L'Exécuteur
Ce chapitre a malheureusement été relu à la va vite… J'espère que ça ira quand même !
Salut à vous ! Je suis enfin de retour avec le chapitre 18 ! Il est un peu long, donc ça va aller, hein, vous n'allez pas me frapper… ? Non parce que je vous l'avoue, j'ai manqué un peu de motivation pour l'écrire… Peut-être parce que c'est les vacances ? Et puis aussi parce qu'il me reste un élément à trouver pour avoir toutes mes idées rassemblées, mais je ne suis pas encore parvenue à l'attraper… bref !
GRAND MERCI POUR VOS REVIEWS, JE VOUS AIME TOUS ! D'ailleurs, y en a certains qui me posent des questions sur ce qui va se passer... Vous êtes des curieux hein :3 Ca fait plaisir à voir ~ Mais vous savez bien que je ne peux pas vous répondre... pas de spoil dans ma maison !!
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Eren se réveilla d'un sommeil sans rêve. Face à lui, une horloge indiquait malheureusement une heure plus que tardive pour se lever : 13H37. Il se frotta vigoureusement les yeux, puis s'extirpa bien vite du canapé. Il faillit trébucher, mais se rattrapa bien vite à l'accoudoir. Il pouvait sentir une fameuse gueule de bois taper douloureusement à ses tympans, et son ventre lui tordait, son estomac ne contenant malheureusement pas suffisamment de nourriture pour absorber tout l'alcool qu'il avait ingurgité. Finalement, il se rassit lentement et se prit la tête dans les mains, coudes posés sur les genoux, ses mèches brunes qui avaient bien poussées venant lui chatouiller les pommettes. Sa soirée lui revenait progressivement en mémoire, et il grimaça, se pinçant l'arête du nez. Pourquoi avait-il fallu qu'il déblatère autant de conneries à Levi ? Des conneries totalement véridiques, qui plus est. Décidément, l'alcool ne lui réussissait pas.
« Putain…, gémit-il.
Des craquements résonnèrent derrière lui, le faisant se retourner brusquement. Le noiraud se tenait là, appuyé contre la cuisinière, un verre d'eau à la main, ses lèvres esquissant un mince sourire. Pour une fois il ne portait pas de costume, pas même une chemise. Seulement un jean bleu foncé et un tee-shirt blanc, et ses pieds étaient nus sur le parquet. Il parut alors au brun beaucoup plus… accessible. Bien que ses yeux soient encore cachés devant ces lunettes arrondies si intrigantes. Il n'était plus ni le Chien, ni cet homme si plein de sérieux enserré dans son costume lors de ses heures de travail. C'était simplement Levi, une personne ordinaire. Eren fit la moue, chassant ces pensées de sa tête.
- Tu jures à cause d'un certain mal de crâne ou bien parce que tu aurais dû passer ta nuit ailleurs ? fit le gérant de Titania d'un ton léger.
L'infirmier affala sa joue dans sa paume, et de l'autre main leva son index.
- Première suggestion, marmonna-t-il.
Ça le mettait mal à l'aise, d'avoir ainsi profité de l'ignorance de Levi. L'Exécuteur et le Chien. Ils avaient passés une bonne soirée ensemble, pour ne pas dire excellente. Eren avait pu le rencontrer sous un nouveau jour, beaucoup plus doux, sincère, voire expressif. Comme s'il ne s'était heurté jusque-là qu'à la coquille, mais qu'à l'aide d'illusions il avait eu l'accès au cœur. Des illusions malsaines. Mais il n'était pas parvenu à s'en empêcher, il avait eu ce besoin de pénétrer l'âme du noiraud, personnage en qui il se retrouvait tant. Et pourtant qui le détestait, à juste titre. Il ne l'expliquait pas, cette impression qu'il avait, ce lien de ressemblance qu'il pensait entrapercevoir entre eux deux. Mais ça le tiraillait dans un coin de sa tête, il était bizarrement intrigué. En relevant les yeux, il ne remarqua que maintenant que Levi s'était rapproché, et se tenait juste là, bien droit devant lui, tendant le verre d'eau qu'il tenait dans la main depuis que notre brun s'était réveillé. Dans son autre paume ouverte se trouvait un médicament blanc.
- Avale ça, ordonna-t-il. C'est un migralgine.
L'infirmier soupira. Il se sentait mal, il devait partir. Ce n'était pas réellement dû à une douleur physique, il s'agissait principalement là de culpabilité. Il se mit sur ses pieds, s'empara du médoc qu'il goba avec un peu d'eau, puis tendit le verre au noiraud.
