Le destin des Ackerman - Tome 1

Cela fait déjà plusieurs jours que Eren et Mikasa sont enfermés suite à leur insubordination. La majorité du temps Armin reste près d'eux, par simple besoin d'être avec ses meilleurs amis qu'il considère comme son frère et sa sœur mais aussi pour s'infliger — en quelques sortes — la même peine. Depuis la veille, Eren s'est mis à parler, seul, racontant des scènes du passé comme s'il les vivait. Le soldat Arlelt essaye de prendre en note tout ce qu'il dit.

En ce matin du cinquième jour d'enfermement, Hanji et Livaï viennent libérer les deux soldats originaires de Shiganshina. En effet, même si leur punition devait durer une dizaine de jours supplémentaires, il y a de nombreuses circonstances atténuantes. Il est déjà un peu mal vu de garder prisonniers les héros de Shiganshina, mais la réunion exceptionnelle de l'état-major requiert leur présence.

Les officiers apportent donc deux uniformes propres. Une fois sortis, douchés, habillés et prêts à partir, ils rejoignent cinq autres soldats qui attendent dans la cour principale de la caserne : Conny, Jean, Frock, Julia et Thomas.

Les survivants de la bataille de Shiganshina se rendent au bâtiment administratif central du district où l'audience se tiendra.

Hanji et Jean vont prendre un peu d'avance pour aller remettre cette lettre destinée à Historia que leur a donné Reiner.

Quand les autres entrent dans ce bâtiment puis montent de quelques étages afin de s'engager dans le couloir qui donne sur la double porte de la salle, ils peuvent voir le gratin de l'armée attendre. Les commandants des différents corps d'armée ainsi que d'autres haut gradés. Thomas ne reconnaît pas beaucoup d'entre eux sinon le Commandant Pixis.

Parmi eux se trouve Naile Dork, le chef des brigades spéciales et ami d'enfance d'Erwin Smith, lui souffle Julia. Celui-ci regarde en leur direction et, une fois qu'ils se sont approchés, semble fixer le brun aux yeux bleus. Le soldat Ralle comprend que ce doit être sa ressemblance frappante avec son père qui justifie son regard. Il n'était pas au courant ?

Livaï vient chercher les trois amis d'enfance.

— Hé, les mioches. Historia veut vous voir.

Armin, Eren et Mikasa s'éclipsent donc, guidés par leur chef d'escouade jusqu'à une petite salle plus loin dans le couloir. Au fond de celle-ci se trouve Historia, assise près de la fenêtre et lisant une lettre.

Livaï frappe à la porte entrouverte avant de l'ouvrir en grand.

— Ils sont là. Annonce-t-il.

Ils entrent et se mettent en rang, leurs regards tombant sur leur ancienne camarade. Un sourire illumine le visage d'Historia quand elle tourne la tête vers eux. Elle se lève puis s'approche d'eux.

— Votre Majesté. S'incline Armin, rapidement suivi par ses deux compagnons.

— Arrêtez, pas de ça entre nous voyons ! S'affole Historia.

Le regard de la jolie blonde s'attarde sur l'hôte du titan assaillant et elle ne peut pas s'empêcher de sourire tendrement.

— Vous avez traversé tant d'épreuves... Moi j'étais dans le centre à seulement scruter l'horizon...

— Ta mission à toi c'est d'avoir un long règne. Rassure Armin.

— Armin a raison. Soutient Eren.

— Mh. Confirme Mikasa.

L'héritière de la famille Reiss observe le brune pendant un instant et remarque qu'elle ne porte pas son écharpe rouge. Par contre, elle a au poignet un bracelet de cuir tressé qu'elle n'avait jamais vu jusqu'à aujourd'hui. Mikasa observe son amie en retour et, quand elle comprend qu'elle la détaille, suit son regard jusqu'à son poignet. Elle se dépêche alors de le cacher dans sa manche en le faisant remonter de quelques centimètres sur son avant-bras.

— Heureuse de vous retrouver si peu changés. Prononce finalement la Reine.

