L'amour au-delà de la haine
Chapitre VI : Confusion.
Une fois ma douche terminée, je décide de rejoindre ma chambre afin de songer à tout ce que Tony et moi avons pu échanger. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ce fut rude. Il ne pourra jamais me pardonner. Tels ont été ses mots. Que puis-je faire ? Que puis-je dire face à cela ? Et surtout, quelle attitude dois-je adopter la prochaine que l’on va se croiser ? A peine nous nous sommes retrouvés que nous avons couché ensemble. Et à peine avons-nous couchés ensemble, que nous nous sommes disputés. Et le pire dans tout cela, c’est que nous avons fait ça au mépris de nos conjoints respectifs. Car même si Tony ne s’envisage pas en couple avec ce fameux Docteur Strange, ils semblent être suffisamment proche pour que ce soit ambiguë aux yeux de Vision. Ma relation avec lui est catastrophique. Pire, elle est même néfaste pour nous. Autant pour moi que pour lui. Et malgré que je sache ça, malgré que j’aie conscience de cette réalité, je ne peux pas m’empêcher de l’aimer. Et ce, d’un amour inconditionnel et irraisonné. Et c’est douloureux. Pour moi. Pour lui. Mais que puis-je y faire ? J’ai tenté de l’oublier avec Sharon et le résultat est que j’ai trompé la pauvre jeune femme avec lui à la première occasion que j’ai eu.
Je suis perdu, et je ne sais plus quoi faire. Alors dans des cas comme ceux-là, j’ai tendance à me diriger vers Natasha, qui je le sais, sera de bon conseil. C’est pourquoi, je partis la chercher. Après un rapide détour par sa chambre qui est vide, je me rends dans la cuisine, pensant qu’elle doit être en train de petit-déjeuner à cette heure-ci. Mais non seulement elle n’y est pas, mais j’eu la mauvaise surprise d’y trouver Tony en compagnie de ce fameux Docteur Strange. Ils sont assis l’un à côté de l’autre, et Tony écoute avec attention ce que lui raconte le sorcier.
- J’ai dû quitter la terre durant quatre mois pour une mission. J’ai été dans la dimension trois mille quatre cents quatre-vingt-dix, et tu ne devineras jamais… Lui lance le sorcier.
- J’étais encore plus irrésistible là-bas qu’ici ?
- Hum c’est à voir. Réfléchis le docteur. Là-bas, tu étais une femme qui répondait au doux nom de Natasha…
- Moi une Natasha ? S’étonne Stark tandis que j’entre dans la cuisine.
- Une Natasha sacrément sexy. Répond-t-il en dévisageant l’ingénieur.
- Et ma version féminine t’a-t-elle trouvé à son goût ?
- Malheureusement, elle était mariée et n’a pas voulu tromper son conjoint. Soupire-t-il. Je n’ai même pas pu obtenir un baiser.
- Mariée ? S’étonne l’ingénieur.
- Au Steve Rogers de leur univers, dit-il en me lançant un petit regard.
- Steve ? Tu entends ça ? On aurait pu être marié. Tu aurais voulu de moi si j’avais été une femme ? Me lance l’ingénieur comme si de rien n’était.
- Que tu sois une femme n’aurait rien changé, me contente-je de répondre comme si c’est évident et avec une certaine amertume.
- En même temps, tu es irrésistible dans les deux cas. Mais je crois que je préfère encore ta version masculine, lui déclare Strange.
- Ah oui ?
- Au moins, je peux embrasser cette version.
Strange attrape la tête de Tony avant de l’embrasser langoureusement tout en me fixant l’air satisfait. Devant ce spectacle, j’ai l’impression que je vais exploser de colère. Comment peuvent-ils faire ça devant moi ? Comment Tony peut-il se comporter de la sorte ? N’a-t-il aucune sorte de respect pour moi ? Et ce Docteur Strange, à quoi joue-t-il ?
Je ne peux m’empêcher d’attraper Tony par le bras et le tirer jusqu’à moi. Étonné, il me dit d’une voix froide :
- A quoi tu joues ?
- Je peux te retourner la question ! Lui réponds-je furieux.
- Moi ? Je fais encore ce que je veux que je sache, je ne te dois rien.
- Comment tu peux faire ça avec moi dans la pièce et avec l’autre crétin qui me cherche !
- Parce que tu jures maintenant ?
- C’est tout ce que tu as à dire ?
- Je croyais que c’était clair ce qu’on s’était dit toute à l’heure, répond-t-il en parlant moins fort comme s’il veut calmer les choses.