- Merci. Je vais…
Il détourna les yeux, la mine embêtée, puis reporta son attention sur Levi. Ce dernier était décidément de petite taille, alors que lui-même n'était pas très grand. Ça serait presque… mignon. Il se mordit l'intérieur de la joue à cette pensée, retenant un rire. Le Chien, mignon ? C'était stupide. Le gérant était décidément plein de surprises. La poitrine de notre brun le pinça, et il serra les dents.
- Je vais partir, termina-t-il avec raideur.
Il baissait bien trop sa garde ces derniers temps. Levi sembla surpris, mais surtout – et ça se lisait clairement sur ses traits – déçu. Merde, ça déstabilisa Eren, qui ouvrit la bouche sans rien pouvoir dire. Il aurait voulu secouer le noiraud un bon coup. Ne fais pas ton naïf putain, réveille-toi ! Tu vois pas que je suis ce salaud d'Exécuteur ?! Ce changement d'attitude subi le prit lui-même au dépourvu, et il se retrouva là, bras ballants, sans savoir quoi dire. Non mais sérieux, c'est vrai quoi, qui soupçonnerait un jeune de vingt-deux piges fêtard qui aime faire le gosse, d'être en fait un tueur sanguinaire ?
- Pas de problème, répliqua le noiraud, qui avait repris son masque fermé.
Ah ça non, pas question.
- J'ai passé… une bonne soirée, continua-t-il.
Le brun hocha vigoureusement la tête, avec un large sourire. Il était parvenu à fendiller la carapace de Levi, il n'était pas question qu'il s'en forge une autre. Mais qu'est-ce que ça pouvait lui foutre au fond bordel ?! Parce qu'il est une bonne personne. Parce qu'il agit pour le bien de la ville, au péril de sa vie. Parce que lui aussi semble avoir une vie aussi bordélique que la sienne. Parce que pour une fois, l'Exécuteur ne serait plus désespérément seul. Le sourire de l'infirmier se fana. Ah, il venait de comprendre de quoi il s'agissait, cette émotion inconnue qui fleurissait en lui. Une sorte de … forme d'affection, encore interrogatrice. Mais elle était bien là. Eren s'était trouvé un allié. Des alliés. Hanji, Levi, Erwin… Les Rebelles. Et merde, ça faisait tellement du bien de ne plus se sentir aussi solitaire. Il n'avait plus à se chercher un chemin escarpé pour gravir une de ces nombreuses collines, à la place de ça il avait droit à une route joliment lisse qu'on plaçait bien en évidence devant lui et qui le mènerait au sommet d'une montagne. Toutes les décisions difficiles qu'il devrait prendre ne reposeraient pas uniquement sur ses épaules, ne dépendraient pas que de lui. D'autres supporteraient ce lourd fardeau, à ses côtés. Sans doute une des raisons pour lesquelles il avait rejoint l'organisation assez… facilement.
- Moi aussi, chuchota-t-il. C'était… différent.
- Inhabituel pour moi, rectifia Levi d'une voix presque tout aussi basse. Ça faisait pas mal de temps que je n'avais pas parlé aussi posément, de… de manière spontané on va dire. Une petite coupure agréable dans ce monde de dingue.
Il fit un petit sourire en coin, grattant distraitement les mèches courtes et corbeau du haut de sa nuque. Presque comme s'il était gêné de ce qu'il venait d'admettre. Mais Eren était d'accord avec lui, et ses mots résonnaient encore dans son crâne. Ce moment qu'il avait passé avec le noiraud avait été encore mieux que tous ceux qu'il avait eu avec Rei et Bert'. Bizarrement. C'était un peu comme ces instants qu'il avait avec ses amis proches, mais différemment. Car Levi ne lui posait aucune question trop indiscrète. Ou bien avait-ce été aussi bien car il s'agissait de la naissance d'une sorte d'amitié – ce qui s'en rapprochait le plus en tout cas – ? Ces débuts où l'on fait connaissance sont toujours si passionnants… Mais il y avait également autre chose. Ce lien, qui persistait, les rapprochant inexorablement l'un de l'autre. Principalement du côté d'Eren, puisqu'il connaissait la vérité de toute cette histoire, du moins la majeure partie. Il y avait comme un accord tacite entre eux. : chacun ses secrets, je respecte ça. Leur relation resterait ainsi seulement en surface, ne creusant pas trop profond. Mais ils avaient tous deux besoin de ça. Pour le moment. L'infirmier sortit de sa rêverie quand il remarqua que le gérant le fixait avec insistance. Et en effet il était resté planté là, les yeux dans le vague. Non mais pourquoi fallait-il qu'il ait autant de moments d'absence ? En un mouvement à l'allure mécanique, il porta la main à son ventre.
