Retour à l'océan

Chapitre 21 : Le vrai visage de Vénus

3122 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 13/02/2023 00:32

Du temps où on lui répétait que les humains étaient dangereux, qu'elle ne devait en aucun cas les approcher ou même toucher un quelconque objet provenant de la surface, où sa fascination pour les humains et tout ce qui venait de la surface était vu comme une hérésie voire une aberration, Ariel n'avait jamais cru à ses histoires. À force d'admirer la beauté des objets qu'elle avait amasser en secret, elle n'arrivait pas à comprendre comment un monde pouvant concevoir et créer de tels trésors et de tels merveilles pouvait être aussi mauvais que le décrivait tous ses aînés. Et même durant son séjour parmi les humains, elle s'était rendu compte au fil des années qu'ils n'étaient certes pas tous des anges mais en aucun cas plus abjects que la plus viles créatures vivant au fond des mers et certainement pas assez pour réprouver un monde entier. Pas plus que le monde aquatique mériteraient d'être honni par ceux de la surface. Pas avec toutes ces merveilleuse choses qui existaient en ce monde et n'attendaient que d'être decouvertes.

Pourtant, quand a ce moment là Ariel se fit trainer sur le pont et agressé par les marins qui "l'accueillaient" et la lorgnaient comme un poisson qu'ils étaient sur le point de frire et de déguster goulûment, ce fut comme si les propos médisants de Triton à l'encontre des humains se venaient de se concrétiser, comme si son père avaient raison depuis le début à leur sujet.

Elle n'arrivait pas à comprendre pourquoi ils la traitaient aussi brutalement et avec autant de malveillance et de lubricité dans le regard. Que leur avait-elle donc fait pour être traitée de la sorte ?

Elle comprit alors mais un peu tard que ce n'étaient pas des marins qu'elle avait l'habitude de côtoyer du tant où elle vivait à la surface, ni ceux avec lequel Éric avait pour habitude de naviguer. C'étaient des pirates. En tout cas ils en avaient l'apparence, bien qu'Ariel ne se souvient pas avoir vu de pavillon noir orné d'une tête de mort flotter du haut d'un des mâts, autrement elle ne se serait approché du navire.

Elle se débattit comme elle pouvait contre ses agresseurs qui lui tiraient les cheveux ou sa queue de poissons quand ils essayaient pas de lui arracher son haut. Mais elle avait beau mordre et donner des coups de coudes ou des coups de queues, elle n'était clairement pas de taille à venir à bout de ses brutes. Elle n'était plus dans son élément désormais

En désespoir de cause, elle parvint néanmoins à subtiliser la rapière d'un de ses agresseurs avec laquelle elle l'pes tint à distance après en avoir blessé deux ou trois et s'être adossée contre une pile de tonneaux.

Elle ne fut pas tiré d'affaire pour autant. Ces agresseurs étaient également armés, tous baraqués et trop nombreux pour qu'elle pût rejoindre la mer et ainsi leur échapper.

Si seulement elle avait retrouvé ses anciennes jambes, elle aurait ainsi pu mettre en pratique les cours d'escrime qu'elle avait suivi avec Éric.


Ce fut alors que celui qui semblait être le capitaine, un homme balafré vétu d'un manteau noir rapiécé et coiffé d'un tricorne, se fraya un chemin parmi ses hommes pour approcher la sirène d'un pas claudicant.

Il se figea net quand son unique œil valide se posa sur Ariel, comme s'il venait de voir un fantôme.

— Milles sabords ! s'exclama-t-il. Aurais-je déjà vu cette créature ?

— J'en doute ! lui rétorqua Ariel sur un ton de défi. Je ne fréquente jamais les individus de votre genre. Et je n'oublie jamais un visage, surtout s'il est aussi laid que le vôtre.

— Une forte tête, à ce que je vois ! commenta le capitaine nullement impressionné. Bah, je maintiens que la vôtre ne m'est inconnu...

Il tata distraitement quelque chose comme un pendentif derrière son manteau puis son visage se figea de nouveau avant de s'éclaircir.

— Ça y est, je m'en souviens ! s'exclama finalement le capitaine. C'était il y a vingt-cinq ans, quand j'étais second dans la piraterie ! On avait pêché une sirène qui vous ressemblait à s'y méprendre ! Même qu'elle portait ceci !

Elle sortit de sous son manteau le pendentif qui s'avérait être un diadème dorée accroché à son cou par une chaîne et qui n'était pas sans rappeler la couronne du roi Triton. Ariel comprit finalement et avec horreur qu'il s'agissait du diadème de la reine Athéna, que la sirène que le capitaine évoquait n'était autre que sa mère.

