Un Peuple Oublié
Chapitre 25 : Chapitre 24 _ L'Acceptation
3862 mots, Catégorie: G
Dernière mise à jour 13/06/2020 14:16
Aragorn fut le premier à retrouver ses esprits. Après plusieurs minutes d'inconscience, il ouvrit soudain les yeux, se rappelant peu à peu ce qui l'avait conduit au sol.
Dés qu'il en fut capable, il se releva, et s'approcha de Gimli, qui fut le premier qu'il vit.
Il poussa un soupir de soulagement en voyant son énorme poitrine se soulever, et il s'accroupit à ses cotés, le remuant pour le réveiller.
Rapidement, celui ci ouvrit les yeux à son tour, et le rôdeur se précipita vers le deuxième corps immobile qu'il vit.
Du sang coulait abondamment de la poitrine de l'elfe, et l'homme eut peur un instant pour la vie de son ami.
Il le secoua, le frappa, l'appela, rien n'y faisait. L'elfe ne se réveillait pas. Ce ne fut que lorsque le rôdeur lui asséna une violente gifle qu'une réaction apparut.
Legolas cligna des paupières, et toussa violemment, comme si sa gorge était trop sèche pour qu'il puisse dire un mot.
Le rôdeur sourit de soulagement.
-Aragorn.
La voix de Gimli était faible, comme terrifiée. Si faible que l'homme se demanda un instant s'il n'avait pas rêvé. Il se redressa, et suivit le regard apeuré du nain.
Il se releva, et s'approcha doucement du spectacle qui s'offrait à eux.
Le corps d'Azazel était étendu sur le sol, la tête bercée dans une marre de sang noir qui devait être le sien.
L'homme ne put empêcher un soupir de soulagement de sortir d'entre ses lèvres.
Ce monstre était mort.
Puis il se demanda ce qu'il était réellement venu faire ici. Il avait cru comprendre qu'il venait pour Naé mais .... Naé.
Il tourna la tête et aperçut le corps de l'elleth, ou ce qui avait terrifié le nain.
Il courut vers elle, s'inquiétant un peu plus à chaque pas.
Elle était roulée en boule sur elle même, prise de violentes convulsions qui rythmaient les tremblements de ses membres. Du sang s'écoulait doucement autour d'elle, et elle en était tellement couverte qu'il était difficile de deviner ses blessures.
L'homme dut se mordre la lèvre pour contenir les craintes qui le submergeaient.
Doucement, il s'accroupit à coté d'elle, plaçant ses mains de façon rassurante derrière sa nuque, et sur son cou, cherchant la régularité d'un pouls.
Il ne put retenir une grimace en voyant son œil crevé.
Lorsque Gimli trouva enfin la force de s'approcher, il cria quelques mots dans sa langue natale. Il frappa le sol, de colère, quand il vit le cadavre du prince. Il se rua alors dessus et lui envoya une série de coup de pieds, comme pour s'aider à se calmer. Il continua encore et encore, et même bien après que le rôdeur ait ramener le corps si faible de leur amie jusqu'au château.
Legolas était quant à lui resté en retrait, aussi indéchiffrable qu'un bloc de glace, personne n'aurait alors pu dire s'il était triste de la situation, en colère, ou s'il s'en réjouissait...
En entrant dans la grande salle avec le corps de l'elleth dans les bras, tous s'éloignaient d'Aragorn, le laissant passer, comme s'ils avaient peur de s'en mêler.
Celui ci ne réfléchit pas une seconde et l'emmena directement dans la chambre de l'elleth, où il pourrait être au calme pour réfléchir et prendre les décisions qui s'imposaient. Il la déposa délicatement sur le lit, et lui dégagea de façon protectrice les mèches de cheveux qui lui tombaient sur le visage, restant collées au sang poisseux qui séchait sur sa peau.
-Que s'est-il passé ?
Eowyn avait déboulée comme une furie dans la pièce.
Il la regarda, et se sentit incroyablement responsable en entendant sa voix.