— C'est sans doute parce qu'on ne réalise pas encore vraiment... Répond Eren.

— Bon, on devrait y aller. Rappelle Hanji qui range les documents éparpillés sur la table au centre de la pièce, aidée par Jean.

Ils rejoignent ensuite la salle où a lieu l'audience. Les portes s'ouvrent et tout le monde prend place. Les membres des brigades spéciales se placent à gauche de la salle, les officiers de la garnison à droite puis les représentants du bataillon qui seront entendus aujourd'hui au centre, face à Historia et au général Zackley.

— Bien. Si tout le monde est installé nous pouvons commencer. Dit le général.

Les discussions cessent et tout le monde se tourne vers lui.

— Donc, à l'ordre du jour... Les trois carnets écrits par Grisha Jäger, père de Eren Jäger membre du bataillon d'exploration et détenteur du pouvoir de transformation.

Thomas observe les trois personnes qui trônent devant lui, dont Historia Reiss. Leurs regards se croise d'ailleurs et elle lui adresse un signe de tête amical auquel répond le jeune homme qui jette ensuite un coup d’œil à Mikasa.

— ...L'autobiographie de Grisha Jäger est une chronique de l'histoire des titans et un traité du monde extérieur. Les seuls à connaître l'existence de ces carnets sont ceux présents dans cette pièce. Nous devons leur obtention aux dix ici présents. Résume le général en désignant les membres du bataillon. Et à leur cent-quatre-vingt-dix-neuf défunts camarades. Nous allons maintenant récapituler les informations en présence de la reine et tâcher d'harmoniser nos points de vue au mieux.

Il regarde les officiels assis sur les côtés de la salle.

— Major Hanji Zoe, la parole est à vous.

— Merci. Répond le quatorzième major du corps d'armée aux ailes de la liberté, qui se lève. Le bataillon d'exploration a subi des pertes dramatiques dont la disparition d'Erwin Smith.

Armin baisse la tête et se fait tout petit à l'évocation de cette perte.

— Mais nous sommes parvenus à reprendre le mur Maria et à nous emparer du colossal. Cependant nous autres habitants des murs, continuons à courir un grand péril. Nous serions bien fortunés de n'avoir affaire qu'aux titans. Hélas, il s'avère que nos ennemis sont les hommes d'une autre civilisation. Autrement dit : le reste du monde.

Hanji prend une pause dans son discours et tout le monde lève un regard étonné vers elle en entendant sa conclusion.

— Nous descendrions d'une lignée capable de se transformer en titan appelée « peuple d'Ymir », qui pourrait un jour dominer à nouveau le globe. Voilà pourquoi le reste du monde souhaite notre éradication pure et simple.

Elle se tourne d'un quart vers Eren.

— Monsieur Jäger a accompli sa mission et confié le titan originel à son fils, Eren. Mais pour que son plein potentiel soit exploité, l'originel doit être possédé par un descendant royal. Cependant lorsqu'un tel cas se présente, l'héritier, conditionné par l'héritage spirituel du premier roi, préfère se donner la mort. Tel est sûrement le pacte de non-agression. Toutefois, Eren est parvenu une fois à commander aux titans pour se sortir d'une impasse. Lui qui ne descend pas de la lignée royale pourrait, peut-être, malgré tout user du pouvoir de l'originel.

Soudain, Eren se lève d'un bond et tape des deux mains à plats sur le plateau de la table à laquelle il est assit.

— Bon sang ! S'écrie-t-il.

Tout le monde sursaute et le regarde, bouche-bée.

— Tu m'as fait peur, quelle mouche te pique ? Demande Hanji.

Eren bégaye et lève les yeux vers Historia qui elle aussi est surprise.

— Euh, je...

— Parle cher titan, nous t'écoutons. Encourage le général Zackley.

— Non, ce n'est rien. Eren se rassoit. Navré pour l'interruption.

Il baisse la tête mais a une expression effrayée que captent les trois personnes devant lui ainsi qu'Armin et Mikasa.

