L'elfe Noire et la Communauté de l'Anneau

Chapitre 15 : Une rencontre hors du commun

1768 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 22/07/2019 22:44

Atterré, le prince de la Forêt Noire regardait l’entrée de la mine désormais fermée. Il n’avait rien pu faire. Et même s’il espérait au fond de lui que la jeune elfe s’en sorte, il savait que cet espoir était vain. Eliana était blessée. Les pierres avaient profondément entaillé sa peau, il l’avait vu. Elle ne résisterait pas longtemps aux assauts du monstre. Legolas savait les risques qu’encourait chacun des membres de cette Communauté. Mais il n’aurait jamais pensé qu’Eliana serait la première à tomber. Il avait failli à sa promesse. Il ne l’avait pas protégé. Une intense tristesse l’envahissait, ainsi qu’une rage sans nom. Si Boromir ne l’avait pas retenu, il aurait pu…


« Calme-toi mon ami. Tu n’aurais rien pu faire. Tu aurais seulement été bloqué avec elle de l’autre côté de la mine et, même si vous aviez réussi à vaincre le monstre, qu’auriez-vous fait ensuite ? Eliana était blessée, tu l’as vu comme moi. Dans cet état, elle aurait été incapable de traverser la Moria. Respecte son dernier souhait. Nous devons  aider Frodon à accomplir la charge qui lui a été donné. »


Les paroles emplies de sagesse d’Aragorn calmèrent quelques peu la colère du prince elfique. Mais la tristesse, elle, demeurait. C’était la première fois en presque trois mille ans d’existence qu’il en ressentait autant. Il avait vu des compagnons, des amis, mourir. A chaque fois, il avait ressenti de la peine. Mais cette impression que sa raison de vivre était partie avec sa compagne, c’était la première fois qu’il l’expérimentait. Il se sentait perdu et même affaibli.


Secouant violemment la tête, il s’efforça de chasser ses questions. Tout comme lui, le reste de la Communauté était peiné. Il ne devait pas se laisser aller. Il devait soutenir Merry et Pippin qui sanglotaient auprès de Gimli, Frodon qui fixait la porte de la Moria sans la voir, encore sous le choc. Il ne devait pas flancher. Il avait juré de mener le porteur au terme de sa quête. Il le ferait. Echangeant un regard avec Aragorn et Gandalf, Legolas entraina les Hobbits avec lui et la compagnie se remit en marche. Alors qu’il s’enfonçait dans les profondeurs de la mine, le prince de la Forêt Noire ne put s’empêcher de jeter un ultime regard à l’endroit où, quelques minutes auparavant, la jeune princesse se tenait encore. Désormais, il leur faudrait avancer à neuf.



 

Eliana flottait. Du moins, elle en avait la sensation. Son corps lui paraissait extrêmement léger et elle n’avait pas l’impression de reposer sur quelque chose. Etait-ce ça, la mort ? Ce n’était pas aussi douloureux que ce qu’elle aurait pensé. Ses blessures ne la faisaient plus souffrir. Autour d’elle, tout était silencieux. Etait-elle seule ? Elle savait d’avance qu’elle n’irait pas à Valinor. Alors où était-elle ?


« Tu es entre la vie et ce que l’on appelle la mort mon enfant. Ni totalement vivante, ni totalement décédée. »


La princesse sursauta. Elle n’avait pas parlé et pourtant, une voix répondait à ses pensées. Doucement, elle ouvrit les yeux. Tout était blanc. D’un blanc pur, immaculé. Elle n’aurait pu dire où exactement elle se trouvait. Pas le moindre objet n’était présent dans son champ de vision. Seulement cette femme, brune, qui la dévisageait d’un air tendre. Une femme qu’Eliana se rappela soudain avoir vue durant son enfance. Certains tableaux présents dans la galerie principale du palais où elle avait grandi la représentaient.

« Vous êtes… »


Sans cesser de lui sourire, la femme hocha doucement la tête. Ainsi, elle avait vu juste. Devant elle se tenait la plus belle des Maiar, Melian. Les pensées continuaient à se bousculer dans sa tête.


« -Je vais répondre à la plupart de tes interrogations mon enfant. Il est temps désormais que tu saches qui tu es et d’où te viennent les dons que tu possèdes et dont tu ignores encore une partie de leur étendue. Il y a très longtemps, j’ai accordé à un de tes ancêtres le don de la médecine. Mais pas n’importe qu’elle médecine. Une médecine ancestrale, connue seulement de quelques Valars, dont la clé était le lien avec la nature. Si au départ, ton peuple l’utilisa pour soigner les maux que les guérisseurs ne savaient pas guérir, ce don s’oublia peu à peu avec le temps, notamment lorsque les Nimrols furent chassés de leur terre. Aujourd’hui, rare sont ceux qui possèdent encore mon cadeau. Tu es l’héritière d’un savoir très puissant. Mais prends garde, mon enfant. Si ce don à le pouvoir de guérir n’importe quel mal, entre de mauvaises mains, il a aussi le pouvoir de faire des choses atroces.

