Les Lumières dans les Ténèbres : La Réalité de la Fée Noire

Chapitre 65 : Shibuya (Sora)

6638 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 27/08/2023 16:53

J’ai ouvert les yeux.

La première chose que j’ai remarqué : j’étais au sol, en plein milieu de la route. En me relevant, je me suis aperçu que j’étais plus du tout à l’Empire. Tout autour de moi, un nombre incalculable de bâtiments haut comme le ciel, avec des écrans sur la plupart de leurs murs affichant des trucs comme « Tigre PUNKS » ou encore « Venez achetez ce nouveau badge ! Pour cela, contactez le… » suivi d’une série de chiffres. Au loin, un immeuble se distinguait bien plus des autres, par sa hauteur bien sûr, mais aussi par son aura. On pouvait y voir écrit en énormes lettres rouges : « 104 ».

-         Où suis-je ? me demandais-je à voix haute.

Cet endroit ne ressemblait en rien avec les mondes que j’avais visités auparavant. Il semblait plus moderne que le monde de Peter Pan, mais bien moins futuriste que celui de Tron. Aucun doute, je n’avais jamais mis les pieds ici. Quelque chose de lourd dans ma main droite m’a interpellé. Je l’ai ouverte pour découvrir dans ma paume deux petits objets plats et circulaire, sur lesquels figuraient simplement un signe rappelant une tête de mort noire sur fond gris.

C’est quoi ça ? Pourquoi est-ce que j’en ai ?

Avant que je ne puisse y réfléchir plus longtemps, quelqu’un m’a foncé dessus. N’ayant pas le temps de l’éviter, j’ai fermé les yeux en attendant le choc.

« C’est pas vrai, je vais être en retard ! » a retenti une voix dans mon esprit.

En ouvrant les yeux, cette personne se trouvait derrière moi.

-         Hein ?

D’autres personnes m’ont « bousculé ». Quoique, je ne savais pas vraiment, puisque je n’avais senti aucun choc. À la place, d’autres voix ont résonné en moi au même moment : « Je me demande ce que je vais bien manger ce soir. », « Ce nouveau morceau doit se trouver à Tower Records ! » ou encore « Il y a toujours autant de monde à Scramble Crossing… ».

Autant de paroles qui semblaient venir de nulle part et partout en même temps et me faisaient mal au crâne.

-         Qu’est-ce qu’il m’arrive ?! m’écriais-je en me prenant la tête dans les mains.

En regardant le sol, je me suis aperçu que j’étais en plein milieu de la route, au croisement entre plusieurs passages piétons, d’accord, mais quand même sur la route. J’ai relevé la tête à temps pour voir un camion rouler dans ma direction. Aussi vite que possible, je l’ai esquivé, de même que les voitures dans l’autre sens de circulation. Aussi bizarre que cela puisse paraître, les conducteurs regardaient droit devant eux. Comme si… Comme si…

Ils ne me voient pas ?

Malheureusement, j’ai été bête. À trop vouloir observer les chauffeurs, j’ai eu un instant d’inattention, ne remarquant pas un autre camion, plus gros que le précédent. Là, il m’était impossible de faire quoi que ce soit.

-         Whoa !

J’ai fermé les yeux, m’attendant au pire…

Mais rien.

Les autres véhicules continuaient leur route. Je me suis palpé le corps. Je n’avais rien. Comment est-ce que c’était possible ? J’étais pourtant certain que…

Ce qu’il s’est passé plus tôt m’est revenu en mémoire. Ces gens… Ces voitures…

Écoutant mon instinct, j’ai tendu la main devant moi. Un véhicule a roulé près de moi. Mon bras aurait dû se faire percuter violemment.

Or il est passé au travers. En se brouillant légèrement, comme une illusion.

J’ai regardé ma main intacte, inquiet et surtout : complètement perdu.

-         Que se passe-t-il ?

-         Sora ! A appelé une voix familière, me sortant de mon état d’hébétude.

Dingo courait vers moi, en prenant soin d’éviter les passants. Sur ses talons, Thomas, Lea et Yuki.

