à la piquer avec un fer chaud ?
- Mon seigneur, on m’offre toit, nourriture, compagnie. Je ne peux qu’accepter cette chance. L’église était un endroit sacré mais difficile pour les autres de tenir. Alors, montré un signe de contradiction, serait montré un signe que je risque de m’attirer des ennuis.
L’homme bu une gorgée de son verre avant de le poser sur la table.
- Simple question, mon garçon, si un homme affamé mais malade te donne 2 pièces d’or pour que tu ailles lui acheter le plus beau morceau de viande que tu trouves. Que ferais-tu ?
Hamelot, intrigué par la question, regarda le chevalier en serrant ses mains.
- Je partirai chercher ce que demande l’homme et je reviendrai avec le restant d’argent exacte.
Le chevalier Emmeric fixa longuement le garçon. Puis, il soupira. Avec dégout ? Soulagement ? Une action plutôt étrange pour le garçon qui ne savait s’il devait continuer à discuter avec l’adulte ou débarrasser la table avant le retour des autres chevaliers.
Mais Emmeric s’avança jusqu’à l’entrée de la salle. Avant de sortir, il se retourna, un air glacial avait pris place sur son visage.
- Quand j’ai dit de convoqué les autres écuyers, que je sache, c’était tous les enfants qui sont censé être les écuyers de ce château. Et, pardon si je me trompe, mais tu en fais partis, non ?
- Oui, mon seigneur. Répondit timidement Hamelot en se redressant de plus belle. Je crois ?
- Alors, je peux savoir pourquoi tu n’es pas encore dans la cour comme tout le monde ?
Le visage neutre de l’enfant se changea en une expression proche de la surprise et du dégout.
Une pensée lui vint alors, et si cet entraînement nocturne était de sa faute ? Cela signifierait qu’il aurait créé des ennuis aux autres enfants sans même faire quelque chose ?
Mais, sous cette panique, le garçon sentit une pulsation victorieuse jaillir de sa poitrine. Même s’il était incapable de se battre, il sentait une détermination grandissante de vouloir faire ses preuves.
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Dans le même registre que "L'Ombre de la Guerre" : "Sous l'affiche d'un film pornographique" par BakApple -> t.ly/24rq
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