L'automne d'une vie
-Excusez-moi, Hanji, vous n’auriez pas vu Levi?
-Il est dans le bureau d’Erwin. Occupé.
La brune consultait avec attention ce qui ressemblait à un rapport d’expédition, les sourcils froncés.
-Vous… voulez de l’aide?
La scientifique soupira et accepta, reconnaissante.
-Désolée Aki, on est complètement débordés, tu me serais d’une grande aide.
Ça lui faisait peur de voir Hanji si sérieuse, elle qui d’habitude avait tous les défauts d’un enfant. Les expéditions leur demandait vraiment une préparation monstre.
La jeune fille s’assit en face d’elle, posant le livre qu’elle venait d’emprunter à la bibliothèque à sa gauche.
Hanji lui tendit quelques feuilles sans même la regarder.
-Tiens si tu pouvais me résumer ça. Ah et aussi, souligne-moi les pertes qu’il y a eu et les directions qu’ils ont prises.
Aki s'exécuta sans protester.
***
-Tu peux y aller, Aki, on a enfin fini. Repose-toi bien demain, sortir des murs c’est pas de tout repos. Ça va être ta première fois, non ?
La petite blonde posa son stylo et acquiesça.
-Ce serait cool de pouvoir te dire que t’as rien à craindre, sauf que…
-Ce n’est pas le cas.
-Exact, approuva sa supérieure. Bon je te laisse y aller. On se voit ce soir pour le dîner?
Aki consulta sa montre.
-Il est déjà huit heure, vous voulez qu’on y aille ensemble?
-Déjà? Oui, allons-y!
***
-Tu es toujours bienvenue si tu veux manger avec nous, Aki, précisa Hanji avec un clin d’oeil.
Avisant Erwin et Levi assis quelques tables plus loin, Aki lui sourit et secoua la tête. Même si elle aurait voulu accepter, elle avait trop peur de vendre la mèche si elle s’asseyait avec le brun...
-Merci de proposer mais je vais essayer de renouer les liens avec Yuki et Haru. Bon appétit, Hanji!
-Merci!
Elles se firent un signe de la main et la petite blonde se dirigea vers ses deux amis.
-Salut, toi! Ça faisait longtemps qu’on avait pas vu le bout de ton nez!, lui lança Haru.
-Vous êtes partis pendant les vacances, c’est peut-être pour ça, dit Aki avec l’intention de noyer le poisson.
Ils levèrent les yeux au ciel dans un bel ensemble.
-Tu sais on est pas complètement idiots, quand quelqu’un nous évite on s’en rend compte.
Et revoilà ce nous. Ils étaient deux humains, bon sang, pas une seule entitée.
-Désolée, vous… vous avez l’air tellement heureux ensemble, j’ai un peu l’impression d’être de trop…
-Tu ne seras jamais de trop, p’tite Aki.
Sur ce sourire et cette phrase rassurante d’Haru, Aki sourit et sentit qu’elle avait enfin retrouvé cette si précieuse complicité qu’elle avait avant partagée avec ses deux amis.
***
“Damn, I like me better when I’m with you… I like me better when I’m with you… I knew from the first time, I’d stay for a long time, ‘cause, I like me better when… I like me better when I’m with you.”
Sans vraiment y faire attention, Aki chantonnait tout en marchant. Elle se dirigeait vers la salle commune, l’heure du petit déjeuner s’approchant.
-Aki!
La voix familière de Levi, un peu plus rauque que d’habitude, eut pour effet de couper complètement la sienne, et elle se retourna pour le voir, les joues rougies par le froid et encore couvert par un épais manteau. Il devait neiger dehors, car ses épais cheveux noirs étaient couverts de flocons. Il ne devait pas être réveillé depuis longtemps, ses cheveux étaient un peu moins en ordre que d’habitude.
-Levi.
Elle lui sourit.
-Vous étiez dehors?
-Ouais. J’aidais Hanji, elle voulait absolument vérifier tous les équipements tridimensionnels avant qu’on parte.
-D’accord. Hum, je viens d’y penser, j’ai complètement oublié de vous donner votre cadeau hier…
-On va manger et tu me le donneras après, ça te va?