-         Rien de cassé ? S'est enquit le rouquin à mon attention.

Je lui ai répondu que ça allait.

-         C’est quoi cet endroit ? (Une dame est passée à travers Thomas, sans lui accorder la moindre attention, arrachant un cri de surprise à ce dernier.) Pourquoi est-ce qu’on nous traverse comme ça ? Personne ne nous voit ?

Yuki a haussé les épaules.

-         Peut-être avons-nous atterri dans un monde qui révèle ta véritable nature d’être insignifiant ? Va devant un camion pour voir.

-         Je te signale qu’on est dans le même bateau, génie, rétorqua sèchement Thomas.

Lea a poussé un soupir avant de les séparer, pressentant qu’ils en viendraient à s’affronter ici-même.

-         Vous n’allez pas déjà commencer !

Dingo tenait un sac en toile, le même que celui donné par Minehi avant notre départ.

-         Il a atterri à côté de moi après notre trajet, a expliqué mon ami.

-         Merci, mec, lui ai-je dit. Je ne sais pas comment je l’ai lâché. (J’ai ouvert le sac.) Et on dirait qu’elles sont toutes là. Super !

J’ai fait signe aux trois autres de s’approcher. Puis, j’ai pris une des Potions + dans le sac. Il s’agissait d’un petit récipient en verre, tout juste grand pour tenir dans la main, contenant deux étoiles vertes et un objet jaune en forme de croissant de lune. Ces derniers flottaient et scintillaient, dégageant une lumière assez apaisante.

-         C’est une « Potion + », expliquais-je, plus particulièrement à l’attention de Thomas. Il s’agit d’un objet magique qui te soigne complètement.

-         Jusqu’à quel point ? a questionné ce dernier.

-         Comment ça ?

-         Si je perds une jambe, je peux la récupérer avec cet objet ?

-         Ben euh…

-         Non, a répondu Lea. La Potion + est efficace, mais pas à ce point. Et puis, ça ne régénère pas ton énergie ou ta magie.

-         En plus, c’est extrêmement rare et dur à synthétiser. Et je ne te parle même pas du prix !

-         O.K. O.K. Je dois donc m’en servir à bon escient. (Thomas a jeté un œil perplexe à la Potion.) Comment est-ce qu’on stocke ça ? Je n’ai aucune poche assez grande.

Pour lui répondre, Dingo a pris l’objet et s’est concentré. Aussitôt, il a disparu. Devant le regard incrédule du nouveau guerrier de la Keyblade, il a clarifié :

-         Certains objets comme les potions peuvent se lier à toi par magie. Si jamais tu veux t’en servir, il suffit d’y penser (La Potion est réapparue dans la main de Dingo.) et de la jeter en l’air. C’est tout. Facile, hein ? Ahyuk !

-         N’oublie pas que tu ne peux avoir qu’un seul objet lié à toi, a averti Lea. Si jamais tu en veux un autre, l’ancien sera remplacé.

Thomas hocha consciencieusement la tête, l’air d’avoir enregistré ces informations. J’ai alors entrepris de distribuer une Potion + à chacun de mes amis. En donnant la sienne à Yuki, j’ai remarqué qu’elle était ailleurs.

-         Ça va ? lui ai-je demandé. Tu as l’air inquiète.

La jeune fille m’a toisé pendant une fraction de seconde avec la même dureté qu’avant la soirée où nous avions discuté elle et moi. Heureusement, très vite, son regard s’est adouci.

-         C’est juste… Quelque chose que Bullet m’a dit.

Bullet, le Troisième Cadre Supérieur de l’Empire de la Poussière d’Étoile, un utilisateur d’éclairs rouges, avait été l’adversaire de Yuki pendant le combat final face à Stellaos. Avec tout ce qu’il s’était passé, je n’avais pas eu le temps de lui demander comment l’affrontement s’était déroulé. Dans tous les cas, content qu’elle s’en soit sortie !

