Ode au Chaos

Chapitre 7 : Acte II - Scène 2

3381 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 28/06/2024 16:06

Acte II - Scène 2

« Quelle inspiration ! »


« Qu'est-il arrivé à cette chevelure ? »

Sans même me tourner vers lui, je sentis son regard glisser le long de mon corps, me nouer la gorge, me broyer les entrailles comme si le monde entier m'écrasait de tout son poids. Lui répondre m'était impossible, mes yeux s'étaient verrouillés sur ce masque.

« Hirose ! m'interpella subitement la voix approchante de Zed . »


Sa main agrippa brutalement mon bras cuivré. Il m'avait trouvé, lui aussi. Sous son capuchon rougeâtre et ses sourcils froncés, ses yeux rouges m'interrogeaient et son inquiétude fit écho au timbre de sa voix :

« Kayn t'as laissé partir ? »


Je plongeai dans son regard attentif, inerte, tandis que mon esprit me martelait : 

Dis-lui, Hirose ! Dis-lui que Jhin est ici ! Dis-le lui maintenant !

« Tout va bien ?! (il me sonda) Hirose ?! »


Je discernai une once de panique se dissoudre dans le carmin de ses yeux. Pourtant, je restai muette, impuissante, incapable d'ouvrir la bouche comme si je ne comprenais plus rien à mon propre corps. J'avais surestimé ma capacité à résister à l'effroyable emprise de mes sentiments pour Jhin. 

Les doigts de Zed se resserrèrent sur mes épaules et au même instant, la douce mélodie d'une valse s'éleva. Était-ce la mort qui nous invitait à danser ?

« Hirose ! Dis quelque chose ! »


Zed me secoua soudain avec virulence. Sa poigne me libéra brusquement de ma torpeur :

« Zed ! haletai-je. Jhin est... il est... (je tournai la tête en direction de la provenance perçue de sa voix) juste là... »


Personne.

« Tu l'as vu ? s'étonna Zed.

— Il m'a parlé... balbutiai-je. Je crois... »


Soit Jhin avait disparu, soit je l'avais halluciné. Pourtant mon cœur demeurait inapaisable. Un présentiment étrange mais familier me parcourait de la tête aux pieds. La terre s'apprêtait à gronder. Je le savais. Je le sentais. C'était dans l'air.

« Zed ! s'écria une femme en l'abordant dans la précipitation. Shen est ici, faut pas traîner ! »


Elle portait une tunique bordeaux et ses cheveux rouges étaient tirés en une longue queue de cheval. Ses iris vertes flamboyantes au centre de son maquillage noir me toisèrent. Elle hoqueta de surprise :

« Qu'est-ce qu'elle fait là ?

— Peu importe, répondit Zed. On se tire. »


Zed me saisit le poignet tandis que mon esprit, obnubilé par la valse, s'agitait toujours davantage.

« Viens, m'ordonna-t-il. 

— Attend... suppliai-je. Cette musique...

— Il faut partir ! insista Zed. »


Je fermai les yeux un instant et laissai la musique me porter, saisissant un repère... et un, deux, trois, quatre...

« Zed ! m'écriai-je. C'est une valse à quatre temps... (mon souffle se saccada et je croisai son regard angoissé)

— Quoi ?! ... T'as bien dit quatre ?

— La représentation va commencer... murmurai-je en frémissant. »


Soudain, la musique cessa. Au même moment un enchaînement d'explosions détonna. Le sol trembla. Quatre ondes de choc sur ma droite, quatre sur ma gauche. La foule s'agita en un immense chaos. Certains hurlaient, d'autres s'écroulaient dans la précipitation. Les yeux rivés sur eux, mon souffle accéléra : la toile prenait forme. La poigne de Zed se referma sur mon poignet. 

« Hirose, disparaît et quitte cet endroit, retourne à l'auberge ! me somma-t-il. »


Subitement, il lâcha prise et me poussa d'un coup sec de sa paume de main sur ma poitrine. Je tombai à la renverse quelques mètres plus loin, le souffle coupé. Lorsque je redressai la tête, Zed parait les assauts d'un homme vêtu d'un uniforme de l'Ordre Kinkou. Je m'invisibilisai avant de me relever à la hâte. J'analysai un peu plus en détails ce mystérieux assaillant et le reconnu aux deux sabres qu'il portait dans son dos : Shen.