Son regard passa de la jeune femme au corps inerte de l'elleth, et ses yeux se voilèrent de tristesse et de remords.
-Son prince... eut-il du mal à articuler. Il ... Il était comme ... possédé.
Elle le fixa un instant comme pour essayer de savoir de quoi il parlait, mais cela n'avait pas la moindre importance.
-Déshabillez la. Je vais chercher ce qu'il faut.
N'étant pas en état de discuter ou de réfléchir, il obéit.
Il commença à lui ôter sa ceinture, puis son pantalon, essayant de ne pas prêter attention aux cris de douleur qu'elle laissait échapper.
Une fois qu'elle fut nue, et qu'Eowyn fut revenue, ils nettoyèrent ses plaies avec du linge et de l'eau chaude. Le sang continuait à affluer par endroit, tandis qu'il tombait en croûte séchées à d'autres. Quand ce fut fait, Aragorn entreprit de recoudre les plaies les plus profondes.
Gimli et Legolas s'étaient joints à lui, bien qu'il régnait dans la chambre un silence de plomb.
L'elleth se réveilla quelques fois en hurlant, en proie à des cauchemars brûlants. Son corps tremblait et des gouttes de sueur ruisselaient le long de sa peau, comme preuve de la fièvre qui semblait l'emporter.
-Elle est brûlante... finit par souligner le rodeur, de plus en plus inquiet. Quelque chose ne va pas...
Le nain se rapprocha du corps étendu, comme pour se prouver que ces mots étaient fondés.
-Elle a toujours guérie très vite, commença-t-il, essayant de se convaincre lui même, peut être est-ce une réaction normale ?
Aragorn tourna alors les yeux vers Legolas, qui n'avait rien dit et se tenait en retrait depuis le début, et remarqua qu'il semblait souffrir plus qu'il ne devrait.
Puis reposant ses yeux sur le corps de l'elleth, il vit que la plaie de son cou fumait.
-La lame était empoisonnée.
Il avait craché ses mots, comme pour pester encore contre le cadavre d'Azazel.
Il réfléchit très vite, tandis que Gimli et Eowyn prirent un air paniqué.
-Allez chercher de l'atelas. Vite. Cela ralentira peut être assez le poison pour que leur organisme est le temps de récupérer au fur et à mesure... Vite.
Au moment où ils sortirent de la chambre, Legolas s'écroula sur le sol, assis contre le mur.
Il luttait pour garder les yeux ouvert.
Le sang ne coulait plus de son torse, où il avait formé une croûte rougeâtre.
Son ami se précipita vers lui, et lui porta un peu d'eau sur le visage, afin de le rafraîchir.
Quelques minutes passèrent, qui semblèrent durer une éternité, puis Eowyn revint avec une poignée d'herbes.
Ils se dépêchèrent d'en appliquer sur les plaies, essayant d'en glisser entre la peau.
Puis, sentant la fièvre se stabiliser, Aragorn porta son ami dans ses bras, afin de le ramener dans sa chambre respective, pour l'étendre sur un lit dans lequel il serait plus à l'aise.
La journée s'écoula. Les deux blessés dormirent, récupérant de leurs blessures, sous l'œil attentif de leurs compagnons qui venaient régulièrement s'inquiéter de leur état.
Le lendemain, Legolas se réveilla, plus ou moins remit sur pied. Eowyn voulait lui faire porter à manger mais il insista pour se lever et aller se dégourdir un peu les jambes. Aragorn l'accompagna de bon cœur, soulagé de voir que son ami allait mieux.
-Et le monstre noir ? Demanda amèrement l'elfe.
-Nous l'avons enterré ce matin, avec Gimli.
-Vous auriez dû le brûler.
La colère perlait dans sa voix, et le cœur du rôdeur se serra de voir tant de haine dans les yeux d'ordinaire si bleus de son compagnon.