— Je me souviens même qu'on avait provoquer la colère du roi des océans en la faisant prisonnière ! se vanta le capitaine. Il voulait faire sombrer le navire avec son trident mais on lui a fait comprendre que s'il tentait quoi que ce soit, sa précieuse reine mourrait soit de notre main soit de la sienne. Vous aurez l'autre barbu vu se résigner, les gars ! On était assez fier de nous ! On avait fait courber l'échine au maîtres des océans.

Était-ce dû au ton moqueur qu'employait le capitaine en évoquant ses parents ? Au fait qu'elle se trouvait face à l'un des responsables de la disparition de sa mère ? En tout cas Ariel fut envahie d'une colère noire qu'elle n'avait pas ressenti depuis qu'Ursula s'était servie d'elle pour s'emparer de la couronne de son père.

— Qu'est il advenu... de la sirène... que vous avez capturé ? demanda-t-elle tandis qu'elle se hissait sur la pile de tonneaux derrière elle.

— Pourquoi, c'était un parent à vous ? lui rétorqua le capitaine avec dédain. Bah, il est trop tard pour se soucier d'elle désormais.

C'en fut trop pour Ariel qui de rage s'élança sur le capitaine la rapière au poing, prête à le taillader, en criant

— ESPÈCE DE MONSTRE !

Le capitaine para son attaque de son sabre et fit voler la rapière des mains de la sirène qui se retrouva à nouveau allongée sur le pont, désarmée et à la merci des marins. Notamment du capitaine qui plaça la pointe de son sabre juste sous sa gorge.

— Vous avez de la chance que je me sois fait corsaire, lui susurra-t-il avec toujours autant de dédain. Car j'ai des ordres à respecter. Comme ne pas blesser de sirène avant le début des opérations. ALLEZ, VOUS AUTRES ! METTEZ MOI ÇA AUX FERS !


En moins de temps qu'il n'en fallait pour le dire, Ariel fut traînée par deux marins vers le cachot à fond de cale, plus désemparée que jamais.

Elle s'était gardée d'évoquer sa fille restée sur l'île de peur qu'ils ne la furent du mal mais par conséquent, elle était en train d'abandonner Mélodie à son sort. Ce alors qu'elle venait de lui promettre de ne jamais lui faire défaut. Pour couronner le tout, elle ne pouvait cont cher personne là on l'emmenait et personne parmi son entourage ne savait où elle se trouvait.

Elle fut cependant pas seule dans le cachot où on l'y enferma.

Elle eût la surprise et le bonheur de retrouver Grimsby... qui semblait bien diminué en raison de sa captivité.

Après une brève mais non moins chaleureuse étreinte, Ariel demanda au vieux conseiller ce qui l'amené aux fers. Ccelui-ci lui expliqua alors toute son histoire, son enquête sur le testament égaré d'Éric, le complot fomenté par Ulrich et le notaire pour qu'il pût s'emparer du château ainsi du royaume de son cousin et ainsi réquisitionner toute la flotte pour reprendre aux sirènes les richesses perdus en mer.

Ariel n'en croyait pas ses oreilles. Tant de magouilles pour qu'on chassât elle et sa fille du château de son regretté mari et qu'ensuite on pût piller les richesses que son peuple aurait accumulé au fil des siècles.

Elle n'avait vraiment porté le cousin Ulrich dans son cœur mais maintenant qu'elle savait la vérité sur ses réelles intentions, le peu de respect qu'elle avait pour cette individu s'écroulait tel un château de cartes.

Dire qu'il s'agissait d'un parent d'Éric, avec qui la sirène avait fait sa vie pendant douze ans et eut Mélodie. Qu'un être aussi méprisable et machiavélique pouvait avoir un lien de parenté avec son regretté mari, si chevaleresque et attentionné de son vivant, dépassait son entendement.

— Et ce n'est pas tout, reprit Grimsby. Il y a aussi cette femme... La fiancée de votre cousin...

Ariel avait complètement oublié ce détail. La fiancée d'Ulrich, qui fut son prétexte pour chasser Ariel et sa fille du château.

— Oui et alors ? demanda-t-elle intriguée.

— On parle de moi on dirait ! intervint au loin une voix ressemblant à s'y méprendre à celle d'Ariel, sans laisser le temps à Grimsby de répondre.


Ils virent alors la dénommée Vénus vêtue d'une cape noire, descendant avec prudence dans la cale, relevant les pans de sa robe couleur indigo pour lui éviter d'être souillée par les saletés traînant au sol et éclatant son chemin avec une lanterne.

— C'est bien elle, souffla Grimsby à Ariel.