Elle hocha la tête et il enleva son manteau avant de se rapprocher d’elle.
-Ça va? T’as l’air un peu pâle.
-C’est parce qu’il fait super froid dans mon dortoir…
Il la regarda quelques secondes, s’attardant sur la petite cicatrice traversant sa lèvre avant de l’embrasser, posant sa main sur la peau toujours chaude de la blonde.
-C’est mieux ?
-Vous avez les mains gelées, mais j’apprécie l’effort, répondit la jeune fille avec un sourire espiègle.
-J’espère bien.
Ils se regardèrent un moment, puis Levi recommença à embrasser doucement la blonde, glissant ses mains sous son pull.
Il la sentit se figer, et se crispa. Il ne touchait même pas sa peau étant donné qu’elle portait un t-shirt, mais elle avait du mal à supporter ses mains.
Elle leva les yeux vers lui et posa sa main au-dessus la sienne, et même à travers le tissu de son pull Levi pouvait sentir la tension dans ses muscles, l’effort qu’elle faisait pour ne pas se détacher de lui et s’enfuir en courant, la chaleur qu’elle dégageait.
-Aki...
Ils se détachèrent rapidement, entendant des pas arrivant dans leur direction.
-Aki! Levi!
Hanji s’avançait dans leur direction, un grand sourire aux lèvres.
-Vous avez l’air coupable.
-De quoi tu parles, quatz’yeux?
-Je parie que vous venez de vous embrasser!
Levi leva les yeux au ciel.
-C’est tes affaires?
-Tu ne nies pas!!! J’AI RAISON!!
-Bordel Hanji, ferme-la, tu voudrais pas le crier sur les toits non plus?
-Non, effectivement. Cachez-vous bien tous les deux, si ça se sait ça va faire un scandale monstre. Déjà Aki est si jeune, et en plus tu es son supérieur… Faites vraiment gaffe, d’accord? Ça aurait des répercussions incroyables si ça se savait.
Et après ces mots ô combien rassurants, elle s’en alla.
Levi et sa recrue se regardèrent quelques instants avant que l’adulte ne parle :
-Ne t’inquiète pas. T’as déjà assez de soucis pour t’embêter avec ça, putain.
-C’est facile à dire. Elle a raison, c’est… Imaginez perdre votre travail à cause de moi?
-Ça risque pas d’arriver, Aki. On fera gaffe, d’accord? C’est un peu tard pour se poser des questions maintenant de toute façon.
-Vous avez raison… Hum, je crois que je vais sauter le petit déjeuner, Caporal, vous… on se voit demain.
-Putain, Aki. Je savais que tu réagirais comme ça.
Il se pinça l’arrête du nez, l’air exaspéré.
-Je t’accompagne.
Elle s’apprêta à refuser et réalisa que ce serait inutile. Et puis, elle avait envie de l’avoir à ses côtés, il lui ferait oublier l’imminente expédition…
-D’accord.
Il la suivit dans sa chambre et ferma la porte derrière eux.
-J’ai pas beaucoup de temps.
-Vous n’étiez pas obligé de m’accompagner, Levi…
Elle lui tournait le dos et ça ne lui plaisait pas.
-Aki, regarde-moi.
La petite blonde obéit et il ne put s’empêcher de la prendre dans ses bras.
Le coeur de la blonde sauta un battement. Ses craintes revinrent, plus fortes que jamais.
Ne le laisse pas savoir ce qu’il se passe dans ta tête.
-On s’en fout de ce que les gens pensent, okay ? Putain, Aki, ne les écoute pas.
-Levi…
Elle posa son menton dans le creux de son cou et entoura sa taille de ses bras.
Je n’ai pas peur.
Un frisson la parcourut et elle tenta de retrouver sa respiration.
J’ai peur. Sortez-moi d’ici.
-Je ne veux pas nuire à votre travail.
-Mais c’est pas le cas ! Et merde, Erwin est mon supérieur direct, si quelqu'un doit me virer c’est lui ! Tu crois vraiment que c’est son genre ?
La jeune fille rit doucement.
