L'elfe Noire et la Communauté de l'Anneau
Attendri, Aragorn regardait le tableau qui se dressait devant lui. Eliana s’était rendormie, sa main serrée dans celle du prince de la Forêt Noire. Legolas la regardait comme si elle lui était ce qu’il avait de plus précieux. Songeur, Aragorn se dit que c’était sûrement le cas. Il avait remarqué depuis longtemps le trouble de ses deux compagnons. Leurs regards les trahissaient. Seuls eux ne s’étaient pas rendu compte de ce qu’ils éprouvaient l’un pour l’autre. L’héritier d’Isildur sourit discrètement en quittant la pièce. Sa présence n’était pas indispensable maintenant qu’il savait son amie hors de danger. Le prince de la Forêt Noire se chargerait avec bonheur de la veiller.
Dans ses pensées, le Rôdeur se mit à déambuler à travers les arbres. S’il devait être tout à fait honnête avec lui-même, il devait avouer que, par moments, il ressentait une petite pointe de jalousie s’éveiller en lui. Legolas avait trouvé sa moitié, et même s’il pressentait que la faire accepter par son peuple, et surtout par son père, ne serait pas une mince affaire, Aragorn savait qu’il finirait par imposer sa volonté. Contrairement à lui. Il aimait sincèrement Arwen mais son amour était condamné à mourir. Il était humain, elle était une elfe. Il était parfaitement conscient que les propos que lui avait tenu Elrond avant leur départ étaient on ne peut plus juste. Malgré sa longévité, Aragorn finirait par mourir. Arwen était immortelle et souffrirait forcément de son départ. Et il se refusait à ce qu’elle renonce au cadeau des Valars pour lui.
Il fut stoppé dans ses pensées par Sam qui venait aux nouvelles. Aragorn aimait bien ce petit Hobbit. Toujours dans l’ombre de Frodon, il agissait un peu comme un protecteur pour son ami, se dévouant pour lui. Devant la mine sombre de l’héritier d’Isildur, le Hobbit se méprit.
« -Dame Eliana est-elle… ?
-Non Sam, rassurez-vous. Au contraire. Elle vient de se réveiller. Legolas est à son chevet et veille sur son sommeil. Je pense qu’il va falloir la laisser dormir encore un peu. »
Rassuré, le semi-homme hocha la tête. Une bonne nouvelle arrivait enfin. Il allait pouvoir redonner un peu le sourire à ses compagnons dont l’inquiétude était croissante.
« Eliana devrait se rétablir rapidement, nous devrions reprendre la route dans quelques jours. Je compte sur vous pour veiller à ce que toute la compagnie se nourrisse correctement en vue de ce départ, Sam. »
Enthousiasmé par sa nouvelle tâche, Sam sourit avant de repartir aussi vite que ses petites jambes lui permettaient.
Quelques heures plus tard, l’elfe noire ouvrait à nouveau les yeux. Immédiatement, son regard se porta sur la personne qui la veillait. Legolas lui sourit doucement. Elle lui répondit avant de laisser ses yeux divaguer dans la pièce. Elle se trouvait visiblement dans une chambre, au style épurée. Les meubles et objets qui la composaient étaient tous simples, en bois, sans la moindre fioriture. La jeune fille ne connaissait pas cet endroit, mais se sentait en sécurité. Le prince de la Forêt Noire à ses côtés ne semblant pas non plus inquiet le moins du monde acheva de la rassurer. Shaylan l’avait conduit hors de danger.
« -Prince Legolas… Où sommes-nous ?
-Vous êtes dans le royaume de Lorien ma chère. »
La personne qui venait de lui répondre se tenait devant la porte. Elle avait de longs cheveux blonds et un visage d’ange. Eliana reconnu immédiatement la dame de Lorien, Dame Galadriel, mère du Seigneur Elrond et grand-mère de Dame Arwen. Cette dernière s’approcha et vint s’asseoir près d’elle.
« Les circonstances de votre accueil sont un peu particulières. Néanmoins, je vous souhaite la bienvenue en Lorien, princesse d’Organda. »
Sa voix douce mit immédiatement Eliana à l’aise. Elle tenta de se redresser mais serait retombée si Legolas ne l’avait pas retenu. Elle le remercia d’un sourire avant de grimacer. Ses blessures la faisaient encore souffrir. Elle aurait aimé vérifier elle-même l’état de ses plaies mais la présence du Prince de la Forêt Noire l’angoissait. Galadriel sembla remarquer son trouble.
