Un avenir incroyable
Bilbon fier de sa petite plaisanterie se réfugia ni vu ni connu dans sa maison, alors que tous ses invités étaient en émoi, qui sait combien de temps il leur faudra pour se remettre du choc ? Une fois à l'intérieur, il se défit de ses vêtements de fête qu'il enveloppa dans du papier fin et les rangea soigneusement. Il enfila des vêtements plus confortables pour son voyage, en n'oubliant pas son épée Dard accrochée à sa ceinture, ainsi qu'une cape chaude.
Avant de partir, Bilbon se rappela ce qu'il avait promis à Frodon, il prit une enveloppe assez volumineuse dans laquelle il y fourra le testament ainsi que l'anneau. Mais sur une impulsion, il retira l'anneau qu'il cacha dans la poche de sa culotte. Enfin, il cacheta l'enveloppe et l'adressa au nom de Frodon. Gandalf venait juste d'entrer dans la maison lorsque Bilbon déposait le papier sur la cheminée.
"Ah ! Vous voilà ! Je me demandais si vous alliez apparaître avant mon départ."
"Je suis content d'être arrivé à temps. J'imagine que vous êtes satisfait de votre plaisanterie, tout s'est passé comme vous le souhaitiez."
"Absolument satisfait, croyez-moi. Mais cet éclair, je n'ai pas bien compris, est-ce qu'il provenait de vous ou d'Emily ?"
"Cela venait de moi, bien sûr. De toute façon, j'aurais empêché Emily de se servir de sa magie pour éviter qu'elle soit pointée du doigt par vos invités. En tout cas, votre plaisanterie a bien fonctionné, après votre départ, les hobbits parleront de votre disparition pendant de nombreux jours. Vous êtes toujours décidé à quitter la Comté ?"
"Plus que jamais ! Comme je vous l'ai dit ce matin Gandalf, j'ai besoin de retrouver la tranquillité, je veux revoir les montagnes ! Par ailleurs, j'ai pensé à une fin intéressante pour mon livre : Et il vécut heureux jusqu'à la fin de ses jours."
"Croyez-vous que votre livre sera lu ? J'ai un doute là-dessus."
"Frodon a commencé à le lire pour le peu que j'en ai écrit. Vous garderez un œil sur lui et sur la jeune Emily, n'est-ce pas ?"
"Oui... les deux... dès qu'ils ne seront pas tournés vers d'autres lieux."
"Ils trouveront leurs cadeaux dans leurs chambres respectives. Pour Frodon, je lui laisse tout à l'exception de quelques objets que j'emporte avec moi."
"Quand vous dites tout, cela concerne aussi l'anneau ? Souvenez-vous, nous en avions parlé dans le passé, vous aviez consenti à vous en séparer."
"Heu... Oui... Bien sûr."
Bilbon n'était plus très sûr de lui, cette conversation remontait à trop loin, il espérait que Gandalf avait passé à autre chose, mais à son déplaisir, il en fut tout autre.
"Où est-il ?" Demanda le magicien d'un ton ferme.
"Dans une enveloppe sur la cheminée !" Répondit Bilbon avec impatience, puis il ajouta en voyant que Gandalf s'y dirigeait. "Enfin non, l'anneau est dans ma poche... Pourquoi ne le garderais-je pas en fin de compte ?"
Gandalf s'inquiéta du changement de comportement chez son ami bien qu'il était de dos à contempler l'anneau.
"Je crois sincèrement Bilbon que vous devriez laisser cet anneau ici."
"Franchement, je ne vois pas pour quelle raison je le laisserais derrière moi ! Dites-moi pourquoi je devrais le faire ? Jusqu'à maintenant, vous ne vous êtes jamais préoccupé des objets que j'ai rapporté de l'expédition d'Erebor, alors pourquoi cet intérêt soudain pour mon anneau ?"