-Pas vraiment, non.
-Tu vois. Tout va bien.
Il murmura les trois derniers mots dans son oreille, si bas qu’elle put à peine les entendre.
-Tout va bien…
Si vous saviez.
Il l’embrassa sur le front, insérant ses mains dans les poches arrières de son pantalon.
-Comment tu te sens ?
La question figea Aki. Il savait à quel point sa crainte des contacts physiques était grande, et le fait qu’il s’en soucie assez pour lui demander comment elle se sentait alors qu’il ne la touchait pas directement lui fit chaud au coeur. Il la connaissait mieux qu’elle le pensait...
-Bien. Je veux dire… je- je suis toujours en train de vous toucher, alors j’imagine que ça va.
Elle ferma les yeux et se concentra sur le brun. Elle ne détestait pas sentir sa peau contre la sienne… Même, elle appréciait le contact.
Sa gorge se serra. Je suis dans les bras de quelqu’un. Quelqu’un me touche.
Inspirant un grand coup et soudainement frappée par l’envie de s’éloigner du brun, elle combattit ses peurs et décida de faire l’exact inverse de ce qu’elles lui intimait. Toucher Levi, le plus possible. Juste pour connaître la satisfaction de ne pas céder à ses démons.
S’élevant sur la pointe des pieds, elle alla embrasser le brun. Celui-ci, surpris par l’initiative, n’eut pas le temps de retourner son affection à la blonde avant qu’elle ne le repousse.
Je ne peux pas. J’ai peur.
-Caporal, je…
-Prends le temps qu’il te faut, Aki.
L’estomac noué, Aki leva les yeux vers lui.
-Je comprends. Putain, j’ai une envie folle de te toucher, et je crois que tu le sais. Mais on prendra tout le temps dont tu as besoin.
La tension dans les épaules de la plus jeune sembla s’effacer. Elle regarda le brun avant de poser une main sur son épaule et de déposer un baiser sur sa joue.
-Vous avez du travail, non ?
-Ouais, je devrais y aller.
-Vous devriez.
-Je devrais.
Ils se regardèrent un long moment avant que la blonde ne sourit, comprenant à quel point son copain n’avait aucune envie de s’en aller.
-Courage, Levi. On se voit ce soir?
-Oui. À tout à l’heure.
Ils échangèrent un léger sourire et le brun recula, fermant la porte derrière lui.
***
-Levi.
-Erwin. J’ai du boulot.
-Je sais. C’est à propos d’Aki.
-Putain, Erwin, qu’est-ce qu’il y a encore? Tu voudrais pas la laisser vivre de temps à autre?
-J’ai juste entendu d’Hanji que vous aviez enfin franchi le pas, et je voulais la confirmation.
Le brun releva la tête de ses feuilles et le fixa.
-Ça vous arrive de vous occupez de vos culs au lieu de ceux des autres?
-Oh, allez, Levi.
-Ouais, on s’est peut-être embrassés. Et alors? Ça change quoi pour vous?
-L’expédition est demain. Tu le sais, pas vrai?
-Ouais, et alors?
Le soldat eut alors un mauvais pressentiment.
-Je ne veux pas que tu changes ta position pour elle. C’est bien clair? Tu restes en formation quoi qu’il arrive.
-Tu me prends pour un novice ou quoi ?
-Quand il s’agit d’Aki, tu pourrais faire des choses bien stupides.
-Putain, je connais mon boulot, merci.
-Je sais. Mais oublie-la le temps de l’expédition, ok? C’est déjà assez dur pour que tu t’inquiètes pour elle.
-Merde, Erwin, tu es très loin de la vérité. Comme si j’allais m’inquiéter pour elle! C’est une des meilleurs recrues qu’on ai jamais eue!
-Ouais. Mais même. Tu reste en position quoi qu’il arrive.
-C’est ça.
Mais Levi dans un coin de sa tête, savait très bien que si un danger menaçait la blonde il ne se gênerait pas pour s’assurer qu’elle allait bien. Il ne pouvait pas se permettre de la perdre.
***
“Aki.”
