Les Lumières dans les Ténèbres : La Réalité de la Fée Noire

Chapitre 51 : Rencontre à l'orée de la forêt (Kairi)

5784 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 24/04/2022 17:56

-         Nous y sommes.

Enfin arrivés à la maison de ce « Dang Hai », un édifice imposant de plusieurs mètres de haut coloré par ses multiples lanternes et ses tissus pourpres, Raya fit signe au reste d’entre nous de rester discret, cachés dans l’ombre d’une ruelle.

-         Pourquoi doit-on être silencieux ? demanda Araen.

La jeune femme lui répondit en montrant les sept guerriers armés de lances qui gardaient les escaliers de bois menant directement à l’intérieur du bâtiment. Ils entouraient l’entrée, de sorte qu’il était totalement impossible de les prendre à revers.

-         Mieux vaut foncer dans le tas, non ? suggéra le garçon.

Riku poussa un soupir exaspéré.

-         Tu te souviens de ce qu’on a dit sur la discrétion, tout ça…

-         Et bah ?

L’argenté le regarda droit dans les yeux.

-         « Et bah » il vaudrait mieux éviter de trop attirer l’attention sur nous.

-         Sinon, ça gênerait la quête de Raya et, par conséquent, la nôtre, continuai-je.

-         Exact. Sans parler de l’ordre…

-         L’« ordre » ? répéta Araen en levant un sourcil.

Riku fronça les sourcils.

-         Tu ne te souviens pas de ce que nous a dit le roi avant notre départ ? Comme quoi il ne faut pas trop interférer avec d’autres… contrées ? Il me semble que tu étais là, pourtant.

Araen haussa les épaules.

-         Aucun souvenir !

-         Quelle surprise, soupira Riku.

-         Hé, s’indigna le blond, qu’est-ce que c’est censé vouloir dire ?

Sentant que la tension montait entre les deux garçons, je décidai d’intervenir.

-         Je te le rappellerai plus tard, Araen. Cela dit, pour la discrétion, on a plutôt mal commencé…

-         C’est vrai, acquiesça Raya. Mais j’ai une petite idée pour voler la pierre sans trop de problèmes.

Sur ces mots, elle expliqua ce qu’elle avait en tête à la petite fille qui nous accompagnait et ses amis singes au pelage blanc. En écoutant, elle hochait la tête consciencieusement jusqu’à la fin du discours de la brune.

-         Hé, attends ! (Araen jeta un œil au quatuor.) Je dois le faire avec eux ?

Un sourire malicieux que je ne lui voyais pas souvent se dessina sur les lèvres de mon meilleur ami.

-         Bien sûr, répondit l’argenté. Ou alors, le Grand Héros que tu es refuserait de donner un coup de main à un pauvre petit bébé ?

Araen faillit rétorquer quelque chose, jusqu’à ce que son regard croise les yeux suppliants de la petite. Riku l’avait piégé. Le blond se résigna, déçu de ne pas faire parti de l’action. Je savais que Riku avait raison, mais cela me fit un peu de peine de le voir dans cet état.

Je m’approchai de lui et mis une main sur son épaule.

-         Ne t’inquiète pas, Araen. On sera vite revenu. D’ici-là, montre à tous à quel point un Héros peut tout faire, O.K. ?

Il releva la tête et plongea, pour la première fois, son regard dans le mien, comme pour vérifier si j’étais sincère. À cet instant précis, un frisson me parcourut l’échine. Ces yeux cyans… Pourquoi est-ce qu’ils me disaient quelque chose ?

Araen bomba le torse.

-         Tu as raison !

Je me forçai à sourire.

-         Je ne vais pas me laisser abattre pour si peu, continua-t-il. Allez viens, petite. Le Grand Héros Araen va te montrer de quel bois il est fait !

Riku se rapprocha de moi, l’air inquiet. Il avait sans doute remarqué mon expression face à Araen un peu plus tôt.

-         Qu’est-ce qui ne va pas ?