- Tony… Tu…
Je me retiens de l’insulter. Et le moins que l’on puisse dire c’est que ce n’est pas facile. J’ai envie de lui hurler dessus. De lui demander pourquoi il me fait ça ? Notre discussion a eu lieu il y a à peine une heure de ça. Et il ose me dire que tout est réglé comme si rien ne s’était passé hier soir. Comme s’il n’y avait jamais rien eu entre nous.
- Vous savez, Tony ne vous appartiens pas. Me précise Strange avec un air hautain.
- Pas plus qu’à vous, lui rétorque-je énervé.
- Je sais. Se contente-t-il de répondre.
- Captain, vous devriez nous laisser. Me demande Tony sur un ton autoritaire.
Et c’est ce que je fais. Non pas parce que j’avais envie de lui obéir, mais parce que je n’avais pas envie que cela aille trop loin. Car pour être honnête, je suis à deux doigts d’enfoncer mon poing dans le visage de ce fameux docteur. Comment peut-il me parler comme ça ? Pour qui se prend-t-il sérieusement ? Il n’a pas à se mêler de notre histoire. Cela ne le regarde pas. Car s’il est fier de n’être qu’un coup d’un soir, ou un partenaire occasionnel pour Tony, cela ne lui donne pas le droit de se mêler de nos affaires. S’ils étaient en couple, ce serait différent mais là, il me provoque volontairement. Et si je m’en veux de rentrer dans son jeu et d’avoir réagis comme un idiot, je dois dire que cela a été plus fort que moi. Presque instinctif. Je déteste être comme ça, ce n’est pas moi. Et c’est encore moins la personne que j’aspire à devenir. Depuis que j’ai mis les pieds dans le QG des Avengers, je ne me reconnais plus…
Pour vider la frustration et la rage que j’ai accumulé depuis notre arrivée hier soir, je me suis enfermé dans le gymnase à cogner sur des sacs de sable. Et aux vues du monticule qui s’amoncèle, il y a encore beaucoup de choses que je n’ai pas pu digérer. Mais alors que je continue de ruminer, j’entends une voix m’appeler par mon nom de super-héros. Lorsque je me retourne, je suis surpris de retrouver Rhodes derrière moi. Il me demande :
- Captain, je peux vous parler ?
- Bien sûr, réponds-je intrigué.
Rhodes est le meilleur ami de Tony donc il n’est pas à exclure qu’il veuille me parler de lui. Toutefois, cela me surprend puisqu’il ne s’est jamais mêlé de nos histoires. Pour ma part, j’ai beaucoup de respect pour lui. C’est un militaire avec une carrière extraordinaire, et un homme avec de fortes valeurs. De plus, c’est un ami fidèle et bienveillant. Et même si nous nous sommes retrouvés en tant qu’ennemi sur le champ de bataille, cela ne m’a jamais empêché d’éprouver une forme d’admiration pour lui. C’est donc tout naturellement que j’accepte de le suivre jusqu’à un banc. Il s’assoit difficilement en raison des jambes mécaniques que son ingénieur d’ami a dû lui fabriquer. C’est empreint de culpabilité que je lui demande :
- Vous vous êtes habitués à… vos nouvelles jambes ?
- C’est un coup de main à prendre, mais Tony sait faire des miracles avec ses mains. Se confie-t-il. En parlant du loup…
- Vous voulez me parler de Tony ?
Je suis gêné lorsque je pose cette question, car même si j’ai beaucoup d’estime pour Rhodes, je ne suis pas prêt à me confier à lui sur ce que je ressens pour Stark. Surtout pas après la scène à laquelle je viens d’assister.
- Oui, me dit-il sans détour.
- Écoutez, Rhodes, je vous apprécie, mais…
- Captain, pas besoin d’être un génie pour comprendre que vous l’aimez toujours. Me coupe-t-il. Mais ne lui faites pas ça.
- Quoi ? Réponds-je surpris.
- Il n’est pas assez fort pour le supporter.
- Pour supporter quoi ? Demande-je agacé.
- Vous.
- Moi ? Qu’est-ce que j’ai fait ?
- Ce que vous lui avez fait, il ne s’en relèvera jamais. Si vous le poussez dans ses retranchements, j’ai peur de ce qu’il va se passer, me dit-il l’air inquiet. Tony a toujours réagi avec… disproportion à tout ce qu’il lui arrive. Et il ne sait pas gérer ses sentiments.