-Bah, intervint Gimli, dans quelques jours, cela ne sera plus qu'un mauvais souvenir. Naé sera sur pied, parfaitement rétablie et vous pourrez continuer à vous envoyer des insultes, rassurez vous !
Il ponctua sa phrase d'un énorme sourire, qu'il espérait voir apparaître en face de lui mais il n'en fut rien.
-Parfaitement rétablie ?
Le nain fronça les sourcils.
-Elle a toujours guérie, il n'y a pas de raison qu'il en soit autrement. Et je vous interdit de souhaiter le contraire !
-Ce n'est pas le cas.
-Alors pourquoi tant d'amertume dans votre voix ?
-Nous guérissons rapidement, c'est vrai. Mais je ne suis pas sur qu'on puisse guérir de quelque chose qu'on nous a arraché.
Le nain se stoppa.
-Etes vous entrain de dire qu'elle ne retrouvera jamais son œil ?
Legolas eut un rire lasse et haussa les épaules.
-Je n'en sais rien. Je ne m'en suis jamais fait arracher un.
Il avait peur. Vraiment peur. C'était bien là encore un sentiment qu'il ne contrôlait pas. Il s'en voulait. Il était en rage contre lui même. Il n'avait pas réussi à les protéger, et il s'en sentait infiniment coupable. Naé avait été seule. Il l'avait laissé, seule. Elle avait mit du temps à réagir, au début. Il avait été surprit de la voir, elle, aussi tétanisée. Peut être la surprise, cet elfe avait l'air d'avoir été très important pour elle. Comme si un lien fort avait toujours existé entre eux. Et cela aussi, étrangement, le mettait en colère.
Il s'était toujours cru doué au combat, et pourtant ce .. Prince Noir l'avait ridiculisé. Jamais il n'avait affronté pareil adversaire, ni pareil humiliation. Bien sur, Aragorn et Gimli ne pouvaient rivaliser avec ce monstre. Mais il s'en voulait aussi de s'en être pensé, lui, capable. Il n'y avait eu que Naé pour le tuer. Et heureusement. Si elle avait échoué, ils seraient tous morts à l'heure qu'il est. Et le village serait sans doute en flammes. Il serra le poing. Mais à quel prix?
Les jours s'écoulèrent rapidement.
La fièvre de Naé finit par tomber, mais elle eut besoin de plusieurs jours pour se remettre. Dès qu'elle eut retrouver ses esprits, elle demanda gentiment à ses compagnons de ne plus venir la voir avant qu'elle ne soit rétablie.
Elle avait mal. Non pas physiquement mais dans son âme.
Elle faisait le deuil de la personne qu'elle avait aimé.
Cela lui prenait du temps. Elle dormait beaucoup, et dans son sommeil, il continuait de venir la hanter.
Elle s'était sentie responsable un temps, puis coupable, et enfin la colère survint.
Un soir, elle fracassa le mobilier de sa chambre et hurla de rage tellement fort que toute la cité se réveilla.
Puis la tristesse arriva. Seule, comme une vieille amie, et un matin enfin, elle repartit.
La laissant vide de toute émotion.
Ce matin était celui du 4eme jour. Sans voir personne d'autre qu'Eowyn qui lui apportait des repas. Que bien souvent elle ne mangeait pas.
Mais enfin elle était prête.
Elle se redressa, posant un pied à terre. Doucement, elle se mit debout. Restant quelques instants immobile.
Elle savoura quelques secondes cet équilibre retrouvé, puis marcha lentement dans la pièce.
Elle s'arrêta en face du miroir, un des rares objets qu'elle n'avait pas cassé. Elle eut du mal à se reconnaître.
Elle avait maigri, de façon beaucoup trop évidente pour que ce soit joli.
Sa peau était pâle, elle aussi un peu trop. Elle remarqua la nouvelle cicatrice sur sa cuisse, et la caressa. Fermant les yeux, elle revécut un instant la douleur ressentie lorsque sa peau s'était déchirée. Puis rejeta cette pensée. Elle posa ensuite ses doigts sur celle de son ventre, puis de son cou.