Voyant que j’attendais des explications, elle a ajouté :

-         Cela concerne… (Elle s’est rembrunie.) Il a dû mentir. Forcément.

-         De quoi est-ce que tu parles ?

Ignorant la question de Thomas, elle a commencé à regarder autour d’elle.

-         Il nous faut trouver les autres au plus vite. (Ses iris blancs se sont posés sur l’immeuble au numéro « 104 ») Ils doivent être quelque part ici, non ?

Lea sa croisé les bras, en pleine réflexion.

-         En principe, oui. Le bâton de Stellaos qui lui permet de se déplacer grâce aux étoiles couplé à l’Essence de peur d’Eoga devrait nous mener à Riku. Et donc, peut-être aux autres.

-         OK ! (Mon enthousiasme retrouvé, j’ai commencé à me rendre vers une ruelle.) Dans ce cas, allons les chercher !

Une main m’a retenu.

-         Observe bien, m’a dit Thomas.

Ne comprenant pas ce qu’il voulait dire, je me suis contenté de suivre son regard… pour enfin remarquer le problème. Certaines issues du quartier où on se trouvait (y comprit la ruelle où je comptais me rendre) étaient comme barrées par un mur bleuté translucide.

-         On est piégé ? a demandé Dingo.

-         Peut-être pas, a répondu Lea. Essayons de fouiller cet endroit

À l’instant où il a terminé sa phrase, des sons stridents ont retenti.

-         C’est quoi ? ai-je demandé.

-         On dirait que ça vient de nos poches… observa Dingo.

Le capitaine de la garde royale a mis la main dans sa poche et en a ressorti un objet rectangulaire. Nous l’avons imité pour constater que nous en avions tous un. L’appareil, assez léger, ne se limitait qu’à un seul écran qui le recouvrait totalement.

-         Un smartphone ?! s’exclama Thomas avant de se reprendre. Quoique, dans un monde comme celui-ci, ce n’est pas surprenant.

-         Un quoi ?

Le brun nous a regardé comme si on se moquait de lui.

-         Vous avez des vaisseaux spatiaux, mais vous ne savez pas ce que c’est ?

Dingo et moi avons secoué la tête.

-         Eh bah, j’avoue que je n’y attendais pas. Il s’agit d’un genre de…

-         Les gars, a coupé Lea. Vous devriez lire ce qu’il y a d’écrit sur l’écran.

Un peu dubitatif, mon regard s’est dirigé une nouvelle fois sur le mystérieux objet… pour y découvrir en plein milieu un message auquel je ne m’attendais pas.

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Triomphez du maître d’A-East. Vous avez 360 minutes. Si vous échouez, vous serez effacés. Cette règle s’applique également aux Supports.

— Les Faucheurs 

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Nous sommes restés plusieurs secondes sans dire un mot. Lea a relevé la tête.

-         Vous comprenez quelque chose, vous ?

Personne n’a répondu. Même Thomas, dont l’intelligence n’était plus à prouver, semblait aussi perdu que n…

Attendez.

Les… « Faucheurs » ? Pourquoi est-ce que cela me disait quelque chose ?

Soudain, un hurlement a retenti non loin de nous. À côté d’une statue de chien, un type s’est mis à scintiller, avant de littéralement se dissoudre en sphères de lumière. Les autres personnes autour de lui continuaient leur vie sans rien remarquer.

-         Qu’est-ce que…

Je n’ai pas eu le temps de finir qu’une chose a capté mon attention, pas loin du type qui venait de disparaître il y avait un animal étrange. Sa tête m’arrivant aux genoux, il ressemblait indéniablement à un crapaud vert avec ses yeux jaunes et des pattes arrière bleues. Il s’est tourné non pas vers nous, mais quelqu’un d’autre. En l’observant, je me suis aperçu qu’il tenait le même genre d’appareil que nous dans une main et autre chose dans l’autre. Non… Ce n’était pas un objet… Mais il y avait des chiffres sur sa main :

« 05 : 59 : 50 »

« 05 : 59 : 49 »

« 05 : 59 : 48 »

Un compte à rebours ?