- Avec Strange, c’est sérieux ? Demande-je avec un brin d’inquiétude dans la voix.
- Cela ne vous concerne pas, me réplique-t-il froidement.
- Ça me concerne ! Vous… savez ce qu’il s’est produit hier soir, et… Commence-je.
- Je le sais, c’est pour ça que je viens vous voir. Vous en voyez déjà les conséquences aujourd’hui.
- Tout ce que je vois, c’est qu’il me provoque.
- Oui, et il le fera toujours. Steve. Écoutez. Il vous déteste plus qu’il ne vous aime. Et le fait qu’il éprouve encore des sentiments pour vous ? C’est une torture pour lui. Alors ne lui faites pas ça, n’entrez pas dans son jeu, car vous allez vous brûler les ailes tous les deux. Cela vaut autant pour lui, que pour vous, ce que je vous dis.
- Mais… tente-je.
- Il n’y aura pas de fin heureuse à cette histoire. Dit-il tranchant.
- Vous n’en savez rien. Le contredis-je.
- Vous allez juste le détruire si vous persistez. Vous ne savez pas dans quel état il s’est retrouvé après les accords. Et il n’avait personne à qui en parler ! S’emporte légèrement le militaire.
- Pas même vous ?
- Certainement pas moi, vous avez juste la moindre idée du sentiment de culpabilité qu’il éprouve par rapport à ce qu’il m’est arrivé ? Dit-il en désignant ses jambes. Du sentiment de culpabilité qu’il a éprouvé quand tout le monde s’est retrouvé en prison par votre faute ? De la douleur qu’il a ressentie quand il a appris pour ses parents ? Il ne s’en était jamais remis. Jamais.
- Je n’ai jamais voulu ça, argument-je.
- Que vous l’ayez voulu, ou pas. Ça ne change rien aux faits, Captain.
Je sais que j’ai tout gâché avec Tony. Que lui avoir caché que ses parents ont été… assassinés par Barnes a été… l’erreur qui a coûté la vie à notre couple[1].
- Ne lui faites pas ça, c’est tout que j’ai à vous dire.
Je prends ma tête entre mes mains. C’est plus facile à dire qu’à faire car je suis amoureux de lui. Mais je ne veux pas lui faire de mal. Alors, si c’est pour son bien… Je serais prêt à… Et en même temps, hier soir… il est venu à moi. Il a été tactile avec moi, et bien plus encore. S’il n’éprouve rien à mon égard…
- Je vous laisse réfléchir à tout ça, mais c’est pour votre bien. Et le sien. Vous ne serez jamais heureux ensemble.
- Vous n’en savez rien, lui lance-je amère.
Puis il partit sans un mot de plus. Je ne sais pas comment je dois me sentir. Je ne sais pas si je suis en colère ou blessé par ce que je viens d’entendre. Ou les deux. C’est probablement les deux d’ailleurs. Et la seule question que j’ai en tête est de savoir s’il a raison. Et si ce qu’il m’a dit est vrai ? Et si en persistant auprès de Tony je vais empirer les choses ?
Quelques semaines ont passés depuis ma discussion avec Rhodes et je ne sais toujours pas quelle attitude adopter avec Tony. Pour le moment, je n’ai eu guère à m’en soucier que l’ingénieur m’évite autant que possible. En effet, la majorité du temps il se trouve dans l’antre du sorcier. Probablement à batifoler. En tous les cas, quand il en revient, il est de très bonne humeur. Et mis à part avec moi, il est très sociable avec les autres membres de l’équipe, et une bonne ambiance semble s’installer. Mais encore une fois, c’est sans me compter, car à chaque fois qu’il me voit, et qu’on est contraint de se parler, il est froid et méchant. Il me lance sans arrêts des petits pics notamment en évoquant volontairement sa relation avec Strange devant moi. Et il sait que cela me met hors de moi et il tente de me pousser dans mes retranchements. Il veut que je m’énerve. Mais jusqu’à présent, j’ai toujours réussi à me contrôler, afin de ne pas lui hurler dessus, même si ce n’est pas l’envie qui m’en manque parfois. Mais à quoi bon ? A part empirer les choses, cela n’aurait servi à rien. Je ravale donc ma colère, et je passe à autre chose. Ainsi, nos journées se ressemblent : soit il m’ignore, soit il me provoque.