-         Un désagréable sentiment de déjà-vu. Dis, tu n’aurais pas croisé Araen quelque part ?

L’argenté observa longuement le garçon, en pleine explication de sa stratégie au bébé et ses amis singes. Quelques secondes plus tard :

-         Non, trancha-t-il finalement, il ne me dit rien du tout.

Etrange… Je suis pourtant presque sûre que…

-         Prêts ? nous demanda Raya, coupant court à mes pensées.

Je n’essayai pas d’y réfléchir plus longtemps. Riku et moi en aurions le temps plus tard. Pour l’instant, il fallait se concentrer sur notre tâche.

-         Oui, répondis-je. Nous sommes prêts.

Riku suivit avec un hochement de tête. Araen et ses compagnons se tinrent prêts.

Raya observa les gardes avant de chuchoter :

-         Allez-y !

Les gardes furent vraiment surpris de voir arriver devant un adolescent, trois singes blancs et un nourrisson, tous avec des bananes dans les mains. Ils passèrent devant les gardes en étant aussi visibles et bruyants que possible en s’échangeant les fruits entre eux, tantôt entre les jambes, tantôt par derrière ou encore avec un salto. Les gardes, d’abord intrigués, furent impressionnés par leurs performances et, après quelques hésitations, tous quittèrent leurs postes pour aller voir la troupe de plus près.

Pour tout vous dire, c’était assez amusant à voir.

-         Si Sora avait été là, murmura Riku avec un sourire, il se serait sans doute joint à eux.

-         C’est clair, répondis-je, souriant à mon tour.

Raya, qui guettait la moindre occasion de passer, nous dit :

-         À nous de jouer.

Nous la suivîmes aussi discrètement que possible en restant dans l’ombre. Je craignais que les gardes ne se retournent soudainement mais cela n’arriva pas : Araen les émerveillait trop pendant qu’il explosait des bananes avec ses éclairs dans les airs en utilisant ses mains comme des pistolets. Nous passâmes derrière eux sans un bruit et montâmes les marches de l’escalier de bois. Ce dernier nous fit déboucher en plein milieu d’un couloir qui – heureusement pour nous – s’avéra désert. Raya, qui ouvrait la marche, regarda autour de nous en dégainant son épée. Riku et moi l’imitâmes aussitôt avec nos Keyblades. La maison de Dang Hai, bien qu’appartenant au prétendu chef de Griffe, manquait cruellement de vie et d’ambiance. Il y faisait très sombre, l’endroit était seulement éclairé par la lumière qui provenait des lanternes de l’extérieur, cette dernière passant à travers les interstices des murs de bois. Tout cela donnait un aspect vraiment lugubre et froid à l’habitation. Raya s’avança au détour du couloir et passa doucement la tête pour observer de l’autre côté. La jeune femme nous fit signe d’avancer à notre tour. Riku s’exécuta, non sans regarder autour de nous, moi sur ses talons. Je jetai un œil derrière. Toujours personne.

En imitant Raya, nous vîmes un homme avec un chignon de dos, qui regardait l’extérieur. De plus, il semblait porter quelque chose, mais impossible pour nous de savoir quoi depuis notre position.

-         C’est lui ? chuchota Riku.

Son interlocutrice hocha la tête et quitta sa cachette la première. À pas de loup, nous nous approchâmes du chef de Griffe. Mentalement, je m’apprêtais à ce que n’importe quoi arrive, qu’un sans-cœur ou autre monstre étrange se manifeste. Riku aussi. Pas besoin de lui parler pour le savoir. Vu tout ce que nous avions vécu, mieux valait s’attendre à tout.

Nous n’étions plus qu’à six mètres.

La lame d’acier de Raya brillait dans l’obscurité.

Cinq mètres.

Je sentais mon cœur battre de plus en plus fort.

Trois mètres.

Toujours aucune réaction de notre cible.

