Un combat de tous les instants

Chapitre 15 : A la rescousse

3548 mots, Catégorie: K+

Dernière mise à jour 08/11/2016 14:52

Marion sursauta lorsqu'une sonnerie brisa le silence. Elle commençait tout juste à saisir les bases la méditation quand son portable décida de l'interrompre. Il ouvrit précipitamment les yeux et maître Splinter, à ses côtés, l'imita. Elle s'empressa de s'excuser :

- Je suis désolée. Il était censé être en mode silencieux, mais c'est le signal d'urgence. Oh non ! C'est Raphaël, il a enclenché l'émetteur de son T-Phone, afin qu'on puisse le localiser. Il faut que j'y aille !

- Est-il bien prudent pour toi de partir seul ? s'enquit le rat mutant. Tu ne connais pas les égouts et qui sait ce qui peut t'attendre là-bas. Tu as du potentiel, Marion, mais tu manques encore d'expérience et...

- Je sais, maître, mais j'avais déjà toutes les peines du monde à rester ici les bras croisés jusqu'à présent, alors ça ne va pas s'arranger. Il faut que j'y aille. Casey et lui sont sûrement en danger, et qui sait si les autres ne le sont pas également ? Ils ont peut-être besoin de moi.

La lueur déterminée qui brillait dans ses yeux convainquit Splinter de ne pas insister. La décision de la jeune fille était déjà prise. Quoi qu'il dise, quoi qu'il fasse, il ne saurait la dissuader d'aller porter secours à ses amis. Qui plus est, la loyauté était une qualité qu'il chérissait trop pour la condamner.

- Bonne chance, Marion. Sois prudente.

- Je n'y manquerai pas, affirma-t-elle.

Elle ramassa sa rapière qu'elle avait posée sur le sol avec son fourreau au moment de s'asseoir sur le tatami, puis la fixa autour de sa taille. Armée, elle s'élança en courant hors du dojo, bien décidé à prêter main forte aux autres.

***

April souleva la tête de Donatello pour la poser sur les genoux. Le choc qu'avait subi la tortue, désormais inconsciente, avait été si violent qu'elle redoutait qu'il ne souffre d'une commotion cérébrale. Elle caressait machinalement son front en l'implorant de reprendre ses esprits, mais cela se soldait par un échec.

- Je n'y connais rien, moi, en locomotion céréale ! gémit Mikey. Il faut le ramener à maître Splinter, il saura quoi faire. Leatherhead, est-ce que tu...

La tortue n'eut pas le temps d'achever sa phrase. À sa ceinture, son T-Phone se mit à vibrer et à sonner. Celui de Donnie et le portable d'April réagirent en même temps. Il s'agissait du signal d'alerte, ce qui voulait dire que l'un de leurs amis étaient en danger.

- Raph ? s'étonna Michelangelo en ouvrant des yeux ronds. Ça doit vraiment être la cata pour qu'il consente à appeler du secours, lui qui est orgueilleux comme personne. Il faut aller l'aider.

- Et Donnie ? interrogea l'adolescente.

- Rah ! Pourquoi est-ce qu'il n'y a jamais un chef pour prendre les décisions quand on en a besoin ?

Il prit son visage entre ses mains et le secoua violemment, en quête d'une solution. Mikey n'était pas le plus doué de la bande pour élaborer des plans, pour réagir en cas d'urgence, ni même pour combattre. Que pouvait-il bien faire dans une telle situation ? Plus il réfléchissait et plus il avait l'impression de sentir son cerveau s'enflammer.

La sonnerie de son T-Phone retentit derechef alors qu'il se sentait sur le point d'exploser. Il vit apparaître la photo de Marion sur l'écran, à laquelle il avait ajouté de nombreuses images de chaton, et s'empressa de décrocher.

- Oh, quelle chance, tu réponds ! s'exclama-t-elle aussitôt.

Sa respiration était saccadée, preuve qu'elle était certainement en train de courir ou, tout du moins, qu'elle avait réalisé un effort physique intense au cours des dernières minutes. Michelangelo activa le haut-parleur afin qu'April puisse également entendre leur conversation.

- J'ai essayé de joindre Léo sur son T-Phone, mais il ne décroche pas. Il a sans doute dû l'éteindre. J'ai reçu un signal d'alerte de Raph, je suppose que vous aussi ?

- Oui, il y a une minute à peine.

- Nous avons un léger décalage, alors, car ça en fait au moins cinq que j'ai eu l'alerte.  Je suis déjà en chemin. Où est-ce que je peux vous retrouver ?