Comme pour se familiariser avec ces nouvelles marques.
Puis, relevant la tête elle découvrit son visage.
Bien sur, ses traits s'étaient creusés, et son teint était lui aussi bien trop pâle.
Mais par dessus tout, ce furent ses yeux qui la choquèrent.
Son œil droit était toujours d'un bleu saphir, et à coté, à la place de l'orbite vide qu'elle s'était attendue à trouver se tenait un nouvel œil, dont l'iris était d'un bleu si pâle, qu'il était presque blanc.
Mais surtout, il était aveugle.
Maudissant pour la énième fois cette restriction de champ visuel, elle fut tout de même heureuse de ne pas voir un trou repoussant.
Elle aurait pu être affreuse, elle était simplement infiniment moins belle.
En relevant les yeux, elle découvrit aussi que ses cheveux avaient blanchis, d'un coup et sur toute la longueur.
Honteuse, elle les attacha, espérant que le blanc serait moins visible dans sa tresse habituelle.
Cette nouvelle teinte la rendait froide, glacée même, presque digne du roi Thranduil.
Et ce n'était pas vraiment pour lui plaire.
Elle entreprit ensuite de s'habiller, mais elle ne vit autour d'elle qu'un pantalon de cuir à peu près de sa taille et une chemise d'homme bien trop grande, qui à l'odeur devait appartenir à Eomer.
Pieds nus, et n'en pouvant plus d'être enfermée, elle se décida à sortir de la chambre.
Lorsqu'elle arriva dans la grande salle, elle y découvrit plusieurs soldats, ainsi que Gimli, Aragorn et Eomer, qui y déjeunaient tranquillement.
En la voyant, Gimli explosa d'un rire de joie, et se leva, allant à sa rencontre.
-Ma belle Naé! Encore un jour de plus et vous auriez commencé à me manquer !
-Messieurs, les salua-t-elle plus calmement, avec un air amusé en s'asseyant avec eux.
Un silence s'en suivit, et chacun paraissait gêné. Plusieurs s'attardèrent sur son œil, bien trop clair.
-Et dire que l'autre avait peur que vous ne guérissiez pas ! Ria le nain, Regardez vous, c'est comme s'il n'était rien arrivé ! Je vais arrêter de me faire du soucis pour vous, ça oui !
-Je récupère physiquement. Mes sens eux ne repoussent pas. Essaya-t-elle de dire avec douceur.
Le nain ravala sa salive d'inconfort, et tenta d'une voix rigolote,
-Apparemment vos doigts non plus !
Un silence pesant s'en suivit, tandis que Naé fixait les moignons qui s'étendaient au bout de sa main gauche.
-Il m'en reste assez pour vous mettre une raclée. Finit-elle par dire avec un clin d’œil.
Gimli rit de soulagement en voyant qu'elle avait gardé son esprit joueur, et la porte s'ouvrit.
-Vous voilà rétablis !
En se retournant, l'elleth vit Eowyn s'approcher d'elle avec joie.
-Et bien ! Il suffit que je fasse une sieste pour que vous me voliez mes habits, dit-elle en souriant en découvrant que la femme avait enfilé un pantalon de cuir.
Les joues de celle ci s'empourprèrent, et ce fut Eomer qui prit la parole, tandis que Legolas entra à son tour dans la salle.
-Vos amis semblent avoir pensé que ma sœur avait le droit d'apprendre à se battre.
Elle comprit au ton de sa voix que lui même n'était pas totalement d'accord avec ça, mais apparemment pas assez pour contredire Aragorn. Étonnant.
-Ne vous en faîtes pas, reprit Gimli, si c'est l'elfe qui lui enseigne elle pourrait très vite changer d'avis.
Il fit un clin d'œil à Naé, comme pour être fier d'avoir trouver une taquinerie pour le sindar avant elle.
Un sourire en coin se dessina sur les lèvres de l'elleth, et elle tourna la tête vers le concerné, perdant immédiatement son air amusé.