Et enfin…

Tous, nous dirigeâmes nos lames respectives vers l’homme, à quelques centimètres à peine de lui.

-         À nous, Dang Hai, déclara Raya. Nous allons prendre la Pierre du Dragon.

-         Et vite, ajouta Riku. Nous n’avons pas que ça à faire.

Notre cible se retourna en poussant un petit cri de surprise.

-         Je ne suis pas Dang Hai !

Riku et moi échangeâmes un regard.

Raya essaya de rester méfiante, mais la surprise pouvait se lire sur son visage.

-         Comment ça ? demandai-je. Ce n’est pas vous ?

-         Mais non, insista-t-il. Je suis Chai, le fleuriste.

Effectivement, ce qu’il tenait était un panier rempli de fleurs. Aussi, même s’il était costaud, l’homme semblait pataud avec un air un peu… ahuri, souriant sans aucune raison apparente. On aurait juste dit quelqu’un de gentil et d’un peu perdu. Cela acheva de me convaincre qu’il n’était pas la personne que nous cherchions.

-         Où est-il, alors ? demanda Raya en baissant son épée.

Chai eut un petit rire avant de regarder à sa droite.

-         Juste là.

En suivant son regard, à notre gauche, nous vîmes quelque chose d’assez inattendu. Tellement, que je ne pus retenir une petite exclamation de surprise. À quelques mètres de nous se trouvait une statue. Elle représentait un homme, possédant un chignon, comme Chai, barbu, un air triste au visage qui joignait les mains, tête baissée. C’était la même position que l’un des singes nous avait montré en parlant de la famille du bébé.

Il était facile de deviner ce qu’il lui était arrivé.

-         Quoi ? fit Raya.

-         Qui a pris sa pierre ? demanda Riku.

-         Le plus vicieux des chefs que Griffe ait jamais connus. Dang Hu. Sa… mère.

Je crus avoir mal entendu.

-         Attendez, intervins-je. Vous voulez dire qu’elle a été capable faire ça à son propre fils ?

Chai se gratta la tête.

-         Personne ne sait ce qu’il s’est vraiment passé. Cela dit, plusieurs personnes racontent qu’elle complotait contre son fils pour prendre le pouvoir depuis longtemps. Un jour, elle, Dang Hai et quelques hommes sont allés à l’extérieur du village pour chercher des ressources.

-         Tu ne les as pas accompagnés ? demanda Riku.

-         Pas envie, répondit Chai. J’avais déjà assez à faire avec mes fleurs. D’ailleurs, vous en voulez une ?

-         Euh… non merci.

-         Continuez, dit Raya.

Le fleuriste marqua une pause, une expression lointaine au visage. Enfin, il reprit.

-         Eh bien, ce jour-là, ils mettaient super longtemps pour rentrer. Je me souviens parce que j’étais en train de ranger de superbes espèces de fleurs d’orchi…

-         Chai, avertit la jeune femme en forçant un sourire. J’adorerai discuter de la flore des environs avec toi mais nous sommes, euh, un peu pressés.

-         Oh, fit son interlocuteur, un peu confus. Pas de problème. Comme je disais, il était tard et toujours aucun signe d’eux. Ce qui, comme vous le savez est super dangereux à cause du Druun. Jusqu’à ce que Dang Hu revienne avec juste une partie de ses hommes… et la statue de son fils. Elle nous a fait un discours émouvant en nous disant que son pauvre fils s’était sacrifié pour la protéger du fléau. La vieille femme en avait même la larme à l’œil. Bon j’avoue, moi aussi. Enfin bref, si vous voulez mon avis…

-         Un mensonge, devina Riku.

Chai hocha lentement la tête.

-         De toute façon, si Dang Hai ne s’était pas fait avoir, ça aurait été sa mère, la statue. Vu leur relation et leur soif de pouvoir, il s’agissait des deux seules issues possibles.

-         C’est… horrible !

Raya me lança un regard du coin de l’œil, toujours en serrant son épée, comme si elle craignait que Chai se mette soudain à nous attaquer.