- J'ai encore vachement mal à la tête, je peux rester le temps que ça aille un peu mieux ?
Comme le noiraud ne disait rien, il se racla la gorge et reprit de manière hésitante :
- Enfin, si ça t'embête pas bien sûr. Je veux pas déranger.
Merde, pourquoi mentait-il aussi mal ? Son homologue se détourna, mais il le temps d'apercevoir son visage qui s'était éclairé. Eren se dit l'instant d'après qu'il avait vraiment bien fait de demander de rester.
- Idiot, souffla Levi. Oui tu peux rester.
Puis, se retournant à demi, il ajouta d'un air moqueur :
- Et ta tête se trouve plus haut, que je sache.
Ah oui, en effet il se tenait l'estomac à la place. Quel con. Il voulut répliquer que c'était parce qu'il avait mal ici également, mais referma bien vite la bouche. Il avait compris que ça n'aurait servi à rien à part l'enfoncer davantage.
- Comment va ton dos ?
- Oh, beaucoup mieux, je sens plus rien ! répondit-il, rassuré de la nouvelle tournure de leur semblant de conversation. Tu es réveillé depuis longtemps ?
Le noiraud se détourna et marcha en direction de la cuisinière.
- Deux heures, peut-être un peu plus.
Il continua tout droit jusqu'à la porte du fond, la salle de bain.
- Tu baves quand tu dors, lui signala-t-il de là-bas.
- Qu – Ce – ça veut dire que j'étais bien installé ! s'exclama-t-il, pris au dépourvu.
- C'est ça, ricana l'autre.
Ce dernier revenant bien vite avec une serviette dans les mains.
- Si tu tiens à rester, va prendre une douche. Tu pues l'alcool et la transpi à trois kilomètres.
Le brun se dirigea vers lui en faisant la moue.
- Sympa. », ironisa-t-il.
Mais il devait admettre que se laver lui ferait un bien fou. Il se sentait collant, et quant à l'odeur… Ouais, bref, Levi n'avait pas tout à fait tort. Il s'empara de la serviette que celui-ci lui tendait, lâchant une vague merci, et pour finir alla s'enfermer dans la pièce d'eau. Il se dévêtit, se mouvoir le réveillant un peu plus, puis actionna le robinet de douche. Avant d'enjamber le rebord de la baignoire, il se planta face au large miroir, et, constatant la sale mine qu'il arborait, il s'aspergea le visage d'eau fraîche. Il alla ensuite sous le jet d'eau chaude, laissant de longs ruisseaux brûlants couler sur sa peau fatiguée. Il ferma ses paupières et baissa le menton, l'eau venant crépiter contre son crâne, gouttant jusqu'au bout de son nez droit. Quand il rouvrit les yeux, ses pupilles glissèrent automatiquement vers son ventre. Sur sa cicatrice, celle qui partait du dessous de son nombril et longeait toute la moitié gauche de son estomac jusqu'à son flanc. Elle était laide, de la largeur de son annulaire et rosâtre, semblant encore boursouflée par endroits. Son regard descendit ensuite plus bas, du même côté, là où il y avait deux impacts de balle. Un au-dessus du genou, l'autre situé bien au centre de la cuisse. Il pouvait sentir ses pieds tannés contre la surface lisse de la baignoire, ainsi que l'épaisse corne qui les recouvrait. Le long de son mollet droit descendait une autre marque, fine et blanche, mais bien visible. Et il restait son dos.
Eren détestait son corps. Oui il était mince et parfaitement musclé, mais on ne pouvait passer à côté de sa peau couverte de vieilles blessures, hideuses à ses yeux. Il s'agissait là de lui, alors sans doute était-il davantage conscient de la présence de ces marques, de la place conséquente qu'elles prenaient sur son corps. Il ne voyait qu'elles. Et c'était moche. Il les haïssait, détestait de devoir se cacher derrière des pantalons même en été. Parce que ça lui rappelait à chaque fois sa condition, et les choses qu'il avait faites dont il n'était pas fier. Surtout maintenant, deux ou trois cicatrices qui étaient apparues afin de sauver le cul de policiers spéciaux. Il y en avait forcément eu au moins un parmi eux qui était corrompu.