« Seigneur Legolas, il me semble qu’Aragorn vous cherchait. Vous devriez aller le rejoindre, cela pourrait être important. »
Aussitôt, l’elfe blond quitta la pièce, non sans avoir jeté un dernier regard à sa camarade. Dès qu’il fut sorti, Galadriel reprit la parole.
« -Vous êtes restée inconsciente pendant trois jours ma chère, ne forcez pas trop. J’ai soigné la majorité de vos blessures. Malheureusement certaines laisseront des cicatrices. Notamment celle qui va de votre poitrine à votre nombril. Elle m’a d’ailleurs semblé étrange.
-C’est une vieille blessure qui semble s’être rouverte Dame Galadriel. Elle date de temps ancien. A l’époque, je ne maitrisais pas totalement mon don et j’ai donc été dans l’incapacité de me soigner moi-même. Et nos meilleurs guérisseurs n’ont pas réussi à faire disparaître la cicatrice. Mes camarades ont-ils… ?
-Rassurez-vous, ils ne l’ont pas vu. Néanmoins j’aimerais m’entretenir avec vous d’un sujet qui me préoccupe. Le reste de la Communauté attend votre rétablissement et refuse de partir tant que vous ne serez pas sur pied. Toutefois, l’Isengard et le Mordor s’agite. Il est devenu primordial pour Frodon de détruire l’anneau dans les flammes de la montagne du Destin. Le temps presse désormais. »
Eliana resta silencieuse sous le regard perçant de son interlocutrice. Elle avait perçu la question sous-jacente du discours de l’elfe. En refusant de partir sans elle, la Communauté perdait du temps et Sauron devenait plus fort. Pendant quelques minutes, la jeune elfe resta dans ses pensées avant de se tourner vers la Dame de Lorien.
« Dame Galdriel, auriez-vous l’amabilité de faire venir le reste de la Communauté. Je crains d’être trop faible pour me déplacer et je dois m’entretenir avec eux. »
Avec bienveillance, l’elfe hocha la tête avant de sortir de la pièce. De nouveau, la solitude donna à Eliana le loisir de se replonger dans ses pensées. Elle ne pouvait retarder la Communauté et sa quête plus longtemps. D’autant plus qu’elle sentait depuis sa rencontre avec Melian qu’un autre destin l’attendait.
Quelques minutes plus tard, toute la Communauté était réunie dans la chambre de la blessée. Après les paroles de la princesse visant à rassurer définitivement ses compagnons, la conversation prit une tournure beaucoup plus grave. Lorsque Eliana leur demanda de continuer la quête sans elle, elle se heurta à un concert de protestations.
« -Voyons Dame Eliana ! Nous n’allons pas vous abandonner maintenant.
-Tout à fait d’accord. D’autant plus que nul ne sait ce que ces elfes vous réservent.
-Nous avons commencé cette quête ensemble, nous la finirons ensemble ! »
Dans un dernier espoir, la jeune femme se tourna vers Aragorn, le seul à être resté silencieux.
« -Aragorn s’il vous plaît, comprenez-moi. Je suis trop faible pour vous suivre maintenant et attendre ma guérison complète ne ferait que nous ralentir encore plus et laisser le champ libre à Sauron. Vous pouvez continuer sans moi. Je vous rejoindrais lorsque j’aurais repris des forces. Shaylan saura me guider jusqu’à vous. Ne mettez pas en danger une quête aussi importante juste pour une elfe tel que moi. »
Aragorn la fixa un long moment sans rien dire. Au fond de lui, il savait que ses arguments étaient justes. Il devait simplement convaincre le reste de la Communauté. Finalement, il finit par hocher la tête en direction de la princesse, signifiant ainsi qu’il comprenait sa décision. Il leur fallu ensuite de longues minutes pour réussir à convaincre les autres. Finalement, lorsque Legolas accepta à contrecœur, le reste suivit rapidement.
« Nous partirons demain à l’aube. Nous ne pouvons pas retarder plus. Profitez de cette dernière nuit pour vous reposer et récupérer l’ensemble de vos forces. Ce qui nous attend au-delà du Nimrôdel ne sera pas de tout repos. »
L’héritier d’Isildur avait à peine finit de prononcer ses dernières paroles qu’une cavalcade de pas se fit entendre à proximité. L’ouïe aiguisée des elfes leur permit de distinguer la voix d’Haldir criant à quelqu’un que cette partie du palais était interdite, et que de toute façon, il n’avait rien à faire ici, avant que la porte ne s’ouvre à nouveau violemment. Et avant que quiconque puisse comprendre, la princesse d’Organda se retrouvait prise dans une étreinte possessive.
« Eliana chérie ! Tu m’as manqué ! »