-         Les gens sont comme ça, Kairi.

La jeune m’avait dit ça avec un certain dégoût dans la voix. Je ne savais pas ce qu’elle avait vécu, mais pour qu’elle ait si peu confiance en l’humanité, cela avait dû être grave.

L’argenté observa Raya quelques instants, pourtant, il ne fit aucun commentaire.

-         Où est-elle maintenant ?

Chai se mit à réfléchir.

-         En observant la population tout à l’heure, je crois l’avoir vue en compagnie d’une femme aux cheveux colorés.

Nous écarquillâmes les yeux avant d’échanger un regard : la même personne nous venait à l’esprit.

-         Tu en es sûr ? demanda Riku. À cette distance ?

-         Ouais. Des cheveux pareils, c’est pas courant.

-         Vers où se dirigeaient-elles ?

-         En direction de la sortie de la ville, me répondit le fleuriste, vers la forêt.

Raya se tourna vers nous, complètement paniquée.

-         Il fait nuit. À une heure pareille, le Druun rôde ! Si Sisu se retrouve dehors…

-         Dans ce cas, ne perdons pas de temps ! nous dit Riku avant de sauter par la fenêtre derrière Chai, suivi aussitôt par Raya.

-         Et mes fleurs ? Vous êtes sûrs de ne pas en vouloir ?

J’aurais bien voulu lui en prendre une, mais ce n’était pas le moment.

-         Une autre fois, peut-être. Désolée !

Sur ces mots, je passai par l’ouverture à mon tour.

J’atterri juste devant les gardes de l’entrée, encore subjugués par le spectacle offert par nos nouveaux amis. Riku et Raya, qui m’attendaient dans l’ombre au coin d’une ruelle, hors de portée de vision des soldats, me firent signe de les rejoindre.

-         Tuk Tuk, appela la jeune femme.

Ce dernier, caché et roulé en boule dans un coin, nous rejoignit. Il se déploya et, d’un geste, nous invita à monter sur son dos. Raya fut la première… puis se rendit compte d’un problème.

-         Il y a juste assez de place pour deux, et je ne veux pas prendre le risque de ralentir Tuk Tuk.

-         OK, fit Riku. On ne sait pas quels dangers nous attendent, alors je monte avec Raya. Toi, Kairi, tu retournes au…

Nos regards se croisèrent.

-         Non, le coupai-je. Je ne serai plus en retrait, Riku. Plus jamais.

Durant ces deux dernières années, je n’ai fait qu’être protégée par Sora et Riku. Maintenant que j’avais enfin la force de me défendre, hors de question que ça recommence !

-         Fais-moi confiance.

Riku ne répondit pas.

-         Décidez-vous vite ! nous pressa Raya.

-         D’accord, céda Riku. Allons-y.

Ainsi, je rejoignis notre nouvelle alliée sur le dos de son animal de compagnie.

-         Et toi ? demandais-je en passant les bras autour de la taille de Raya.

-         T’inquiète, me répondit-il en souriant. Mon entraînement va servir.

Avant que je ne puisse demander à mon ami ce qu’il voulait dire par là, la jeune femme hurla : « Vas-y, Tuk Tuk ! » et ce dernier se roula en boule puis s’élança à toute vitesse dans les rues du village. Notre voyage ne fut pas du goût des passants, hurlant et s’écartant de nous. À chaque fois, je leur disais que nous étions désolés de tout ce grabuge, mais cela ne semblait pas arranger leur humeur. Sur le chemin, je cherchai Riku du regard en espérant qu’il parvienne à nous suivre. Sans surprise, c’était le cas, et d’une façon assez inhabituelle. L’argenté ne plaisantait pas en parlant de son entraînement : bondissant de toit en toit, profitant de l’ombre pour ne pas attirer l’attention des habitants, il restait à nos côtés en enchaînant sauts et différentes acrobaties. Il m’en avait parlé il y a quelques temps. Durant leur examen pour devenir Maîtres de la Keyblade, Sora et Riku apprirent de nouveaux mouvements pour être plus rapides et mieux contrôler l’issue du combat. Je n’avais pas vraiment été témoin de ça, jusqu’à maintenant.