Il la fixait intensément, ne semblant pas décidé à en détourner le regard.
Les yeux pétillants, il semblait découvrir le visage de l'elleth pour la première fois.
Il s'attarda sur tout ce qui avait changé. Ses cheveux blancs mal attachés, sa main droite tranchée, puis sur la nouvelle couleur de son œil, mais il ne parut à aucun moment choqué ou rebuté.
L'instant s'étirait, et elle sentit tout à coup une décharge dans le bas de son ventre qui la rappela à l'ordre. Elle tourna aussitôt la tête et n'entendit qu'une fin de conversation.
-Ce serait bien différent ! Dit Gimli avant d'éclater de rire tout seul.
-Et vous Naé ?
L'elleth se tourna vers Eowyn, surprise.
-Pardon ?
-Vous aviez un jour parlé de me montrer deux ou trois choses... ?
Elle releva l'empressement dans sa voix, mais malgré sa promesse, elle ne put s'y résoudre.
-Je ... Je crois que je vais moi même avoir besoin de réapprendre certaines choses.
-Cela ne presse pas, vous devriez peut être prendre le temps de bien vous remettre avant, sourit-elle.
Contre toute attente, et malgré la meilleure volonté, l'elleth lui répondit d'un ton froid et légèrement agressif.
-Je ne vous demandais pas la permission.
Elle s'en voulut immédiatement pour la rudesse de ses paroles, mais elle était tellement pleine de colère contre elle même que ses excuses moururent dans sa gorge. Un silence pesant s'installa, que Gimli, comme toujours, brisa avec humour
-Venez avec moi, je vais vous montrer quelques trucs que ces elfes ne connaissent pas.
Tous deux partirent alors, et le silence se fit.
-Des nouvelles de Gandalf ? Essaya l'elleth
-Rien. Nous nous tenons prêts. Dés que les feux d'alarmes s'allumeront, nous les rejoindrons. Avec ou sans l'appui du Rohan. J'ai fais porter vos lames dans votre chambre, au cas où ...
Elle sourit.
-Merci.
Sous le regard de ses camarades, elle se leva et se dirigea dans la direction indiquée. Elle avait du mal à soutenir les regards intrigués qui pesaient sur elle, et plus particulièrement celui de l'elfe, évidemment. Elle avait deviné le dégoût, et la pitié dans les yeux de plusieurs hommes, et cela était trop dur à supporter, mais heureusement, ses compagnons n'avaient eux rien laissé paraître. Gimli s'était bien appliqué à ne montrer aucune pitié, faisant comme si rien n'avait changé. Et elle lui en était vraiment reconnaissante.
Récupérant ses lames, elle essaya d'en tenir une dans sa main gauche. Ce ne fut qu'avec beaucoup de concentration qu'elle parvint à la tenir. Ensuite, aucun mouvement ne fut fluide. Ses gestes étaient lents, indécis, elle ne parvenait plus à trouver l'équilibre pour manier sa lame.
Plusieurs fois, l'arme tomba au sol, la laissant désarmée. La colère monta.
Elle réessaya, encore. Et encore. Et chaque fois, cela finissait de la même façon. Elle n'avait pas assez de force entre son pouce et son index pour manier l'épée.
Après de longues minutes, énervée, elle décida de rejoindre le nain et la femme qui s'entraînaient dehors.
En arrivant, elle s'assit dans l'herbe, écoutant avec intérêt les conseils de son ami.
Celui ci avait prit une épée pour l'occasion, et essayait d'attaquer, très doucement, pour analyser les réflexes et les réactions de la jeune femme. Bien que les gestes de celle ci étaient maladroits et imprécis, la concentration se lisait sur son visage. Elle écoutait et prenait en compte les conseils, autant qu'elle le pouvait, et se révélait être une très bonne élève.
A force de la regarder, Naé sentit poindre en elle l'excitation au creux de son ventre, elle baissa les yeux, et regarda sa main blessée.