Un coup de feu retentit. Juste derrière moi, un homme s'écrasa au sol dans un bruit sourd et une fleur s'ouvrit sur son torse, éclaboussant la nuit de couleurs vives. Je ne pu résister. J'étais imperceptible, personne n'en serait témoin, pourtant je plaidais intérieurement coupable d'apprécier ce sanglant tableau. Un second coup de feu et une balle éclata comme un coup de pinceau sur une femme à proximité. Elle s'effondra dans une harmonieuse aquarelle aux nuances délicates de sang et d'éclats scintillants. Je l'admirai quelques secondes et, le cœur palpitant, je relevai la tête à l'affût de la prochaine cible.

« Trois... murmurai-je. » et une balle occis sa troisième cible dont la poitrine se déploya comme une fleur de lotus sous le soleil Ionien. Ma respiration s'accéléra encore. Le tempo si précis de cette symphonie m'enivrait.

« Et... quatre, soupirai-je » à l'instant même où un paysan fut touché d'une balle en pleine tête.

Le diable pouvait bien m'emporter si je n'avouais pas que ce spectacle m'émerveillait. Je ne m'extasiais pas de la terreur qui animait la foule ni même de la puissance destructrice de son inspiration morbide. Non. Encore une fois : Un. Deux. Trois. Quatre. Quatre balles pour quatre victimes, autant de chef-d 'œuvres qui s'ajoutaient à cette cruelle mais si éblouissante composition. 

Je m'enivrais de son œuvre, de son spectacle que je vivais en première loge. Je lâchai malgré moi un soupir d'exaltation, sans doute la seule en ce lieu à secrètement espérer accueillir la prochaine balle de l'Artiste

Un hennissement au loin parvint jusqu'à moi. Les tirs cessèrent mais d'immenses brasiers provoqués par les explosions formaient un véritable labyrinthe de flammes. Jhin mettait les voiles, c'était certain. Je me hâtai en direction de l'attache où j'avais laissé ma monture. Mais très vite, la foule affolée m'emporta, portée par l'adrénaline et l'instinct de survie. Instinct qui me manquait fatalement face aux œuvres de Jhin. 

Brutalement bousculée, je tombai à genoux dans le terre humide. Sous l'impact de la chute, mon invisibilité se déroba. Sur ma droite, un enfant en bas-âge s'égosillait entre ses longs sanglots. Trois ou quatre ans, il n'en faisait guère plus. Ses joues rougies parsemées de larmes, de boue et de sang frais m'emportèrent dans ce lointain souvenir. Je la sentais encore sur mes joues. Oui, je la sentais, la chaleur du sang qui gicle du corps de mes proches découpés en morceaux. Mon seul repère défait en une fraction de seconde, désassemblé pour exhaler la putréfaction, ce à quoi nous étions tous destinés. Tous, sauf ceux qui mourraient de la main de l'Artiste

Une quinte de toux me ramena à la réalité. La fumée s'étendait dangereusement et le piétinement des fuyards horrifiés qui ne parvenaient pas à m'éviter se firent douloureux. Je me relevai rapidement et saisis le garçon sous les bras le caler contre moi. Il s'agrippa à mon cou de toutes ses forces. J'aggravais ma situation, je savais qu'inévitablement il me ralentirait, pourtant, c'est ce que j'aurais aimé que quelqu'un fasse pour moi ce jour-là : me sortir de l'enfer.

Je pris quelques instants pour réfléchir : Jhin avait toujours plusieurs coups d'avance. Si la foule désemparée se ruait dans un sens, c'était calculé. Alors je m'élançai contre flux, bien visible cette fois. Je luttai et tentai de percer des ouvertures à coups d'épaule, d'esquiver tant que possible les hystériques qui fondaient vers moi en rafale déchaînée. J'ignorais si la puissance des Ombres avait un lien avec l'agilité et l'anticipation dont je pu faire preuve durant ma course, mais je réussis à me faufiler à grandes enjambées jusqu'à la source de cette panique : un immense incendie barrait la sortie du festival de toutes parts.