— Ah bon, je vois. Puisque tu le dis... Ne lui en tenez pas rigueur, c'est l'âge. Dit Hanji en revenant au général. Des pulsions le poussent à hurler et se mettre en valeur.

— Ah, je comprends, il faut bien que jeunesse se passe.

— Eren ? Appelle Armin à voix basse, le jeune Jäger baisse la tête et ne répond pas.

Mikasa se tourne vers lui et remarque qu'il semble préoccupé.

— Que préconisez-vous alors, major Hanji Zoe ?

— Pour le moment nous essayons d'en savoir plus mais notre priorité reste d'éradiquer la menace que les titans représentent encore. Reiner Braun et ses deux acolytes dont nous ne connaissons pas les noms ont certainement fui jusqu'au continent d'où ils viennent. Nous pouvons donc être quasiment certains que plus aucune brèche ne devrait s'ouvrir dans le mur, jusqu'à une prochaine attaque de leur part mais cette fois nous sommes mieux armés, avons plus de connaissances et avons le colossal en plus.

— Avez-vous estimé le nombre de titans qui peuplent l'espace entre les murs Rose et Maria ? Interroge encore le général.

— Non pas encore mais nous pouvons considérer que la majorité des titans se sont engouffrés dans la brèche de Shiganshina et ont envahis la majorité du territoire déserté il y a cinq ans. Nous aimerions donc lancer une campagne de recrutement et préparer une série d'expéditions pour éliminer tous les titans pour que ces terres soient de nouveau habitables et utilisées à des fins agricoles.

— Très bien, je crois que personne ici ne s'y opposera. Nos besoins sont trop importants pour rejeter ce projet. Répond Zackley.

Un officier des brigades se lève pour prendre la parole.

— Si le peuple apprend tout ce que nous racontent ces carnets, les murs plongeraient dans le chaos.

— Exact, nous mesurons nous-même à peine l'ampleur de ces révélations. Complète un autre membre du même corps d'armée.

— Suggérez-vous de mentir au peuple ? Demande Pixis. D'imiter le roi Reiss en maintenant la population parquée ici dans l'ignorance ? Dans ce cas au nom de quoi avons-nous donc renversé l'ancien monarque ?

Les deux intervenants des brigades deviennent silencieux et baissent la tête.

— Révélons tout. Tranche la reine. Rendons à nos concitoyens la mémoire que le roi Reiss leur a arraché il y a un siècle. Nous, habitants des murs, partageons tous le même destin. Il nous faut rester unis afin de conjuguer nos forces.

— Bien majesté, nous ferons le nécessaire. Approuve le général des armées des murs qui se lève. Dans ce cas, la séance est levée.

Tout le monde se lève mais la salle ne se vide pas immédiatement, chacun discutant avec son ou ses voisins des informations qui viennent d'être révélées. Les membres du bataillon font exception et sortent rapidement mis à part Hanji qui est interpelée par Zackley.

— Bah alors Eren, tu as voulu faire l'intéressant devant Historia pour changer ? Taquine Jean.

— Ça fait des semaines qu'ils se tournent autour. Ajoute Conny avec un grand sourire.

— Ouais, dommage que « Roi Eren » ne sonne pas très bien. Ajoute le soldat Kirschtein.

— C'est toujours moins débile que « Roi Jean ». Renchérit le jeune Jäger mais sans avoir l'air de plaisanter, il a une expression fatiguée et préoccupée.

Mikasa prend son frère par le bras pour l'emmener à part.

— Eren ? Appelle Jean qui se sent un peu bête sur le coup, il n'avait pas remarqué que son ami était dans cet état.

— Les souvenirs de son père refont surface depuis quelques jours, ça l'empêche de dormir... Ça ira mieux quand il se sera reposé. Explique Armin qui regarde ses deux amis d'enfance s'éloigner.

Une fois à bonne distance pour éviter que quelqu'un en les écoute, Mikasa s'arrête.

— Eren, qu'est-ce qu'il s'est passé, tu as encore vu un souvenir de ton père ? Demande-t-elle.