"C'était un intérêt professionnel, non personnel mon cher Bilbon. Je voulais que vous me disiez la vérité sur la façon dont vous aviez obtenu l'anneau, c'était très important. Par ailleurs, puisque vous devez repartir en voyage, il serait préférable que vous le laissiez, vous n'en aurez plus besoin ; cela fait bien trop longtemps que vous l'avez."
Bilbon s'énerva pour de bon, Gandalf était allé trop loin dans ses propos, il ne se laisserait pas faire.
"Ce que je fais de mes propres affaires ne vous regarde pas ! Cet anneau est à moi ! Il est venu à moi !"
"Oui, oui. Mais il est inutile de vous mettre en colère."
"Si je me mets en colère, c'est de votre faute ! Il m'appartient... Seulement à moi... Mon précieux..."
Le regard de Bilbon avait perdu sa bienveillance, il devenait fou sans s'en rendre compte, Gandalf ne pouvait pas le laisser partir dans de telles conditions, il devait sauver son ami de cette emprise malsaine.
"Précieux ? Il a déjà été appelé comme ça, mais pas par vous."
"Et qu'est-ce que ça peut faire que Gollum l'ait déjà appelé ainsi ? Il l'a perdu et maintenant, il est à moi seul ! Ne vous en déplaise, je le garderai !"
"Bilbon... Cet anneau s'est emparé de vous, partez sans lui et vous pourrez reprendre une existence libre et heureuse."
"Je fais ce que je veux et je partirai comme il me plaira !"
"Bilbon, depuis si longtemps, nous avons toujours été amis. Je vous supplie de me faire confiance, laissez le."
"Avouez le Gandalf ! Vous le voulez pour vous tout seul ! Mais vous ne l'aurez pas ! Je vous répète que c'est mon précieux !"
De rage, Bilbon avait mis sa main sur la manche de son épée Dard. Cette fois, Gandalf perdit patience, on aurait dit que son ombre emplissait le salon, sa taille avait grandit de manière imposante. Le hobbit en fut effrayé, c'était la première fois qu'il voyait le magicien aussi menaçant.
"Bilbon Sacquet !!! Si vous répétez ces mots, vous découvrirez Gandalf le Gris en colère et poussé à bout !!! Ne sous-estimez surtout pas mon pouvoir !!!"
Bilbon était livide, prostré, il mit du temps à se remettre de cette vision, enfin il dit péniblement.
"J'ai dépassé les limites visiblement. Mais comprenez-moi Gandalf, si je n'avais pas gardé cet anneau, Gollum m'aurait réservé une fin abominable ! Malgré qu'il m'ait accusé d'être un voleur, je n'en suis pas un, vous devez me croire."
Dès que Bilbon fut sorti de sa folie, l'ombre avait disparue, Gandalf reprenait une taille normale avec un regard bienveillant et soucieux à la fois.
"Personnellement, je ne vous ai jamais accusé d'être un voleur et je n'en suis pas un non plus. Je ne cherche pas à vous voler, mais à vous aider. Je vous demande de me faire confiance comme avant."
"Je suis désolé pour mon comportement, Gandalf. D'une certaine façon, vous avez raison, ce serait un soulagement de ne plus avoir à le posséder, mais il a pris tant de place dans mon esprit. Bien souvent, j'ai eu cette impression qu'un grand œil me surveillait, aussi j'ai essayé de le mettre dans un coffret sous clé, mais je ne parvenais pas à me calmer s'il n'était pas à ma portée et je ne comprends toujours pas pourquoi."
"Fiez-vous à ma parole, Bilbon. Cessez de posséder cet anneau, détachez-vous de lui. Donnez le à Frodon et je veillerai sur lui."
"Très bien, je le ferai, je le laisserai à Frodon. Bien, il vaut mieux que j'y aille avant de me faire attraper par d'autres hobbits."
Alors que Bilbon s'éloignait de Gandalf, ce dernier l'interpella.
"Bilbon... l'anneau est encore dans votre poche."