- Je n'ai pas activé le pistage GPS. Est-ce que tu sais où est Raphaël ?

- Toujours au même endroit, pas très loin d'une galerie de métro, ce qui m'emmène à penser qu'il est soit inconscient, soit prisonnier, soit qu'il a lâché son T-Phone. Si c'est le cas, il faut le retrouver au plus vite.

- Marion, l'interrompit April. On a un gros problème, ici aussi. On vient de rencontrer l'ami de Mikey, Leatherhead, et disons pour faire court qu'il y a eu une altercation. Donnie est inconscient, il faut le ramener au repaire, pour que maître Splinter puisse s'en occuper.

Le silence se fit à l'autre bout du fil. L'adolescente était visiblement en train de chercher une solution. Michelangelo voulut reprendre la parole, mais April l'en dissuada d'un geste, afin de laisser à Marion le temps de réfléchir. Elle reprit la parole quelques secondes plus tard pour s'enquérir :

- Leatherhead, c'est bien le crocodile géant, celui qui tape indifféremment sur ses alliés et ses ennemis ?

- Lui-même. Tu verras, tu vas l'adorer.

- Non, je ne verrai pas. Je crois que le plus sage, c'est que tu ailles avec lui aider Raphaël et potentiellement Casey, car il ne répond pas non plus. Pendant ce temps, je rejoins April et nous nous chargerons ensemble de rapatrier Donnie jusqu'au repaire. Envoie-moi un message avec tes coordonnées.

L'adolescente à la queue-de-cheval rousse devança Michelangelo et rédigea un rapide SMS à l'intention de Marion, lui indiquant leur position exacte. Il lui fallut près d'une minute pour être reçu. Le réseau était piètre, dans une zone aussi reculée des égouts, raison pour laquelle le SOS de Raphaël leur était parvenu plus tard qu'elle.

- C'est bon. Je serai là dans une dizaine de minutes. Fonce, Mikey !

- Bonne chance, sois prudente.

La tortue mit un terme à la conversation et se tourna vers Leatherhead, qui lui adressa son légendaire sourire crocodilien. À la place de Michelangelo, n'importe qui aurait été terrifié, mais pas lui. Il aimait trop son vieil ami pour avoir peur de lui.

- T'as entendu, mon pote ? T'es prêt pour une mission en duo, comme dans la dimension X ? Rien que toi, moi et quelques méchants à fracasser.

Le mutant répondit par un grognement affirmatif et ses pattes griffues se serrèrent en poings. À l'instar de Raphaël, dès qu'il était question d'aller au combat, il était toujours partant. Qui plus est, cela l'aiderait à se racheter du sort qu'il venait d'infliger, une fois encore, à ce pauvre Donatello.

***

Léonardo se jeta sur le côté juste à temps pour parvenir à échapper à l'attaque de Karai. Ses crocs le frôlèrent, mais ne le blessèrent pas. Il poussa un soupir de soulagement en constatant que cela s'était joué à quelques centimètres près, mais ne cria pas victoire pour autant. La mutante le fixait de ses yeux luisants, prête à repasser immédiatement à l'action.

- Karai, arrête ! Je ne suis pas ton ennemi et je n'ai aucune envie de me battre contre toi. Est-ce que tu te rappelles de moi ? Je suis Léo, et toi, tu es mon amie, la fille de maître Splinter.

La fille-serpent semblait déterminée à ne rien entendre. Elle essaya de le frapper avec sa queue, mais il exécuta un salto arrière qui le plaça temporairement hors de sa portée. Karai émit un sifflement de mécontentement.

- Ne m'oblige pas à te faire du mal, je t'en prie. Je veux seulement t'aider.

Léonardo attrapa un second mouchard, qu'il activa. La kunoichi pourrait difficilement être plus proche de lui qu'elle ne l'était en cette instant et c'était une occasion à ne pas manquer. Il jeta le traceur dans sa direction, mais alertée par son geste, Karai le repoussa avec l'un de ses appendices buccaux qui lui servaient de patte.

La tortue grimaça. Il lui en restait plus qu'un, désormais, ce qui signifiait qu'il n'avait plus le droit à l'erreur. Comment allait-il parvenir à l'accrocher aux écailles de la mutante quand celle-ci avait l'intention de lui livrer la plus farouche des défenses ?

Avant qu'il n'ait eu le temps de réfléchir à une solution, elle le chargea, crocs en avant. Il n'eut pas d'autre choix que de se saisir de l'un de ses ninjatos pour repousser ces pointes luisantes et acérées avant qu'elles ne le déchiquettent. Karai résista quelques secondes, mais finit par reculer.