Misère. Si je pouvais contrôler les fluides, il m'était en revanche impossible de maîtriser le feu. Il me fallait l'éteindre, du moins en partie. De l'eau ? J'étais bien trop éloignée des quais, à cette distance, je ne sentais pas la moindre perle d'eau du fleuve. En revanche, je ressentais bien des fluides, non loin de moi. Je jetai un coup d'œil en arrière : des corps sans vie, probablement soufflés par les explosions, s'étalaient dans l'herbe, disposant d'une quantité de sang dont je devrais me contenter.

« Ferme les yeux, petit... murmurai-je, un peu embarrassée. »


Je me concentrai et puisai sans ménagement la totalité du sang des défunts, le guidant en un seul flot pour le déverser sur les flammes. Dans un bruit d'ébullition, le sang étouffa le feu dans un nuage de vapeur crépitant, assez pour y ouvrir un petit passage. Je resserrai ma prise sur l'enfant et me précipitai à travers la fumée. Nous étions dehors, indemnes. 

Je regagnai rapidement l'entrée par laquelle j'étais arrivée. Par chance, elle était quelque peu épargnée par l'embrasement général. Mon cheval, pris de folie, luttait contre ses liens de toute sa frénésie. Je me précipitai vers lui.

Je reposai le petit au sol. A présent hors d'atteinte de la scène de Jhin, il ne craignait plus rien. Il s'accrocha aussitôt à mes jambes de toutes ses forces, le corps secoué de sanglots. Je tentai de le rassurer d'une caresse sur la tête.

« Cache-toi, et attend que tout soit fini. Ferme les yeux et quand tu n'entendras plus rien, trouve Shen. Il saura peut-être où sont tes parents, d'accord ? »


Le petit partit en sanglots de plus belles et je m'agenouillai pour le serrer contre moi.

« S'il te plaît, fais ce que je t'ai dit. Quelqu'un d'autre compte sur moi, je dois partir, tu comprends ? »

Il sécha brièvement ses larmes et couru se cacher dans un bosquet où s'assit sagement, ferma les yeux et posa ses mains sur ses oreilles. 

Désolée.

Ne perdant pas plus de temps, je me précipitai alors vers le cheval affolé pour tenter de le calmer. Ce fut peine perdue, évidemment. Il s'agitait dangereusement, d'instinct. Il voulait fuir. Ses puissants sabots s'élevaient et frappaient le sol à tour de rôle. Je saisis l'enrênement pour le détacher et le maintenus fermement pour l'empêcher de détaler. 

J'eus tout juste le temps de me hisser en selle qu'il décampa au triple galop. Sa vitesse folle couplée à un virage serré me fit perdre l'équilibre. Je me rattrapai de justesse à son encolure. Secouée de haut en bas, d'avant en arrière, je me hissai à la force des bras pour me repositionner sur son dos. 

Je serrai les mollets de toute ma force pour me maintenir en selle. Impossible de songer à le calmer. Mais un léger coup de rêne sur ma droite m'assura que je pouvais toujours le diriger. Il s'élançait vers le port et je veillai tant que possible à esquiver les arbres, les rochers et autres obstacles apparaissant au dernier moment. Malgré la sauvagerie de ma monture, j'avais déjà une idée en tête : Jhin devait sans doute admirer sa propre représentation depuis un lieu sûr.

Le cheval faisait une véritable démonstration de puissance, les oreilles plaquées en arrière, il fila à toute vitesse vers les quais. Un petit navire quittait lentement le port. Sur le pont le plus haut du bateau, je discernai une silhouette observer le festival à feu et à sang à travers une longue vue. A mesure que j'approchai, je le distinguai mieux encore : c'était un homme en tenue traditionnelle dorée, bleue et bordeaux. Il portait un masque blanchâtre surmonté de deux petites cornes rouges, lui donnant l'allure d'un démon. Je plissai les yeux tandis que la distance entre nous se réduisait rapidement : il disposait de trois prothèses de métal, un bras et deux jambes. C'était lui ! A cet instant, je compris qu'aucune hésitation ne m'était permise. Malgré l'état de panique de ma monture qui précipitait notre course vers le fleuve, je décidai de tout tenter sur ce coup et de ne pas la ralentir. Nous entrâmes sur le port. Les sabots claquèrent frénétiquement sur les lames du ponton. 