-Dame Melian… Comment puis-je utiliser mon don au mieux ? Au fond de moi, je sens que lorsque j’utilise ma magie, elle ne réagit pas complétement à mon appel, comme si une part résitait.

-Tu devras le comprendre par toi-même, mon enfant. Cette magie est liée à toi et à tes émotions. A toi de choisir quelle voie tu veux emprunter et l’utilisation que tu veux en faire. »


La Maia se leva doucement et s’éloigna de sa patiente de quelques pas. D’un mouvement du poignet, elle fit apparaître deux portes, tout aussi lumineuse l’une que l’autre. Elle se retourna vers Eliana et lui sourit d’un air encourageant.


« Maintenant mon enfant, il va falloir faire un choix. Je te l’ai dit, tu n’es ni tout à fait morte, ni tout à fait vivante. Tu peux choisir de partir définitivement, et de rejoindre tes ancêtres. Ou tu peux choisir de rejoindre les vivants et ceux qui sont chers à ton cœur, afin d’accomplir ce pour quoi tu as été choisie. »


Interdite, Eliana regarda la Maia. Dans les yeux de son interlocutrice, elle ne lut aucun jugement, seulement une grande douceur. C’était à elle de faire ce choix, et elle devait choisir seule, sans qu’aucun conseil ne vienne altérer son jugement. Elle devait écouter son cœur. Et au fond d’elle-même, elle savait que ce choix était déjà fait. A son tour, elle s’approcha des deux portes.


« Avec votre permission, dame Melian, je choisis de vivre et retourner sur la Terre du Milieu. »


Un fin sourire étira les lèvres de la Maia. Dans ses yeux, Eliana eut la sensation que sa bienveillance s’était accrue.


« Tu es courageuse mon enfant. En réponse à ton courage, les Valars m’ont demandé de te remettre ceci. Maintenant va. »


Avant que la jeune princesse ne puisse regarder ce que Melian lui avait mis autour du coup, elle se retrouva aspirée par la porte de droite. Avant de sombrer à nouveau, il lui sembla cependant entendre une dernière fois la voix de son hôtesse.


« J’espère que tu me pardonneras de ne pas avoir soignée l’intégralité de tes blessures. Mais les elfes sont souvent plus accueillants lorsque leur interlocuteur est blessé. »


Puis, à nouveau, ce fut le trou noir.




Quand elle se réveilla à nouveau, elle ne sut pas dire où elle se trouvait. Devant elle s’étendait une longue plaine, vide de toute vie. A la limite de ce que ses yeux d’elfe pouvaient distinguer, il lui sembla apercevoir l’orée d’une forêt. En essayant de se relever, elle s’aperçu qu’elle se trouvait en hauteur par rapport à la plaine. Derrière elle se trouvait une immense montagne. Tant bien que mal, elle se remit debout, tout en s’apercevant que ses blessures étaient toujours présentes, et bien plus graves qu’elle ne l’imaginait. Les pierres avaient ouverts des entailles à plusieurs endroits sur son ventre et ses bras, et elle se rendit compte avec une horreur grandissante que la longue cicatrice qui partait du creux de sa poitrine jusqu’à son nombril s’était elle aussi rouverte.


Vacillante, elle fit quelques pas avant de manquer de s’effondrer. Sa conscience lui disait de se mettre à l’abri, mais sur cette terre aride, aucun endroit ne semblait pouvoir convenir. Et elle sentait qu’elle n’aurait pas la force de rejoindre la forêt qu’elle voyait au loin. Si quelqu’un de malintentionné se dressait devant elle, elle n’aurait pas la force de se défendre.


Quand elle tomba à nouveau à genoux, un doux tintement se fit entendre au niveau de sa gorge. Interrogative, elle se découvrit un nouveau bijou, comprenant qu’elle avait dans les mains le cadeau de la Maia. En l’observant plus attentivement, son souffle se coupa. Elle reconnaissait ce pendentif pour en avoir vu des similaires aux cous des elfes de Fondcombe et du prince de la Forêt Noire. Les Valars lui avaient remis un pendentif d’immortalité. Son peuple avait été privé de ce symbole lors de leur exil. Ce bijou signifiait que les Valars lui accordaient leur confiance. Pour la première fois de son existence, Eliana se sentit fière d’être une elfe.


Soudain, un mouvement à sa gauche attira son attention. A quelques mètres d’elle arrivait un grand cheval noir. Il trotta jusqu’à elle avant de pencher son museau.


Douloureusement, Eliana esquissa un sourire. Shaylan l’avait retrouvé.


« Bonjour mon beau. Je suis contente de te voir. »


Doucement, le cheval se glissa vers elle. Il semblait vouloir l’aider à monter sur son dos. Après de nombreux efforts, elle y parvint. Elle se pencha en avant et s’accrocha à la crinière de son destrier tout en murmurant.


« Je ne sais pas où aller Shaylan. Mes blessures m’épuisent et je n’ai plus assez de force pour utiliser la magie pour les soigner. Je te fais confiance mon beau. Emmène-moi en lieu sûr. »



Sans attendre, le cheval repartit à travers la plaine. Sans se questionner sur sa destination, Eliana se laissa bercer par les ballottements de son cheval et glissa dans le sommeil.

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