Décidément, ces deux-là m’impressionneront toujours !

Bientôt, nous pûmes apercevoir un pont de bois derrière lequel se trouvaient de grands escaliers donnant sur une immense porte en bois. Derrière, nous pouvions distinguer la silhouette menaçante des arbres, dépassant aisément les murailles protégeant la ville. D’ici, je sentais une ambiance lugubre émaner de l’extérieur.

-         La porte est ouverte, remarqua Raya. Pourvu que Sisu n’ait rien…

En plissant les yeux, je m’aperçus qu’elle avait raison. Je ne voyais pas le visage de Raya, mais sa voix trahissait une inquiétude profonde pour son amie.

-         Ne t’inquiète pas, essayai-je. Nous allons la sauver. Je te le promets.

Elle ne me répondit pas, cela dit j’espérais avoir pu la rassurer ne serait-ce qu’un peu.

Se trouvaient devant cette porte deux énormes types tenant chacun un battant avec, au milieu d’eux, une personne d’assez petite taille.

-         Ce doit être elle, dit finalement la jeune femme. Allez, Tuk Tuk !

Notre monture accéléra à son appel. Bientôt, nous n’étions plus qu’à une trentaine de mètres d’eux. Il me semblait que Dang Hu tenait une pierre bleue dans une de ses mains. Devant elle, Sisu essayait de dire quelque chose pendant que les hommes du chef fermaient peu à peu la porte, laissant notre nouvelle amie à la merci d’un genre de nuage obscur et informe…

-         Le Druun ! (Je me tournai vers mon ami.) Riku !

-         J’ai vu ! répondit-il. Allons-y !

-         On se charge des deux gardes, dis-je à Raya.

L’épéiste répondit en hochant la tête. Puis, une fois à quelques mètres de la porte, cette dernière étant presque fermée, je sautai du dos de Tuk Tuk vers un des hommes, Riku sur l’autre. Au même moment, nous nous débarrassâmes d’eux d’un seul coup de Keyblade, au grand désarroi de Dang Hu qui ne put même pas réagir : Raya, chevauchant Tuk Tuk, défonça la porte en dérobant la pierre du Dragon à son ancienne propriétaire. Ensuite, elle brandit cette dernière en direction du Druun qui s’approchait dangereusement de Sisu. Le monstre n’eut pas d’autre choix que de rebrousser chemin, dominé par le pouvoir de la pierre.

Sisu, extrêmement heureuse de nous voir se dépêcha de rejoindre Raya.

-         Je vous avais bien dit de rester sur le bateau, lui rappela l’épéiste, néanmoins soulagée de la voir elle aussi.

Une fois sur le dos de l’animal de Raya, cette dernière donna la pierre à Sisu en lui demandant de la garder. Dès l’instant où Sisu toucha la pierre, ses cheveux se hérissèrent et un épais brouillard émana d’elle. Tellement dense que je ne pus même plus distinguer ce qu’il se passait autour de moi.

-         Du brouillard ? demanda Riku, quelque part sur ma gauche.

-         C’est compliqué, lui répondit la voix de Sisu, avant que cette dernière n’ajoute précipitamment : On se retrouve au b…

-         Vous-savez-où ! coupa Raya. Ne perdez pas de temps !

Riku et moi allions les suivre lorsqu’une voix familière nous arrêta net.

-         Oh ? Mais qui vois-je ?

Une voix féminine, à la fois hautaine et puissante, qui perça même le brouhaha lointain de Griffe.

-         Maléfique, reconnut l’argenté d’une voix dans laquelle transperçait la colère.