Il eut tôt fait de sortir de la douche, préférant ne pas s'attarder, son regard se dirigeant comme à chaque fois sur ses blessures. Il enfila ses vêtements d'hier à la va-vite et entreprit de se sécher les cheveux, jusqu'à ce que la poche de son pantalon ne se mette à vibrer. Il stoppa tout geste durant deux secondes, puis continua d'agiter la serviette sur ses mèches brunes qui partaient dans tous les sens, ignorant l'appel qu'il recevait sur son portable. Mais bientôt la vibration se fit plus insistante, lui grattant le haut de la cuisse. Purée, cette personne devait vraiment être déterminée.
« Putain de bruit de tronçonneuse, maugréa-t-il alors qu'il ouvrait la fermeture éclair de sa poche pour en sortir son vieux bigot.
Le visage de Mikasa s'affichait, sa mine sérieuse lui intimant comme à chaque fois de décrocher sous peine de représailles.
- Hey, Mikasa.
- Eren, enfin ! grésilla la voix de la jeune femme, soucieuse.
Il éloigna l'appareil de son oreille en grimaçant.
- Désolé, désolé, marmonna-t-il, je sortais de la douche. Il se passe quelque chose ?
- Pas vraiment.
Bon. Ça voulait tout dire.
- Tu veux qu'on se voit cette aprem ? J'ai repos.
- Je sais bien, soupira-t-elle, c'est ce que j'allais te proposer. Je doutais que tu fasses l'effort d'allumer ton portable en deux jours.
Il allait évidemment se faire tirer les oreilles, il le savait. Mais il l'avait mérité.
- Mik –
- A moins que tu ne sois occupé en réalité ? le coupa-t-elle.
Le brun jeta un coup d'œil vers la porte, sachant Levi dans la pièce, ou du moins pas loin.
- Je suis avec… moi-même, termina-t-il. Chez moi. Je n'ai rien prévu de particulier, juste bouffer quelques Pim's dans du lait sur le canap.
Le mensonge lui vint plus aisément qu'il n'aurait cru. Parce qu'il ne devait pas présenter Levi à qui que ce soit. Il ne risquerait jamais la vie de ses amis, il ne les mettrait pas le pétrin. Le noiraud restait un Rebelle, qui plus est le Chien, et lui était l'Exécuteur. Pas question que ceux qu'il chérissait se trouvent avec ces deux personnalités criminelles en même temps, dans la même pièce. Un c'était déjà bien trop.
- Alors c'est d'accord, on peut se voir ?
- Yep !
- Je suis au Bloc avec Sasha et Ymir, on t'attend. Viens quand tu peux.
- Ça marche, à toute.
Il raccrocha. Il n'avait pas vu Mikasa depuis une éternité, et elle lui manquait énormément. Les courtes conversations par sms ne suffisaient plus. En sortant de la salle de bain il put trouver le gérant assis à son bureau, en pleine réflexion sur son portable. Il avait de nouveau revêtu un de ses costumes habituels, le noir sur chemise blanche, le plus sobre. Le regard toujours vrillé à son écran, il prit la parole :
- Terminé gamin ?
- Mh, fit celui-ci en hochant vaguement la tête.
Finalement, Levi pivota vers lui et se mit debout. Il paraissait extrêmement ennuyé.
- Excuse-moi, mais j'ai un petit souci à régler avec le boulot.
L'organisation ou bien…
- Des putains de livraisons, enchaîna-t-il, répondant à la question muette du brun. Tu pourrais…
Ça tombait à pic, lui qui devait justement trouver un moyen de partir.
- Pas de problème, je m'en vais, dit-il immédiatement.
- Je te raccompagne en bas. »
La descente des escaliers se fit dans le silence. Ils passèrent par l'intérieur de la boîte, et la voir aussi vide et dénuée de lumières clignotantes changea son aspect du tout au tout. C'était simplement paisible, propre, mais aussi plus spacieux. Cet endroit avait dû coûter une petite fortune. Levi raccompagna notre protagoniste à l'entrée principale, celle où passaient les clients. L'infirmier enfonça les mains dans ses poches et gratta le sol de sa chaussure, attendant il ne savait trop quoi. Le noiraud tenait le battant de son avant-bras levé et replié, affichant une mine contrite.
« J'ai vraiment l'impression de te mettre à la porte…, soupira-t-il en posant deux doigts sur sa tempe.
Eren afficha un petit sourire narquois, relevant les yeux vers lui.
