Sienna

Chapitre 27

2478 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 15/02/2020 18:36

Je me réveillai presque en sursaut. Newt remua légèrement mais n’ouvrit pas les yeux. Je me mis difficilement debout, les muscles endoloris et fis quelques pas, resserrant ma veste autour de mes épaules. Les rafales de vent n’étaient plus aussi violentes que la veille, mais l’air était frais. Je passai silencieusement au dessus de Fry et Thomas qui dormaient encore. Je levai ensuite le nez vers la sortie que nous avions emprunté la veille et tendis l’oreille. Les zombies semblaient partis, l’endroit était désert et silencieux. Je fis quelques pas vers la droite et gravit la dune qui nous avait plus ou moins protégé du vent durant la nuit. Je parvins au sommet et sentis mon cœur louper plusieurs battements devant la scène apocalyptique qui s’étalait devant mes yeux. Des immeubles à perte de vue, détruits, en ruines. Une ville fantôme désertée depuis des lustres. Il n’y avait aucun signe de vie quelconque. Le cœur battant, je me demandai ce qui avait bien pu se passer pour en arriver là. Et si le reste du monde était dans le même état… 

La voix de Thomas rompit le silence ambiant.

- Hé ! Hé ! Dégage de là, toi ! 

Je me retournai et vis un corbeau s’envoler avec un croassement lugubre. Thomas se releva et, comme moi quelques minutes avant, inspecta les alentours du regard.

- Ils sont partis ? S’enquit Minho, la voix ensommeillée. 

- Ouais, répondit Thomas. Jusqu’à la prochaine fois. 

Newt se redressa à son tour et son regard se posa instantanément sur moi. Il formula silencieusement « ça va ? » et j’acquiesçai. 

- Faut qu’on y aille, dit-il en se relevant à son tour. 

Thomas secoua la tête et le groupe commença à s’agiter. 

- Allez, on remballe, les pressa t-il. Aris, debout. Fry, Winston. On y va.

Je perçus le cri de douleur étouffé que lâcha Winston en tentant de se relever. Le bandage de fortune que lui avait fait Teresa la veille était imbibé de sang. Fry s’approcha de son ami.

- Ça va mec ? Aller, viens, ajouta t-il en lui tendant la main. 

Il releva Winston tandis que les autres remettaient leur sac à dos en place. Puis ils me rejoignirent au sommet de la dune. Je sentis la main de Newt se poser sur le bas de mon dos et se raidir lorsqu’il se rendit compte du spectacle désastreux. Un silence de mort s’abattit sur le groupe quelques minutes, le temps que chacun prenne conscience de l’ampleur de la catastrophe. C’était peut-être la seule chose sur laquelle WICKED n’avait pas menti…

Thomas prit une nouvelle fois les devant et descendit la dune pour se diriger vers la ville. Le groupe suivit ; Newt et moi restâmes à l’arrière. Nous traversâmes silencieusement les rues jonchées de décombres en tout genre. C’était une vraie scène de guerre, comme si la ville avait littéralement était bombardée. Le silence environnant rendait les lieux encore plus inquiétants. 

- Putain, qu’est ce qui s’est passé ? Souffla Fry qui marchait devant nous.

- J’en sais rien, répondit Newt. Mais ça fait bien longtemps que cet endroit est inhabité. 

- J’espère que toute la planète n’est pas comme ça, commenta Julian. 

Je continuai de marcher, les yeux vers les cimes en ruines des immeubles. C’est alors qu’un bruit inhabituel me parvint. Je m’arrêtai, stoppant Newt dans sa course. Je tendis l’oreille.

- Attendez, interpelai-je les autres. 

Le groupe s’arrêta et ils se retournèrent. 

- Écoutez. 

Les bruits des rotors me parvinrent alors distinctement.

- Cachez vous ! Vite ! Les pressai-je. 

- Là ! La dessous ! Dit Minho.

Il désigna un long bloc de béton qui, en tombant, avait formé des cavités en dessous. Nous nous y précipitâmes. Passant discrètement la tête dehors, j’observai deux hélicoptères et un énorme avion à la forme bizarre passer au dessus de nos têtes. Ils s’éloignèrent rapidement, remuant le sable derrière eux. 

- Ils n’arrêteront pas de nous traquer, souffla Newt. 

- Fais chier, lâcha Minho. 

- Faut pas rester là, enchaina Thomas. 

Nous sortîmes de notre cachette et reprîmes notre route à travers les débris. Ce qui avait probablement été un boulevard était barré par un immeuble qui s’était couché en travers de la route. Nous commençâmes notre ascension ; je parvins en haut la première. C’était un exercice facile pour moi. Un peu moins pour Camille et Julian. Je les aidais autant que possible. 

