L'Ode à la liberté [Livre I]
Æsma et Delroy accompagnaient Hanji à Ragako, où Conny et le reste de l’escouade les attendaient.
Ensemble, ils découvraient le Titan que le soldat Springer mentionnait dans son rapport. Ils comparèrent le portrait de ses parents - dessiner au fusain - et le Titan avachi dans son ancienne maison. L’illustration à l’envers, la ressemblance était frappante.
La théorie émis suite à l’apparition inopiné des Titans dans le mur Roses - sans faille - et les maisons en ruines sans signes d’explosions et d’effusion de sang, supposait que les monstres - déviant ou non - étaient possiblement des êtres humains. Et pour appuyer les propos du commandant, le nombre de Titan éliminé correspondait au nombre des habitants de Ragako, disparu à ce jour.
Si on ajoutait à l’équation, le comportement de Reiner, cela faisait sens. Sinon, pour s’évertuer à faire taire Conny, quand il pensait avoir entendu ce Titan parler ? Un beau foutoir que voilà. Des questions en suspens, auxquelles s’ajoutaient d'autres interrogations.
Hanji qui avait vu toute la détresse dans les yeux du petit gars, évita de montrer un quelconque enthousiasme. Il se limita à remercier le jeune soldat pour sa coopération et demanda à son équipe d'attacher le Titan seulement avec des cordes. Pas besoin de le persécuter, comme il l’avait fait pour ses anciens enfants, même s’ils aucun des deux n’avait montré signe de souffrance.
Le point faible des Titans était la nuque. Malgré les différents gabarits, leur faiblesse faisait toujours la même taille. 1m de long et 10 cm de large, la même dimension que le cerveau et la moelle épinière d'un être humain. Mais tout ça n'était que supposition. Le chef Zoe avait déjà pris soin de disséquer la nuque de ces anciens enfants. Il n'y avait rien qui s'apparentait à un cerveau humain. En même temps, difficile qu'il demeure intact dans un ces étranges corps. Ils sont encore bien loin d'avoir découvert quoi que ce soit. Ils manquaient cruellement de preuves.
La journée s'achevait laissant le soleil défiler petit à petit à l'horizon.
— Chef ? Appela Æsma - une fois en selle.
— Oui ?
— Ça fait combien de temps que vous vous n'êtes pas lavé ?
— Je me suis lavé hier !
Æsma plissa les yeux. Son odeur soutenait le contraire. Moblit n'est pas rentré depuis quelques jours, après s'être vu confier quelques petites missions à droite à gauche. Hanji se laissait clairement aller. Réfléchissant à une nouvelle ruse, la blondinette devait redoubler de créativité et d’originalité. Le belle homme déjouait ses plans à chaque fois.
Une idée germait dans son esprit. Hanji rendrait forcément visite au Major. L’occasion de mettre son plan à exécution, il suffisait juste de convaincre Delroy pour l’épauler.
La jeune fille croisa le regard suspicieux de son chef. Elle lui adressa un sourire doux et innocent.
Æsma hésita quelques instants, et demanda à Delroy de le faire. Le grand brun la traita de folle, ne souhaitant pas se mouiller non plus. Il ne savait pas à quoi s’attendre derrière la porte.
La porte s’ouvrit soudainement. Les yeux bleu irisés, mêlés à de la méfiance et de la surprise, fixaient les jeunes soldats. Les deux pupilles d’acier retrouvèrent enfin leur froideur habituelle.
— C’est vous qui jacassez comme ça depuis tout à l’heure ?! Qu’est-ce que vous voulez ?
Æsma se racla la gorge.
— Dites… Vous qui êtes à cheval sur l'hygiène. Vous n’auriez pas une grand bassine. Assez grande pour mettre quelqu'un à l'intérieur ?
Le soldat Henchman se frappa le visage, convaincu que son projet se solderait par un échec, se mordant déjà les doigts d’avoir accepté.
Le capitaine Livaï interrogea les subalternes d’Hanji du regard. Que manigançait la morveuse ? Oui, il estimait, qu’elle seule complotait, annonçant un cataclysme dans les heures à venir. Et son intuition ne le trompait jamais. La gamin expliqua ses intentions, déterminée à faire prendre un bain à son mentor. Un plan bien tordu.
Ouais, ils sont tous siphonnés dans cette équipe, pensait-il.
— Ok, dit-il. Delroy regarde dans le vestiaire des hommes. Préparez lui son bain et j’arrive.
L’énorme cuvette - maintenue par les deux explorateurs - roulaient jusqu’à la chambre du chef Zoe.
Æsma courra jusqu’aux cuisines, emportant un chariot rempli de quatre énormes casseroles brûlantes.
Delroy emprunta un des savons disposés dans la salle de bain commune des hommes.