Il la fixe pendant une seconde, droit dans le yeux, avec une expression qui est loin d'être tendre. Le titan assaillant soupire ensuite.

— J'ai besoin de me reposer, c'est tout. Répond-il, sèchement, en retirant son bras de l'emprise de sa sœur.

Mikasa baisse tristement la tête, impuissante en constatant qu'un fossé s'est creusé entre eux et la distance ne cesse d'augmenter. Elle n'arrive plus à le suivre, le comprendre, il ne se confie plus.

Eren tourne les talons l'instant suivant mais, après avoir fait deux pas, se stoppe et se tourne d'un quart vers la brune.

— Je vous ai entendu cette nuit. Lance-t-il avec un ton qui laisse transparaître une sorte de... Colère ?

La jeune femme sursaute et repense à la visite de Thomas.

Elle entendit la lourde porte du mitard être poussée puis être refermée. Mikasa se dressa sur son coude pour regarder en direction de l'entrée en se demandant bien qui pouvait leur rendre visite puisque Armin était parti pour dormir un peu. Après s'être frotté les yeux elle reconnut Thomas, son uniforme sur le dos.

La jeune femme s'assit dans son lit puis se leva pour s'approcher des barreaux.

— Ça va, tu tiens le coup ? Demanda le brun aux yeux bleus à voix presque basse.

Il s'adossa ensuite au mur perpendiculaire aux barreaux.

Elle acquiesça sans trop de conviction.

Thomas se laissa ensuite glisser le long de ce mur jusqu'à s'assoir par terre. Elle le rejoignit rapidement et prit place près de lui, seulement séparés par les barreaux.

— C'est la nuit ou le matin ? Demanda Mikasa qui avait du mal à se repérer dans le temps après plusieurs jours enfermée ici.

— La nuit.

Elle leva un regard inquiet vers lui, comprenant pourquoi il est debout.

— Encore un cauchemar..?

— Mh. Acquiesça Thomas avant de forcer un sourire pour qu'elle ne s'inquiète pas plus.

Elle sentit ensuite son regard la détailler rapidement. Elle portait des vêtements blancs et simples, juste un haut et un pantalon. Ses pieds étaient nus et ses cheveux ébouriffés, ayant pris le sens de l'oreiller.

— Chez ta mère, quand elle nous a servi cette tisane tu étais nerveux, effrayé même. Tu m'avais aussi demandé si tout ça était réel... C'est à cause de tes cauchemars ?

La question lui brûlait les lèvres depuis des semaines, elle profite alors que le sujet soit abordé pour satisfaire sa curiosité.

— Mh. Je me vois toujours rentrer chez moi et quand on me sert une boisson chaude c'est du sang de titan. Sur la table je vois le visage d'un soldat qui me fixe, une tête sanguinolente séparée de son corps. Je baisse ensuite les yeux et je vois que mon corps est transpercé par deux lames. Explique le jeune homme.

Mikasa ne sut pas vraiment quoi dire, quand il termina son récit elle baissa les yeux pour fixer ses pieds.

Thomas soupire et fait son possible pour arborer un sourire.

— Mais bon... Keiji m'avait dit que c'est normal de faire ce genre de rêves, que tout le monde en fait alors ça ne m'inquiète pas trop. Je suppose qu'on a vu trop de choses horribles...

— Tu dois être plus sain d'esprit que moi... Souffla Mikasa qui repliait ses jambes contre elle et les entourait de ses bras.

— Comment ça ? S'étonna-t-il.

— Je ne me souviens pas avoir fait le moindre cauchemar avec du sang, des morts ou le visage des hommes que j'ai tués. Tu crois que je suis une meurtrière sans cœur..?

Il eut une seconde de silence pensant, elle comprit qu'il devait l'observer.

— Nan. Je dirai qu'ils ne te réveillent jamais alors tu ne t'en souviens pas. Rassura-t-il.

Elle hocha la tête, pas convaincue.