Mais un soir, son attitude fut totalement différente de celle que j’avais l’habitude de voir. Ayant eu une journée particulièrement éprouvante, notamment à cause de Tony qui m’a encore une fois provoqué comme à l’accoutumée, je n’arrive pas à trouver le sommeil. Pourtant, j’ai tout essayé : lire, dessiné et écouté la musique. Comme il se fait très tard et que j’ai envie de trouver le sommeil, je me décide à aller dans le salon afin de pouvoir regarder un peu les programmes de nuit sur la télévision. Je me dis que si mon esprit est concentré sur un programme de pêche à la mouche, cela m’aiderait à trouver le sommeil. Mais je suis loin de me douter que l’ingénieur serait lui aussi présent dans le salon. Lorsque j’entre, il est assis dans un fauteuil avec un verre à la main. Lorsque je le vois, je peux m’empêcher de soupirer. En effet, je n’ai pas envie d’être son souffre-douleur ce soir, et j’ai seulement besoin de repos. N’ayant aucune envie de l’affronter ce soir, je m’apprête à tourner les talons lorsque j’entends une voix éteinte me déclarer :
- Tu dois me détester…
- Quoi ? Demande-je incertain de ce que je viens d’entendre tant cela me semble irréaliste.
- Rien… Dit-il avec une voix qui semble serrée par les sanglots.
Je m’approche de lui et je m’assois sur un fauteuil que je place en face de lui. Tony semble éteint. Vêtu d’un simple t-shirt noir et d’un jogging, il a les cheveux en bataille et le regard perdu dans le vide. Son visage a revêtu une expression indéchiffrable qui trahit cependant, très probablement, un mal-être intérieur.
- Pourquoi tu me dis ça ? Demande-je doucement.
- A ta place… Je me détesterais… Finit-il par lâcher.
Sans rien répondre, je m’approche en douceur pour lui retirer son verre. Je pense qu’il a bien trop bu pour ce soir et que cela explique ses élucubrations.
- Tu devrais aller te coucher, me contente-je de lui répondre.
- J’arrive pas à dormir, dit-il en plongeant son visage dans ses mains.
- Tony… Je ne suis pas ta baby-sitter, je ne vais pas aller te coucher dans ton lit. Mais tu devrais vraiment y aller. Tu seras mieux dans ta chambre.
Tony ne me répond pas et se contente de garder son visage caché. Sincèrement, je ne sais pas quoi faire. Et pour tout dire, je ne m’attends pas à le trouver dans cet état. Lui qui semble si sûr de lui en journée. Même si j’ai appris ces dernières années que Tony sait bien cacher son jeu, je ne pensais pas qu’il craquerait devant moi ainsi. Malgré tout, je n’ai aucune envie de le consoler. Pas après ce qu’il m’a fait ces derniers temps. Je crois que je vais me contenter de suivre les conseils de Rhodes et ne pas entrer dans son jeu.
- Aller Tony, il faut aller vous coucher.
- D’accord… Dit-il docilement.
Mais il ne se lève pas. Il reste assis sans bouger. Agacé, je finis par lui demander :
- Et tu comptes te lever dans combien de temps ?
- Je te dérange ? Me demande-t-il la voix brisée.
Je ne rentrerais pas dans son jeu. Je ne peux pas encore être là pour lui après tout ce qu’il m’a fait. Non. S’il a fait une croix sur notre relation… Je ne peux pas toujours être là pour lui. Ce fut donc moi qui me lève.
- Tu peux rester… lâche-t-il. Je vais partir…
Il se lève à son tour, mais il dû le faire trop brusquement, puisqu’il manqua de tomber par terre. Bien sûr, je n’ai pas pu m’empêcher de le rattraper avant qu’il ne se fasse mal. Probablement ivre au-delà du raisonnable, il tient à peine debout. Et alors que je vais le sermonner, il fond en larme dans mes bras.
- Je suis désolé… Sanglote l’ingénieur.
- Tony…
En le voyant sangloter ainsi, mon cœur se serre. Malgré tout ce qu’il m’a fait ces derniers temps, je n’aime pas le voir comme ça. Je préférais le savoir heureux, même si cela me faut du mal, plutôt que de le voir se détruire et souffrir de cette façon. Je le rassois dans le fauteuil avant de lui demander d’une voix plus douce :
- Vous vous êtes disputés avec Strange ?
- Non… Se contente-t-il de me dire.
- Alors qu’est-ce que vous avez ?
- J’en peux plus… J’en peux juste plus… Dit-il en relevant la tête vers moi.
- De quoi ?
- De tout…
Je ne sais pas quoi lui répondre. De tout ? Qu’entend-t-il par-là ? J’attrape doucement sa main dans la mienne, et contrairement à ces derniers jours, il se laisse faire. Soudain, il semble chercher quelque chose du regard avant de vouloir attraper son verre.