Tétanisé devant la créature, il nous a néanmoins remarqué :

-         Vous… Vous êtes aussi des…

Des symboles sont apparus dans les airs juste derrière lui ; des marques noires au bordures rouges rappelant vaguement une tête de grenouille à partir desquelles le même genre de batracien qui menaçait l’homme est sorti. À plusieurs, ils ont ouvert leur gueule.

J’ai immédiatement tenté d’invoquer ma Keyblade, prêt à nous débarrasser de… De peu importe ce que c’était.

Ma main s’est refermée sur du vide. Je l’ai regardée, estomaqué.

Mon épée… Ne vient pas ?

Manifestement, mes amis avaient le même problème : aucun d’entre nous ne parvenait à appeler son arme. Tous les animaux ont craché des bulles sur l’homme. Je pensais que ces bulles étaient inoffensives, jusqu’à ce que l’inconnu hurle de douleur, avant de disparaitre de la même manière que son collègue.

Non…

Les animaux ont reporté leur attention sur nous. D’un même mouvement, ils ont préparé une nouvelle attaque. J’ai à nouveau essayé d’appeler mon épée.

-         Pourquoi est-ce que ça ne marche pas ? s’est plaint Thomas.

De la lumière a commencé à se concentrer sur la langue de l’animal.

-         Mes chakrams non plus ne répondent pas ! s’est exclamé Lea.

Chacun des batraciens visait une personne de notre groupe, de sorte que nous n'ayons aucune échappatoire. Aucune nouvelle de mon arme. Le stress montait de plus en plus.

-         Sora ! Appela Dingo d’une voix désespérée. Qu’est-ce qu’on fait ?

Je suis resté là, sans pouvoir lui répondre quoi que ce soit ; complètement dépassé par les évènements. Je suis resté là, à regarder la gueule de l’ennemi s’illuminer de plus en plus. Je suis resté là, à regarder l’attaque de l’ennemi approcher, sans doute suffisamment puissante pour me faire subir le même triste sort que les deux autres inconnus. Un jet de flammes venu de nulle part a atteint mon assaillant, ainsi que ses bulles. Puis, le brasier s’est étendu à tous ses congénères. Bientôt, il n’est plus resté d’eux que le vide, comme s’ils n’avaient jamais été là. Un garçon avait atterri devant moi, me tournant le dos.

-         Tu n’as pas perdu de temps pour remplir ta promesse, a-t-il constaté d’une voix familière. Rien de cassé, (Il s’est retourné.) Sora ?

Quand ses yeux bleus ont croisé les miens, je n’y croyais pas. Mon interlocuteur était un adolescent d’une quinzaine d’année environ, aux cheveux orange en épis et à la peau légèrement pâle. Vêtu comme à son habitude d’un haut au col en forme d’entonnoir – suffisamment grand pour couvrir sa bouche – de couleur noire barré d’une bande indigo, des chaussures du même style avec entre les deux, un short blanc et un bandeau jaune à son poignet gauche. Bien évidemment, il portait son signe le plus distinctif chez lui : un genre de casque lui couvrant les oreilles.

Cela faisait longtemps que je ne l’avais pas vu, peu avant que Riku ne devienne Maître de la Keyblade, en fait. J’avais fait la promesse de venir le voir dans son monde, mais malgré mes recherches, je ne le trouvais nulle part. Mais le voilà, mon nouvel ami était juste devant moi !

-         NEKU ! me suis-je écrié, débordant de joie.

Il n’a pas eu le temps de répondre que je l’ai pris dans mes bras. Si ça l’a dérouté ? Carrément ! Une grenouille restante se glissa derrière nous et s’apprêtait à attaquer.

-         Attention ! a averti une voix féminine.

Trop tard pour agir ; le monstre ouvrait déjà sa gueule.

Quelque chose de noir est passé devant moi. On aurait dit…

Un chat… en peluche ? Oui, mes yeux ne me jouaient pas de tours. L’« animal » a donné de lui-même un coup spectaculaire qui a réduit à néant l’assaillant en une fraction de seconde. J’ai regardé le jouet se tenir debout tout seul, l’air de me regarder droit dans les yeux.