Le silence s'installa de nouveau. Elle réfléchissait pour la première fois sur son humanité, se demandant à quel point elle était devenu un monstre pour combattre ces choses qui rôdent, là, dehors. Après quelques secondes elle sortit elle-même de ses pensées et leva les yeux vers Thomas et une autre question lui vint.

— Qu'est-ce que tu as fait ces derniers jours ?

— Rien d'intéressant... Hanji m'a demandé d'assister Julia qui consigne toutes les informations que contiennent les carnets. Répondit le jeune homme.

Mikasa ne laissa rien paraître mais l'idée qu'il ait passé plusieurs jours seul avec elle réveille sa jalousie et cette peur non assumée que quelque chose puisse se passer entre elle et son brun.

— ...Et en plus les entraînements ont été temporairement suspendus... Ajouta Thomas.

— Ah. Je croyais que... Que tu avais été envoyé quelque part.

Elle trouvait étrange qu'il ne soit pas venu lui rendre visite plus tôt alors qu'il était ici. C'est pour cela qu'elle avait imaginé qu'il avait été envoyé quelque part. Est-ce qu'il a passé les autres nuits avec Julia ?

Mikasa secoua la tête pour chasser ces pensées qui lui faisaient du mal pour s'accrocher à l'idée qu'il a simplement bien dormi les nuits précédentes et cette nuit là, après un énième cauchemar, son premier réflexe a été de venir la trouver pour se réconforter avec sa présence.

— Désolé, j'aurai dû passer plus tôt m...

Il s'arrêta net de parler quand il sentit qu'elle lui prenait la main, après avoir passé son bras entre deux barreaux. Il resta fixé sur leurs doigts entrecroisés un instant avant de lever les yeux vers elle. Elle lui souriait, tendrement, la tête reposant contre le métal froid qui les séparait.

Elle le vit à son expression surprise : Mikasa devait témoigner bien plus de tendresse et d'affection qu'elle ne le devait avec ce geste et sa façon de le regarder. Il fit alors la même chose, sa tête se posa contre le barreau et il soupira longuement, un son qu'elle interpréta comme le signe de son contentement.

— Dis-moi ce que je dois faire, Mikasa. Parce que tu avais raison l'autre jour... Je suis mort de trouille. Avoua-t-il, le regard fuyant.

Le sourire de la jeune femme s'élargit.

— Moi aussi.

Elle passa son bras gauche entre les barreaux pour se saisir du menton du jeune homme avec délicatesse pour l'obliger à croiser son regard.

— Peut-être que... Qu'on pourrait trembler de peur ensemble, comme avant. Ajouta Mikasa, soudainement timide et nerveuse mais déterminée à le fixer droit dans les yeux.

Thomas baissa la tête, il hésitait.

Mikasa le regardait se questionner, poser le pour et le contre. De son côté, elle avait décidé de ne pas croire aux paroles de ce Erik Müller.

— Tu crois que... Commença-t-il.

— Même si c'était vrai, c'est déjà trop tard à cause de ce qu'on a... Fait. Non ? Coupa la brune, comme si elle avait deviné la suite de sa phrase.

Thomas ne répondit pas mais tortillait légèrement sa bouche. Mikasa posa sa main gauche sur le bras du soldat Ralle, ce qui lui fit relever les yeux vers elle.

— Écoute, on risque de mourir à chaque sortie du bataillon alors... S'il ne nous reste que quelques semaines à vivre, autant en profiter. Tu ne crois pas ? Nous serons sûrement morts avant que ça ne se sache.

Il acquiesçait lentement. Elle ne rêvait pas, il semblait être d'accord avec elle sur ce point.

— N'oublie pas qu'on s'est promis de tout partager, alors la prochaine fois qu'il y a quelque chose de grave je veux que tu m'en parle avant de prendre une décision. Ajouta-t-elle.

— Mh, tu as raison, désolé...

Thomas se saisit doucement de ce bracelet qu'elle portait encore autour de son poignet gauche et le fit tourner lentement jusqu'à ce qu'il soit dans le bon sens, sans doute pour extérioriser sa nervosité.