— On m'a prévenu qu'un de nos bateau venait à l'instant de pêcher une sirène, dit Vénus en s'avançant vers la cage avec nonchalance. Une sirène avec des cheveux roux. J'ai tenu à la voir en personne. (Elle éclaira la cage avec la lanterne) Ooooh ! Il semblerait que nos hommes aient eu une belle prise !

Ariel tenta de scrute le visage de sa "visiteuse" malgré la pénombre et la faible lueur qu'émettait la lanterne, se demandant pourquoi elle l'intéressait autant.

Il fallu cependant que Vénus accroché la lanterne à un support cloué aux barreau de la cage pour que celle-ci éclaira plus distinctement son visage.

Ariel reconnu alors avec stupeur l'apparence humaine qu'Ursula avait prise douze ans auparavant pour envoûter Eric de l'entière a ce qu'il l'épousât. Si ce n'était encore un tour de cette ville sorcière, c'était le parfait sosie de son déguisement.

La stupéfaction de la sirène n'échappa cependant pas à l'attention de Vénus qui l'a scrutait d'un œil plein de malice.

— Tu sembles surprise de me voir ? lui demanda-t-elle. Il est vrai que ça fait un bail... pauvre âme en perdition.

Ariel crut un instant que son cœur s'arrêtait de battre en entendit ces mots.

Ce n'étaient seulement les mots mais aussi la voix quand Vénus les avait employé.

Sa voix avait soudainement, passant d'une voix douce et mélodieuse à une voix grave et rauque. Une voix qu'Ariel ne connaissait que trop bien. En particulier pour avoir employé ces même mots douze ans plus tôt.

La sirène fut tant déconcertée qu'elle peinait à aligner ou même a trouver les mots.

— Est-ce...? Serait-ce... ?

Ta marraine la bonne fée ? railla Vénus en conservant la voix d'Ursula.

— N-n-non, c-c-c'est impossible ! balbutia Ariel de plus déconcertée. V-v-vous êtes... Vous êtes morte ! Eric vous a... Vous a...

— Embrochée ? termina Vénus en se saisissant distraitement d'un vieux harpon qui trainait dans un coin de la cale. Avec cette vieille épave ? Oh oh, il ne m'a pas loupé, je peux te le confirmer ! Rien que pour cela, je plus que fière de l'avoir envoyé six pieds sous terre.

— Que... Qu'est-ce que vous dites ? demanda Ariel choquée.

— Éric est mort d'une chute de cheval, rappela Grimsby également interloqué. Comment...?

— Vous croyez sincèrement qu'il ne s'agissait que d'un banal accident ? Alors qu'il suffisait d'une sangle à demi-tranchée, d'exciter un peu l'animal et le tour est joué.

La sirène n'en revenait pas de ce qu'elle venait d'entendre. Ce que tout le monde avaient pris pour un bête accident, qui lui avait pourtant privé de son mari et l'avait contrainte de déménager avec sa fille, n'était ni plus ni moins que le fait d'une sorcière revenue elle ne savait comment d'entre les morts pour la tourmenter à nouveau.

Furieuse, Ariel tenta de se redresser pour se jeter sur cette femme qui se moquait de la mort de son mari. Mais sans jambe, elle ne pût que trébucher et se ramasser sur le sol.

— Comment... Comment est-ce possible ?questionna la sirène a la fois furieuse et désemparée. Comment se fait que vous soyez... Toujours là ?

— Tu oublies que je fus une sorcière, de mon vivant, lui répondit Vénus. Et une sorcière qui se respecte a toujours plus d'un tour dans son sac, sinon un second souffle. Même dans la plus humiliante des défaites. Et même dans la mort.

" Mais pour ne rien te cacher, je reconnais que cela n'a pas été facile de revenir d'entrée les morts. Heureusement que je me suis fais des amis dans l'au-delà. Il m'en beaucoup aidé.

— Quel genre d'amis ? questionna Ariel sceptique.

— Q-q-quel genre d'amis ? demanda à son tour Grimsby d'une voix plus tremblante.

— Le genre qui n'existe que dans vos pires cauchemars, si vous voulez tout savoir, leur répondit sèchement Vénus. Quoi qu'il en soit, c'est bien grâce à eux que je suis là, à vous parler à travers des barreaux en ce moment-même. Et légèrement plus puissante que je ne l'étais de mon vivant. Tu as certainement remarqué, ma chère petite sirène, que je n'ai plus besoin de subtiliser ta voix pour t'imiter (elle modulait sa voix à volonté entre la voix douce d'Ariel et la voix rauque d'Ursula) . Et ce n'est que le début.

— Comment ça ? demandèrent Ariel et Grimsby d'une même voix.