Je l’ai déjà vu quelque part... Mais oui ! Si Neku est ici, alors cette peluche appartient bien à…

Le jouet s’est mis à flotter comme par magie, au grand dam de mes camarades, et a rejoint une fille que j’ai tout de suite reconnu.

-         Salut, Sora ! m’a-t-elle salué avec bonne humeur. Ça me fait plaisir de te revoir !

Mon interlocutrice, elle aussi dans les quinze ans, avait le même style vestimentaire que lors de notre dernière rencontre : un gros béret brun ne pouvant cacher ses longs cheveux roux, un gilet jaune et blanc à capuche par-dessus un haut rouge aux bordures noires – tous deux laissant son nombril visible – le tout surmonté par un pendentif rappelant une pièce de puzzle argentée. À sa ceinture, une minijupe vert olive accompagnée d’un sac banane marron, de la même couleur que ses bottes. Enfin, elle portait à son poignet gauche un bandeau jaune, exactement comme Neku.

Elle non plus n’a pas échappé à mon câlin et a rejoint Neku dans mes bras.

-         Shiki ! me suis-je écrié. Moi aussi je suis content de te revoir !

-         Doucement, Sora ! a bafouillé Neku.

Quelques secondes plus tard, j’ai enfin décidé de lâcher prise (un peu à contrecœur, je l’avoue). Mes deux nouveaux amis se sont détachés de moi, l’un grommelant, l’autre souriant. Puis, leurs yeux se sont posés sur moi… avant de s’écarquiller.

-         Euh, dis-moi, Sora… a commencé Neku.

-         Tu n’aurais pas… grandi en si peu de temps ? a continué Shiki, aussi stupéfaite que le garçon.

-         Beaucoup grandi, même, a corrigé l’oranger. On dirait que tu as pris un ou deux ans d’un coup.

Je les ai regardés sans comprendre puis je me suis souvenu.

-         C’est… un peu compliqué à expliquer, leur ai-je dit. Mais rassurez-vous, c’est bien moi !

Les deux nouveaux venus m’ont souri.

-         Je te crois, m’a assuré Neku.

-         On t’aurait reconnu n’importe où, a confirmé Shiki. Cela dit, je te trouvais plus mignon quand ton visage ressemblait à celui d’un bébé…

-         Hé !

Shiki a éclaté de rire, suivie timidement par Neku. Très vite, je les ai rejoints. Je me sentais un peu perdu dans ce nouveau monde si étrange. Certes, j’avais mes nouveaux amis et leur présence comptait énormément, mais Neku et Shiki ont accentué les choses, balayant totalement les quelques doutes qu’il me restait.

Lea s’est éclaircit la gorge dans mon dos.

-         Tu nous présentes ? a proposé ce dernier quand je me suis tourné dans sa direction.

-         Ah, oui, ai-je fait, un peu gêné. Désolé.

Là-dessus, j’ai enchaîné avec les dites présentations en m’adressant à mes deux amis retrouvés.

-         Voici Lea, Thomas, Yuki et Dingo. (À l’appel de leur nom, chacun a salué le duo à sa manière.) Ce sont mes amis, eux aussi !

Shiki leur a fait un signe de la main, toute sourire à l’exact opposé de Neku, qui s’est contenté d’un simple signe de tête désintéressé. Je me suis adressé aux autres porteurs de la Keyblade.

-         Quant à eux, il s’agit de Neku et Shiki, ai-je expliqué. Je les ai rencontrés lors de mon examen pour passer Maître de la Keyblade. On a combattu plein de monstres ensemble !

Neku a poussé un soupir.

-         Les Cauchemars, hein ? s’est-il souvenu. Ils portaient bien leur nom, aucun doute là-dessus.

-         C’est vrai, a acquiescé Shiki. Mais heureusement que Sora et Riku étaient là pour nous filer un coup de main ! D’ailleurs, (Elle a jeté un œil autour de nous.) où est-il ? Tu as réussi à le retrouver depuis ?