- Vous tenez le coup ? Demanda Thomas au reste du groupe. 

Thomas nous avait presque rejoint. J’observai la montée des autres. Winston, dernier de la file, semblait avoir des difficultés. Mais il s’accrochait et continuait son ascension. Nous parvînmes tous en haut et nous sortîmes de la ville au bout d’une heure de marche. Le soleil était haut maintenant et la température grimpait. Au delà de la ville, il n’y avait que du sable à perte de vue. Nous continuâmes notre route jusqu’à ce que Thomas s’arrête. De là où nous étions, nous avions une vue imprenable sur la ville désormais ensevelie sous des milliers de tonnes de sable. Thomas désigna l’horizon.

- Voila les montagnes. 

En effet, au delà de l’immense plaine désertique, apparaissaient de hautes montagnes. 

- C’est là qu’on va, ajouta Thomas.

- Alors on est pas arrivés, commenta Newt. 

- Raison de plus pour continuer à tailler la route. 

A ce moment, Winston tomba soudainement au sol et glissa quelques mètres sur le sable.

- Hé Winston ! Paniqua Fry.

Nous fûmes près de lui immédiatement. Il paraissait à peine conscient et avait des difficultés à respirer. Je ne m’étais pas rendue compte que son état avait autant empiré. 

- Winston ! Winston ! L’appela Thomas en prenant son visage entre ses mains. 

- Il a une sale blessure, déclara Fry. 

- Ok, intervint Teresa qui peinait à garder son calme. Qu’est-ce qu’on fait ? 

Elle regarda Thomas avec insistance mais celui-ci semblait à court d’idée. Newt le comprit également et préféra reporter son attention sur Winston. 

- Hé mec, est ce que tu m’entends ? Ça va aller.

La respiration de Winston se fit encore plus saccadée et il ne parvint pas à répondre. Newt et Thomas échangèrent un regard avant de décider qu’il fallait continuer. Les garçons fabriquèrent rapidement une civière de fortune avec quelques vêtements et des bouts de bois trouvés par ci par là. Puis nous reprîmes une nouvelle fois notre route, Minho et Fry se chargeant de traîner Winston, installé sur la civière, derrière eux. 

Nous progressâmes ainsi quelques heures en plein désert. Le vent s’était à nouveau levé et les rafales étaient de plus en plus fortes. De petits tourbillons de sable se formaient et venaient fouetter les jambes et le visage. Je me protégeai tant bien que mal à l’aide de ma capuche et de mon foulard. Il devenait presque impossible d’avancer.

- Il faut trouver un abri ! Cria Newt à Thomas pour couvrir le bruit du vent. 

Thomas acquiesça et nous nous arrêtâmes quelques minutes plus tard à l’abri d’une petite ruine. Nous déposâmes nos sacs au sol et Fry et Minho installèrent Winston à l’ombre et à l’abri du vent. Il paraissait à peine conscient. 

Newt, Minho et Fry s’étaient installés sur un rondin de bois, partageant le peu d’eau qu’il restait dans la gourde de Minho. Et Camille, Julian et Aris s’étaient adossés contre un mur de béton, l’air angoissés et fatigués. Je m’assis près d’eux.

- Tout le monde va bien ? M’enquis-je.

Aris déglutis difficilement avant de hocher silencieusement la tête. Julian acquiesça et Camille posa sa tête contre le mur en poussant un soupir. 

- Rien ne se passe comme prévu, lâcha t-elle tout bas. 

Je levai la tête vers elle en fronçant les sourcils. Elle ne pouvait pas déjà baisser les bras. 

- C’est parce que rien n’était prévu, répondis-je avec pragmatisme. 

Elle haussa les épaules et ses yeux brillèrent. 

- Cam, la secouai-je, c’est pas ce à quoi on s’attendait, je te l’accorde. Mais il faut faire avec, on a pas le choix. 

- Je sais. Mais c’est pas pour autant que c’est simple. 

- Ça ne l’est pour personne, soufflai-je en jetant un œil à Julian. 

Il affichait un petit air triste qui me fit mal au cœur. 

- Hé cow boy, arrête de faire cette tête. Tu ressembles davantage à Lucky Luke quand tu souris. 

Je me souvins de la petite figurine en bois qu’avait fabriqué Julian au Bloc. Il m’avait confié qu’il se souvenait adorer les westerns et les indiens.

- N’importe quoi, Lucky Luke ne sourit jamais, répliqua t-il en s’animant un peu. 

- Ouais, c’est vrai, c’est un dur, souris-je. 