- Non Tony, je crois que tu as suffisamment bu pour ce soir. Dis-je avec autorité.
Et bizarrement, il ne réplique pas. C’est avec douceur que je lui demande :
- Tu veux aller te coucher ?
- Non j’arriverais pas à dormir… Lâche-t-il.
- Tu fais toujours des cauchemars ? Demande-je inquiet car je sais que cela le bouleversait à l’époque.
Mais au lieu de me répondre, il se redresse et voulu quitter la pièce. C’est en titubant qu’il se dirige jusqu’à sa chambre. Je sais que je ne dois pas l’aider, au pire, il ne risque que de se faire mal en tombant. Ce qui n’est pas bien grave. Mais… je ne suis pas du genre à ignorer les gens qui souffrent devant moi. Et c’est donc en soupirant que je me lève et que je me dirige vers lui. Je lui attrape le bras ce qui semble le surprendre :
- Tu fais quoi ? Me demande-t-il de sa petite voix fatiguée.
- Je t’aide à regagner ta chambre, lui réponds-je avec honnêté.
- Tu es trop gentil pour ton propre bien, constate-t-il.
- Je sais, Tony… Je sais…
Nous avons marché jusqu’à sa chambre et je prends soin de l’installer sur son lit. J’ouvre la couverture afin qu’il puisse s’allonger confortablement sur son matelas. Il semble mal en point et ce n’est pas uniquement à cause de la consommation excessive d’alcool qu’il a pris ce soir. Et le moins que l’on puisse dire c’est que je suis inquiet. Autant pour l’alcool dans lequel il semble avoir totalement replongé, mais aussi parce qu’il semble plus déprimé que jamais. Je remonte la couverture jusque sur ses épaules avant de lui souhaiter une bonne nuit. Puis alors que je vais partir, il m’attrape par la manche et me demande :
- Tu peux rester ?
Je ne sais pas comment réagir. Car même si j’en meurs d’envie, je ne peux pas rester. Ce ne serait pas bon pour lui, car si j’en crois Rhodes, c’est moi le problème. Et il faut l’avouer ce ne serait pas bon pour moi non plus. Je sais que si je viens à dormir avec lui, je ne pourrais pas m’empêcher de nourrir de faux espoirs sur une possible relation avec lui. C’est donc avec douceur que je lui réponds :
- Désolé Tony… Tu devrais dormir…
- Steve… Répond-t-il avec supplication.
- Ce ne serait pas raisonnable…
A ces mots, il me lâche le bras ce qui, je dois l’avouer, me surprends. Lui qui a toujours eu la niaque de se battre et qui a toujours été têtu, il est en train de lâcher prise. Cela ne lui ressemble pas. C’est pourquoi, malgré les avertissements de Rhodes, je m’installe à ses côtés. Surpris, il me demande d’une petite voix pleine d’espoir :
- Tu restes finalement ?
- Quand un ami a besoin de moi, je ne peux pas lui tourner le dos. Lui réponds-je. Tony, tu sais que tu peux me parler et que je serais toujours là pour toi.
- Tu ne l’as pas toujours été, me reproche-t-il.
- Je sais. Avoue-je.
- Désolé… Fait-il visiblement conscient de ce qu’il vient de me dire.
- Pourquoi tu te comportes comme ça ? Lui demande-je dans un murmure.
- Comment ? Répond-t-il intrigué.
- Avec Strange, dis-je en laissant s’exprimer ma jalousie.
Il ne me répond pas tout de suite et semble réfléchir. Je commence à m’impatienter devant cette absence de réaction. Finalement, au bout d’une minute qui me semble interminable, il me déclare :
- J’en sais rien… je… veux t’oublier…
- Tony… Dis-je en caressant son visage avec délicatesse.
Il se rapproche de moi et vient se blottir dans mes bras. Et c’est avec désespoir que je resserre mon étreinte autour de lui. Le sentir près de moi me fait un bien incommensurable. Et je n’ai aucune envie que cet instant se termine. Et, à mon plus grand soulagement, l’ingénieur semble s’endormir dans mes bras. Pour ma part, je ne bouge pas de la nuit. Je le garde collé à moi, le visage plongé dans ses cheveux afin de m’imprégner de son odeur. Et le moins que l’on puisse dire c’est qu’il m’a manqué durant ces deux années. Deux ans qui m’ont semblé interminables loin de lui. Et même si j’ai eu Sharon durant tout ce temps, elle n’a jamais réussi à me le faire oublier. Et ce n’est que maintenant que je réalise à quel point ma relation avec Sharon manque de sentiments. Car lorsqu’elle est allongée à mes côtés, je n’ai jamais ressenti ce sentiment d’apaisement que je ressens là maintenant. Et même si je sais que demain, Tony aura repris du poil de la bête, et qu’il sera à nouveau dur à mon égard, je profite simplement de cet instant.