"Oh ! C'est vrai ! Quel étourdi je fais ! Prenez vous-même l'anneau, vous le remettrez à Frodon ainsi que l'enveloppe sur la cheminée, ce sera plus sûr."
"Je préfèrerais que ce soit vous qui déposiez l'anneau sur la cheminée comme vous l'aviez prévu, j'attendrai Frodon afin qu'il puisse prendre votre testament et l'anneau."
Bilbon s'inclina, mais il flancha au moment de déposer l'anneau sur la cheminée, il tomba à terre. Sur son geste brusque, l'enveloppe tomba en même temps. Gandalf ramassa le papier sans toucher l'anneau, le hobbit crût que la colère allait de nouveau l'envahir mais elle disparut comme un souffle de vent.
"Voilà qui est une affaire classée. Maintenant, je vais vous laisser." Dit Bilbon, la mine soulagée.
Une fois libéré de l'anneau, Bilbon se sentit tout de suite beaucoup mieux, il prit sa canne, son sac à dos dans lequel il enfourna des provisions de nourriture, des vêtements de rechange et appela les nains qui sortirent d'une pièce.
"Tout est prêt ? Tous les paquets sont étiquetés ?"
"Tous !" Répondirent en chœur les trois nains.
"C'est parfait, merci à vous trois et à tous vos amis pour votre aide."
"Avec grand plaisir, maître Sacquet, quand est-ce que vous souhaitez partir ?" Demanda l'un des nains.
"Maintenant." Répondit Bilbon.
En ouvrant la porte d'entrée, Bilbon eut la surprise de voir Frodon et Emily, lui qui espérait partir en toute discrétion, c'était raté.
"Frodon, Emily... Vous êtes déjà là ? Vous avez fait vite dites donc."
Gandalf était également dubitatif sur l'instant, il n'était pas possible que les deux jeunes gens aient pu le talonner ou il s'en serait aperçu, encore une autre question sans réponse mais qu'il règlerait plus tard.
"Je voulais te dire au revoir avant que tu partes, Bilbon. J'aurais eu le cœur gros, car je ne sais pas quand est-ce que je te reverrai" Répondit Frodon à son parent.
Bilbon ne put résister de prendre Frodon dans ses bras dans une étreinte affectueuse, qui sait s'il le reverrait effectivement. Puis ce fut le tour d'Emily de dire au revoir.
"Bilbon, pour ma part, je tenais à vous remercier de m'avoir hébergé dans votre maison et pour toutes vos bontés que vous m'avez montré."
Le vieux hobbit étreignit Emily et lui dit.
"Je n'ai jamais regretté de t'avoir accueilli à Cul-de-Sac, tu as été comme une fille pour moi."
"Soyez prudent sur la route." Ajouta encore la jeune femme.
"Ne t'inquiète pas pour moi ma petite Emily, tout ira bien. En plus, je ne voyagerai pas seul, les nains qui ont apporté les cadeaux pour mon anniversaire partiront avec moi. Au fait ! Tant que j'y pense !" Bilbon se tourna vers les nains et leur demanda. "Maîtres nains, pourriez-vous montrer à Frodon et Emily l'endroit où vous avez étiqueté les paquets, car ils devront les distribuer aux hobbits."
Les nains acquiescèrent à sa demande et invitèrent les deux jeunes gens à les suivre, Bilbon fit ses adieux en silence à sa chère maison où il avait grandi avec ses parents, Bungo et Belladonna. Il dit ensuite à Gandalf.
"Voilà ce dont j'avais rêvé depuis si longtemps, voyager de nouveau avec des nains. Adieu Gandalf."
"Adieu pour le moment Bilbon, peut-être que nous aurons l'occasion de nous revoir, qui sait ? En attendant, prenez soin de vous."
"De même pour vous, Gandalf."
Les deux amis se serrèrent la main chaleureusement avant de se séparer, les nains rejoignirent rapidement Bilbon.