Il attendait devant la porte de sa chambre depuis quelques minutes déjà, sachant qu’elle y retournait toujours vers 9h. Le soleil s’était déjà couché, mais le sien venait juste d’arriver.
“Levi !”
“Salut, gamine.” Il vérifia qu’ils étaient bien seuls avant de l’embrasser, puis s’appuya contre le mur à une certaine distance d’elle quand il entendit des recrues s’approcher.
“Oh, Caporal Levi. Bonsoir. Toujours avec Aki ?”
La blonde baissa les yeux.
“Ça te pose un problème ?”
Le regard glacial du brun obligea les jeunes à presser leurs pas, et ils furent bientôt seuls de nouveau.
“L’expédition est demain.”
“J’avais cru comprendre, oui.”
“Est-ce que… Euh… Tu veux dormir avec moi cette nuit ? Les nuits avant les expéditions sont rudes.”
Elle sourit et apposa délicatement son front sur le sien.
“Vous n’avez pas besoin de demander, Caporal.”
“Levi.”
Elle rit et l’embrassa sur la joue, prenant son courage à deux mains et glissant ses doigts sous son pull avant de se reculer hâtivement, ayant entendu des recrues.
Le brun les maudit de toutes ses forces. La blonde l’avait touché. À même la peau. Et évidemment, il fallait que quelqu'un vienne les interrompre juste à ce moment-là.
Il la fixait toujours quand ils arrivèrent à leur niveau, et apparement ils pouvaient sentir la tension qui flottait dans l’air aussi bien qu’Aki.
“Aki ! Avec Levi, je vois.”
Elle fut soulagée de voir que ce n’était que Haru et Yuki.
“Euh- on interrompt quelque chose.”
Il ne le dit pas sur le ton d’une question, plus comme une affirmation.
“N-non, euh…”
“On voulait te proposer une p’tite soirée entre amis, mais vu la tension sexuelle qu’il y a ici t’as l’air d’avoir d’autres plans pour ce soir…”
Aki rougit et secoua la tête.
“Euh ça va j’vous dérange pas les gosses ? “Tension sexuelle” ? Non mais ça va pas bien ? Laissez Aki tranquille putain. Même si vous avez déjà sauté le pas ça veut pas dire que c’est son cas. On laisse le choix aux gens, généralement.”, riposta Levi, sur la défensive.
Un grand silence suivit sa déclaration.
J’ai merdé.
Aki tenta d’attirer son regard et quand elle y arriva enfin, elle lui sourit.
“On a effectivement quelque chose de prévu ce soir, mais rien d’aussi… euh…”
“Osé ?”, suggéra Haru, un sourire en coin.
“Oui. Oh mon Dieu, c’est gênant.”
“Oh c’est bon Aki, qu’est-ce que tu peux être coincée des fois ! Va bien falloir que tu le fasses un jour ou l’autre, j’espère que tu le sais ? Surtout si t’as un copain plus âgé.”, dit Yuki avec un signe de la tête tout sauf discret vers Levi.
“On pourrait peut-être arrêter de parler implicitement de sexe, et à la place inviter Levi pour notre petite soirée? Comme ça on profite d’Aki, et Aki peut profiter de Levi et vice-versa.”, trancha Haru, un grand sourire aux lèvres.
Aki soupira.
“C’est si évident qu’on…?”
“Ben écoute là c’était un peu difficile de le rater. L’intensité de son regard...Et puis, bon, t’as un faible pour lui depuis un bon bout de temps…”
“Qu’est-ce que vous en dites, Levi?”
Il hocha la tête.
“Non mais c’est une blague? Aki, tu le vouvoie?”
“Oui, mais-”
“Pas de vouvoiement accepté ce soir. C’est tu ou rien.”, prévint Haru avec un grand sourire.
“Quoi? Mais pourquoi?”
“Demandons à Levi. Levi, est-ce que tu préfèrerais qu’elle te tutoie? “
Il déplora l'absence de formalité dans la façon dont Haru lui parlait, mais décida que si c’était pour Aki, alors ça en valait la peine.