Les mots m’ont manqué. Mon expression n’a pas échappé à Neku, qui l’a remarquée en moins d’une seconde.

-         Je vois, a-t-il fait. T’inquiètes pas, on finira bien par le retrouver.

-         Il se débrouillera bien tout seul ! a renchéri Shiki, qui avait déjà été témoin de la force de mon meilleur ami.

-         Le truc, est intervenu Lea, c’est que nous cherchons également d’autres personnes.

Thomas a réfléchi quelques instants.

-         Espérons qu’ils soient tous ensemble, a-t-il pensé à voix haute.

Nos amis devaient forcément se trouver dans ce monde. Nous avions utilisé les pouvoirs d’Eoga, me liant à Riku par sa peur la plus profonde et de Stellaos pour assurer le voyage. Je connaissais très bien l’argenté, alors impossible de me tromper, non ? Soudain, le visage de Neku s’est obscurcit, comme s’il venait de réaliser quelque chose en nous regardant. J’allais lui demander ce qui n’allait pas lorsque Shiki est intervenue.

-         Joshua et Rhyme seront tellement heureux de ton arrivée ! m’a-t-elle assuré.

Ah oui ! Ces deux-là ! Je les avais aussi rencontrés pendant mon examen, dans un monde appelé « La Ville de Traverse ». Ils ont été d’une grande aide.

-         J’espère bien ! Où sont-il, au fait ?

Le visage de l’adolescente s’est fait pensif.

-         Aucune nouvelle de Josh depuis le début de la semaine, a-t-elle répondu, visiblement aussi inquiète. Quant à Rhyme…

De nouvelles marques de têtes de grenouilles sont apparues tout autour de nous. Trente…, non, quarante au total. Ce qui voulait dire autant de monstres à affronter !

-         Une embuscade ?! s’est étonnée Yuki cherchant en vain à faire apparaître sa Keyblade.

-         Comment est-ce qu’on va se battre sans nos armes ? a paniqué Thomas.

-         Prenez ça !

Shiki nous a lancé à chacun des badges, à peu près de même forme que ceux que j’avais découverts plus tôt avec une tête de mort dessus.  

-         Shiki, a averti Neku, sorti de son silence. Je ne suis pas sûr que ça va mar…

-         C’est tout ce qu’on peut faire pour le moment, a protesté son interlocutrice. Alors autant essayer, non ?

-         J’apprécie ta gentillesse, Shiki, a dit Lea. Mais qu’est-ce qu’on est censé faire avec ?

Son interlocutrice nous a souri.

-         Accrochez-le sur vous, et vous saurez quoi faire.

Celui que j’avais reçu représentait trois boules de feu sur fond vert. À la seconde où je l’ai serré dans ma paume, une image m’est apparue : un grand feu, bref, mais puissant. Les monstres grenouilles ont commencé à affluer de partout. Neku et Shiki étaient occupés à se battre, l’un avec du feu et l’autre avec son chat en peluche.

Ce que je viens de voir. Est-ce que c’était…

Finalement, c’est Thomas qui a apporté la réponse. Malgré les créatures qui se dirigeaient vers nous, il a fait l’effort de se concentrer. Soudain, ses pieds ont décollé du sol. Mon ami, toujours les yeux fermés, n’y faisait pas attention.

-         Thomas, va-t-en ! lui ai-je hurlé.

Pourquoi ne fait-il rien ? Les monstres attaquent !

Incapable d’attendre plus longtemps, je me suis précipité vers lui.

-         Tout ira bien, m’a-t-il répondu, m’arrêtant net dans ma course.

Thomas a ouvert les yeux. Aussitôt, des éclairs jaune et bleus ont entouré le groupe de créatures qui l’attaquaient avant de les électrocuter violemment. Il n’est plus rien resté des assaillants. En voyant son œuvre, Thomas s’est emporté :

-         Vous avez vu ça ?!

Neku et Shiki eux-mêmes ont osé un coup d’œil dans notre direction, tous deux stupéfaits.