Je dû m’assoupir puisqu’à mon réveil, je suis seul dans ce lit immense. Je me redresse et je cherche l’ingénieur du regard. J’aperçois la porte de la salle de bain entrouverte de laquelle filtre une lumière. Après un rapide coup d’œil au réveil, qui indique cinq heures, c’est inquiet que je me rends jusqu’à la porte. Je frappe avant d’entrer et je découvre l’ingénieur en train de s’habiller. Je lui demande :
- Tout va bien ?
- Oui, merci. Se contente-t-il de me répondre.
- Vous vous habillez déjà ?
- Je vais aller travailler un peu dans mon laboratoire.
- A cette heure-là ? Demande-je tout en ayant conscience des insomnies dont il souffre.
- Oui…
Puis un petit silence s’installe. Je ne sais pas quoi rajouter. En fait, j’ai peur de dire quelque chose qui pourrait jeter de l’huile sur le feu. J’aimerais tellement que notre relation s’apaise à défaut de redevenir ce qu’elle était. Que nous puissions nous voir et nous parler comme le ferait des adultes responsables. Mais on en revient toujours à nos vieux démons. Aux rancunes qu’il est impossible d’oublier. Et nos deux caractères finissent inlassablement par s’entrechoqué pour finir dans une violente dispute.
- Steve, je suis désolé…
- De quoi ?
- Pour hier soir, je n’aurais pas dû te demander de rester… S’excuse-t-il sans me lancer le moindre regard.
- Ne t’excuse pas, tu n’étais pas dans ton état normal. Réponds-je.
Il me lance un regard confus, sans doute s’attendait-il à une autre réaction de ma part. En même temps, cela peut se concevoir puisque ces derniers temps je n’ai pas fait preuve de patience à son égard. Étant sur les nerfs à cause de sa relation particulière avec Strange, je dois avouer que je me suis montré plus agressif qu’en temps normal. Mais là, son état m’inquiète donc je dois mettre mes griefs de côté et prendre soin de lui. Après ce que je lui aie fait, c’est la moindre des choses.
- Merci, fini-t-il par lâcher avant d’ajouter : Tu peux rester dormir ici si tu l’veux.
- D’accord
Puis il quitte la salle de bain sans un mot de plus. Quant à moi, je suis effectivement fatigué et je décide de retourner me coucher. J’hésite à rester dans sa chambre, mais je préfère regagner la mienne. Si on me voit sortir de la chambre de Tony ce matin, on me fera très certainement des réflexions que je n’aurais aucune envie d’entendre.
Durant les jours qui ont suivi, Tony est bien plus agréable avec moi. Et ce changement surprend tout le monde. Sam et Natasha étant même venu me voir afin de savoir s’il s’est passé quelque chose. Je lui explique que nous avons eu une petite discussion, et que depuis cela allait mieux, mais sans entrer dans les détails. Si Sam semble s’en contenter, la veuve noire elle se doute que je cache quelque chose. Mais elle ne me questionne pas directement, elle me fait comprendre que je peux venir lui parler. Toutefois, comme je ne le fais pas, elle semble s’impatienter et prend les devants. Ainsi, un soir elle vient s’installer à mes côtés tandis que je suis occupé à dessiner sur la grande terrasse des Avengers. Elle me déclare :
- Alors Steve, comment tu te sens ?
- Très bien et toi ?
- Je vais bien, me dit-elle d’une voix douce.
Puis je la vois passer sa tête au-dessus de mon épaule afin de regarder ce que j’esquisse. Malheureusement pour l’espionne, je ne fais que croquer le paysage que j’ai en face de moi.
- Tu dessines très bien, me fait-elle remarquer.
- Merci
- C’est rare de te voir dessiner un paysage, et pas une personne, lâche-t-elle l’air de rien.
- Qu’est-ce que tu veux savoir ? Lui demande-je avec un petit sourire amusé.
Et la jeune femme me sourit en retour. Car oui, si elle me connaissait bien, je peux affirmer après ces deux années passées ensemble quasiment tous les jours, que je la connaissais plutôt bien également.