Léo allait devoir la prendre par la ruse, mais comment ? Elle avait été toujours plus maligne que lui et son côté serpent paraissait l'avoir rendue plus fourbe que jamais. Tout en parant ses assauts vifs et violents les uns à la suite des autres, il continuait à lui parler, dans l'espoir d'atteindre une parcelle de son subconscient qui serait encore fonctionnelle.

- Karai, tout ce que je fais, je le fais pour toi, alors je t'en conjure, permets-moi de te venir en aide. Tu n'en as peut-être pas conscience, mais tu en as besoin. Tu ne peux pas rester comme ça et moi... Moi, je voudrais que tu reviennes.

La kunoichi était sur le point de lui porter une nouvelle estocade lorsqu'elle s'immobilisa. Léonardo en fut le premier surpris, car il ne s'attendait pas à ce que cela fonctionne. Elle poussa un petit sifflement attristé, qui convainquit la tortue d'abaisser son arme pour se rapprocher d'elle.

- Tu sais que tu peux avoir confiance en moi, murmura-t-il.

Il ignorait combien de temps elle demeurerait aussi calme qu'elle paraissait l'être en cet instant, aussi n'avait-il pas une seconde à perdre. Il saisit le dernier traceur en sa possession, puis étendit la main en direction de Karai, le mouchard soigneusement dissimulé dans le creux de sa paume.

Elle ne bougea pas lorsqu'il lui effleura la joue. Au contraire, elle ferma les yeux, comme si cette caresse la rassurait. Était-elle en train de retrouver un semblant d'humanité ? Si tel était le cas, son instinct bestial ne tarderait pas à reprendre le dessus. Léo approcha ses doigts du sommet de son crâne mais, au moment d'y implanter le traceur, Karai releva brutalement la tête.

Ses crochets se refermèrent de son avant-bras tandis que sa main tout entière disparaissait dans la gueule de la mutante. Il poussa un hurlement de douleur en sentant ses appendices acérés transpercer ses écailles. Sa souffrance fut telle qu'il lâcha le mouchard au fond du gosier de Karai, avant de se dégager.

Pour y parvenir, il dut lui asséner un puissant coup de pied dans le ventre. Agir ainsi lui déplut fortement, mais à la vue de la situation, il ne pouvait pas faire autrement. La kunoichi recula en rampant, avant de plonger dans l'eau. Léonardo voulut crier pour la retenir, mais le seul son qui sortit de sa bouche fut un gémissement.

Son bras était mal en point. Karai produisait visiblement un venin avec lequel elle l'avait contaminé, car les trous dans lesquels ses crocs s'étaient enfoncés commençaient déjà à suinter. Même s'il n'éprouvait pour l'instant aucun symptôme en dehors d'une cuisante brûlure, il devrait prendre rapidement un antidote. Pour cela, il allait avoir besoin de Donatello.

***

La première chose que Raphaël sentit en revenant progressivement à lui fut la douleur. Chacun des muscles de son corps lui faisait mal, à cause des coups que lui avaient infligés les mutants de Shredder. Il se sentait totalement groggy, au point de ne pas réussir à esquisser le moindre geste.

En ouvrant les yeux, au bout de quelques minutes, il s'aperçut qu'il y avait une autre explication à cela. S'il ne pouvait pas bouger, c'était surtout parce que de lourdes chaînes enroulées autour de son corps l'immobilisaient. Il tenta de s'en dégager, mais le métal était solide, et surtout bien trop serré.

Casey était attaché avec lui. Il se trouvait juste dans son dos et, apparemment, il était toujours inconscient, au contraire de Raphaël. En plus de tout cela, ils étaient suspendus à un crochet, qui saillait hors de la voute des égouts, juste au-dessus d'un tourbillon d'eau. Même s'ils parvenaient à se libérer, ils réaliseraient un plongeon forcé dans ce maelström souterrain.

- Tu perds ton temps, tortue. Tu ne t'échapperas pas.

Raph sursauta en entendant cette voix. Affairé à étudier la situation complexe dans laquelle son partenaire et lui se trouvaient, il n'avait prêté aucune attention aux trois silhouettes situées sur la rive en béton. Fishface, Rahzar et Tiger Claw l'observaient, une leur sadique brillant dans leur regard.

- Tu ferais bien de commencer à appeler du secours, conseilla le tigre géant. D'ici peu, les sons que tu pourras produire avec ta bouche risquent d'être... Comment dire ? Noyés.