- Baah c'est le cas un peu, non ?
Les lèvres du plus vieux frémirent.
- Tu ne me facilites pas la tâche toi, hein.
- C'est rare d'avoir l'occasion de te mettre dans l'embarras, alors j'en profite ! ricana-t-il.
- Sale gosse.
Le brun lui tira puérilement la langue.
- A la prochaine alors, fit-il avec bonne humeur.
- Mh.
Il vit Levi qui allait refermer la porte, alors il commença à marcher.
- Eh Eren !
Il tourna la tête à l'entente de son prénom – il faut dire que ce n'était pas souvent qu'il sortait de la bouche du noiraud.
- Ouais ?
- Remets pas dix piges à revenir cette fois !
- C'était si long que ça ? répliqua-t-il du tac-au-tac en riant. Ne t'inquiète pas, ajouta-t-il de suite, après cette nuit avec toi je vais être rapidement pressé de te voir.
Et il s'esclaffa de plus belle en pensant au second sens de sa phrase.
- Tu es trop jeune pour faire des sous-entendus, merdeux ! s'exclama le noiraud, son sourire s'étant agrandi.
- Je suis aussi adulte que toi mon cher, lui signala-t-il, puis il agita la main. A très vite !
- C'est ça. »
Il vit Levi secouer la tête puis lui faire signe également avant retourner dans la boîte, la lourde porte se fermant bien vite dans son dos. Eren partit dans la rue avec le sourire. Il avait certes encore un peu sa gueule de bois qui lui tapait le crâne, mais ses pensées quant à elles étaient tournées ailleurs. Sa soirée avait été un franc succès, et il avait pu se libérer un peu d'une partie du poids de son cœur, même superficielle. Il se sentait apaisé, plus en paix avec lui-même, à ses décisions quant aux Rebelles. Levi était une personnalité chez ces derniers, quelqu'un d'important. Et quelqu'un de bien. Il semblait pouvoir tenir le rôle de celui qui prenait les décisions difficiles, qui parvenait à agir. Et Eren le respectait d'autant plus pour cela. Le fait d'en apprendre rien qu'un peu sur son comportement extérieur lui révélait tout de même une facette, même infime, de sa manière de penser. De qui il était. Cela rassurait bien l'Exécuteur, le confortant dans son choix de se joindre aux Rebelles. Et maintenant il avait encore plus de quoi baisser la tête face au Chien…
Son téléphone sonna et il le prit en main. L'agenda de son portable affichait la date malheureuse, avec en quelques mots le rendez-vous qu'il avait lieu en fin d'après-midi.
Ah oui, c'était déjà aujourd'hui.
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Le brun était finalement parvenu au Bloc, où l'attendaient en bas ses trois amis. Sasha se rua vers lui en l'apercevant, sa couette haute s'agitant de gauche à droite. Ils se firent la bise, tout sourire :
« Comment ça va Eren ! Ça faisait un bail !
Il allait répondre mais quelqu'un d'autre le devança de sa voix légèrement rauque :
- Ça tu peux le dire.
- Ymir, fit-il, son sourire s'agrandissant.
Il s'approcha d'elle et ils se claquèrent la main.
- Quoi de neuf ? demanda-t-elle.
- Bof tu sais bien, la routine absolue qui nous envahie tous, soupira-t-il.
- Tu m'étonnes.
Le brun regarda derrière son amie, pour y trouver Mikasa, qui attendait sagement son tour. Elle semblait bien reposée. Il contourna Ymir et serra sa sœur de cœur dans ses bras.
- Je suis de retour, chantonna-t-il.
Deux bras fermes vinrent entourer son dos.
- Oui, dit la noiraude simplement.
Il se détacha bientôt d'elle pour se tourner vers les deux autres, et posa ses mains sur ses hanches.
- Bon alors, on va où ?
- Oh mais c'est qu'il est pressé le p'tiot, ricana la grande brune aux taches de rousseur, sortant une clope de sa poche arrière.
- C'est que je n'ai pas énormément de temps, grimaça-t-il en se grattant la joue de l'index. Je dois voir vous savez qui ensuite, alors…
- Ah, c'est aujourd'hui ? fit Sasha.
- Mouais.
Ils se tinrent là tous les quatre, sans trop savoir quoi ajouter. Mikasa vint prendre notre brun par le bras, l'entraînant à sa suite.