Et à vrai dire, de temps à autre, ça lui plaisait d’oublier son grade, sa place, le poids du monde sur ses épaules. Ce soir, il n’était qu’un homme ordinaire, qui passait du temps avec sa copine. Il devait bien ça à la jeune fille.
“C’est un peu évident, non?”
“HA! Tu vois Aki.”
“D’accord, j’abandonne. Mais ce qui entre dans cette chambre, reste dans cette chambre. On n’est pas vraiment censés… vous savez…”
“Ouais, être ensemble. Logique. Allez, entrez, on va pas rester plantés là trois heures.”
Ils s’installèrent tous les quatres sur le sol de la chambre de la plus jeune, les deux blondes ayant installé des coussins.
“Bon. Ben je suis super contente pour vous deux, en tout cas ! C’est super ! Depuis le temps que vous vous tournez autour…”
“On ne-”
Levi sourit intérieurement en réalisant qu’elle s’apprêtait à nier.
“Non, elle a raison. C’était définitivement ça.”
Aki tourna la tête vers lui et lui sourit, posant sa tête sur son épaule.
“T’as fait quoi de ta journée ?”, lui chuchota le brun en entrelaçant leurs doigts.
“Pas grand-chose, au final. J’ai lu, j’avais un peu aidé Hanji ce matin, et c’est à peu près ça. Et vo- euh, toi ?”
“La pile de papier à remplir n’a pas l'air de diminuer même quand on y passe 3 heures. Alors c’est à peu près la seule activité que j’ai faite. Mais on a enfin fini.”
“Super.”
Elle leva la tête vers son copain et lui sourit tendrement.
Levi déglutit. Il ne pouvait s’empêcher de remarquer la douce courbure de ses cils si clairs, le ballet irrégulier mais qui semblait tellement à sa place sur son visage de ses légères taches de rousseur, les deux légères fossettes qui se formaient sur ses joues, la petite cicatrice blanche sur ses lèvres dont il se demandait toujours la provenance, et ses lèvres, ces lèvres, qui se courbaient si souvent en un sourire qu’il ne méritait pas, à peine rosies par les baisers qu’ils avaient échangé un peu plus tôt, et maintenant qu’il savait quel goût elle avait sous sa langue il lui était impossible de ne plus y penser, et il voulait la toucher, encore et encore. Sa hanche était contre la sienne, ses longs cheveux dorés chatouillaient sa joue. Il traça les veines visibles sur sa main et les quelques cicatrices qu’il ne discernait que parce qu’il connaissait ses avant-bras par coeur, doucement, affectueusement, et ses doigts paraissaient si fins sous les siens, si lisses, il aurait pu les toucher pendant des heures et ne jamais s’en lasser. La façon dont la délicate lumière des bougies allumées tombait sur elle faisait ressortir le bleu lagon de ses iris et la tache bleu cobalt au coin de son oeil, et elle le regardait avec tellement de douceur, de tendresse, d’amour, qu’il oublia immédiatement qu’elle n’était pas son monde entier.
“Aki… Tu es magnifique.”
Elle émit un petit rire.
“C’est toi qui dis ça, Levi ?”
“Ouais, c’est moi qui dit ça. Merde, gamine, vraiment, tu es splendide. On dirait une putain d’oeuvre d’art. Ça devrait pas être permis.”
Il caressa doucement ses cheveux tandis que la blonde s’allongeait sur ses cuisses, tenant toujours sa main dans la sienne.
Il sentait toute l’affection qu’il avait pour elle ressortir d’un coup, et tout ce qu’il voulait c’était le lui exprimer, à quel point elle donnait du sens à ses journées, combien elle lui manquait dès qu’elle s’en allait, et il fallait qu’il le lui dise, qu’il lui montre, parce que parfois il avait l’impression qu’elle ne s’en rendait pas compte.
“Aki?”
“Oui?”
“Je… j’aurais un jour de libre après l’expédition. Ça te dirait de le passer ensemble?”
Elle sourit et serra sa main.
“Évidemment.”
“Je veux dire, genre, dans la ville. Hum, comme un… rendez-vous?”
Aki haussa les sourcils, et se retourna pour plonger ses yeux dans les iris acier de son supérieur.