La bassine se remplissait au trois-quart. La blondinette versa un petit liquide, agréablement parfumée à l’hibiscus. Elle remuait l’eau pour disperser le contenu de la fiole.
La porte s’ouvrit brusquement, laissant entrer Livaï - Hanji sur son dos et quelque peu amoché et surtout inconscient.
—Mais... C'est quoi ce bordel ?! S'exclama Æsma.
— Au grand maux, les grands remèdes. C'est le seul moyen pour lui faire entendre raison.
— Vous êtes timbrés !
Livaï jeta un regard noir à la petite protégée d'Hanji avant de balancer le corps sur le lit. « Viens m’aider , toi » s’adressa-t-il au grand brun. Sans crier gare, il commença à retirer le haut de son collègue - sous les yeux éberlués de Traum.
— Qu’est ce que vous faites ?! Demanda Æsma - les bras agités. Vous n'allez quand même pas le déshabiller !
Embarrassée, elle leur tourna le dos, mais face à un miroir, elle ne pouvait s’empêcher de jeter un coup d’œil. Le caporal retiraient les vêtements du chef Zoe - caché par ce dernier. Prise en flagrant délit de voyeurisme par son camarade, Æsma observait méchamment le plafond.
— Comment comptes-tu le laver ?
— Hein ?
— Vu son état, il ne va pas se laver tout seul, dit-il en déposant Hanji la cuvette. Une fois, mais pas deux. D'habitude, c'est Moblit qui s'occupe de lui. Vu que c'est ton chef et que tu as l'air de bien l’apprécier, tu ne verras pas d'inconvénient pour lui faire sa toilette.
Le Caporal lui balança une éponge avant de partir et de claquer la porte. Delroy avait également profiter de cet instant pour s’éclipser de la pièce.
La prétendante examina au loin la chimère endormie. Le sang affluait sous les tambourinements incessant enfermée dans sa geôle osseuse, où l’anarchie régnait - embrassant l’entièreté de son visage.
Tout le courage qu’elle avait acquis ces derniers mois, se vaporisa sous la fumée. Æsma faisait les cents pas, dans la pièce silencieuse. Ce n’était pas prévu dans ses calculs.
La pression l’asphyxiait, qu’elle réussit - au tout dernier moment - par lâcher prise pour inhaler le peu d’oxygène, qui errait dans la demeure du chaos. La chaleur la rendait fiévreuse. Son corps vacillait à mesure qu’elle s’approchait de la sublime créature.
Jamais, elle n’aurait pensé dans une telle conjoncture - admirer et toucher cette divinité. Pas de cette façon. Encore moins l’entièreté de son corps - glisser ses mains sur la partie la plus intime et divine… Réagirait-il à ce contact ?
L'excitation pointa le bout de son nez, quand elle réalisa qu'ils étaient seuls dans la chambre. La chambre d’Hanji. Son imagination dépassait les limites de la réalité - tantôt exaltée, tantôt honteuse de concevoir un scénario de cet envergure.
Æsma ricana. Elle se sentait fiévreuse à l’idée de poser ses mains sur ce corps d'apollon.
S’asseyant au bord de la bassine, elle entrevoyait à travers le liquide incolore, un corps élancé, légèrement musclé. Elle se délectait de cette vision mirobolante. Ses yeux verdoyants scrutaient de son en large la peau blanche de son mentor, constatant avec une légère déception qu’il n’était qu’à moitié dénudé.
La blondinette se claqua violemment les joues, se punissant pour ses pensées obscènes. Seul dieu sait ce qu’elle pourrait faire à cet instant, mais le péché était prohibé. Interdiction de divaguer.
Le soldat Traum inspira et expira un bon coup, avant de reprendre son sérieux. Elle plongea l’éponge dans l’eau. Elle hésita un instant, craignant de se faire brûler au contact de sa peau. Doucement, elle commença à frotter son cou avant de descendre légèrement au niveau de son buste. En pleine effervescence, elle se mordit intensément la lèvre inférieure et ferma les yeux pour contenir tous ces excès ostentatoires.
La jeune fille débarbouilla le visage d’Hanji, puis frotta son bras droit. Son mentor lâcha un petit grognement, ouvrant les yeux. Il attrapa le poignet d’Æsma pour l’entraîner à l’intérieur de la bassine. Les fesses dans l’eau, Æsma se redressa, mais se retrouva dos - contre le torse de son chef. Son cœur rata un battement. Elle entra dans une transe endiablé.
— Et bien Livaï, je croyais que tu ne voulais plus me toucher. Petit coquin.
Le simple fait d’entendre son prénom horripila le soldat Traum, brandissant le bouclier pour contrer le coup. Livaï. Ce son résonnait encore un long moment dans le creux de ses oreilles. Li-vaï. Un choc brutal.