- Viens, allons te changer un peu les idées. »
Il n'était pas certain que ça marche, son rendez-vous lui obstruant totalement l'esprit comme à chaque fois, mais il était très reconnaissant envers la noiraude. Il était de plus absolument certain qu'elle se souvenait de la date, qu'elle ne l'avait pas harcelé particulièrement aujourd'hui pour rien. Ils marchèrent tranquillement pendant un petit quart d'heure, écoutant les plaintes d'Ymir sur l'un de ses profs, ainsi que les interventions de Sasha comme quoi elle avait un petit creux.
« Le vieil immeuble, vous êtes sûres ? fit le brun. Ça fait vachement longtemps.
- D'où le fait qu'on y retourne, rétorqua la brune haute sur pattes.
Face à eux, derrière un square, se dressait un bâtiment de cinq bons étages dénué de fenêtres à partir du premier étage. Un échafaudage à l'allure branlante se dressait sur le côté droit. Les murs étaient à moitié recouverts de graffitis. Il semblerait qu'il y ait eu des problèmes lors de la construction, faisant que sa structure était instable. L'immeuble avait été entièrement vidé, et ce depuis un bon bout de temps, et les travaux qui avaient à peine débuté n'avaient jamais donné suite. Peut-être les bonnes gens s'en soucieraient dans quelques années.
- Je leur ai dit que c'était dangereux, grogna Mikasa en soufflant sur sa mèche. Mais pas moyen de les détourner de leur objectif ces deux-là.
- Eh ouais ! s'exclama Sasha en levant le poing. Bon, c'est pas tout mais notre suicidaire est pressé !
Et sans attendre qu'ils répondent quoi que ce soit elle se dirigea vers l'échafaudage – la porte d'entrée étant condamnée. Ymir partit à sa suite.
- Je vais pas laisser la gamine faire des conneries sans moi. Ramenez-vous !
Le brun la suivit donc, et attendit qu'elle enjambe la fenêtre du premier étage avant de poser un pied sur l'échafaudage. Une main vint se poser sur son avant-bras.
- Fais attention, ça n'a pas l'air très solide, le prévint la noiraude avec une moue inquiète.
- Je sais, je sais, fit-il, la tête ailleurs.
Il s'empressa d'escalader les quelques barres de fer avec souplesse, et parvenu dans le bâtiment il s'étira rapidement. Les pièces étaient vides, plus ou moins grandes selon les endroits. Les murs qui les séparaient disposaient d'une embrasure de porte. La plupart d'entre eux étaient troués, formant des passages parfois suffisamment larges pour permettre à un corps de s'y glisser. Des escaliers se trouvaient à chaque bout d'étage. Il fallait être extrêmement prudent aux trous ça et là dans le sol, qui donnaient accès à l'étage du dessous. Il y en avait très peu, et deux barres de fer formant une croix les obstruaient superficiellement, mais deux ou trois étaient assez large pour qu'un corps mince passe au travers. Ce terrain de Parkour était un peu différent. Il était beaucoup plus restreint, et Eren s'en lassait ainsi plus vite. Mais il n'empêchait qu'il était parfaitement heureux d'y être. Ce genre d'endroit demandait surtout un bon contrôle de l'espace. Il fallait savoir se faufiler, être assoupli comme un chat. Mine de rien il était nécessaire d'avoir une très bonne condition physique. On pouvait s'ennuyer plus rapidement. Mais les amis avaient bien vite trouvé une solution au problème.
- C'est pas moi le loup ! s'écria Sasha en fuyant au second étage.
- Pas moi non plus, fit Ymir en levant les yeux au ciel puis en s'éloignant.
- C'est Mikasa ! » s'écria le brun en se ruant vers l'escalier le plus proche.