Puis, la proposition ayant flotté dans l’air quelques instants, elle se mit à rire silencieusement.
“Si j’avais su que tu serais le premier à proposer! Évidemment que c’est oui, Levi. J’adorerais.”
Son coeur fit un petit bond et il expira un long coup.
“Cool.”
Ils se regardèrent, prunelles bleues fixées sur prunelles grises, et tellement de choses passèrent entre eux, et Levi disait je comprends que tes parents et ton frère te hantent encore après tout ce temps, mais ça va aller, je suis là, tu vas t’en sortir, et jamais, jamais quelqu’un n’avait semblé comprendre le caporal mais la blonde lisait en lui comme un livre ouvert, et elle disait je comprends. Je suis là. Farlan et Isabelle ne vous en veulent pas, et Petra, Mike, Auruo et tous les autres non plus. Je suis là. Les cauchemars passeront, un jour.
Leurs lèvres se trouvèrent bientôt et ils s’embrassaient, tendrement, plus passionnément que d’habitude, Levi caressant doucement la nuque de la petite blonde, Aki ayant passé ses deux bras autour de son cou et en équilibre précaire sur les genoux du brun et ils avaient soudainement oublié où ils commencaient et où l’autre s’arrêtait, et-
“Euh, Levi? Aki?”
Ils sursautèrent tous les deux et par habitude, Aki mit immédiatement le plus de distance possible entre elle et son supérieur.
Haru partit dans un grand éclat de rire et Yuki les fixait, ébété.
“On a l’air aussi irrémédiablement amoureux, quand on est ensemble, ou c’est juste vous?”
Aki sourit timidement et s’assit en tailleur à une bonne distance de Levi.
“Je crois pas qu’on ait l’air si irrécupérable, Yuki. Pas moyen. Non mais regarde-les! En un rien de temps, ils nous avaient complètement oubliés!”
“Incroyable. Ça me donne des convulsions tellement ils sont mignons.”
“On est dans la même pièce que vous, vous savez. Et on a des oreilles qui marchent.”
“Pardon, Caporal, mais bon Dieu ! Je n’aurais jamais cru vous voir comme ça.”
Il releva les coins de sa bouche en un demi-sourire et baissa les yeux sur sa petite recrue.
“Moi non plus, en fait.”, murmura-t-il.
“Bon, c’est bien mignon tout ça mais on a toute une soirée devant nous et ce serait pas drôle si on vous obligeait pas à vous faire des confidences que vous ne vous feriez jamais sans nous. On a un peu d’alcool, on peut jouer à “je n’ai jamais” avec ça. On va jouer. À moins que vous préfériez action ou vérité ?”
Levi plissa du nez de dégoût. Il avait 32 ans, et il se retrouvait à jouer à des jeux d’ados avec sa copine de 16 ans… Mais qu’est-ce qu’il était en train de faire de sa vie?
“Je ne vais même pas demander comment cette bouteille est arrivée là…”, soupira l’homme aux cheveux noirs corbeaux, abandonnant et allant s’asseoir à côté de sa copine.
Haru remplit trois des quatres verres d’alcool et tendit le dernier à Aki.
“Tu ne bois pas, hmm?”
“Non, merci. Je vais aller le remplir d’eau.”
Levi regarda quelques instants la jeune fille blonde s’éloigner et se demanda comment elle était, saoule. Plus tactile? Plus triste, peut-être. Non, en fait, il ne voulait pas savoir. Ses inhibitions constituaient un constant obstacle pour eux, mais c’était une partie d’elle, et s’en débarrasser avec de l’alcool n’était sûrement pas une idée brillante. Il l’aimait comme elle l’était, et si elle faisait le choix de rester complètement sobre, c’était à lui de le respecter.
Ce qui ne voulait pas dire qu’il devait faire de même.
“Et toi, Levi? Tu bois, hein?”
“Ouais.”
Il prit quelques moments de réflexion et s’exclama:
“Non mais putain de merde! C’est l'expédition demain! Vous auriez pas pu me le rappeler?! Haru, Yuki, posez ces verres et allez pioncer. Manquerait plus que vous manquiez de sommeil et que vous ayez une migraine.”