- Il s’est passé quoi avec Tony ? Fini-t-elle par me demander.
- Avec Tony… Comment dire, il s’est passé des tas de choses.
- C’est secret ?
- Non, on ne peut pas dire ça, mais…
- Tu ne veux pas en parler ? Pourtant, tu peux tout me dire tu sais très bien que je ne te jugerais pas.
- En fait, je ne sais pas quoi faire avec lui…
- Parle-moi, et peut-être qu’ensemble on pourra trouver une solution. Suggère-t-elle.
- Il y a une semaine, je n’arrivais pas à dormir, donc je suis allé dans le salon. Histoire de regarder un peu la télévision… Commence-je.
- Et ? M’encourage la veuve noire.
- J’ai trouvé Tony qui était installé dans un fauteuil avec un verre à la main. Comme c’était tendu, je n’avais pas envie de lui parler, mais c’est lui qui s’est confié à moi.
- Il s’est confié à toi ? S’étonne-t-elle.
- Oui, et je peux te dire que j’étais aussi surpris que toi.
- Et il t’a confié quelque chose qui t’a perturbé ? Vous vous êtes réconciliés ? Demande-t-elle d’une traite.
- Réconcilié ? Je ne pense pas, mais, nos relations sont apaisées pour le moment.
- C’est déjà ça, dit-elle en glissant sa main dans mon dos.
- Mais je m’inquiète, ce soir-là, il était ivre. Et pas qu’un peu. Lui avoue-je. Et surtout, il semblait déprimé…
- Tu penses que c’est par rapport à ce qu’il s’est passé il y a trois ans maintenant ?
- C’est une certitude même. Confirme-je à la belle blonde. Il me l’a dit… et il m’a dit… qu’il voulait m’oublier…
- Donc c’est qu’il ne l’a pas encore fait ? Dit-elle avec un air malicieux sur le visage.
Je ne peux m’empêcher de sourire à cette déclaration. D’habitude c’est moi qui voit le bon côté des choses, mais pour une fois, cela me fait du bien qu’on me rappelle que tout n’est pas perdu.
- Je ne suis pas sûr qu’il m’aime encore, mais plutôt qu’il est toujours attaché à moi.
- S’il ne t’aimait plus, il ne se mettrait probablement pas dans des états pareils.
- Natasha… Je… je n’aurais jamais pensé le faire souffrir comme ça… Tu sais quand je l’ai vue dans cet état, je me suis dit que je ne devais pas m’en mêler tu vois. Que c’était pas à moi de faire ça, surtout après tout ce qu’il me balançait au visage. Mais… Quand je l’ai vue dans cet état là…
- Tu es trop gentil, s’exclame la plantureuse blonde.
- Il me l’a dit aussi…
- C’est vrai ? S’étonne-t-elle.
- Oui…
- Et donc tu as fait quoi pour lui remonter le moral ? Me recadre-t-elle.
- Après ça… il semblait mal donc je lui ai suggéré d’aller se coucher. Mais comme il titubait, je l’ai raccompagné à sa chambre.
- Vraiment ? Fait-elle l’air malicieuse.
- Oui, et évidemment, il m’a demandé de rester toute la nuit. Mais on a juste dormi ! Devance-je sa question.
Elle resserre son étreinte autour de moi sans rien me dire. Et je dois avouer que cela me soulage. Je n’avais pas envie d’avoir de remarque, car je m’en veux déjà d’avoir cédé. Même si au final, cela a améliorer nos relations, j’ai peur que ce ne soit que superficiel, et c’est pratiquement sûr qu’à la moindre occasion, nous allons retomber dans nos mauvais travers.
- Tu sais, je pense qu’en réalité, ce n’est qu’une question de temps avant que tout s’envenime à nouveau…
- C’est probable, approuve la jeune femme. Si vous n’avez pas réglez vos problèmes…
- Et surtout, je ne vais pas pouvoir fermer les yeux sur son comportement.
- Je ne suis pas sûre qu’il soit prêt à t’écouter, me prévient-elle.
- Je le sais bien. Seulement, je suis censé faire quoi ? Ne rien dire quand il boit comme ça ? Faire comme s’il allait bien alors que je sais que ce n’est pas le cas ? Je sais qu’il n’a pas envie de se confier à moi… et que je suis l’origine du problème… Mais, je peux pas l’ignorer. Et surtout je ne peux pas faire comme si de rien n’était…
- Tu n’as jamais été le genre de personne à faire comme si de rien n’était… Approuve-t-elle.