Celui qui montait, bien sûr. Descendre serait comme signer un arrêt de mort. Car à coup sûr il se ferait chopper. Étant le plus proche de la jeune fille, celle-ci lui courut après. A chaque fois qu'on le talonnait, Eren était pris d'une certaine adrénaline. C'était inexplicable, mais ça lui courait dans les veines aussi rapidement qu'un courant électrique, le forçant à accélérer l'allure, à faire frictionner ses muscles. Là, avec son ventre lourd d'alcool, il pouvait sentir à quel point c'était difficile d'aller plus vite. Se tournant légèrement, il put constater que la distance entre lui et la noiraude s'était amenuisée. Mais ce qu'il remarqua principalement, c'était le sourire que sa sœur affichait, ainsi que ses yeux sombres qui pétillaient. Elle lui avait bien manqué. Cela faillit lui faire manquer un élément clé, mais il le vit à temps. Un trou parfaitement rond dans le mur, qui avait sans doute abrité autrefois un vitrail ou un truc dans le genre. Dans tous les cas, ça consistait en sa porte de sortie. L'espace entre ses enjambées fut restreinte, puis il plongea au travers, les bras allongés devant lui. Il atterrit dans la pièce à côté sur ses mains, prenant appui afin de balancer ses jambes au-dessus de son corps et finir sur ses deux pieds. Il entendit Mikasa jurer derrière. Elle avait compris qu'elle venait de perdre son avance. A leur gauche, une longue jambe couverte d'un pantalon kaki disparut par le haut de la fenêtre. Ymir. Tout près de la noiraude. Cette dernière saisit sa chance et bondit vers l'encadrement amenant au-dehors. Une peu plus tard le nom de la grande perche résonnait dans l'immeuble, exclamé par Mikasa, ce qui signifiait qu'elle venait d'être touchée. C'était maintenant elle le loup… Au moindre contact on devenait ce dernier, et deuxième règle : toujours rester en mouvement, jusqu'à l'épuisement ! Bientôt le nom de Sasha fut prononcé, puis quatre minutes après de nouveau celui d'Ymir. Ils étaient maintenant au quatrième étage. Cette dernière se mit en tête de le prendre en chasse, puisqu'il n'avait pas encore eu le plaisir d'être le loup. C'est en s'esclaffant idiotement qu'ils couraient comme des dératés dans le bâtiment, s'insultant à tout va.
« Viens là p'tit con !
- Me tente pas l'asperge !
- J't'emmerde !
- Je t'aime aussi !
Ouais. Des gosses. Des gosses qui commençaient à fatiguer et le savaient tous les deux, c'est pour ça qu'ils continuaient, se disant que peut-être avec un dernier effort suffisant ils pourraient tenir la cadence, puisque l'autre était tout aussi exténué. Ymir s'élança à un moment vers l'avant, son corps dans les airs, prise de risque. Eren l'évita de peu, bondissant de côté. Pris d'adrénaline à fond, il passa au travers de l'un des trous du sol, coupant sa respiration et rentrant son ventre au maximum. Fort heureusement il passa, s'égratignant simplement un peu le coude au passage. Mais ce n'était rien. Ce qu'il n'avait pas prévu, c'était que son amie fasse de même. Ah oui, elle était vraiment très mince, c'était pratique.
- Putain, souffla-t-il les yeux écarquillés, reculant de justesse face à la tentative d'Ymir pour le toucher à l'épaule.
Il put même sentir le souffle d'air de son geste tant ça avait été proche.
- J'vais t'avoir, ricana-t-elle.
Et elle avait raison. Il n'y avait dans la pièce que l'embrasure d'une porte, bouchée par son amie, et l'escalier derrière lui. Mais l'utiliser ne servirait à rien, comme pour la fenêtre juste à côté. Elle pourrait aisément sauter et le rattraper. Mais… Mais il était Eren Jaeger, l'Exécuteur de nuit, le Suicidaire. Il ne pensait en cet instant qu'à la manière de s'échapper de cette merde. Comme s'il était réellement poursuivi. Il ressentait une certaine panique s'infiltrer en lui à coups de fouet, le maintenant au stade de pile électrique. Alors il prit la décision qu'il aurait prise face à un ennemi trop puissant. Comme s'il avait été l'Exécuteur. Il sauta par la fenêtre, atterrissant un peu plus bas sur l'échafaudage branlant, qui n'arrivait qu'entre le troisième et le quatrième étage. La plaque de fer se détacha d'un côté et il tomba avec ébahissement, sans émettre la moindre exclamation. Deux mètres en-dessous, par la fenêtre du troisième étage, il croisa les yeux écarquillés de Mikasa qui se trouvait juste à côté de la fenêtre. Réagissant au quart de tour, il empoigna la barre de fer verticale la plus proche dans l'angle de la structure. Il tint dessus cinq petites secondes, puis elle se mit à tanguer dangereusement, la plaque n'étant plus là pour la maintenir bien droite.
- Eren ! s'époumona Mikasa, penchée à la fenêtre, les traits déformés par la peur.
Il fut obligé de lâcher la barre et de se laisser tomber de nouveau plus bas. Dans sa chute, l'échafaudage s'effondrait en-dessous de lui comme un château de cartes. Mais notre protagoniste avait ses réflexes de survie toujours bien en éveil, qui le maintenaient sans arrêt sur le qui-vive. Il eut le temps d'attraper le rebord de la fenêtre du second étage de son bras droit, et posa ses pieds contre le mur, les laissant glisser afin d'adoucir sa chute. Son épaule le tirailla, ce fut douloureux mais c'était supportable. En tout cas il avait connu bien pire.