Elle était bien là, au milieu du brouillard créé par Sisu un peu plus tôt. Comme à son habitude, simplement vêtue d’une longue robe noire et équipée de son sceptre, elle nous observait d’un regard cruel et amusé. Je me préparai aussitôt à une attaque. Si la sorcière était là, cela voulait dire que nous allions bientôt avoir des ennuis. La brume devînt de moins en moins dense, révélant un Riku qui gardait les yeux rivés sur la sorcière, ainsi que Dang Hu et ses sbires inconscients, une aura vert sombre autour d’eux.

-         Qu’est-ce que tu veux ? demanda froidement mon ami en se mettant en garde.

La Fée Noire eut un sourire.

-         Tu le sais déjà, mon cher Riku. Le pouvoir. Le vrai. Pour atteindre mon objectif.

-         Comme c’est original. Si c’est vraiment ce que tu souhaites alors je vais te le montrer, le vrai pouvoir.

Son interlocutrice éclata d’un rire mauvais, laissant l’argenté complètement de marbre.

-         Il semblerait que tu n’as pas vraiment changé en deux années. Même si tu n’étais qu’un pantin, je regretterais presque l’époque où nous travaillions ensemble.

-         Je m’en veux chaque jour pour ce que j’ai fait à Sora à cette époque... Plus jamais ça n’arrivera. Plus jamais, tu m’entends ?!

-         Tu dis cela, mais es-tu vraiment certain d’être libéré de ces mêmes Ténèbres depuis ?

Riku ne répondit pas, perplexe.

-         ÇA SUFFIT ! éclatai-je. Laisse-le tranquille, Maléfique !

La sorcière jeta un regard dédaigneux vers moi.

-         Comment oses-tu m’adresser la parole sur ce ton ?! Toi qui n’as même pas été choisie par la Keyblade…

Je ne répondis pas.

-         Si Riku ne t’avais pas donnée cette arme, où serais-tu aujourd’hui ?

-         Tais-toi…

-         Tu es toujours cette petite fille que les deux… « héros » se sont jurés de protéger.

-         TAIS-TOI !

Furieuse et au bord des larmes, je m’élançai vers la Fée Noire, bien décidée à lui faire regretter ses paroles. Pendant ma course, il me sembla entendre la voix de mon ami me dire de faire attention, mais tout me semblait si loin. La colère obscurcissait tout jugement. Je bondis puis assenai Appel du Destin, ma Keyblade, mais cette dernière rencontra un bouclier émeraude protégeant ma cible. J’employais le maximum de force dont je pouvais faire preuve, sans succès : la protection ne cédait pas. Avec les secondes, je sentais mes bras lâcher de plus en plus.

Je… Je ne peux pas laisser tomber ! Pas après ce qu’elle a dit !

-         Une des sept Princesses de Cœur et une Gardienne de la Lumière, pourtant si faible…

Maléfique fit exploser son bouclier en gerbes de flammes verte dont je ne pus me protéger. Projetée en arrière et hurlant de douleur, je sentis mes forces s’échapper peu à peu. La magie de Maléfique.

Heureusement, Riku m’attrapa dans les airs, me sauvant d’un atterrissage brutal. Il leva aussitôt sa Keyblade et des fleurs apparurent au bout de son épée. Bientôt, je me sentis un peu mieux.

Un sort de soin, pensai-je.

-         Tu es juste venue ici pour essayer de nous déstabiliser ? lança mon ami.

La Fée Noire leva un sourcil.

-         « Essayer » ? Non, pas exactement. Je remplis juste ma part du contrat.

-         De quoi est-ce que tu… (Riku s’interrompit, l’air de réaliser quelque chose.) Une seconde. Où es le Numéro III ?

C’était une bonne question de sa part. Les deux dernières fois où nous l’avions vue, elle était accompagnée du membre de l’Organisation. Or, ce jour-là, aucun signe de lui malgré la présence de la sorcière. Quoique…

« Aucun signe de lui ? »

Riku sembla arriver à la même conclusion.