Sa patte griffue se posa sur un levier encastré dans un mur, qu'il actionna. Aussitôt, un bruit de ferraille et d'engrenages en mouvement résonna aux alentours. Une secousse ébranla la chaîne qui reliait Raph et Casey au crochet. Il n'en fallut pas davantage à la tortue pour comprendre ce qui se passait.

Ils se rapprochaient du tourbillon aquatique, lentement, mais sûrement. C'était le plan de Tiger Claw. Il les menaçait d'une mort lente, afin de laisser à Karai le temps de venir les sauver. Raphaël savait d'ores et déjà que c'était peine perdue. Même si la mutante était encore elle-même, elle ne l'avait jamais assez estimé pour risquer sa vie pour lui. Quant à Casey, elle le connaissait à peine.

Il s'abstint toutefois d'en faire la remarque à ses geôliers, car ceux-ci risqueraient d'accélérer sa descente vers le maëlstrom. Combien de temps était-il resté inconscient ? Les autres avaient-ils reçu son message d'alerte ? Il avait perdu son T-Phone dans le combat, aussi le signal GPS n'émettait-il pas au bon endroit. Parviendraient-ils malgré cela à le retrouver avant qu'il ne soit trop tard ?

- Qu'est-ce que tu attends, la tortue ? gronda Tiger Claw. Crie.

- Il n'en est pas question, répliqua Raphaël en pointant le menton en direction du plafond, dans une attitude dédaigneuse. Pourquoi est-ce que je coopérerais avec vous pour vous permettre d'attraper Karai, alors que vous prévoyez de nous noyer ?

- Si c'est comme ça que tu le prends, ne t'inquiète pas. On a plein d'idées pour entendre ta jolie voix, affirma Fishface avec un sourire mauvais qui dévoila plus encore ses crochets pointus.

Il se saisit d'un objet, visiblement suspendu jusqu'alors à ses redoutables pattes mécaniques, qu'il point en direction de Raphaël. Il s'agissait d'un pistolet électrique, avec lequel il infligea à la tortue au bandeau rouge une décharge de plusieurs voltes. Il serra les dents pour ne pas hurler et réussit tant bien que mal à résister à la douleur. Dans son dos, Casey s'agita. Le voltage l'avait ramené à lui.

- Eh, mec, où est-ce qu'on est ? s'enquit-il d'une voix pâteuse.

- Dans de sales draps...

La réponse de Raph permit à Fishface de s'esclaffer, au contraire de Rahzar et de Tiger Claw qui gardait leur sérieux. Cette fois, ce fut le tigre mutant qui dégaina son pistolet laser et le pointa dans leur direction. Raphaël réussit à s'agiter suffisamment pour réaliser un mouvement de balancier avec le crochet auquel ils étaient suspendus pour échapper au tir.

Casey, lui, ne cessait de gémir. Le frottement des chaînes sur son torse, lacéré par les griffes de félin géant, devait être terriblement douloureux. Malgré cela, il ne protesta pas. Sans doute n'était-il pas encore suffisamment revenu à lui pour prendre conscience de leur fâcheuse posture.

Raphaël se pencha vers l'avant afin d'observer le tourbillon sous lui. Ils continuaient à s'en rapprocher. Au rythme où ils perdaient de l'altitude, ils seraient sans doute entièrement immergés d'ici une quinzaine de minutes, vingt tout au plus, à moins que les sbires de Shredder n'en décide autrement.

Dans un cas comme dans l'autre, il était convaincu d'une chose : si les autres n'arrivaient pas très vite à leur secours, c'en serait fini de Casey et de lui. Il était tellement désespéré que, pour un peu, il aurait même été heureux de voir apparaître Mikey, mais hélas, personne ne volait encore à leur secours.

Il ferma les yeux et se concentra. Tant qu'il lutterait contre l'envie de crier, il y avait une maigre chance pour que Tiger Claw et ses acolytes décident de prolonger leur temps de vie, afin de mettre toutes les chances de leur côté pour capturer Karai. Il craignait cependant que Casey ne se montre pas aussi résistant que lui. Le pauvre avait été déjà bien amoché au cours du combat dans lequel ils avaient été vaincus.

De toute manière, il ne leur restait rien d'autre à faire qu'attendre, puisque leur situation ne leur permettrait pas de s'en sortir par eux-mêmes. Ils devaient s'en remettre totalement aux bons soins de leurs amis, en priant pour que ceux-ci n'arrivent pas trop tard.

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