- Pffiou !
Il entra dans le bâtiment et épousseta son pantalon, attendant les autres. Mikasa déboula dans la pièce, suivie d'Ymir et Sasha. La noiraude se rua vers lui, les lèvres pincées. Il fut plus que surpris quand elle l'empoigna par le col.
- Non mais qu'est-ce que tu fous, hein ! cria-t-elle, le regard noir et plein d'angoisse. Ça te plait de mettre ta vie en jeu comme ça putain ?!
Il ne serait pas mort, il aurait trouvé un moyen. Il y avait toujours un moyen.
- Tu tiens donc si peu à ton corps ?!
Son pouvoir… Il aurait pu l'utiliser discrètement, elles ne se seraient rendues compte de rien.
- Pense un peu aux autres bordel !
Ah. Là il ne pourrait rien dire.
- M-Mikasa, pardon, j'avais oublié que c'était fragile, je suis désolé…
Elle le lâcha, ses mains retombant contre son corps, serrées en un poing. Ymir s'avança, une cigarette au bec.
- Sérieux mec, quand on saute quelque part on est censé voir là où on veut atterrir. Mais quand t'as sauté de cette putain de fenêtre tu voyais pas ce qu'il y avait en-dessous –
- Je savais qu'il y aurait l'échafaudage.
- Encore un coup du Suicidaire je suppose, renchérit Sasha.
- Hého ça va, rajoute-en pas une couche s'il-te-plaît, ronchonna-t-il.
Il alla prendre les deux mains de sa sœur de cœur, les joignant entre les siennes, puis ajouta d'une voix plus douce :
- Écoutez, je suis vraiment désolé pour ce qui vient de se passer, avec ma mémoire de poisson rouge j'avais oublié que la structure pouvait être si fragile… Alors pardonnez-moi, s'il-vous-plaît. »
Ymir n'hésita pas, l'insultant un peu pour la forme. Sasha décida qu'elle pouvait se permettre de l'embêter plus souvent sans qu'il n'ait le droit de s'en plaindre. Quant à Mikasa, elle continua de râler un peu, mais ça lui passa vite. Elle avait été folle d'inquiétude. Eren l'aurait été tout autant pour elle. Alors il resta à ses côtés, proche, leurs épaules se touchant presque à chaque pas qu'ils faisaient sur le chemin du retour. Ils se séparèrent tous en bon termes, riants comme à leur habitude, l'incident pas tout à fait oublié mais déjà derrière eux.
A dix-sept heures trente Eren arriva à son lieu de « rendez-vous ». Il entra dans le bâtiment, saluant les trois ou quatre visages familiers qu'il croisa.
« C'est pour la chambre vingt-deux, fit-il à l'accueil.
Il longea les longs couloirs blancs qu'il connaissait si bien, et bientôt parvint devant la fameuse porte. Il entra sans toquer, abaissant tout doucement la poignée. La pièce était illuminée par une douce lumière filtrant à travers la vitre teintée. Le brun prit une chaise noire pliable qui se trouvait contre le mur, et l'installa en diagonale du siège roulant ou était assis la personne qu'il devait voir. C'était un peu une obligation, mais d'un autre côté il souhaitait être là. Comme une responsabilité, une charge, et à la fois un besoin. Il soupira, frotta sa tête dans ses mains, puis s'empara des longs doigts minces de son vis-à-vis, les serrant dans ses paumes chaudes comme s'il voulait les réchauffer.
- Salut… papa. »
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Je m'arrête là ! Chuis fatiguée ! J'ai pratiquement tout écrit en une seule aprèm T.T Vous n'avez pas eu exactement droit à une scène de Parkour – qui est toujours prévue ne vous inquiétez pas – mais c'est déjà ça on va dire ! XD C'est difficile avec tout ce que je veux vous faire découvrir de ne pas laisser les amis d'Eren de côté, mais bon… Voilà… J'ai essayé de les faire intervenir un peu. Sinon z'avez vu y a le Pôpa qui entre en scène ! Je trouvais ça d'ailleurs étonnant que depuis le début de la fiction personne ne m'ait demandé ce qu'il était devenu )
Bref, c'est tout pour aujourd'hui ! Grosses beuzouilles mes bébés ~