— Je mentais tout-à-l'heure en disant que me le tenais là devant vous. En vérité, la femme que vous voyez et qui vous parle de l'autre côté de ses barreaux... n'est qu'une partie de moi.

— Seulement "une partie" ? la questionna Ariel sceptique. Dans ce cas où est l'autre ?

— "Où sont les autres", devrais tu dire ! la corrigea Vénus. Un peu partout, disons. Et sous bien différentes formes. Par exemple, as-tu remarqué toutes ces méduses violettes qui pullulaient dans ton océan ?

— Les méduses... Vous ne voulez pas dire que...

— Comment expliques-tu que ta fille ait si soudainement retrouvé son apparence humaine... si je ne l'avais pas marqué via l'une d'elles ?

— C'était donc vous ! ...

— Cela t'en bouche un coin, hein ?

Refusant de se laisser intimider, Ariel toisa sa geôliers en bombant le torse

— Je ne sais pas ce que vous mijotez mais jamais je ne vous laisserais prendre le contrôle d'Atlantica !

Vénus répond d'un éclat de rire.

— Qu'est-ce ce qu'il y a de si drôle ? demanda Ariel avec impatience.

— Ne m'as tu donc pas écouté quand je disais être plus puissante que je ne l'étais de mon vivant ? La couronne de ton père, le Trident, Atlantica, tout ça n'est plus que broutilles a mes yeux depuis que j'ai triomphé de la mort. Désormais je nourris de projets plus ambitieux qu'être la reine de ton pathétique royaume. À commencer par... Toi.

En l'espace d'un instant, le harpon que Vénus tenait dans la main se mit à léviter au dessus de sa paume. Puis en une fraction de seconde, le harpon passa à travers les barreaux de l cage pour se planter jusqu'aux arrêtes dans la queue de poisson d'Ariel, infligeant à cette dernière une douleur indicible.

La sirène tenta de le retirer mais même avec l'aide de Grimsby, le harpon semblait vouloir s'accrocher dans sa chair, comme si l'arme y était maintenu par le mental de Vénus.

— Considère ça comme un avant de goût de la souffrance de ce que je te réserve, lui dit elle avec sadisme.

— Pourquoi ? demanda Grimsby révolté. Pourquoi vous acharnée vous sur cette sirène.

— C'est grâce à moi que cette sirène a pu concrétiser ses rêves ! C'est grâce à moi qu'elle a pu épouser votre imbécile de prince ! Grâce à moi que celui-ci soit tombé amoureux de cette petite impertinente ! Grâce à moi qu'ils ont eu leur si précieuse Mélodie ! Et comment elle et son prince adoré prince m'ont remercié ?... Alors je m'arrange pour reprendre tout ce que tu as eu grâce à moi. Et même plus, tout ce qui t'es cher. Jusqu'à ce qui ne te reste plus que les yeux pour pleurer.

— Vous... Vous mentez ! lui rétorqua Ariel tandis qu'elle luttait douloureusement contre le harpon accroché à sa chair. Ce que j'ai eu... C'est tout sauf grâce à vous... Vous n'avez fait que m'embobiner et le mettre des bâtons dans les roues. Vous n'avez fait que vous servir de moi pour parvenir à vis fins. En conséquence, je ne vous dois rien.

Soudain le harpon se délogea de lui-même de la queue de la sirène pour retourner dans la

— C'est donc ainsi que tu vois les choses ?... Soit ! Sache cependant que tu seras aux première loge pour assister à la phase finale de mon plan. Et tu ne seras pas déçu.


Vénus s'en alla en ricanant, jetant le harpon ensanglanté au sol.

Grimsby se dépêcha de déchirer un l'année sa veste pour ainsi bander la blessure d'Ariel.

— Je suis sincèrement désolé pour ce qui vous arrive, lui dit-il.

— Ne le soyez pas, vous n'y êtes pour rien, lui répondit la sirène plus désemparée que jamais. Cette sorcière a raison. Tout est de ma faute. Pourquoi a-t-il fallu que je signe ce maudit contrat ?

Et si ce n'était déjà fait, des êtres qui lui étaient chers allaient payer pour son erreur. Encore.

— Allons, c'est du passé tout ça ! Ce qui importe maintenant c'est de nous sortir de là, de déjouer les plans d'Ulrich et de... cette chose, et ainsi sauver nos royaumes respectifs. Vous avez bien un plan de secours, non ?

— Désolée, non.

— Pardon ? Mais enfin... D'aussi loin que je vous connais, vous vous êtes toujours montré débrouillarde ! Comment vous...?

— Pas cette fois, non. Cette fois je suis à cours d'idée.

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