Les poings serrés, Æsma comprit enfin les paroles du capitaine. Le salaud. Ce salaud avait vu Hanji. Ce salaud avait profité d’Hanji. Ce salaud mérite la peine de mort, pensa-t-elle - entrant irrémédiable dans une colère noire.
Cette fureur naissante laissa place à de l’amertume. Comment son mentor ai pu la confondre avec ce nabot ?!
Réfléchissant à la façon dont elle allait trouver le caporal-chef, Hanji - persuadé avoir à faire à Livaï - lui mordilla l’oreille, glissant une de ses mains sous son t-shirt, remontant dangereusement au niveau de sa poitrine.
Æsma, prise d’une bouffée de chaleur, frôlant la crise cardiaque, lâcha un petit cri étouffé, ses sens de nouveau stimulés. Elle se dégagea brusquement de son étreinte pour se libérer de son joug et donna une tape sur le front de son chef.
— Putain chef Hanji ! Ça va pas la tête ! Vous êtes aveugle ma parole ! Comment pouvez- vous pouvez me confondre avec lui ?! S’offusqua-t-elle.
— Oh Æsma, c’est toi ? S’exclama Hanji, légèrement surpris avant de rigoler. Excuse moi, sans mes lunettes, je ne vois rien…
Hanji se redressa et coinça sa jeune protégée dans ses bras.
— Alors comme ça, tu voulais prendre un bain avec moi. Tu aurais pu me le demander plus clairement tout à l’heure, dit-il d’une voix grave.
Une fois de plus, son cœur fit un raté. Cette voix suave… Son souffle chaud se diffusant dans ses oreilles… Æsma fixa son mentor béatement, s’embourbant volontiers dans le jardin d'Eden, où les noisettes remplaçaient les pommes de ce lieu paradisiaque - désireuse d’embrasser cette bouche aguicheuse et commettre le pire des péché avec cette homme qu’elle admirait tant.
— Æsma ? l’appela son chef - approchant son visage du sien.
Il attrapa le menton de sa protégé du bout de ses doigts. Elle se laissa happer par son souffle, tremblante comme une feuille quand les mains de son supérieur glissèrent sur ses joues. Les yeux mi-clos, elle ferma instinctivement les paupières attendant patiemment d’échanger un baiser des plus passionnants.
Des secondes s’écoulèrent sans que rien ne se passe. Bordel, qu’est-ce qu’il fou? s’interrogea-t-elle, ouvrant un œil pour prendre connaissance de la situation.
Hanji semblait obnubilé par autre chose.
— Æsma, tu saignes du nez.
— Rien de grave, annonça le médecin. Seulement un choc émotionnel. Vous êtes stressée en ce moment ?
Le soldat Traum n’osait pas répondre à cet interrogatoire, bien trop embarrassant.
Alors qu’elle voulait seulement sortir de la bassine, elle s’était vautrée et cogné contre le rebord du lit, n’arrangeant pas son cas. Hanji - à peine vêtu - l’avait entraîné de force pour se faire ausculter. Pour couronner le tout, ils avaient croisé le Major Erwin et Livaï en chemin, - actuellement présents dans la pièce. La pire soirée de sa vie. Delroy était là aussi, essayant de contenir son fou rire.
La blondinette jeta un coup d'œil à la corbeille, remplie de mouchoirs imbibé de son sang. La honte… pensa-t-elle. Elle ne se voyait pas dire au médecin, que cet incident était dû à l’excitation éprouvée plus tôt. Encore moins devant le Major, Delroy et l'autre tête de con.
— Avec tous ces événements, c’est normal. Le stresse retombe, dit le Major sûr de lui.
Erwin observait Hanji, ne comprenant toujours pas son accoutrement. Et pourquoi Traum se retrouvait trempée de la tête au pied à cette heure tardive ?
Livaï roula des yeux agacés et se frotta le front exaspéré que le Major puisse être aussi débile et aveugle dans un moment pareil.
Delroy étouffa son rire de plus en plus incontrôlable.
— Tout va bien Henchman ? Tu es tout rouge, demanda le commandant du Bataillon.
— Ahahah… oui ? Peut-être… Besoin de prendre l’air.
Le grand brun sortit de la pièce en trombe. On pouvait l'entendre éclater de rire à travers les murs. Le Major Smith trouvait la nouvelle recrue d’Hanji très bizarre. Enfin, rien d’étonnant, s’il se trouvait dans cet escouade...
Depuis de bonne minutes, Æsma jeta des regards noirs au caporal-chef - quelque peu blasé. La jeune fille s’imaginait encore Livaï les mains baladeuses et dégueulasse sur le corps d’Hanji. Elle le maudissait intérieurement. Elle avait une furieuse envie de l’étrangler. C’était de sa faute, si tout avait capoté, pensait-elle. Ce n'était qu’un vieux pervers dégueulasse qui tournait autour de son chef.