-         C’était… a commencé Dingo.

-         Incroyable ! a terminé Shiki. Tu es doué pour manipuler les psychs !

-         Les quoi ? a répété Thomas.

-         Ça arrive, a averti Lea. Restez sur vos gardes !

J’ai palpé mon badge. Mon épée ne répondait toujours pas. O.K. Shiki avait dit qu’on comprendrait comment se battre dès qu’on recevrait l’objet.

Pas besoin de réfléchir… C’était dans mes cordes !

Un groupe de cinq batraciens s’est approché de moi, prêts à bondir pour me lacérer avec leurs pattes griffues ou à me cracher leurs bulles mortelles. Je me suis concentré.

J’ai senti mes pieds se décoller du sol à leur tour.

Du feu, me représentais-je. Un brasier puissant consumant mes adversaires.

En ouvrant les yeux, j’ai d’abord constaté qu’il ne se passait rien. Puis, de la fumée noire s’est dégagée de chacun d’entre eux et d’un coup :

WOOUSHHH !!!!

De puissantes et hautes flammes incandescentes sont apparues sur les monstres, avant de fusionner pour les consumer tous ensemble. Plus aucune trace d’eux ensuite.

Malgré l’étonnement de Shiki, cette fois, c’est Neku qui a parlé.

-         Pas mal, Sora.

-         Merci ! (Je me suis adressé à Lea avec un sourire.) Je m’en sors bien avec le feu, pas vrai ?

Lea a haussé les épaules.

-         Ça va, a-t-il fait pour me taquiner.

Avant que je ne puisse protester, il s’est élancé vers l’ennemi.

-         Je crois que j’ai compris le truc !

En courant, il a tendu sa main vers sa cible. Aussitôt, le sol sous cette dernière s’est congelé et une énorme stalactite – au moins deux fois plus grande que Lea – en est sorti, transperçant le monstre qu’il visait ainsi que ses congénères à proximité.

De la glace ? Lea ?

L’homme a la chevelure de flammes n’a pas eu l’air satisfait.

-         Je ne suis pas fan, mais je vais m’en contenter pour le moment.

De son côté, Dingo lui aussi faisait état de son nouveau pouvoir : il lançait des sphères de lumières aussi grosses que des ballons avec un naturel surprenant. Après avoir éliminé ses vis-à-vis, il a eu un petit rire.

-         C’est assez facile, en fait !

-         Derrière toi ! ai-je fait, juste après avoir vu les grenouilles qui bondissaient dans son dos.

Mon sort et celui de Thomas nécessitaient trop de temps pour se lancer. Quant à Neku et Shiki, ils étaient beaucoup trop loin pour agir à temps. Le seul qui aurait pu faire quelque chose, c’était Lea. Ayant compris tout seul la situation, il a tendu la main.

Rien.

L’étonnement s’est lu sur son visage. Beaucoup trop tard pour essayer d’expliquer ça, Dingo était en danger ! Une ombre est passé au-dessus des monstres. Le temps que je réalise ce qu’il se passait, quelque chose s’est brutalement écrasé sur les grenouilles dans un vacarme assourdissant. Quoi donc ?

Une voiture.

Par miracle, à part les créatures, aucun d’entre nous n’avait été touché.

Yuki, un peu en retrait, a baissé sa main avant de réajuster quelque chose dans ses vêtements : son badge. J’ai regardé la voiture. Aucun doute, elle ne serait plus jamais en état de marche. Mais peu importe, c’était incroyable !

-         C’est… C’est toi qui as fait ça ? a demandé Thomas, bouche bée.

Son interlocutrice a eu l’air de beaucoup apprécier l’état d’hébétude du brun.

-         Si… quelqu’un comme toi peut se battre avec ces badges, lui a-t-elle lancé, alors moi aussi.

Ne voyant plus aucun monstre à l’horizon, Shiki et Neku nous ont rejoint. Neku avait toujours cet air sombre au visage, contrairement à une Shiki radieuse.

-         Vous vous en êtes très bien sorti ! nous a-t-elle complimenté.