Devant la tête d’enterrement des deux, il soupira.
“Vraiment. Les expéditions c’est pas rien, vous voulez pas vous trimballer un mal de tête ou être super fatigué.”
Aki lui sourit et enroula son bras autour de sa taille dans un geste d’affection spontané.
“Bon, ben, j’suppose qu’on a pas le choix.”, grogna Haru.
Yuki lui prit la main et après avoir souhaité bonne nuit au couple, ils s’en allèrent vers leurs chambres.
Le brun soupira à peine audiblement et la blonde posa la paume de sa main sur son avant-bras pour l’apaiser.
“Vous avez fait le bon choix, Levi. C’est déjà bien assez dangereux.”
“Tu. C’est pas parce que Haru est partie que tu peux reprendre ton vouvoiement, Aki.”
Elle rit.
“Bien. Tes désirs sont des ordres.”
Levi se leva et l’aida à se relever.
“On va dormir maintenant, d’accord? C’est valable pour nous aussi, ce que j’ai dit à tes potes.”
Elle acquiesça.
“Je… vais me mettre en pyjama.”, dit-elle en indiquant la salle d’eau.
“Yep.”, répondit le brun, déjà allongé sur le lit double et ayant tiré la couette sur lui.
Il entendit l’eau couler et quelques minutes plus tard, la blonde sortit de la salle de bain.
“Caporal, vous… Hum. Tu comptes dormir habillé ?”
Levi plissa les yeux et s’étira.
“Ouais, j’ai rien pris pour dormir. C’est pas grave.”
“Oh. D’accord.”
“Ce sera pas la première fois, de toute façon.”
Elle sourit et hocha la tête, soufflant les bougies et allant s’allonger aux côtés de son copain, dos contre son torse.
“Tu te sens bien ?”, demanda le brun en passant ses bras autour de sa taille et déposant ses lèvres contre sa nuque.
La jeune fille posa ses paumes contre le dos de ses mains et soupira légèrement.
Béatitude.
“Hmm. Oui, ça va.”, murmura la blonde.
Ils laissèrent flotter un silence confortable pendant quelques minutes, durant lesquelles Levi massait légèrement les doigts de la blonde.
Il remonta lentement jusqu'à atteindre ses épaules et soupira en la sentant toute tendue.
“Détends-toi, gamine.”
“Facile à dire…”, chuchota-t-elle.
“Ouais, je sais. Allez, respire un grand coup. Compte jusqu'à 5...Expire… Aki!”
Elle se mit à rire, et il aimait tellement ce son. “C’est trop dur de me détendre quand vous êtes avec moi, Caporal.”
“...Tu, Aki. Quand tu es avec moi.”
Il soupira et l’embrassa sur l’oreille.
“Et ne dis pas des choses comme ça, idiote. Ça me rend dingue.”
Elle sourit.
“Je sais.”
Quelques minutes d’un silence confortable passèrent avant qu’Aki ne le brise.
“Caporal?”
“Levi.”
“Levi.”
“Aki. Je t’écoute.”
“Hum… je-je peux vous poser une question?”
“Ok.”
Un long silence suivit.
“Ça voulait dire pose cette question, Aki.”
“Oh, oui, hm… Laisse tomber. Ce n’est pas important.”
“Putain, Aki! Crache le morceau.”
“Je- Est-ce que… je veux dire… Est-ce que vous avez… je veux dire tu as...déjà, hum…”
Elle se tut et leva les yeux vers lui, timidement. Il ne pouvait pas la voir mais il aurait juré qu’elle avait rougi.
“Oh. Couché.”
“Oui.”
“J’ai 32 ans, Aki. Je ne t’ai pas attendue toute ma vie.”
Elle déglutit lentement et à cet instant, il réalisa à quel point un immense gouffre les séparait.
Leur âge. Leurs origines. Leurs languages. Leurs amis. Leurs habitudes. Leurs peurs. Leurs expériences.