- Moi aussi, je suis un dur, affirma t-il en retrouvant le sourire. 

Camille lui ébouriffa les cheveux avec un petit sourire affectueux. Je pris congé pour rejoindre Newt qui m’accueillit avec un tendre sourire. Je m’installai à ses côtés. Ils étaient tous au chevet de Winston, dont l’état ne s’améliorait toujours pas. Maintenant que j’étais témoin de ce qu’était « La Braise » - car c’était bien ça n’est ce pas ? – je me demandai si la vie des gens ici n’avait pas été finalement plus dure que la notre, au Bloc. 

Newt me sortit de mes pensées en posant sa main sur ma jambe. Il me fit signe de le suivre. Nous nous éloignâmes et fîmes le tour du petit bâtiment. Je glissai ma main dans celle de Newt et il la serra. Lorsque nous fûmes à l’abri des regards, il approcha ses lèvres des miennes avec urgence. Je savourai ce baiser tant attendu.

- J’avais envie de me retrouver seul avec toi depuis des heures, soupira t-il. 

- Les contraintes de la vie en communauté, commentai-je. Ça nous connaît…

- Ouais. Comment tu vas ? S’inquiéta t-il avec cette expression si bien à lui qui me faisait craquer. 

- Ça va. On ne peut pas dire que la situation soit simple mais… on va trouver une solution. 

Newt secoua la tête avec scepticisme. 

- Je sais que tu ne voulais pas rester là bas, dit-il, et je sais aussi que tu avais raison. Mais je ne peux pas m’empêcher de me dire qu’on a peut-être fait une erreur. Qu’on leur fait prendre tous ces risques pour rien. 

- Ils ont tous choisi de venir, tu n’es pas responsable d’eux.

- Tu te sens responsable de Camille et Julian pourtant, releva t-il en haussant un sourcil.

Je fis la moue.

- Tout le monde est responsable de Julian, c’est un gosse. 

- Et Camille ? J’ai l’impression qu’il y a autre chose que la simple envie de prendre soin d’une amie.

Je souris devant sa perspicacité.

- C’est vrai, il y a autre chose. Ou plutôt quelqu’un d’autre. 

Je me laissai glisser contre le mur et m’assis dans le sable. Newt m’imita. 

- Ben était mon meilleur ami, lui racontai-je. Un sprinteur hors pair. Et Camille et lui étaient très proches. 

- Tu en parles au passé, remarqua Newt.

- Il s’est fait piqué dans le labyrinthe. Il n’a pas survécu. 

Newt m’attira contre lui.

- Je suis désolé. 

Je haussai légèrement les épaules. A ce stade, nous avions tous perdu quelqu’un.

- Nous n’étions que deux ce jour là, continuai-je. On avait repéré une nouvelle section du labyrinthe mais elle se comportait bizarrement. On avait mis en place des tours de garde pour pouvoir la cartographier. Ben et moi avions pris le premier. Un griffeur nous est tombé dessus. Tu imagines la suite.

- Oui, j’imagine bien, souffla t-il en se mordant l’intérieur de la joue. 

- Je l’ai ramené avec moi. Et il a préféré en finir lui-même avant de devenir dingue. 

- C’était courageux, commenta Newt en caressant doucement ma joue. Et Camille dans tout ça ? 

- C’est ce qu’il y a de plus…degueulasse, lâchai-je avec dégoût. Quelques minutes avant de se faire piquer, il avait décidé d’aller voir Camille en rentrant. Pour lui dire qu’il l’aimait. 

Newt remua légèrement mais garda le silence. Je lui en fus reconnaissante ; parler de Ben était douloureux mais j’avais besoin que Newt connaisse son existence. Et je préférai ne pas m’arrêter une fois lancée. 

- Avant de mourir, il m’a fait promettre de protéger Camille. C’est…important pour moi.

- Je comprends. 

Newt se tourna complètement vers moi ; il avait l’air contrarié.

- Mais tu ne dois pas prendre trop de risques, même pour elle.

Je lui répondis par un sourire indulgent.

- Je sais que tu t’inquiètes pour moi. Mais si je prends des risques, ils sont mesurés. 

- Je veux juste que tu sois prudente – autant que faire ce peut, nuança t-il avec une grimace. 

Je posai mon front contre le sien.

- Je serais prudente, lui promis-je. 

Il m’embrassa en souriant. D’un long baiser doux et intense. Quand il se recula, il poussa un soupir de frustration.

- J’aimerais tellement pouvoir passer du temps avec toi, j’ai tellement de choses à te dire, souffla t-il. 

- Ca viendra, lui assurai-je. 


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