Il ne restait plus que le chef et sa subalterne dans la pièce.
— Ça va avec Eren ?
— Hein ?
La jeune fille se gratta le crâne, confuse. Eren ? Il agissait de plus en plus bizarrement. À croire qu’elle avait fait quelque chose de mal, et c’était le cas, elle ne connaissait pas les raisons… Ah pourquoi parler d’Eren maintenant ? Elle a bien failli perdre les pédales tout à l’heure. Alors qu’ils étaient à deux doigts de passer à une étape supérieure… La première chose qui lui venait à l’esprit était Eren ? Pourquoi ?!
« Atchoum ». Voilà qu’elle commençait à s’enrhumer…
— Jamais je n’aurais pensé que tu aurais fait appel à Livaï. C’est vraiment mesquin de ta part.
— C’était pas prévu, dit timidement Æsma, les yeux fixés au sol.
— Il te suffisait juste de me solliciter directement.
Hanji lui apporta une couverture et l’enroula autour d’elle. Cette délicate attention ne manquait pas de la faire fondre.
— Vous solliciter ? Genre, vous vouliez prendre un bain avec moi ?
Hansi ricana devant la grimace rougissante de la demoiselle.
— Tu sais quel âge j’ai Æsma ?
La blondinette cligna des yeux plusieurs fois.
— C’est quoi ces questions sans queue ni tête capitaine ?
— Nous avons plus de dix ans d'écart.
— Et… alors ?
Æsma fronça les sourcils, retroussant son petit nez. Où voulait-il en venir ?
Hanji soupira exaspéré.
La blondinette percuta - enfin c’est ce qu’elle pensait. Elle ferma les yeux un instant, posant sa main sur sa poitrine, comme elle ferait pour saluer un de ses supérieur et décida de se déclarer :
— Vous savez, j’ai toujours eu envie de rejoindre le Bataillon d’Exploration. Encore plus après vous avoir rencontré. Vous êtes mon modèle. Vous n’avez rien à envier aux autres, même pas au Major. Vous êtes un homme beau, brillant et exceptionnel. Sans vous, le Bataillon serait encore ignare et ne se serait jamais intéressé au Titans. Vous êtes quelqu’un de passionné. J’adore vous entendre vous exprimer au sujet des titans. Vous respirez la joie et la bonne humeur. Ça vous donne un côté terriblement sexy. Vous n’avez peur de rien. Vous savez aussi vous montrer sérieux et attentif quand il le faut avec autrui. C’est rassurant d’avoir quelqu’un comme vous à mes côtés. Si vous n’existiez pas, il faudrait vous créer. Vous ne savez pas comment ça me fait plaisir d’être à vos côtés. Je serais prête à tout pour vous, vous aider dans vos recherches et bien plus encore ! Je m'en fou complètement de l’âge. Je ne suis plus une enfant maintenant.
Æsma regarda son chef les yeux brillants.
— Hé bien… Je ne m’attendais pas à ça, dit-il - un petit sourire timide.
En plein dans le mille, se dit-elle en voyant son supérieur rougir.
Le chef Zoe se gratta la joue. Cette déclaration franche et spontanée le désarçonna un peu - mais pas assez pour changer de bord et le faire tomber dans une perversité malsaine.
— Tout ce que tu me dis me rend très heureux. Qu’est-ce que ça va être quand tu vas te déclarer à Eren.
— Hein ?
— Si tu te montres aussi passionné avec lui qu’avec moi, il va prendre peur. Veille à ne pas trop le brusquer et ça sera dans la poche.
— Mais … Mais pourquoi on parle d’Eren là ? J’vous dit que je vous aime bordel !
— Non Æsma. Ne confond pas amour et admiration.
— Je ne confonds rien du tout voyons !
— Alors explique moi, si tu m’aimes vraiment, dit Hanji s’approchant d’Æsma, et chuchotant à l’oreille d’une voix plus grave, pourquoi tu te montre plus expressive et tactile avec Eren ? Pourquoi c’est lui que tu retrouvait à chaque fin de soirée et pas moi avant d’aller dormir ?
Déstabilisée, la jeune fille gesticulait bizarrement. Tel un poisson rouge dans son bocal, elle secouait la tête de gauche à droite, mais aucun son ne sortait de sa bouche.
— Ah, mais tu ne peux pas savoir comment ça me rend heureux que tu me voue autant d’admiration, s’enjailla Hanji - la prenant dans ses bras. J’ai toujours rêvé d’avoir une petite sœur comme toi.
« Petite sœur ». Ces mots engourdissaient son esprit, saccageant tout sur son passage, rayant de la surface de la terre ses rêves les plus fantasques - à l’exception d’un éclat de verre plongé dans la désolation.