Il n’avait jamais vraiment questionné comment il était tombé amoureux d’elle -car oui, il l’était, même s’il ne l’avait jamais dit à voix haute-, et pour la première fois il se demanda si tout cela n’était qu’une erreur du destin dont ils étaient les protagonistes.
Il y avait eu des personnes avant elles. Des coups d’un soir, certains de deux. Mais jamais, jamais n’avait-il pensé “Je l’aime”. Jamais. Jusqu'à Aki.
Et c’était ça qui la rendait tellement spéciale. Ils avaient beau avoir tellement d’années d’écart, elle si terrifiée de tout ce qui touchait au corps, lui si fermé, elle tellement timide et n’osant pas s’ouvrir, et au final qu’avaient-ils en commun?
Rien.
Mais il leur suffisait d’apprendre, de se construire. Aki avait encore à grandir, et Levi pouvait bien apprendre à rajeunir. Pour elle. Pour eux.
Et oui, peut-être que rien que l’idée de faire l’amour à la blonde allumait au fond de son ventre une flamme qu’il connaissait très bien, mais le sentiment n’était pas mutuel.
Et qu’importe. Il fallait qu’elle soit prête et qu’elle le veuille, ou ce serait une première fois terrible. Et Levi le regretterait toute sa vie.
“Aki… J’ai pigé que ça te tourmente, cette histoire de sexe, mais putain, c’est pas parce que tout les gens autour de toi sautent le pas que ça doit être ton cas aussi.”
Il marqua une pause pour l’embrasser sur la joue.
“Tu as peur des contacts physiques. Et tu dors avec moi toutes les nuits ou presque, dans mes bras. Tu réalises à quel point tu as progressé ?”
Elle rit.
Il sourit tendrement.
“Prends ton temps, hein ? N’essaie pas de courir si tu n’arrives pas à respirer.”
Il arrêta de parler un moment, et quand il se rendit compte que la jeune fille riait silencieusement, il soupira.
“C’était bien nul comme métaphore, d’accord, j’ai compris.”
“Au moins tu t’en rends compte.”
“Ouais, c’est une chose. Le mieux ce serait que je la dise pas du tout.”
“Dis-le. J’aime savoir ce qui te passe par la tête.”
“Ok. À quoi tu penses, Aki?”
“Heu…”
“Allez, dis-moi.”
“Je me demandais ce que font Haru et Yuki.”
“Oh, merde, Aki ! J’apprécierai que tu te concentres sur moi, quand on est ensemble. Ou peut-être que je suis pas assez près ?”
Pour remédier à cela, il se mit à déposer des baisers sur son oreille, dans ses cheveux de paille, dans le creux de sa nuque, sur sa joue, le bout de son nez, son front.
“P-pardon, Lev- ahhh, ça chatouille !”
Il venait d’embrasser sa clavicule, et recommença juste pour la sentir frissonner sous ses lèvres encore une fois.
“Levi !”
“Ah, pardon. Tu préfères un suçon ? Ça chatouillera moins.”
Elle rit et lui administra une petite tape sur l’épaule.
“Levi! Qu’est-ce ce que tu peux être idiot des fois!”
“Oh, allez, tu adores ça.”
“C’est vrai. Tu as raison.”
Ils sourirent. Levi l’embrassa sur la bouche une dernière fois, et retourna caler sa tête dans le creux de sa nuque.
“Allez, gamine. On devrait pioncer.”
“Oui. Bonne nuit, Levi.”
La blonde ne mit que quelques minutes à s’endormir… ou du moins, c’est ce que Levi crut.
Le brun resta éveillé longtemps, et dans les alentours de une heure du matin, il murmura dans l’oreille de la blonde :
“Je t’aime, Aki. Merci de faire partie de ma vie. Ne m’abandonne pas, je t’en supplie.”
La blonde ouvrit un oeil, et le referma.
Je t’aime, Levi. Ne m’abandonne plus jamais.
“Mais quelle chanson l’auteure a-t-elle utilisées? “: (chanson-album, artiste)
-I like me better -I met you when I was 18, Lauv
Et dans le chapitre précédent :
-Get well soon -Sweetener, Ariana Grande
-8 letters -8 letters, Why don't we