Elle souriait, toute heureuse qu'il entende enfin raison.

— Tu devras te faire pardonner. Dit-elle pour s'essayer à un peu d'humour.

Vu l'air confus qu'il arborait, elle comprit que ce devait être un échec. Ça n'a de toute façon jamais été son fort mais elle continuait de sourire.

— Je vais devoir m'entraîner à la lutte avec toi ? Si c'est ça, j'abandonne...

Elle contemplait son visage, détaillait chacun de ses traits jusqu'à se perdre dans le bleu profond de ses yeux perçants, un petit sourire aux lèvres.

— Idiot... Répondit-elle dans un souffle, avec une voix douce.

Mikasa sort de ses pensées et est happée hors de ce souvenir qu'elle visualisait en entendant Eren qui s'éclaircit exagérément la voix.

— Tu devrais aller te reposer aussi et... Fais attention avec lui. Dit jeune Jäger en faisant allusion à Thomas.

Elle écarquille les yeux avant de baisser la tête, ne sachant pas vraiment quoi penser de cette mise en garde. Est-ce qu'il aurait vu quelque chose en rapport avec le brun aux yeux bleus qui n'annonce rien de bon ?

A ce moment là quatre personnes les dépassent : Hanji emmène Armin, Julia et Thomas jusqu’à une petite pièce. Ils ferment la porte derrière eux.

— Bon, comme vous le savez, maintenant que je suis major je n'aurai plus vraiment le temps de m'occuper de ma chère escouade. J'ai longuement réfléchi et j'aimerai te la confier, Armin.

Le soldat Arlelt n'est qu'à moitié surpris mais il lance un regard à Julia et Thomas pour voir leur réaction. La jeune femme semble ravie d'accueillir son compagnon de lecture dans l'escouade et Thomas a un petit sourire.

— Tu prendras le grade de capitaine, ce qui te place en premières loges si jamais je ne suis plus en capacité d'assumer le commandement du bataillon. Sache que les chefs d'escouade ont toute liberté pour gérer, organiser et assembler leur équipe. Mais si je peux te donner un petit conseil, tu devrais nommer un lieutenant qui t'épaulera et assurera en ton absence. Explique Hanji.

Armin sent que son environnement tourne un peu, même s'il s'attendait à prendre de l'importance pour se préparer à commander et remplir ce rôle qui lui échoit dorénavant, il ne pouvait pas prévoir une promotion aussi fulgurante.

— Sur ce, je vous laisse, j'ai encore quelques petites choses à régler. A plus tard, l'escouade Arlelt. Termine Hanji qui leur fait un clin d’œil avant de s'éclipser.

— Félicitations. Prononce Thomas.

Le blond est un peu déstabilisé parce que s'il y a bien une personne auprès de qui il ne pensait pas faire l'unanimité, c'était bien lui. Julia acquiesce.

— Bon euh... On verra plus tard pour cette histoire de lieutenant, j'aimerai mieux apprendre à vous connaître.

— Ne t'en fais pas, nous sommes habitués à se démerder tous seuls dans cette escouade, Hanji était souvent absente, prends ton temps. Rassure Thomas.

— Je vois, c'est l'inverse de l'escouade tactique... Bon, je suppose qu'on va rentrer à la caserne...

Thomas et Julia exécutent un salut militaire puis tournent les talons.

Armin reste dans cette pièce une bonne minute pour souffler, pour digérer les responsabilités qui pèsent soudain sur ses épaules. Lorsqu'il sort de la salle, il trouve Mikasa et Thomas en train de discuter, celle-ci a d'ailleurs une main posée sur l'épaule gauche du brun.

— ...faire soigner ça.

Entend-il de la part de la jeune femme.

Thomas acquiesce puis ils remarquent que Armin approche. Elle retire sa main et se tourne vers lui.

— Félicitations, capitaine. Dit-elle.

— Merci... Tu avais vu juste. Répond le nouvel officier.

— Allons manger un truc, ça creuse ce blabla sur le continent. Lance Thomas, faisant sourire ses compagnons.