Se mettant debout, elle essaya de sortir la lame de sa main gauche, mais celle ci ne bougea pas. Elle réessaya, encore. Et encore. Prenant exemple sur la persévérance d'Eowyn, mais n'était décidément pas dotée de la même patience.
Prenant une profonde inspiration pour se calmer, elle dégaina donc de l'autre main, avant de donner l'arme à sa main fragile.
Fermant les yeux, elle chercha au fond d'elle l'équilibre qui lui manquait tant. Le simple fait de la tenir lui demandait un effort énorme, et elle se crispa sur son index. Tournant doucement son poignet, elle essaya un mouvement circulaire, mais la lame était beaucoup plus inclinée que ce qu'elle avait souhaité, et elle n'arrivait pas à la redresser.
De colère elle laissa échapper un grognement, avant de refermer les yeux, se concentrant. Elle continua à s'entraîner à des gestes simples et lents, mais même après de longue minutes, elle sentait toujours la lame lui échapper. Elle cria de colère cette fois ci, sentant le désespoir monter.
En ouvrant les yeux, elle découvrit que Legolas s'était silencieusement glissé devant elle, et la regardait, inexpressif.
-Calme toi, tu n'es pas encore manchot.
Elle leva les yeux au ciel.
Elle ne savait pas ce qu'elle aurait voulu, d'ailleurs. Sans doute des paroles douces lui auraient fait encore plus mal. Au moins il n'avait pas pitié. Et pas de paroles du tout l'aurait énervé.
Mais après tout, elle était déjà énervée.
-Toujours aussi direct.
-Peut être devrais-tu éviter les insultes le temps de réapprendre à te battre.
-Une seule main suffit largement pour te botter les fesses.
-Du moment que je garde mes deux yeux.
Il affichait un air rieur, comme amusé de la voir sortir de ses gonds aussi facilement.
D'ordinaire, elle ne s'énervait pas, du moins pas comme cela mais là... Il remarqua tout de suite la contraction de sa mâchoire, et l'étincelle de rage dans ses yeux, qui, à son goût, la rendait charmante. Elle jeta une de ses épées au sol, et se rua sur lui.
Il esquiva facilement ses coups, ne faisant que se défendre. Elle avait des réflexes ambidextres très ancrés, et plusieurs fois, elle hésita sur la main à lever.
Elle était donc lente.
Vraiment lente.
Lui retenait bien sur sa force et sa vitesse. Il n'était pas là pour lui mettre une raclée. Il avait simplement envie de passer du temps avec elle.
Et bien qu'il ne le vivait pas, il ne pouvait qu'imaginer la frustration et la colère qui la tiraillait. Aussi se sentait-il utile de pouvoir la défouler, comme il l'avait toujours fait.
Elle avait bien conscience qu'il ne faisait que l'occuper, retenant son adresse, et bien qu'une partie d'elle lui en était reconnaissante, cela en énerva une autre. Il lui parut alors incroyablement talentueux, presque invincible, comme elle eut l'impression d'être insignifiante.
Il dut le sentir, puisqu'il baissa sa garde une seconde, et se retrouva coincé entre le sol et le corps chaud de l'elleth, la pointe d'une épée frôlant son œil.
-Borgne. Dit-elle simplement avec un sourire triomphant.
Il la retourna alors d'un seul coup, inversant leur position.
Bien que ce n'était là ni le lieu ni le moment, le fait de sentir de le corps de l'elleth se mouver contre le sien fit remonter des souvenirs plus qu'agréables, et il eut toutes les peines du monde à rester concentré. La glace dans ses yeux était entrain de fondre, animée par une lueur plus .. sauvage.
-Borgne. Ah non, tu l'es déjà.
Le visage de Naé se crispa de colère, et elle lui envoya un violent coup de tête pour se dégager. Elle se remit debout, ramassa l'arme qu'elle avait jetée au sol un peu plus tôt, et se dirigea vers le château en ronchonnant...