« Calme-toi, maintenant ! Arrête-toi ! »


Trop tard, je tirai sur ma rêne droite d'un coup sec quitte à lui arracher la bouche. Aussitôt, il pila et je fus instantanément éjectée de ma selle. Je fis un vol plané par dessus la tête du cheval, bloquai ma respiration et finit ma chute dans l'eau.

Le froid du fleuve me saisit et je regagnai péniblement la surface pour reprendre mon souffle. Je me tournai vers le petit navire qui s'éloignait sur le Ghajan. Je créai alors un courant rapide jusqu'à lui, et m'y laissai glisser à la nage. Il me fallut moins d'une minute pour atteindre l'échelle sur son flanc, la saisir et me hisser à bord dans un dernier effort. 

Trempée et épuisée, je me redressai en me cramponnant au bastingage. Une rafale de vent m'arracha un frisson. Aussitôt, d'un geste de main, j'extirpai l'eau de ma robe, de mon corps et de mes cheveux pour la renvoyer par dessus bord.

« Qu'est-ce que tu fous sur mon navire ?! rugit un homme en me fonçant dessus. »


Menaçant, ses bras étaient plus gros que mes deux cuisses réunies et sa démarche trahissait une rage démesurée quant à la situation. Il s'apprêta à me saisir par le bras. Je l'interceptai dans un réflexe surprenant en lui agrippant le poignet.

« Mission de l'Odre Kinkou ! improvisai-je, à bout de souffle.

— Quoi ?! grogna-t-il.

— Il semblerait qu'un démon se soit glissé parmi vos passagers, laissez-moi inspecter le navire immédiatement ! »


Et le pire, c'est que la mascarade fonctionna. L'homme se montra réceptif et coopératif. Je me précipitai alors à la recherche de Jhin, me hissant à la hâte sur le château de proue mais il avait visiblement déserté les lieux. J'entrepris alors de fouiller la cabine principale. En y entrant, mon cœur tambourina lorsque je le découvris là, seul. Il me tournait le dos et observait par le hublot avec sa longue vue dans une indifférence troublante.

« Tu ne cesseras donc jamais de me contrarier... soupira-t-il sans daigner se retourner. »


Encore une fois, l'émotion me condamnait au silence et à l'impuissance. J'entrepris d'avancer d'un pas hésitant et m'arrêtai net lorsqu'il se tourna vers moi. A travers son masque, son regard suffit à me décontenancer. Mon corps refusait désormais de m'obéir.

« Qu'as-tu pensé de ce spectacle, ma chère ? »


Je me gardai de répondre. Il s'approcha plus encore, jusqu'à se tenir suffisamment près pour que son parfum et sa présence mettent à mal toute volonté de résister. Il tendit sa main gauche, seule qui lui restait de chair et glissa une mèche mes cheveux entre ses doigts. Mon cœur martela si fort que j'en perdis l'équilibre. Cette proximité éveillait en moi un état de plénitude inavouable — qu'y pouvais-je ? — Il était mon monde et la seule raison qui me vaille la peine d'endurer cette existence. Il l'avait toujours été. Je me ressaisi.

« Ferais-tu alliance avec Zed ? Espères-tu te venger de moi ? Ou comptes-tu le trahir, lui aussi ?

— Je... (mon souffle se coupa)

— Oui ? Aurais-tu également perdu ta charmante voix ? (sa main s'engouffra dans mes cheveux)

— Je suis venue... pour te capturer, balbutiai-je dans un effort surhumain.


Il éclata de rire.

« Alors pourquoi ne l'as-tu pas déjà fait ? Je sais de quoi tu es capable et pourtant tu es là... docile et perdue comme un pantin à qui l'on aurait sectionné les ficelles. Ô Hirose, et si je te demandais de revenir à mes cotés ? (son œil luisant me sonda avec attention)

— (Mon cœur tambourina plus fort encore) Tu mens... devinai-je.