-         Ces pouvoirs qu’on utilise, a dit Thomas (en jetant un œil à Neku). Tu les as appelés, « psych », exact ?

Shiki a hoché la tête.

-         Chaque badge que vous obtiendrez en contient un, mais retenez bien que vous ne pouvez pas les utiliser bêtement.

-         Il y a un temps d’attente, a deviné Lea.

-         Comme tout à l’heure lorsque tu as voulu attaquer, me suis-je souvenu. Après un certain nombre d’utilisations, le, euh, « psych », n’est pas disponible, c’est ça ?

Shiki a porté le regard sur son chat en peluche.

-         C’est ça, a-t-elle confirmé. En revanche, cela dépend des psychs, tout comme le nombre d’utilisation. Aussi, retenez bien que vous ne pouvez utiliser qu’un seul badge.

-         Ah bon ? (Je lui ai sorti les badges avec la tête de mort que j’avais repérés à mon réveil.) Et ceux-là, alors ?

-         Shiki.

Elle a regardé l’expression de Neku…, fait l’aller-retour du regard entre les badges et son ami, avant de réaliser quelque chose. Une ombre est passée sur son visage, et elle nous a regardé avec une profonde inquiétude.

-         Qu’est-ce qu’il y a ? a demandé Dingo.

-         J’ai dit quelque chose de mal ? lui ai-je demandé, incapable de cacher mon inquiétude face à son changement d’humeur.

Cette fois-ci, c’est Neku qui a pris la parole.

-         Sora, a-t-il dit d’une voix grave. Est-ce que tu sais où tu te trouves ? Où tu te trouves exactement ?

Complètement pris au dépourvu, il m’a fallu quelques secondes pour répondre à sa question.

-         Eh bien… Chez toi, non ? À Shibuya.

Son expression n’a pas changé d’un pouce : il continuait de me regarder comme s’il avait quelque chose de grave à me dire, mais ignorait comment s’y prendre.

-         Oui… et non. Nous sommes bien à Shibuya, mais… dans une autre « couche » de cette dernière.

-         Qu’est-ce que cela signifie ? a demandé Yuki.

-         C’est simple. Eux, (Il a fait un signe de tête en direction des personnes qui nous ignoraient autour de nous.) ils sont dans le Realground, ou RG. Le monde réel.

Lea a froncé les sourcils.

-         Attends. S’ils sont dans le monde réel, alors nous… Où est-ce qu’on est ?

-         L’UG, a répondu Shiki, aussi gravement que Neku. L’Underground.

-         Deux couches pour un même lieu, a ajouté le garçon. Deux mondes…

Son regard s’est dirigé vers un groupe de personnes qui approchaient. Il a tendu la main devant eux. De la même façon que pour nous un peu plus tôt, les gens l’ont non seulement ignoré, mais ils sont aussi passé au travers de sa main comme si Neku n’existait pas.

-         … qui ne peuvent pas interagir.

Je les ai regardé s’éloigner, sans la moindre attention à notre égard. Thomas a frissonné.

-         C’est comme si on était…

-         Des fantômes, a complété Lea.

Un silence pesant s’est abattu sur nous. Plus les secondes passaient, plus il me semblait que le visage de Neku et Shiki s’obscurcissait. Qu’est-ce qu’il y avait de si grave, au juste ?

-         O.K, ai-je fait. Shibuya est décidemment très surprenante ! Mais, euh, est-ce que vous avez une idée de comment on a atterri dans l’Underground ?

-         Excellente question, a renchéri Yuki.

Le duo de Shibuya a échangé un regard lourd de sens. Finalement, Neku a pris une grande inspiration.

-         Pour entrer dans l’UG, il n’y a qu’un seul moyen.

Son expression m’inquiétait au plus haut point. Mon cœur battait de plus en plus vite, sans raison apparente. Malgré tout, je me suis forcé à demander :

-         Lequel ?

Neku, mon nouvel ami, m’a lancé un regard empli de tristesse et de pitié.

-         Mourir.

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