- Malheureusement, je l’ai fait une fois et vue ce que ça a engendré, je…
- Tu as fait une erreur, mais cette fois je suis là pour te conseiller, non ?
- Et tu me conseilles quoi ? Demande-je avide d’avoir son avis.
- Prend soin de lui. Même s’il ne le veut pas. Il n’a jamais voulu d’aide, mais au bout du compte, il est reconnaissant envers ceux qui prennent soin de lui.
- C’est pas faux…
Après tout, nous sommes sortis ensemble parce que j’ai commencé à prendre soin de lui. Et il était loin de le vouloir à l’époque. En effet, déjà j’avais remarqué qu’il buvait plus que de raison, et qu’il avait besoin de quelqu’un pour arrêter et nous avions réussi. Enfin, jusqu’aux accords de Sokovie qui a tout chamboulé dans nos vies. Si je ne sais pas à partir de quand il s’est effectivement remis à boire mais notre rupture, ou ma désertion, en tous les cas, cela n’a pas dû l’aider à garder sa sobriété intacte. Et dans un sens Natasha a raison sur plusieurs points. De un, je ne suis pas capable de fermer les yeux en face de quelqu’un qui souffre. Et de deux, j’ai promis à Tony de l’aider et de le protéger. Et au final, c’est à moi qui l’a fait souffrir et donc c’est à moi de l’aider à se relever.
- Tu as raison…
- Ce sera difficile, me prévient-elle.
- Je sais, il sera pire que jamais.
- Et il y aura Strange…
- Je l’avais presque oublié ce type, grogne-je.
- Oui, et surtout, je ne pense pas que Strange soutienne les meilleurs aspects de la personnalité de Stark.
- C’est sûr, il l’encourage à boire et à faire la fête. Peste-je.
- En même temps, avec Tony leur relation est basée… sur l’amusement va-t-on dire…
- Ça c’est le moins que l’on puisse dire…
Déjà que je n’aime pas Strange, et que leur relation me rende jaloux. C’est le moins que l’on puisse dire. Mais en plus, je partage l’avis de Natasha. Il est là pour s’amuser et il s’en fiche totalement de Tony. La seule chose qui semble lui donner du plaisir, c’est de me voir m’énerver, et surtout il semble tout faire pour nous séparer.
- Tu penses que Strange aime Tony ? Finis-je par demander à Natasha qui est en générale perspicace pour ce genre de chose.
- Ce que je peux te dire, c’est que Tony ne l’aime pas. Strange ? C’est plus difficile à dire. Me dit-elle en réfléchissant. Je ne sais pas s’il l’aime, mais je pense qu’il l’apprécie beaucoup, et qu’il apprécie la liberté que Tony lui laisse tout en profitant des avantages…
- Mais tu penses qu’il est amoureux ? Redemande-je.
- Je ne sais pas, conclue-t-elle. Je ne veux pas te dire de bêtises…
- Je comprends… Il est assez difficile à cerner, approuve-je.
Si je suis heureux que Natasha me confirme que Tony n’aime pas Strange, mais je reste confus quant aux sentiments de Strange à l’égard de Stark.
En tous les cas, une chose est sûre : ma relation avec Tony va encore connaître des hauts et des bas. Je ne sais pas si on pourra s’en relever un jour, mais j’ai besoin de l’aider. Je ne peux pas le laisser souffrir comme ça. Au-delà de la colère que je ressens quant à son comportement de ces derniers temps, l’amour que je lui porte est plus fort que ça. Plus fort que tout et je dois faire en sorte qu’il le comprenne.
A suivre
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Bonjour, Bonsoir,
Voici le dernier chapitre de l’amour au-delà de la haine ! J’espère qu’il vous aura plu ! Si tel est le cas, n’hésitez pas à me le dire en commentaire !
Je tenais à remercier également tous ceux qui ont laissé des commentaires sur ce fiction ! Merci à vous !
Si vous avez apprécié cette fiction, sachez que l’histoire « le principe de réciprocité » se déroule en même temps mais du point de vue de Peter Parker et qu’elle est enfin terminée. Avec bien sûr des scènes inédites. Alors n’hésitez pas à aller y faire un tour !
Sur ce, je vous souhaite une bonne soirée et une bonne lecture !
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[1] Référence aux derniers chapitres de l’amour n’est pas un long fleuve tranquille où Steve apprend que Barnes a tué les parents de Tony et décide de ne pas prévenir l’ingénieur.