— (Il empoigna brutalement mes cheveux et ramena mon visage près de son masque) Incontestablement, tu m'as démasqué ! »


Il me lâcha soudain et recula de quelques pas en éclatant d'un rire cruel. Soudain, le navire se stoppa si net que je perdis l'équilibre, me retrouvant à genoux sur le parquet. Jhin s'effondra d'un coup, inconscient.

« J'aurais préféré être aveugle que de voir ça, s'éleva la voix d'une femme. »


Alors que je tentais de me remémorer où je l'avais entendu, l'intéressée se révéla face à moi en sortant d'un voile d'invisibilité. Sa tenue bordeaux et sa queue de cheval rouge me rafraîchit la mémoire : c'était elle qui accompagnait Zed au festival. Elle s'avança vers Jhin dans une démarche qui témoignait d'une confiance surdimensionnée.

« Voyons voir à quoi il ressemble, ce démon doré... »


D'un geste franc et sans aucune délicatesse, elle saisit et ôta son masque. Mon cœur palpita à la vue de son visage découvert. Sous ses mèches brunes, Jhin semblait dormir paisiblement.

« Hé bien... rien d'incroyable... On dirait que je suis arrivée à temps. Pourquoi tu t'es pas défendue ? Il était même pas armé... et je connais tes capacités !

— On se connaît ? rétorquai-je sèchement.

— Semble-t-il, répondit-elle avec un air supérieur. Je suis une Yànléi. »


Elle posa sa botte humide sur le torse de Jhin.

« Pathétique...

— Ça suffit ! m'indignai-je. Tu le tiens maintenant, inutile de lui manquer de respect ! »


Ses yeux verts me fusillèrent, luisants et menaçants.

« Hirose, c'est ça ? (elle sortit une corde de la sacoche accrochée à sa taille) Je t'ai vu sauver ce gosse, je me suis dit que t'étais peut-être pas une si mauvaise personne dans le fond (elle s'accroupit et noua les mains de Jhin dans son dos)

— Tu m'as suivis... 

— Ouais, mais le canasson court plus vite que moi, d'où mon retard... Par contre, je n'ai pas raté une miette de votre petite entrevue. Pitoyable.

— Il serait bon d'arrêter de me juger ! »


La rousse se releva d'un bond et, sans prévenir se jeta sur moi. Elle m'empoigna par le décolleté pour me plaquer dos au mur avec une force qui me fit sans doute pâlir.

« Te juger ? cracha-t-elle entre ses dents serrées. J'ai presque été témoin de ta trahison auprès de l'Ordre de l'Ombre. Il serait bon de choisir ton camp, personne ne te pousse à rester ! (Elle soupira avant de me relâcher) Tu l'as trouvé, mais pas sûre qu'il serait captif si j'avais pas été là, pas vrai ? »


Je gardai le silence. Sincèrement, la réponse me terrifiait.

« Aucune réponse... Mais secoue-toi, Hirose ! Zed et Shen sont en train de se tabasser à mort en ce moment ! Leur ramener leur ennemi commun mettra un terme à ce foutoir ! Je vais demander au capitaine de faire demi-tour. Reste ici. Je peux te faire confiance ? »


Je hochais légèrement la tête. Elle s'arrêta à la porte :

« Je peux te faire confiance ?! aboya-t-elle.

— Oui, ça va... soupirai-je, décontenancée. »


Elle se retira. J'observai Jhin, inerte, vulnérable, plus que jamais embarrassée par la situation. J'avais désormais son sort entre les mains.

Était-il temps de regretter ? L'avais-je réellement poursuivis pour l'arrêter, dans le fond ?

Je fis les cent pas devant la porte. Zed ! Je ne pouvais pas trahir Zed et la confiance qu'il m'avait généreusement accordé. Mais pouvais-je trahir Jhin une fois de plus ? L'ombre de la liberté paradait sous mon nez. Et pourtant l'abîme se refermait doucement sur moi, m'enchaînant, m'entraînant dans les tréfonds les plus sombres de mon être. Quelle que soit ma décision, je la regretterai. Je serrai ma prothèse contre mon cœur et luttai contre la tourmente qui se déchaînait en moi. 

Décide-toi, Hirose.

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