-         Tu gagnes du temps.

Maléfique resta silencieuse, confirmant ainsi nos soupçons.

-         Il faut vite retrouver Maxwell et Lydia, me dit Riku. Tu peux te lever ?

-         Je… Je crois…

J’essayai de me tenir debout, mais ma tête tourna aussitôt. Mon ami prit alors la décision de me porter sur son dos.

Je voulais lui dire que je pouvais me débrouiller, or la force me manquait.

-         J’oubliais, repris la sorcière. Ces deux-là ne sont pas les seules personnes pour qui vous devriez vous inquiéter.

-         Qu’est-ce que tu veux dire ? demanda Riku, méfiant.

Le brouillard disparu enfin complètement. Maléfique se trouvait à l’extérieur du village, quelques mètres devant la porte. Autour d’elle, il y avait…

Des Druuns. Cela étant, il y avait quelque chose de bizarre avec eux. À tel point que j’eus du mal à croire ce que mes yeux me montraient.

En guise de réponse à Riku, la sorcière frappa son sceptre au sol et une grande quantité de monstres de flammes vertes à deux épées (beaucoup trop pour que je puisse les compter) surgirent de derrière elle avant de foncer sur nous. Mon ami essaya de nous défendre avec sa Keyblade mais cela ne fut pas nécessaire : les créatures nous dépassèrent. Nous n’étions pas les cibles. Pourtant, je croyais savoir vers où elles se dirigeaient.

-         Le… bateau…, parvins-je à articuler.

Riku comprit tout de suite.

-         C’est cela, se moqua notre ennemie. Va donc les sauver, « Maître de la Keyblade ». Fais honneur à ton nouveau statut !

-         La prochaine fois que nous nous verrons, Maléfique, je te détruirai.

Son interlocutrice ricana pendant qu’un portail sombre commença à l’envelopper.

-         Je doute que tu y parviennes, Riku. Je t’en prie : va sauver ces gens sur votre précieux bateau ! Mais retiens que cela ne fera que retarder l’inévitable. Je veux ces pierres… et je les aurai.

Elle se laissa engloutir par l’obscurité et disparut. Ces étranges Druuns s’éparpillèrent au même moment pendant que Riku commença à courir aussi vite que possible dans la direction opposée.

-         Par… où…

Je n’eus pas besoin de finir ma phrase, car l’argenté avait deviné ce que je voulais dire.

-         D’abord, le bateau. (Sprintant au maximum, il faisait tout son possible pour m’empêcher de tomber.) Il faut que tu te reposes et que je défende Donald, Raya et les autres face aux créatures de Maléfique.

-         Maxwell… ? Lydia… ?

-         Justement. Ils savent tous les deux manier la Keyblade un minimum. Je pense qu’ils pourront tenir avant que je ne les rejoigne. Tu passes en priorité.

Je voulais lui dire de s’occuper d’eux d’abord, mais je n’en eus pas l’énergie. C’est sur ces mots que notre discussion se termina. Pendant que nous nous dirigions vers le bateau, je ne pus m’empêcher de me repasser en tête notre conversation avec Maléfique. Plus particulièrement, ce que j’avais vu chez les Druuns autour d’elle. Ces derniers étaient environ cinq ou six. Mais le plus surprenant…

C’est qu’ils ne l’attaquaient pas.

D’après Raya, ces créatures étaient censées tout dévorer sur leur passage, sans faire la moindre distinction. Or, la sorcière se tenait au milieu d’eux sans éprouver la moindre peur, comme si elle était certaine qu’il ne lui arriverait rien. Plus encore, il existait un point commun entre ces Druuns et les monstres qu’elle créait : leur teinte verte.

Je ne savais pas ce que la Fée Noire faisait dans ce monde, ni même pourquoi elle avait tant besoin des pierres. Une chose était certaine : ce qu’elle avait en tête était dangereux. Très dangereux. Et malheureusement…

 

Ce monde en subirait bientôt les conséquences.


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